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La réaction aristocratique avant 1789: l'exemple de l'armée*
Published online by Cambridge University Press: 25 May 2018
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Si les causes de la Révolution font encore l'objet d'ardentes controverses, la plupart des historiens pensent qu'il y a eu dans les décennies précédant 1789 un changement d'attitude de la noblesse qui a largement contribué à déclencher l'événement. Au-delà de toutes leurs divergences, les historiens s'accordent pour affirmer qu'il y a eu avant 1789 une offensive de la noblesse qui a voulu défendre et consolider l'ordre social hiérarchisé qui garantissait sa prééminence et sa situation matérielle. Malgré les différences et les oppositions qui existaient en son sein, la noblesse constituait un groupe résolu et unifié par ses intérêts et ses privilèges. C'est l'action qu'elle entreprit pour les défendre qui fit naître les forces qui devaient la renverser.
- Type
- Ancien Régime et Révolution : Réinterprétations
- Information
- Copyright
- Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1974
Footnotes
Cet article reprend et développe une étude présentée pour la première fois en 1966 à un groupe de recherche sur « les aristocraties », composé d'historiens de diverses universités de la Côte Est des États-Unis. Le délai nécessaire pour assembler des renseignements de sources dispersées et pour rédiger ce travail durant l'année académique 1972-73 m'a été accordé par l'Institute for Advanced Study, Princeton, avec l'appui du National Éndowment for the Humanities (Grant H 5426) et par l'Hudson Research Professorship de l'université de Michigan. Ma recherche en France a été rendue possible par des subventions de la Rackham School of Graduate Studies de l'université de Michigan, du National Endowmenf for the Humanities, S.S.R.C. et A.C.L.S. J'ai reçu d'utiles critiques et conseils au Séminaire de Sciences sociales dirigé par Cari Kaysen à l'Institute for Advanced Study, et de mes collègues du Michigan : John Bowitch et John Shy. Plusieurs de mes étudiants (Lutz Berkner, Lenard Berlanstein, Stephan Fishelman, Marcia Dildine Young), dans leurs thèses de B.A. ou de M.A., ont stimulé mes recherches en traitant des sujets apparentés au mien. A plusieurs reprises des assistants m'ont apporté une aide des plus efficaces : Jacques Chevalier, Mme Bernard Favre, Sharon Hilt Lasker, Charles Mathews, Elizabeth Muenger, Robert M. Schwartz, Judith Silver, et Anne Tenenbaum Toohey. Que tous trouvent ici mes remerciements.
References
1. Il serait inutile d'énumérer, pour le lecteur français, les références qui seraient trop nombreuses. En anglais, les meilleures études sociales des aspects législatifs, institutionnels et constitutionnels du problème se trouvent dans: Ford, Franklin L., Robe and Sword; the Regrouping of the French autocracy after Louis XIV, Cambridge, Mass., 1962 Google Scholar et dans Palmer, R. R., The Age of the Démocratie Révolution: A Political History of Europe and America, 1760-1800, t. 1, The Challenge, Princeton, 1959 Google Scholar.
2. La discussion sur l'aggravation de l'exclusivisme de la noblesse est évidemment aussi ancienne que la Révolution même, mais elle a récemment repris de l'importance. Aux États-Unis, Elinor G. Barber, qui est familiarisée avec les méthodes historiques et sociologiques, a appliqué les catégories sociologiques de la stratification sociale dans un livre très intéressant, The Bourgeoisie in 18th century France, Princeton, 1955. L'idée d'un ralentissement important de la mobilité sociale vers la fin du siècle se trouve aussi dans les ouvrages de Ford et Palmer. On s'est beaucoup intéressé à ce problème aux États-Unis parce que, sans souci de son adéquation à la réalité sociale ou historique, une tradition bien enracinée valorise la mobilité sociale. « Three générations from shirtsleeves to shirtsleeves », dit un proverbe américain. En France, MM. Bluche, Mousnier et d'autres cités ci-dessous ont étudié quelques aspects de cette question. Sur l'état actuel de la question et de ses rapports avec la Révolution, voir les articles de François Furet, « Le catéchisme de la Révolution française », Annales E.S.C., 26e année, n° 2, mars-avril 1971, en particulier pp. 272- 276, et de Guy Lemarchand, « Sur la société française en 1789 », Revue d'Histoire moderne et contemporaine, t. XIX, janvier-mars 1972, en particulier pp. 79-83. Si j ‘ a i bien compris M. Lemarchand, l'idée d'un anoblissement continuel et important tout au long du siècle a conduit les historiens qu'il contredit, à développer le concept d’ « élites mixtes » qui ne s'insère pas facilement dans le modèle de la Révolution « bourgeoise ». Ainsi donc à partir de ce point de vue assez différent, on s'attendrait à ce que l'accès à la noblesse, au prestige et au pouvoir ait été de plus en plus restreint au cours du XVIIIe siècle.
