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Guerre et Régression en Masovie aux XVIe et XVIIe Siècles

Published online by Cambridge University Press:  25 May 2018

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Les Guerres de la seconde moitié du XVIIe siècle, dont la Pologne était non seulement l'objectif mais aussi le lieu, principalement la guerre suédoise de 1655-1660, ont causé à ce pays de graves pertes démographiques et économiques. Les ravages de la guerre que les historiens polonais appellent « le Déluge », ne furent pas réparés avant la fin du siècle suivant. Les historiens ont imputé cette lenteur de la reconstruction à la seule gravité des désastres de la guerre. Mais des recherches récentes nous inclinent à penser que les défaites militaires ont seulement augmenté les tendances régressives qui se manifestaient dans l'ensemble de l'économie polonaise depuis la fin du XVIe siècle. C'est bien avant les guerres que la décomposition du système économique et social, due en premier lieu aux contradictions de l'économie rurale, caractérise cette situation défavorable : l'exportation de blé toujours croissante au cours de la première moitié du XVIIe siècle apparaît comme l'élément essentiel qui a aggravé les difficultés de la réserve seigneuriale, asphyxiée par le manque de main-d'œuvre servile.

Type
Études
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1958

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References

page 651 note 1. Cf. J. Rutkowski, o La transformation des campagnes en Pologne après les guerres de la seconde moitié du XVIIe siècle », Kwart. Histor., t. 30, 1916, p. 309-342. Etude fondée sur des sources de Ruthénie Rouge ; le résumé de ses résultats se trouve dans la traduction française de son Précis de l'Histoire économique de la Pologne, Paris, 1923. — Une étude analogue pour la Prusse Royale a été faite par W. Rusinski, « La structure de la population rurale dans le domaine royal en Prusse Royale, deuxième moitié du XVIIe» siècle », Roczniki Dziejów Spol. i Gosp., t. 6, 1937, p. 87-114.

page 651 note 2. Cf. Première Conférence de Méthodologie des historiens polonais, Varsovie, 1953, t. I : rapports de S. Arnold et M. Malowist, et discussion. Voir aussi I. Gieysztorowa, « Les changements économiques et sociaux du village masovien au XVIe siècle, à la 1 umière des sommaires d'impôt foncier », Przcglad Historyczny, t. XLIX, 1958, ‘p. 236-249.

page 652 note 1. Le manse (latin laneus, mansus ; polonais, lan, wloka), unité de mesure de la terre arable en Pologne au XVIe siècle, équivaut à 30 arpents (16, 8 hectares). La limite inférieure d'une parcelle appartenant à la noblesse masovienne sans main-d'oeuvre servile tombe quelquefois à un demi-arpent.

page 652 note 2. Ces données chiffrées concernant le XVIe siècle proviennent des travaux de documentation effectués par l'Institut d'Histoire de l'Académie Polonaise des Sciences et des Lettres pour l'Atlas historique.

page 652 note 3. Cf. A. Pawinski, « La Pologne du XVIe siècle, du point de vue géographique et statistique », t. V : Masovie, Varsovie, 1895, p. 20.

page 652 note 4. Nous avons surtout utilisé, pour étudier cette situation et son évolution, les documents fiscaux (incontestablement les plus précieux), les recensements des domaines royaux, aux Archives centrales de Varsovie : Lustraliones et revisiones bonorum regalium. Nous citerons ci-dessous ces recensements sous le sigle Lustr. et leur date. Bien qu'effectués selon un schéma toujours semblable, les recensements ne donnent pas toujours des renseignements homogènes, ce qui restreint considérablement les comparaisons, — et ils ne concernent que les propriétés royales. Nous avons donc dû recourir aux registres de l'impôt cadastral et de la capitation, aux derniers registres de l'impôt foncier de 1652-1653, aux états des terres en friche de 1660 pour nous renseigner sur les autres propriétés. Nous avons aussi consulté les registres des tribunaux et les « constitutions » des Diètes.

