Le processus de création d'une « conscience nationale » dans la péninsule Ibérique remonte très loin dans le temps puisque dès la fin de l'Empire romain, dans l'Espagne envahie par les Wisigoths, Indacius au ve siècle, puis Isidore de Séville au début du viie siècle achevaient déjà leurs chroniques respectives par le récit exclusif des événements survenus en Espagne. Isidore de Séville consacrait même, vers 624, quelques pages exemplaires aux louanges de sa patrie, les Laudes Hispaniae. Les premières chroniques postérieures à l'invasion des musulmans, écrites dans le royaume chrétien astur-léonais à la fin du ixe siècle, offrent ainsi un passé glorieux auquel se rattacher, celui de l'Espagne wisigothique, et un but à la fois politique et religieux à atteindre, celui de la réoccupation du territoire et de la restauration des splendeurs anciennes du royaume. Les mythes de Rodrigue, le dernier roi wisigoth, du traître don Julian, et du bon roi Pelayo constituent la trame de fond sur laquelle se crée le sentiment national castillan.