Dans ces dernières années, des études, citées dans l'article de M. Furet, suggèrent l'ouverture continue de l'accès à la noblesse. On doit ajouter aux références de cet article, l'étude de Gilbert Shapiro et Dawson, de Philip, « Social Mobility and Political Radicalism: The case of the French Révolution of 1789 », dans The Dimensions of Quantitative Research in History sous la direction de Aydelotte, W. O., Bogue, A. G., et Fogel, R. W., Princeton, 1972 Google Scholar.
3. Les doléances au sujet de l'exclusion des offices et des postes en raison de la naissance se retrouvent dans une proportion de 73 % à 100 % dans les Cahiers étudiés par George V. Taylor pour quatre catégories de bailliages et d'assemblées urbaines. Quand on descend dans la hiérarchie sociale du Tiers État, cette question perd beaucoup de son importance: 9 % seulement sur 428 paroisses et 14 % des 146 corporations inférieures de 5 villes la mentionnent. Taylor, Cf., « Revolutionary and Nonrevolutionary Content in the Cahiers of 1879: An Intérim Report », French Historical Studies, vol. VII, n° 4, Fall 1972, pp. 485, 498.Google Scholar
4. On a évidemment utilisé pour cette étude les ouvrages sur l'armée qui font autorité et qui sont de grande qualité: Hartmann, Louis, Les officiers de l'armée royale et la Révolution, Paris, 1910 Google Scholar; Latreille, Albert, L'armée et la nation à la fin de l'Ancien Régime, Paris, 1914 Google Scholar; Tuetey, Louis, Les officiers sous l'Ancien Régime. Nobles et roturiers, Paris, 1908 Google Scholar. Sur l'édit de Ségur et la hiérarchie sociale, voir aussi Corvisier, A., « Hiérarchie militaire et hiérarchie sociale à la veille de la Révolution », Revue internationale d'Histoire militaire, n° 30, 1970, pp. 77–92 Google Scholar, et Six, Georges, « Fallait-il quatre quartiers de noblesse pour être officier à la fin de l'Ancien Régime ? », Revue d'Histoire moderne, t. 4, 1929, pp. 47–56 CrossRefGoogle Scholar.
5. Cessac, De, « Capitaine », Encyclopédie méthodique, Art militaire, 1784, t. I, p. 475 Google Scholar; Necker, Jacques, De l'administration des finances de la France, Paris, 1785, t. III, p. 151 Google Scholar; Chérin, L. N. H., La noblesse considérée sous ses divers rapports, dans les assemblées générales et particulières de la nation…, Paris, 1788, pp. 61–62 Google Scholar; Jean-François, , marquis de Saint- Lambert, Œuvres philosophiques, 6 vol., Paris, s.d., t. IV, pp. 371–372 Google Scholar. Le statut légal de de Cessac est précisé à l'article qui le concerne, dans la biographie du groupe des officiers en service en 1789 (dactylographiée) établie par F. V. S. Churchill et conservée à la Bibliothèque du Ministère de la Guerre, boulevard Saint-Germain.
6. Observations sur le règlement du 22 mai 1781, concernant les preuves de noblesse exigées pour entrer au service, Londres, 1789, p. 8.
