Published online by Cambridge University Press: 11 October 2017
La Peste, « ce grand personnage de l'histoire d'hier » (B. Bennassar), n'a commencé à livrer ses secrets historiques que pour la grande épidémie qui a commencé en 1348. Les deux pandémies antérieures — celle de l'Antiquité, celle du Haut Moyen Age — attendent encore au seuil de l'historiographie. Les histoires générales du Haut Moyen Age ignorent ce grand et long événement ou le mentionnent sans s'y attarder. Ces silences ou demi-silences ne s'expliquent pas seulement par l'ignorance ou la paresse intellectuelle des historiens. Ils sont en partie justifiés par les difficultés d'une information sûre. Les textes sont peu nombreux et vagues, l'historiographie de la peste est encombrée par des études de valeur scientifique douteuse, la chronologie et la géographie du phénomène sont malaisées à établir.
Cet article résulte de la rencontre et de la confrontation de deux recherches entreprises indépendamment l'une de l'autre : celle du docteur J.-N. Biraben qui achève, dans le cadre de l'Institut National d'Études Démographiques, une étude globale sur la peste dans l'histoire des populations (et les Annales le remercient d'avoir bien voulu livrer ici une partie de son enquête), et celle de J. Le Goff qui avait étudié, dans le cadre d'un séminaire de la VIe Section de l'École Pratique des Hautes Études, la peste du Haut Moyen Age en Occident en tant que composante de la formation de la sensibilité médiévale.
I. Études où prédomine le point de vue medical