Les benzodiazépines ont fait la preuve de leur efficacité dans le traitement des désordres anxieux relativement «purs», en tout cas libres d’une symptomatologie psychotique, dépressive, phobique ou obsessionnelle, qui pourrait leur être associée. Cependant, dans ce cadre même, l’utilisation de molécules à cinétique d’action très inégale, la différence des posologies utilisées, les associations médicamenteuses souvent multiples, les durées de traitement souvent très excessives témoignent s’il en était besoin de pratiques d’utilisation non codifiées et mal maîtrisées.
Dans les attaques de panique et, plus banalement, dans les crises d’angoisse observables dans l’urgence médicale, la prescription d’une benzodiazépine par voie orale est une réponse peu évitable, efficace à condition qu’elle n’initie pas une prescription prolongée.
C’est sans doute dans le registre du trouble de l’adaptation avec humeur anxieuse (309.24 du DSM III) que les benzodiazépines ont leurs meilleures indications. Il a été suggéré avec pertinence que des molécules à demi-vies longues soient utilisées lorsque la charge anxieuse est constante et importante, des molécules à demi-vies brèves si l’anxiété est variable, à recrudescence vespérale. La prescription ne devra pas excéder 6 semaines.
Dans les troubles phobiques, le trouble-panique et le trouble obsessionnel-compulsif, des stratégies thérapeutiques excluant dans la durée l’utilisation des benzodiazépines sont actuellement retenues.
Pour le traitement d’un état dépressif majeur ou d’un trouble dysthymique, fussent-ils très infiltrés ou saturés d’angoisse, c’est le choix de l’antidépresseur à prescrire, la dose à laquelle il faudra l’utiliser qui constituent les impératifs essentiels. Le principe d’une monothérapie est à promouvoir; si la prescription d’une benzodiazépine comme tranquillisant ou hypnotique s’avère indispensable, elle devra être courte et en tout cas ne pas être prolongée après la guérison de l’accès dépressif.
Lors du sevrage d’un alcoolisme ou d’une toxicomanie, les benzodiazépines comme traitement de confort ou d’accompagnement sont largement utilisées. Il n’existe aucune justification à leur prolongation qui n’évite pas les rechutes et qui expose au risque de dépendance chez des personnalités à risques.
De manière générale, l’excessive banalisation de la prescription des benzodiazépines doit être dénoncée; le médecin doit proposer un projet de prescription dont il restera le garant de manière à éviter les autoprescriptions durables par le patient.