L'Histoire de la folie de Michel Foucault a eu l'éclatant mérite d'ouvrir un champ de recherches sur le geste constitutif du « visage du fou » que les différentes histoires de la psychiatrie se contentaient de prendre pour une figure naturelle. Ainsi, de la léproserie à l' Hôpital général, c'est un espace social très particulier qui était décrit, espace dans lequel, après la période révolutionnaire, l'asile psychiatrique tel que nous le connaissons encore aujourd'hui, est venu, assez naturellement semble-t-il, prendre sa place. Et même si le livre de Michel Foucault s'arrête à la fin du XVIIIe siècle, l'aboutissement de ce vaste mouvement est en fait la loi de 1838. L'asile lui-même, dans ses formes particulières, reste à construire. C'est sur ce temps que nous voudrions porter l'attention en examinant les conditions concrètes de l'application de la loi, les forces sociales et économiques mises en présence au cours de ce processus, bref tout un ensemble de données qui ont été occultées pendant près d'un siècle et qui aujourd'hui encore n'arrivent à se dire difficilement que dans la mise en question de l'asile d'aliénés par le secteur psychiatrique.