Depuis quand et pourquoi le paysan anglais a-t-il disparu ? Partout en Europe, il y a eu lutte entre le domaine seigneurial propre et la propriété paysanne. Mais, tandis qu'en France ou dans l'Allemagne de l'Ouest les paysans finirent par absorber le domaine, en Angleterre, le domaine s'agrandit et absorba les parcelles paysannes. D'où vient cette différence ? La question s'impose à tout Anglais chaque fois qu'il vient sur le continent. Dans les pays de l'Europe continentale le paysan est encore, ou peu s'en faut, le pilier de l'agriculture. En Angleterre, même s'il arrive qu'il survive dans les confins celtiques, le paysan, l'homme qui cultive une terre sur laquelle il a quelque droit de propriété, a pratiquement disparu. Seuls existent les propriétaires (landlords), les fermiers (tenantfarmera), qui prennent les terres à bail mais n'ont aucun droit de propriété, enfin les ouvriers agricoles indigents.

Les notices touchant les prix et les salaires qu'on trouve dans les oeuvres des historiens et des géographes arabes de l'Espagne sont peu nombreuses. Les renseignements qu'elles nous fournissent à ce sujet sont plus rares que celles qu'on peut recueillir dans les sources orientales. De plus, les indications des prix contenues dans les chroniques de l'Espagne musulmane se réfèrent presque toutes aux époques de disette ou de bon marché exceptionnel. Encore faut-il relever qu'il s'agit toujours, chez ces auteurs, des prix de divers produits en Andalousie, sans que nous y trouvions des renseignements sur les prix dans d'autres régions de la péninsule ibérique, qui étaient peut-être différents. Les matériaux de source juive, que nous ajoutons à ceux tirés de la littérature arabe, cités pour la plupart par Lévi-Provençal, proviennent eux aussi de l'Espagne méridionale.

Une idée nette des divisions ecclésiastiques de la France est indispensable pour comprendre et expliquer nombre de problèmes historiques. Ce sont les diocèses qui en constituent les circonscriptions essentielles, car la hiérarchie ecclésiastique est composée par le corps des évêques.

Dans son diocèse l'évêque exerce une autorité souveraine, qui reste toujours considérable même quand elle est limitée, dans certains cas, par la volonté du Saint-Siège. Elle se fait sentir même sur les religieux qui jouissent du privilège de l'exemption, car ils ne peuvent exercer une activité quelconque sans entrer en relation avec les évêques. Le diocèse réussit normalement à acquérir une personnalité, qui permet à ses institutions propres de se maintenir sous des évêques successifs ou de subsister grâce à des organismes jouissant d'une large autonomie, comme le chapitre cathédral, quand l'évêque est défaillant.

Au sud de la Cordillère Cantabrique, et au nord de la Sierra Morena on peut distinguer, sur l'ensemble de la Meseta castillane, deux sortes de paysages agraires que l'on retrouve dans toute l'Europe Occidentale. A l'Ouest, dans les pénéplaines salmantino-zamoranes et dans les pénéplaines d'Estrémadure, les parcelles, limitées par des murets de pierre, parfois en plaques d'ardoise bien équarrie, ailleurs en blocs de granit grossier, couvrent, sinon tout le pays, au moins sa majeure partie. On y voit aussi des espaces plus ou moins étendus de terrains ouverts ; et sur la périphérie des finages (términos municipales) les grandes unités d'exploitation, les dehesas, introduisent, avec leurs secteurs en monte hueco, un paysage différent. Mais toujours les parcelles encloses embrassent une surface suffisante pour conférer à ces pénéplaines l'un de leurs traits les plus originaux.

Cet article a pour objet d'aborder quelques aspects du passé de la Castille à la lumière du concept de « revenu national ». Nos conclusions seront encore rudimentaires et vagues. Et, plutôt que de parler de « revenu » national, nous parlerons de la « richesse » du pays : cette distinction permettra d'apprécier la distance entre une analyse de caractère historique et une étude proprement économique.