7. En 1788-1789, environ 7 100 officiers ont servi à un moment ou à un autre dans ces régiments, y compris l'artillerie. Les 1 050 officiers, environ, dans les 12 régiments de cavalerie légère, les 12 bataillons d'infanterie légère, les 6 régiments de hussards et le génie, sont exclus de nos calculs. Dans l'infanterie légère et les hussards, il s'agissait souvent d'étrangers qui ne devaient pas fournir les mêmes preuves de noblesse.
On a estimé a 3 000 le nombre de nouveaux officiers en poste dans les unités régulières où les preuves généalogiques étaient exigées, en se basant sur l'examen d'un échantillon des registres de 20 régiments. Cette estimation est très proche de celle de Tuetey qui en trouvait 2 943 (Les officiers sous l'Ancien Régime, p. 219). Parmi les étudiants qui entraient dans les régiments de ligne, on compte 487 élèves du roi dont l'éducation était payée par le roi dans les écoles de province et 119 pensionnaires à l'École militaire de Paris, dont les parents payaient les frais d'études. Il y avait 325 pages: 101 à la Grande Écurie, 79 à la Petite Écurie, 34 pages de Monsieur, 24 pages de la Reine, 24 pages du comte d'artois et quelques autres au service d'autres membres de la famille royale. Ces chiffres sont pris dans les registres des régiments qui récapitulent les services de chaque officier, y compris le temps passé comme page ou comme élève: Archives du Ministère de la Guerre, Yb 166 à 468, 529 à 643.
8. Les noms proviennent du fichier établi par J. de La Trollière qui a trouvé en général les renseignements sur les placements et les familles dans les certificats des dossiers du Travail du Roi aux Archives de la Guerre. Ce fichier est aux Archives Nationales, coté Inv. 464 (974).
9. Archives de la Guerre, Yb 669, Corps Royal de l'artillerie, contrôle, lieutenants, 1768 à 1791. L'employé a signalé la noblesse et souvent la profession du père pour presque tous les nouveaux officiers de l'artillerie pendant cette période.
10. Tuetey, Les officiers sous l'Ancien Régime, pp. 94-99. Louis Hartmann, qui a publié son étude deux ans après Tuetey, déduisait sur cette base qu'il devait y avoir en 1781, en plus des 1 100 officiers de fortune, environ 1 845 officiers roturiers (Les officiers de l'armée royale et la Révolution, Paris, 1910, p. 97). Palmer, R. R. traite de cette question dans The Age of Démocratie Révolution, t. 1, p. 460, n. 15 Google Scholar. John Shy a bien voulu me permettre de lire son ancien travail inédit sur les officiers roturiers.
11. André Corvisier, « Les généraux de Louis XIV et leur origine sociale », Bulletin du XVIIe siècle, Ier trimestre 1959, p. 53.
12. Archives de la Guerre, Yb 126.
13. Table historique de l'état militaire de France depuis 1758 jusqu'à présent, Paris, 1766; J. de Champeaux, Honneur et Patrie, ou la noblesse aux armées, 3 tomes, Nevers, 1893-1896.
14. L'Édit et la Déclaration qui vint le nuancer en 1752 sont publiés dans Tuetey, op. cit., pp. 367-375 et aussi dans de Raillicourt, D. Labarre, La Noblesse militaire. Etude, liste biographique des titulaires. Armoriai, Paris, 1962, pp. 27–31 Google Scholar.
15. La liste des officiers anoblis par l'accès à ces fonctions se trouve dans Labarre de Raillicourt, La Noblesse militaire, pp. 11-26. Elle se fonde sur les séries Y” 125-126 des Archives de la Guerre où l'on trouve des renseignements supplémentaires sur les carrières dans les documents sur les cas individuels. Je suis arrivé aux chiffres sur le nombre total des diverses promotions de nobles et de roturiers à partir des listes de l'almanach Royal et, après 1758, à partir des volumes annuels de l'État militaire.
16. Le pourcentage bien inférieur de roturiers parmi ceux qui montèrent en grade avant 1750 et qui étaient encore en service cette année-là, est trompeur. Les chiffres ne donnent pas les généraux roturiers qui étaient anoblis, avant 1750, par des lettres de noblesse individuelles. Ce système prit fin après 1750 parce que le grade suffit alors à conférer la noblesse.
