Dans l’historiographie de la Tunisie ottomane, les Kūlughlī-s, métis issus de pères turcs et de mères indigènes, forment une catégorie intermédiaire dont le destin politique contribue à expliquer l’avènement du fait national. Un retour plus attentif aux sources et aux catégories des acteurs, montre que les Turcs nés dans la régence, créoles plutôt que métis, ont continué à se désigner comme tels jusqu’au début du XVIIIe siècle. Ils se sont inventé alors un nom particulier, Ḥanafiyya, qui les distingue des Turcs de naissance et des Arabes indigènes. Ils se sont également forgé des institutions particulières et une mémoire propre, liée à la fois à l’histoire ottomane et à celle de la province.