La Méditerranée orientale forme un espace de relations d’une grande plasticité, structuré par d’importants déplacements d’individus et de familles qui affectent considérablement l’univers insulaire. Le passage de la domination latine au pouvoir ottoman constitue, entre la dernière décennie du xvie siècle et tout au long du xviie siècle, un long processus marqué par l’aliénation des domaines seigneuriaux, la préservation des terres acquises avant l’arrivée des Ottomans, le renforcement de l’institution communautaire, la formation de nouveaux réseaux marchands, etc. Ce texte essaye de saisir les mécanismes de ces phénomènes par l’étude des parcours géographiques qui représentent un aspect de la mobilité sociale. La documentation notariale a permis de reconstituer toute sorte de liens entre familles traditionnelles et nouvellement arrivées (alliances, acquisition de terres, héritages, associations, différentes formes de solidarité et de conflits, etc.), ainsi que de mouvements croisés entre les îles. Entre ces liens et ces mouvements s’est construit une importante recomposition des élites insulaires. Cette modification du paysage social est suivie à travers, d’une part, l’histoire de deux familles et, de l’autre, le voyage en Italie d’un groupe d’étudiants. La notabilité des premières est le produit d’une intense mobilité spatiale, tandis que les déplacements des seconds mettent en évidence l’ampleur des parcours géographiques et l’apparition d’un nouveau profil de notable.