17. On a trouvé des renseignements sommaires sur les carrières dans les Archives de la Guerre, Ya 125-126 et dans les volumes de l'État militaire. Des renseignements plus complets sur la carrière individuelle des généraux se trouvent aussi dans les séries Y3d et Y3d des Archives de la Guerre.
18. Labarre de Raillicourt (La Noblesse militaire) fonde sa liste sur les dossiers Ya 125-126 des Archives de la Guerre et cite 122 lettres réellement délivrées. L'exhaustivité de cette liste est évidemment essentielle ici. Tuetey estimait qu'il y en a eu 200 au total, mais sur les 9 bénéficiaires qu'il cite, un seul ne se retrouve pas sur la liste de Labarre. La liste semble quasiment exhaustive pour les années 1780: en effet, tous les bénéficiaires des lettres devaient payer un droit, le droit de marc d'or, qui a varié de 36 à 49 livres; les reçus des paiements pour les lettres de 1785 à 1789 figurent dans les registres du Trésorier des revenus casuels (Archives Nationales, P 4881-4888) et donnent 16 noms de bénéficiaires des lettres pour ces années; sur les 16, 15 se retrouvent sur la liste de Labarre et un seul nom (Semilly) manque. Pour la période antérieure, cependant, il manque beaucoup de noms: Mme Gallet, des Archives Nationales, a fait un inventaire (pas encore publié), qui donne le détail des arrêts du Conseil du Roi pendant les deux années du ministère de Turgot de 1774 à 1766. Parmi eux, on trouve les arrêts qui autorisaient le paiement du marc d'or par les bénéficiaires des lettres. Pendant ces deux années, il y eut sept arrêts de cette sorte dont quatre ne figurent pas sur la liste de Labarre. Le chiffre de 122 est donc trop bas et la liste, à peu près exacte pour les années 1780, est incomplète pour la période antérieure. Le chiffre de 200 avancé par Tuetey est sans doute le plus proche de la réalité.
19. Archives Nationales, P 2592-2601, lettres de noblesse enregistrées à la Chambre des Comptes de Paris jusqu'en 1787; E 2768-2782 (registres énumérant les lettres envoyées par le Ministre de la Guerre, 1750-1751, 1753-1759, 1767, 1770-1771, 1775, 1777, 1779); O1 94-123 (registres des lettres du Ministère de la Maison du Roi, 1750-1776); Jules Maulbon d'arbaumont, Les Anoblis de Bourgogne, liste par ordre chronologique des lettres d'anoblissement, de confirmation et de relief de noblesse enregistrées au Parlement et à la Chambre des Comptes de Dijon (1363-1782), Paris, 1867; Inventaire sommaire des archives départementales antérieures à 1790, Gironde. Série B. Archives Judiciaires. Registres d'enregistrement du Parlement, I B 1 à 58. Rédigé par Jean-Auguste Brutails, Bordeaux, 1925, donne les enregistrements des lettres de noblesse au Parlement de Bordeaux, sauf pour les années 1766-1774 pour lesquelles les registres manquent; Inventaire sommaire des archives départementales antérieures à 1790. Haute-Garonne. Archives Civiles. Série B. Parlement de Toulouse, n° 1923-1974, t. V, Enregistrement des actes du pouvoir royal (2e partie) 1569-1790, Toulouse, 1965. Ces listes régionales se recoupent et sont parfois incomplètes. La comparaison entre la liste composite formée à partir de celles-ci avec les recensements généraux connus et complets pour l'ensemble de la France, pour 1750-1767 et 1784-1789 (cf. note 41 ci-dessous) mais qui ne comportent pas d'indication de profession, montre que, regroupées, les listes régionales contiennent environ les deux tiers de l'ensemble.