page 653 note 1. Dans les grandes fermes des starosties de Garwolin et de Latowicz au pays de Czersk, le louage des travaux est partout pratiqué. Quelquefois les vilains ne travaillent pas plus de 8 jours par an pour les aides et ils rachètent les autres journées.

page 653 note 2. Cf. A. Wauwender, Chronique des calamités naturelles en Pologne et dans les pays voisins, de 1450 à 1586, Léopol, 1932-1935. Voir aussi S. Hoszowski, a Le développement de la population à l'époque féodale », Roczniki Dziej. Spol. i Gosp., XIII, 1951, p. 144. De 1622 à 1631, il n'y a pas une année sans épidémie ; en 1624 on note « incendie, peste, famine » ; l'épidémie de 1631 a entraîné une régression économique considérable. Cf. Volumina legum. éd. J. Ohryzko, Saint-Pétersbourg, 1859, t. III, p. 336.

page 653 note 3. Que ce phénomène fût général, les résolutions de la Diète, sans cesse renouvelées, l'attestent. Cf. Volumina legum., t. II, p. 467 (1609) ; t. III, p. 336-337 (1631), et p. 45 (1638), etc. Entre les redevances de deux villages voisins, les différences étaient parfois sensibles, et la demande de main-d'oeuvre permettait au fugitif d'espérer que son nouveau maître le défendrait contre l'ancien.

page 653 note 4. Des notes consignées par les collecteurs de l'impôt sur leurs registres, il ressort que les surfaces relevées telle année comme brûlées ou abandonnées, passaient l'année suivante presque entièrement aux réserves seigneuriales.

page 653 note 5. Par exemple : Lustr., 1616, f° 310.

page 653 note 6. Sur les 91 réserves domaniales énumérées par le recensement, 35 seulement mentionnent l'état actuel du cheptel : il est toujours très inférieur à l'état de 1569.

page 654 note 1. Cf. H. Samsonowicz, L'Artisanat rural en Pologne (XIV-XVIIe siècle), Varsovie, 1954, p. 154 et suiv. En 1569, dans la majorité des villages de Masovie, le recensement cite plusieurs brasseurs-cabaretiers qui paient une redevance sur la production (par brassin), et une sur le débit ; en outre, on trouve de fréquentes mentions de vilains qui brassent leur bière et acquittent un impôt selon leurs brassins. En 1616, le seul producteur de bière est la brasserie domaniale, qui, désireuse de monopoliser la production, s'est efforcée d'exclure les cabarets du circuit.

page 654 note 2. On en trouve des exemples dans les starosties de Makow, de Wizna, etc.

page 654 note 3. Cf. Lustr., 1616, f° 30.

page 654 note 4. Ibid., f° 167.

page 654 note 5. Le calcul a porté sur 18 villes comparables, dans les recensements de 1564, 1616 et 1630, ainsi que dans la liste cadastrale du pays de Lomza pour 1634.

page 654 note 6. Lustr., 1616, f° 1037 v. ; Ibid., f° 213 v.

page 654 note 7. Une partie des jachères est, dès 1030, regagnée par la forêt. Cf. Lustr., 1630, f° 78 et 80.

page 655 note 1. Ainsi Wyszogrod a perdu 37 % de ses artisans entre 1564 et 1630 ;Zakroczym, plus de 25 % ; Gostynin, 15 %.

page 655 note 2. Le péage ne suffit pas a couvrir les frais d'entretien du pont de Sochaczew et de Gostynin (Lustr., 1630, f° 18, 55), témoignage de la faiblesse du trafic. Les foires ont perdu une large part de leur ancienne importance (Ibid., f° 45 et 55).

page 655 note 3. La perte globale des immeubles entre 1564 et 1630 dans les 5 villes masoviennes énumérées dans les fragments conservés du recensement 1630, se chiffreà 41%. Le recensement signale pour la première fois des terrains urbains abandonnés (f° 138). La régression des villes de Masovie persiste jusqu'aux guerres de la moitié du XVIIe siècle, comme en témoigne notamment la pétition de la ville de Lomza en 1647. Cf. les registres judiciaires (Gr. Lomz et Décret. 4a 15, f° 168, extrait des dossiers Pawinski 14, à la Bibliothèque de l'Académie des Sciences et des Lettres, Cracovie, Département des manuscrits).

