Sisyphe et les géographes
Published online by Cambridge University Press: 11 October 2017
Si je signale la leçon d'ouverture, que prononça au Collège de France M. Roger Dion, en prenant possession le 4 décembre 1948 de la chaire de Géographie historique de la France, chaire nouvelle, ou mieux, renouvelée — c'est qu'après avoir défini cette géographie « à la fois comme une archéologie, une histoire de l'occupation du sol et une interprétation du paysage humanisé », le nouveau professeur a réagi nettement (p. 13) « contre ceux qui, oubliant leur dette envers Vidal de la Blache, voudraient que la géographie fût présentée aux étudiants de nos Universités comme naturellement indifférente au passé ». Il a fort bien parlé, dans sa leçon, d'une autre dette : celle des géographes envers Michelet.
page 87 note 1. « Où, ajoute-t-il (Ibid.), ce que nous croyons être une construction sur table rase n'est ibien souvent, en tait, que la réutilisation inconsciente de quelque aménagement exécuté par «des ancêtres plus ou moins lointains. »
page 88 note 1. Et Sisyphe sans grand.espoir. Car les hommes qui président aujourd'hui aux destinéesde la géographie française ont encore été formés dans le cadre de la vieille agrégation d'histoire et de géographie. Que je ne suis point suspect d'admirer ! Mais enfin, ils ont bénéficié tous, plus ou moins largement, de ce qu'il y a d'enrichissant et d'élargissant dans la pratiquede l'histoire. Leur savoir de géographe est un savoir chronologique et spatial à la fois. N'estil pas dangereux, comme on le fait maintenant, au moment où on les forme, de n'attirer leur attention que sur le spatial ? Nous verrons bientôt, je le crains, les fruits d'une certaine inculture dont on croit sentir l'appréhension chez beaucoup de géographes qui réfléchissent. Lorsque les produits de la nouvelle formation seront promus à la dignité (à la responsabilité) de maîtres — alors, l'école géographique française saura-t-elle, pourra-t-elle garder ce qui la distingue, la caractérise, la valorise dans le monde?
page 89 note 1. J'entends, du ressort de la géographie… Moutons de haute laine, dit Panurge.
page 89 note 2. La Terre et l'Évolution Humaine, coll. L'Évolution de l'Humanité, 1921 ; 16e mille, 1936 (réédition en cours, 1949). Cf. II» partie, chap. III, «Le Sauvage et le Barbare dans la nature; besoins et coutumes», p. 194 et suiv.; — IIIe partie, ch. IV, p. 323: «Le troupeau richesse des pasteurs », etc.