Le juge, sauf en quelques rares cas (notamment en droit répressif *) ne tranche que s'il est saisi du conflit. Il faut donc pondérer l'importance des tensions se dévoilant dans les décisions, par la prise en considération de la volonté des justiciables de se soumettre à l'ordre juridique envisagé. Cette volonté dépend de deux facteurs : l'un général, le degré d'acceptation du système juridique par les intéressés ; l'autre plus « technique », la propension à saieir la juridiction établie.

Un livre magnifique , qui n'emporte pas nécessairement la conviction, mais qui secoue nos torpeurs : l'univers de Quetzalcoatl par une jeune archéologue française, de vaste culture et d'intelligence créatrice. Laurette Séjourné n'est pas une inconnue dans le monde de la préhistoire méso-américaine : quatre livres, des articles, ont donné les premiers fruits déjà de dix ans d'efforts et de réflexions sur le champ de fouilles de la féerique Teotihuacan. Au vrai, il faut bien se rendre à l'évidence, même si cela bouscule nos habitudes d'historiens d'archives ; les livres qui s'accumulent, un peu au hasard, sur nos tables le montrent : le précolombien est en marche. Et, dans sa marche, il déplace les plans de l'histoire coloniale.

Le point de départ du livre de Richard Hofstadter, Anti-Intellectualism in American Life (Londres, 1964) est une série de réflexions sur le McCarthysme et les violentes attaques dirigées contre les intellectuels à cette époque, en particulier lors de la campagne pour l'élection présidentielle de 1952 (Eisenhower contre Stevenson). Pour R. Hofstadter le McCarthysme n'a été que la cristallisation de tendances présentes de tout temps dans la société américaine et qui sont liées aux origines de la démocratie américaine et à la tradition de l'égalitarisme.

Publié en 1968, cet ouvrage polonais, qui a été attaqué par le Comité central du P.O.U.P., va prochainement paraître aux Étas-Unis (University of Califomia Press). Son auteur, économiste polonais, a cherché à explorer la dialectique des mutations économiques au cours des siècles. Il prend le fer et l'acier comme indicateurs de la production totale et de la puissance économique à cause de leur omniprésence, de leur applicabilité universelle, de leur rôle fondamental dans la formation de capital et de leur lien avec le progrès technique. Il justifie leur emploi comme instrument de mesure du P.N.B. et de la production industrielle par des calculs de corrélation dans l'espace et dans le temps. Bien qu'ils ne soient pas parfaits, les résultats sont statistiquement significatifs et posent des problèmes réellement intéressants à l'historien de l'économie ; étant donné le caractère incomplet et la notoire fragilité des séries historiques, les informations très convenables dont nous disposons sur le fer et l'acier nous fournissent une possibilité d'appliquer la méthode quantitative à l'analyse séculaire. Mieux vaut mesurer quelque peu que pas du tout.

La Commission d'Histoire Économique et Sociale de la Révolution a confié à M. Albert Soboul la publication d'un manuscrit de Georges Lefebvre dans lequel il est permis de voir un legs particulièrement précieux de sa pensée historique puisqu'il fut l'oeuvre d'une vie. Les Etudes Orléanaises reposent en effet sur une documentation rassemblée après la fin de la première guerre mondiale et complétée ultérieurement ; l'Avant-Propos est de 1944, et la publication posthume. La forme en reste celle d'une thèse, et laisse apparaître la démarche du chercheur ; l'analyse soigneuse des documents s'éclaire à chaque pas d'une interprétation à la fois prudente et ferme : on en mesure tout le prix en constatant qu'elle se réfère à l'acquis d'autres travaux, et s'intègre ainsi à l'ensemble d'une pensée si pénétrante et si vigoureuse qu'elle continue de nourrir nécessairement toute recherche sur l'histoire sociale et mentale de la France autour de 1789.