Au touriste qui l'aborde, la région centrale du Cantal apparaît toujours comme une région aussi riche que pittoresque. Il vient de traverser les plateaux demi-déserts de la Lozère ou de la Haute-Loire, les landes de l'Aveyron ou de la Corrèze, de remonter les gorges profondes de l'Allagnon ou de la basse Cère ; il trouve tout à coup de magnifiques prairies garnissant les fonds de vallées, s'étageant sur les pentes, se couronnant de bois épais, puis des plateaux couverts de pâturages, les hauts sommets seuls paraissant émerger infertiles de cette mer de verdure.

Cette terre du Cantal, où l'eau ruisselle partout, où l'herbe couvre tout, où les habitations et les granges apparaissent à toutes les hauteurs sur le flanc des vallées, où les montagnes mêmes sont parsemées des toitures grises des burons, semble être un pays d'une incontestable richesse.

Dans une Dissertation inaugurale sur le développement économique et constitutionnel de Brunswick jusqu'à la fin du XIVe siècle, un disciple de Mr Rörig, Mr Timme, a voulu appliquer à un centre urbain de la « vieille Allemagne » les théories sur les villes d'entrepreneurs-fondateurs (Gründungsunternehmerstädte) suggérées à son maître par cette terre de colonisation que fut l'Allemagne orientale. A cet effet, il s'est particulièrement servi de l'étude des biens immobiliers, parvenant à déterminer la situation, la propriété et l'arrentement de près de 1 500 d'entre eux, dont l'examen éclaire d'une lumière toute nouvelle la fondation de la partie de Brunswick dite « la vieille ville » ; les deux autres parties, Hagen et la nouvelle ville, ne sont que des conséquences un peu postérieures.

Dans deux volumes, les premiers de la série des Harvard studies in business history, Mr Kenneth Wiggins Porter nous présente un tableau détaillé des activités qui remplirent la vie de John Jacob Astor, de 1763, date de sa naissance, à sa mort (à l'âge de 85 ans) en 1848. Il a paru déjà sur Astor bien des ouvrages où la légende et l'histoire se mêlent, et il a fallu un gros travail pour restituer la figure exacte de ces événements. L'auteur a été aidé par des collaborateurs qui ont passé en revue tous les manuscrits d'Astor, dispersés en des bibliothèques et dépôts publics et privés, dépouillé les archives de Baring Brother and Co et de beaucoup d'autres grandes maisons de commerce et de banque, les journaux de New York pendant un demi-siècle (pour y retrouver les annonces des produits apportés par ses navires), les registres des hypothèques, et, encore, les Archives d'Hawaï, de Montréal, etc.

Un préjugé qu'il importe de combattre écarte trop fréquemment les savants des recherches portant sur les procédés culinaires propres aux diverses civilisations. On étudie la technique agraire d'une population, les céréales qu'elle cultive ; on étudie moins souvent la façon dont elle prépare sa nourriture. Et cependant il y a une évolution de ces procédés de cuisine, évolution dont dépend en grande partie le choix des céréales, leur extension. Une histoire de l'alimentation végétale ne peut donc se borner à une étude des plantes alimentaires : elle doit se fonder en même temps sur une étude des usages culinaires, étude qui suppose une connaissance de la technique appropriée en même temps que l'analyse chimique des mets. Le folkloriste, qui aborde son champ d'observation sans décider d'avance qu'il a affaire à des phénomènes d'ordre exclusivement spirituel (croyances, etc.), se rend compte qu'il est en présence de façons de vivre en voie de disparition ou tout au moins de transformation très rapide.

Pour la première fois, voici trois de nos départements — Moselle, Bas- Rhin, Haut-Rhin — pourvus d'un véritable atlas historique. Les savants français accueilleront avec gratitude cet instrument de travail ; mais ils n'en tireront pas vanité. Car le mécène auquel nous le devons — grâce à un intelligent emploi de crédits sans doute considérables — a nom l'Institut Scientifique des Alsaciens-Lorrains « dans le Reich » et sa patrie est à Francfort . Au recueil des cartes et au fascicule de commentaire et de preuves qui l'accompagne, il convient de joindre le volume sur «l'évolution du paysage humain en Alsace, jusqu'à l'avènement de l'influence française », que, peu après, a fait paraître un des directeurs et principaux collaborateurs de cette entreprise collective, Mr Werner Gley : utile et parfois originale mise au point de l'enquête sur les établissements humains qui se poursuit, depuis bien des années déjà, en pays alsacien, sans avoir encore, tant s'en faut, dissipé toutes les obscurités d'une passionnante et difficile histoire.

Par une innovation plus hardie peut-être que l'auteur ne l'a pensé luimême — la thèse que Mr Jules Blache vient de publier sur Les Massifs de la Grande-Chartreuse et du Vercors se trouve divisée en deux parties à peu près égales. L'une formant un tout complet et un livre autonome, avec table des matières, bibliographie, index, traite de la Géographie physique : c'est la thèse complémentaire. L'autre, munie pareillement de sa table distincte, de sa bibliographie particulière et de son index, est consacrée à la géographie humaine. Deux ouvrages séparés et non plus les deux parties, s'étayant l'une l'autre et faites strictement l'une pour l'autre, d'un seul et même ouvrage. Simple question de présentation matérielle, dira-t-on peut-être ? Je n'en suis pas bien sûr.

Le petit ouvrage, plein de suc, que notre excellent collaborateur Mr Henri Labouret a intitulé A la recherche d'une politique indigène dans l'Ouest Africain doit être recommandé à tous les Français — à tous les Européens — qui savent lire. Lassés, il faut l'espérer, par les élucubrations, également incompétentes, des presses adverses, ils reconnaîtront, dans ces quelques pages, volontairement très sobres, avec un sentiment des grandes tâches nationales infiniment plus profond que dans le lyrisme facile de certaines propagandes, un humanitarisme dont le son résonne singulièrement pur lorsqu'on le compare aux professions de foi de ces prétendus amis des Noirs qui, de leur vie, n'ont jamais vu, jamais cherché à se représenter un village mossi ou haoussa. Parmi tous les lecteurs que nous souhaitons à cette œuvre de science et de courage, on nous excusera de songer ici, en première ligne, aux historiens.