page 655 note 4. Cf. R. Rybabski, Le commerce et la politique commerciale de la Pologne au XVIe siècle, Poznan, 1928-1929, t. II, p. 17, 26, 36.

page 656 note 1. Dans les déclarations fiscales des voïévodies et des pays en 1661, dans la plupart des cas, figure une remarque sur leur dévastation : parmi eux le pays de Zakroczym semble plus durement touché (Volumina legum., t. IV, p. 360). Cf. également Registres judiciaires, Zakr. rel : 1, f° 218, année 1659.

page 656 note 2. En dehors des renseignements fournis par Lustr. 1660 et par les rôles de l'impôt cadastral et de la capitation, beaucoup- d'informations sur les années d'après guerre se trouvent dans : Abbé W. Knapinski, Notes pour une histoire des paroisses de l'archevêché de Varsovie, tirées pour la plupart des archives du Consistoire de Varsovie, texte dactylographié, copie à la Bibliothèque de la Direction Centrale des Musées et des Monuments historiques ; l'ouvrage se réfère souvent à la visite des paroisses effectuée en 1669 par Stanislas Swiecicki. — Cf. également J. Lukasiewicz, Petite esquisse historique des églises paroissiales… dans l'ancien diocèse de Poznan, Poznan, 1863, t. III : Archidiaconie de Varsovie.

page 656 note 3. Zakr. Rel. I, f° 210, année 1659 ; également Zakr. Gr. Wiecz. 103, f° 333, année 1660.

page 656 note 4. Les registres des tribunaux ne nous donnent que des renseignements sur les pillages effectués par les armées polonaises, ces états servant essentiellement à la revendication de réparations. Les armées ennemies se comportaient sans doute encore plus brutalement avec la population et devaient causer des dommages bien supérieurs.

page 656 note 5. Volumina legum., t. III-IV des années 1649, 1650, 1653, 1654, 1655, 1658, 1659, 1661.

page 657 note 1. Zakr. rel. 1, f° 220, année 1659.

page 657 note 2. Roz. Gr. Wiecz. 27, f° 373.

page 658 note 1. Cf. S. Szczotka, Les paysans défenseurs de l'indépendance de la Pologne, à l'époque du Déluge, Cracovie, 1946, p. 302; cf. aussi Vol. leg., t. IV, p. 247.

page 658 note 2. Zakr. Tel. 1, f° 210, année 1659 : « Subditi de eisdem villis caesi, alii in fuga conversi sunt ».

page 658 note 3. A.S.K., Sect. I, liv. 130, fos 4-59.

page 659 note 1. Il convient cependant de noter que, dans les deux cas, les chiffres de la population de la lre moitié du XVIIe siècle, fondés sur le nombre de maisons, sont très inférieurs aux estimations relatives à la fin du XVIe siècle. La lecture des registres de perception de la Masovie à partir des années 1570 ne confirme pas la thèse d'un accroissement constant de la population jusqu'au milieu du XVIIIe siècle. Mais il est difficile d'apprécier dans quelle mesure la différence des estimations basées sur l'impôt cadastral et l'impôt foncier est due à l'émigration (incontestable depuis la 2e moitié du XVIe siècle) de la Masovie surpeuplée vers la Lituanie (cf. M. Wittyg, La noblesse inconnue et ses armoiries, Cracovie, 1908, p. 10) ou vers la Prusse ; ou bien faut-il voir l'origine de ces différences dans l'emploi d'indices inadéquats ou dans des données incomplètes quant à l'impôt cadastral ?