20. Archives de la Guerre, Yb 166 à 468, 529 à 643.
21. Les chiffres sur les capitaines blessés ou tués sont tirés de Champeaux, Honneur et Patrie.
22. Tuetey, Les officiers sous l'Ancien Régime, p. 91.
23. Ibid., p. 172 et cf. pp. 164-181.
24. Ordonnance portant création des Cadets-Gentilshommes, 25 mars 1776, résumée dans État militaire de France pour l'année 1777, pp. 411-412; Règlement concernant les Cadets- Gentilshommes, créés dans les Troupes du Roi, par l'ordonnance du 25 mars 1776, du 20 août 1776. — Et Ordre du Roi, Envoyé à chaque mestre-de-camp-commandant des régimens d'infanterie françoise, de Cavalerie, Chevaux-légers, Dragons et Chasseurs-à-cheval, concernant la création d'une troisième place de sous-lieutenant en pied, sans appointemens, et l'extinction des places de Cadets-Gentilshommes, 22 mai 1781, Archives Nationales, AD VI IoB, Recueil…, t. I, pp. 104-109, 169-172.
25. Correspondance de Babeuf avec l'académie d'arras (1783-1788), publiée sous la direction de Marcel Reinhard (Publications de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Paris, Série « Textes », t. I), Paris, 1961, p. 112.
26. Les quatre mémoires cités sont à la Bibliothèque Nationale, Clairambault, ms. 930, fos 64-65; Bibliothèque de l'arsenal, ms. 6085, fos 356-363; Archives de la Guerre, A4 XLI, n° 37, « Projet des notables par l'abbé Expilly », et Mémoires et Reconnaissances, 1709, n° 47.
27. Mémoire de Béziers: Archives Départementales de l'hérault, C 1995; mémoire d'aubenas: B.N., Clairambault, ms. 930, f60 60; mémoire du Vivarais: Arsenal, ms. 6085, fos 356-363.
28. B.N., Clairambault, ms. 930, f° 124; cf. aussi, à ce sujet, fos 42, 46, 66, 125, 128, et Chérin, La noblesse considérée sous ses divers rapports…, pp. 37-49; Maugard, Antoine, Remarques sur la noblesse, dédiées aux Assemblées provinciales, Paris, 1787 Google Scholar, passim
29. Necker, , De l'administration des Finances, t. III, pp. 149–151 Google Scholar.
30. Necker, , De la Révolution française, 4 tomes, s.l., 1796, t. I, p. 163 Google Scholar et cf. pp. 157- 170.
31. Chérin, La noblesse considérée sous ses divers rapports…, pp. 93-96.
32. Maugard, Remarques sur la noblesse, Introduction.
33. Ibid., pp. 6-7, 35.
34. On trouve une bonne discussion sur la hiérarchie sociale et les divers courants d'opinions sur ce sujet dans Yves Durand, Les fermiers généraux au XVIIIe siècle, Paris, 1971 (Publications de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Paris-Sorbonne, Série « Recherches », t. 70), pp. 177-203, 289-292. L'opinion selon laquelle l'accès à la noblesse était trop facile, se rencontrait communément. Pour d'autres exemples, cf. André DecouflÉ, « L'aristocratie française devant l'opinion publique à la veille de la Révolution (1787-1789) », dans Decouflé, Boulanger, F., et Pierrelle, B. A., Études d'Histoire économique et sociale du XVIIIe siècle, Paris, 1966 Google Scholar, Travaux et Recherches de la Faculté de Droit et des Sciences Économiques de Paris, Série « Sciences Historiques », n° 9, p. 46. — Certains auteurs ne s'opposaient pas à la mobilité sociale. L'abbé Expilly la considérait comme un fait et proposait d'en tirer profit pour les finances royales. Le projet d'édit qu'il soumit en 1772 aurait crée, à partir du Tiers État, un quatrième état de 60 000 notables roturiers, payant de 1 500 à 2 500 livres chacun. Seuls les boutiquiers et les travailleurs manuels auraient été exclus du droit d'acheter des lettres de notables. Celles-ci conféraient à qui les achetait une condition nouvelle, héréditaire, qui conférait automatiquement la noblesse après cinq ou sept générations, selon le prix payé à l'origine. Archives de la Guerre, A4 XLI, n° 37.
35. [de Meilhan, Gabriel Sénac], Des principes et des causes de la révolution en France, Londres, 1790, pp. 103–104 Google Scholar.
