Hostname: page-component-78c5997874-94fs2 Total loading time: 0 Render date: 2024-11-14T23:21:47.323Z Has data issue: false hasContentIssue false

L'ethnie: les vicissitudes d'un concept

Published online by Cambridge University Press:  28 July 2009

Luc de Heusch
Affiliation:
Université libre de Bruxelles, (Bruxelles).
Get access

Abstract

In spite of recent criticisms the concept of ethnicity should be retained in anthropological analysis to designate more or less coherent cultural entities. These entities will be fluctuating, of course, due to their position in a larger social space where women, goods, ideas, and institutions are exchanged. Ethnicity is not, as some have argued, a colonial invention, but an incontestable anthropological fact, where identity is nurtured by otherness. Ethnicity does not of itself have a political vocation: traditional African states were more often than notpluri-ethnic. The ‘national’ phenomenon, the convergence of the State and ethnicity, is rare in pre-colonial African history. The nation-state is a modern phenomenon, the product of a more or less arbitrary manipulation by an elite having a certain number of ethnic traits; a political re-modelling of collective identity.

En dépit des critiques dont il a été l'objet récemment, le concept d'ethnie doit être maintenu dans l'analyse anthropologique pour désigner des ensembles culturels plus ou moins cohérents, fluctuants certes, car situés au sein d'un espace social plus vaste, où s'échangent femmes, produits, idées, institutions. L'ethnie n'est pas, comme on l'a dit, une pure invention coloniale, mais un fait anthropologique incontournable, où l'identité se nourrit d'altérité. L'ethnie, n'a pas, en tant que telle, vocation politique: les États africains traditionnels étaient le plus souvent pluriethniques. Le phénomène « national », la coïncidence de l'État et de l'ethnie, est exceptionnelle dans l'histoire africaine précoloniale. L'État-nation est un phénomène moderne, le produit de la manipulation plus ou moins arbitraire par une élite d'un certain nombre de traits ethniques, un remodelage politique de l'identité collective.

Trotz der sich in letzter Zeit haufenden Kritik muß das Konzept der Ethnic im Rahmen der anthropologischen Untersuchung beibehaltcn werden, um mehr oder weniger zusammenhängende kulturelle Gebilde zu beschreiben; gewiß Veränderungen unterworfen, da sie sich in einem weiter gesteckten Rahmen befinden, indem Frauen, Waren, Ideen, Institutionen gehandelt werden. Entgegen langläufiger Meinungen ist die Ethnic keine koloniale Erfindung, sondern eine unumga'ngliche anthropologische Tatsache, bei der sich die Identität mit Andersartigkeit nährt. Die Ethnie an sich hat keine politische Prägung : ursprünglich bestanden die afrikanischen Staaten Ethnien. Das nationale Phänomen, das Zusammentreffen von Staat und Ethnie, ist in der vorkolonialen Geschichte Afrikas eher außergewöhnlich. Der Nationalstaat ist in der Neuzeit entstanden. Er ist das Ergebnis einer mehr oder weniger willkürlichen Manipulation gewisser ethnischer Züge durch eine Elite, eine Neugestaltung des Kollektivbewußtseins.

Type
Research Article
Copyright
Copyright © Archives Européenes de Sociology 1997

Access options

Get access to the full version of this content by using one of the access options below. (Log in options will check for institutional or personal access. Content may require purchase if you do not have access.)

