« Rappelons-nous », suggère Lucien Febvre, dans un de ses articles consacrés aux alliances et appuis de l'histoire auprès de la psychologie, « tel récit de ce temps, le coupable agenouillé, les yeux bandés, la tête sur le billot… Déjà l'homme rouge brandit sa redoutable épée nue. Et brusquement des cris, un cavalier à fond de course qui envahit la place en brandissant un parchemin, Grâce,grâce… ». Temps fort de l'expression des émotions, le spectacle de l'exécution met en jeu, dans chaque individu, des sentiments instinctifs aussi puissants qu'ils peuvent être changeants : haine, colère, mépris, peur, compassion, admiration. Exprimés et renforcés par des comportements collectifs, ces sentiments individuels reposent sur un climat affectif ou un climat de sensibilité parfois propre à un petit groupe, mais aussi capable de déferler sur le grand nombre comme une épidémie mentale. Champ du combat des idées et des volontés politiques, ce climat d'une époque ou d'une génération, qui s'exprime dans le discours dominant ou dans les changements institutionnels, implique à la fois une certaine nouveauté, mais aussi la prise en compte des comportements acquis de longue date.