36. Soulavie, Jean-Louis, Mémoires historiques et politiques du règne de Louis XVI, depuis son mariage jusqu'à sa mort, 6 tomes, Paris, 1801, t. 4, p. 394 Google Scholar.
37. Chérin, La noblesse considérée sous ses divers rapports…, p. 64.
38. Maugard, Remarques sur la noblesse, pp. 3-7.
39. Tuetey, Les officiers sous l'Ancien Régime, pp. 94-98, 202-203, 212.
40. A ce sujet, la discussion la meilleure est celle de Marcel Reinhard, « Élite et noblesse dans la seconde moitié du XVIIIe siècle », Revue d'Histoire moderne et contemporaine, III (janvier-mars 1956), pp. 5-37.
41. Pour la période antérieure, Bibliothèque Nationale, ms. fr. 32889; pour 1784- 1789, Archives Nationales, P 4881-4887.
42. Les références aux listes régionales et aux listes partielles se trouvent à la note 19 ci-dessus. Aux noms qu'elles indiquent on en a ajouté d'autres cités par H. Gourdon de Genouillac, Dictionnaire des anoblis, Paris, 1875, qui s'est basé sur d'autres cours, en plus de la Chambre des Comptes de Paris. Les listes se recoupent souvent, mais, après élimination des recoupements, il reste 113 noms pour 1774-1783. La comparaison de la liste formée à partir de sources partielles avec la liste complète pour 1784-1786 conservée dans les registres du Trésorier des revenus casuels qui recevait le paiement du marc d'or montre que la liste partielle contient à peu près les deux tiers des lettres de noblesse conférées chaque année. Il faut donc ajouter environ 50 % aux 113 noms que nous avons pour 1774-1783, soit 17 par an pour arriver à 170 environ pour la période, ce qui semble une estimation raisonnable pour la décennie 1774-1784. Selon M. Reinhard (loc. cit., p. 29), il y a eu environ 400 lettres de noblesse de 1750 à 1789. Pour arriver à ce chiffre il se fonde sur l'hypothèse de 10 anoblissements annuels par lettres du milieu du XVIIIe siècle à la Révolution. En fait, il y eut un accroissement de la moyenne annuelle et cette estimation est donc un peu trop faible.
43. François Bluche, « L'origine sociale du personnel ministériel français au XVIIIe siècle », Bulletin de la Société d'Histoire Moderne, 12e série, n° 1 (janvier-février 1957), pp. 9-13; Vivian R. Gruder, The Royal Provincial Intendants: a Governing Elite in Eighteenth Century France, Ithaca, N.Y., 1968, pp. 120-121.
44. Robin, P., La compagnie des secrétaires du roi (1351-1791), Paris, 1933, pp. 10–13 Google Scholar; Bluche, François et Durye, Pierre, L'anoblissement par charges avant 1789, La Roche-sur- Yon, 1962, t. II, pp. 3–12 Google Scholar.
45. Pour la Grande Chancellerie, cf. le mémoire sur les finances de septembre 1789, Archives Nationales, Va 55; sur les offices provinciaux, Jean Meyer, cf., La noblesse bretonne au XVIIIe siècle, S.E.V.P.E.N., 1966, t. I, p. 241 Google Scholar.
46. Archives Nationales, Va 55, mémoire sur les finances, septembre 1789.
47. Les chiffres sont tirés de l'analyse des dossiers de 1’ « enquête sur la vie et les moeurs » des secrétaires du roi qui entraient à la Grande Chancellerie. Ces dossiers sont aux Archives Nationales, V 35-46 et sont complets pour les années 1675-1705, 1713-1789. — Le nombre des secrétaires du roi qui succédaient à leur père dans cet office et qui donc n'en avaient pas besoin pour être anoblis a décliné au cours du siècle: de 1731 à 1750, on trouve 31 fils et 3 petits-fils d'anciens secrétaires du roi, dans ce même office; de 1751 à 1770, on trouve encore 25 fils succédant à leur père; de 1771 à 1789, seulement 6.