References

Bibliographie

Adler, A. (1982), La mort est le masque du roi. La royauté sacrée des Moundang du Tchad (Paris, Payot).Google Scholar
Amstelle, J.L. (1985), Ethnies et espaces: pour une anthropologie topologique, Au cœur de l'ethnie. Amselle, J.-L. et M'Bokolo, E. (eds) (Paris, La Découverte), 1148.Google Scholar
Amstelle, J.-L. et M'Bokolo, E. (1985), « Introduction », Au cœur de l'ethnie (Paris, La Découverte), 710.Google Scholar
Barth, F. (ed.) (1969), Introduction, Ethnic Groups and Boundaries. The Social Organization of Culture Difference (Oslo, Scandinavian University), 938.Google Scholar
Bazin, J. (1985), À chacun son Bambara, Au cœur de l'ethnie, Amstelle, J.-L. et M'Bokolo, E. (eds.) (Paris, La Découverte), 87127.Google Scholar
Boas, F. (1932), The Aims of Anthropological Research, Science, vol. 76, 605613.CrossRefGoogle ScholarPubMed
Chrétien, J.-P. (1989), Introduction, Les ethnies ont une histoire, Chrétien, J.-P. et Prunier, G. (eds) (Paris, Karthala-ACCT), 59.Google Scholar
Condominas, G. (1980), L'espace social. À propos de l'Asie du Sud-Est (Paris, Flammarion).Google Scholar
Coquery-Vidrovitch, C. (1995), De la nation en Afrique noire, Le Débat, no 84, 121138.Google Scholar
Coquery-Vidrovitch, C. (1996), L'anthropologie, ou la mort du phénix ?, Le Débat, no 90, 114128.CrossRefGoogle Scholar
Delafosse, M. (1912), Haut Sénégal-Niger (Paris, Larose).Google Scholar
Descola, Ph. et Taylor, A.-Ch. (1993), Introduction, La remontée de l'Amazone. Anthropologie et histoire des sociétés amazoniennes, L'homme, no126128, 13–24.Google Scholar
Eriksen, T.-H. (1993), Ethnicity and Nationalism. Anthropological Perspectives (Londres, Pluto Press).Google Scholar
Fleming, et Tibbins, (1875), Royal Dictionary English and French and French and English (Paris, Firmin-Didot).Google Scholar
Fortes, M. (1970) [1940], The Political System of the Tallensi of the Northern Territories of the Gold Coast, African Political Systems, Fortes, M. et Evans-Pritchard, E.E. (eds.) (Londres/Oxford/New-York, Oxford University Press), 239271.Google Scholar
Gluckman, M. (1963), Rituals of Rebellion in South-East Africa, Order and Rebellion in Tribal Africa. Collected Essays (Londres).Google Scholar
Héritier, F. (1984), Leçon inaugurale (Paris, Collège de France).Google Scholar
Heusch, L. de (1971), Structure et praxis sociales chez les Lele du Kasai, Pourquoi l'épouser? (Paris, Gallimard), 4371.CrossRefGoogle Scholar
Heusch, L. de (1982), Rois nés d'un cœur de vache (Paris, Gallimard).Google Scholar
Heusch, L. de (1986), Le sacrifice dans les religions africaines (Paris, Gallimard).Google Scholar
Hobsbawm, E. (1992), Nations et nationalisme depuis 1780. Programme, mythe, réalité, traduit de l'anglais par Dominique Peters (Paris, Gallimard).CrossRefGoogle Scholar
Izard, M. (1985), Gens du pouvoir, gens de la terre. Les institutions politiques de l'ancient royaume du Yatenga (Bassin de la Volta Blanche) (Cambridge University Press/Éditions de la Maison des sciences de l'homme).Google Scholar
Izard, M. (1992), L'odyssée du pouvoir. Un royaume africain: État, société, destin individuel (Paris, EHESS).Google Scholar
Kuper, H. (1947), An African Aristocracy. Rank among the Swazi (Londres/New York/Toronto, Oxford University Press).Google Scholar
Le Moal, G. (1980), Les Bobo. Nature et fonction des masques (Paris, Orstom).Google Scholar
Liberski, D. (1991), Les dieux du territoire. Unité et morcellement de l'espace en pays kesena (Burkina Faso), thèse de doctorat (Paris, École Pratique des Hautes Études).Google Scholar
Loraux, N. (1996), Né de la terre. Mythe et politique à Athènes (Paris, Seuil).Google Scholar
Martinello, M. (1995), L'ethnicité dans les sciences sociales contemporaines (Paris, Presses universitaires de France. Que sais-je ?).Google Scholar
Mercier, P. (1966), Histoire de l'anthropologie (Paris, Presses universitaires de France).Google Scholar
Mukendi, wa Meta (1985), L'ethnogénèse luba. Thèse de doctorat (Leuven).Google Scholar
Petit, P. (19921983), Rites familiaux, rites royaux. Étude du système cérémoniel des Luba du Shaba (Zaïre), thèse de doctorat (Université Libre de Bruxelles).Google Scholar
Roosens, E.E. (1989), Creating Ethnicity. The Process of Ethnogenesis (Londres/New Delhi, Sage Publications).Google Scholar
Tylor, E.B. (1871), Primitive Culture (Londres).Google Scholar
Vansina, J. (1991), Paths in the Rainforests. Towards a history of political traditions in Equatorial Africa (Londres, James Currey).Google Scholar