48. L'échantillon choisi pour une étude plus approfondie a été établi à partir du dossier des « entrants » en 1773, 1776, 1779, 1782, 1785, 1788.
49. Robert de Roton, Les Arrêts du Grand Conseil portant dispense du marc d'or de noblesse, commentés et complétés par J. de La Trollière et R. de Montmort, Paris, 1951. Les arrêts de dispense sont pris aux Archives Nationales, E 2466-2655. Jean Egret a montré l'utilité du volume de Roton pour analyser les institutions du point de vue de leur composition sociale dans « L'aristocratie parlementaire française à la fin de l'Ancien Régime », Revue Historique, CCVIII (juillet-septembre 1952), pp. 1-14. La collection Roton omet une catégorie intéressante de nobles très récents qui avaient été dispensés du paiement: les fils et petits-fils des secrétaires du roi à la Grande Chancellerie qui n'avaient pas achevé vingt ans de service au début de la Révolution. Ils étaient déjà, en fait, considérés comme nobles grâce à un privilège traditionnel obtenu auparavant par la Grande Chancellerie et qui prévoyait que tous les membres devenaient nobles à leur entrée, mais qu'ils pouvaient perdre ce statut s'ils ne servaient pas vingt ans. Les généalogistes sont évidemment des puristes et, ici, les auteurs n'ont pas voulu ranger dans la noblesse des familles qui ne la possédaient pas vraiment. Comme les secrétaires du roi qui n'étaient pas en fonction depuis vingt ans en 1789 n'ont pas pu remplir les conditions pour confirmer leur statut nobiliaire, nos généalogistes ont révoqué leur noblesse et celle de leurs descendants. Pour avoir une idée du nombre des dispenses ainsi omises, j'ai utilisé l'inventaire des arrêts du ministère de Turgot (mai 1774-mai 1776) établi par Mme Gallet, qui permet d'en trouver cinq et j'en ai trouvé cinq autres en étudiant E 2590- 2627 (fin 1783-1786). Pour toute la période 1771-1789, il doit y avoir environ 40 dispenses ainsi omises.
50. Archives Nationales, P 4881-4888.
51. Ces chiffres sont fondés sur les dossiers des secrétaires du roi à la Grande Chancellerie, Archives Nationales, V” 36-46. On a les dates de baptême pour 261 des 266 nouveaux venus après 1774, leur âge à leur entrée en fonction se répartissait ainsi: moins de 40 ans: 70 (27 %); 40-49: 77 (29,5 %); 50-59: 71 (27 %); 60 ans et plus: 43 (16,5 %).
52. On possède des listes chronologiques de tous les nouveaux venus dans trois chancelleries sur vingt (Arras, Dijon, Montauban): les 23 nouveaux officiers qui y firent leur entrée de 1784 à 1789 représentent 32,4 % du total (71) des entrées dans ces chancelle ries pour toute la période 1774-1789. Nous savons, en tout cas, que 206 personnes sont entrées dans les vingt chancelleries après 1784, mais que 10 environ furent en Roussillon les premiers titulaires d'offices créés sous Louis XIV mais qui n'avaient jamais été vendus auparavant. Si nous réduisons de 10 le chiffre pour le Roussillon pour le réduire à la moyenne obtenue pour les autres chancelleries, le chiffre de 196 représente le roulement normal dans ces offices pour la période 1784-1789. En sachant qu'ils représentaient 32,4 % de tous les nouveaux venus entre 1774 et 1789 on peut estimer à 605 le nombre des nouveaux venus pendant cette période.
Les listes chronologiques pour chaque chancellerie particulière se trouvent dans: André Bourrée, La Chancellerie près le Parlement de Bourgogne de 1746 à 17ÇO, avec les noms, généalogies et armoiries de ses officiers, Dijon, 1927; Taupiac, M., Notice sur la Cour des Aides de Montauban, suivie de la liste chronologique de ses membres (1642-1790), Montauban, 1865 Google Scholar; Cher. Amédée le Boucq de Ternas, La Chancellerie d'artois, ses officiers et leur généalogie continuée jusqu'à nos jours, Arras, 1882.
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