Evaluée avec la plus grande prudence dans les conclusions tirées de ces comparaisons, la différence notée dans plusieurs paroisses du palatinat de Plock entre la population de 1662 (selon la capitation) et celle de 1578 (d'après l'impôt foncier) chiffre à 65 % la chute du nombre d'habitants. Nous obtenons des pertes de 70 % pour le pays de Wyszogrod, en comparant les données de l'impôt cadastral avec l'état du XVIe siècle. Pour le pays de Varsovie, malgré l'ampleur des destructions subies par la banlieue, la population de 1661 représente 60 % de celle du XVIe siècle, soit une diminution de 40 % seulement. Il faut sans doute voir là l'effet d'une compensation due à l'accroissement de la population (10 % de nouvelles colonies) qu'a entraîné l'établissement de la capitale à Varsovie et l'expansion économique qui en est résultée. Tout ceci souligne les difficultés auxquelles se heurtent les recherches démographiques portant sur de longues périodes.

page 659 note 2. Les dommages en immeubles dépassant ceux qui concernent les gens, la surpopulation des maisons est presque partout visible quand on compare les données du recensement de 1660 pour les maisons avec celles concernant les habitants du pays de Czersk dans les rôles de la capitation de 1663.

page 660 note 1. L'état de 1616 représente 62 % de celui de 1564; l'état de 1660, 22% de celui de 1616, soit 13, 64 % de celui de 1564. Dans la première période (1564-1618), la chute est de 38 % ; pour 1616-1660, 78 % par rapport à 1616, soit 48,36 % de l'état de 1564. La proportion de ces pourcentages est bien — approximativement — de 7 à 9.

page 660 note 2. Cf. F. Bujak, Etudes historiques et sociales, Léopol, 1924, p. 115. L'auteur estime la chute de la population après la guerre à un tiers de l'état d'avant-guerre.

page 660 note 3. Dymen in Polen, 1661 ; copie dans le Sachsisches Landeshauptarchiv à Dresde, Loc. 10852, p. p. I. Gieysztorowa et T. Ladoqòrski, Kwartalnik Hist. Kult. Mat., VI, 1958, p. 59-60.

page 662 note 1. Cf. Hoszowski, op. cit., p. 181 : « Les villes à l'époque féodale étaient, selon la définition donnée au XVIIIe siècle, mortifères. »

page 662 note 2. Exemples : en 1578 dans une des fermes du pays de Gostynin, il y avait eu 18 manses emblavés ; en 1660, « seul un vassal a ensemencé un quart [de manse], les autres n'ont pas semé, car aucun n'a de boeufs » (Lustr., 1660, f° 82). Ailleurs, dans le pays de Czersk : o On a semé seulement du seigle et de l'orge, on n ‘a pas semé d'autres plantes de printemps, faute de semences » (Ibid., f° 312).

page 662 note 3. Calculs sur la base de Lustr., 1660, qui compare l'état des emblavures et la quantité des terres roturières dans 266 villages des trois voïévodies de Masovie. Concernant 3 régions moins étendues (A.S.K., Sect. I, liv. 61, fos 54, 60, 62), les informations oscillent entre 11 et 25 %.

page 663 note 1. Dans la première période (1569-1616), la chute est de 21,5 % pour 1616-1660 ; 57,3 % par rapport à 1616 ; soit 44,5 % de l'état de 1569. La proportion de ces pourcentages est approximativement de 1 à 2.

page 663 note 2. Dans la première période (1569-1616), la chuté est de 32,0 % ; pour 1616-1660, 75,0 % par rapport à 1616 ; soit 54,4 % de l'état 1569. La diminution des récoltes entre 1616 et 1660 serait presque deux fois plus sensible que celle qui sépare 1569 et 1616.

page 665 note 1. Dans 19 domaines pour lesquels nous avons conservé les données de Lustr., 1616, et Lustr., 1660, les emblavures totales de 1660 représentant 44 % de celles de 1616, les récoltes 24,7 %. La moyenne des semailles par domaine était de 165,5 boisseaux en 1616 et 70,8 en 1660 ; la récolte moyenne, respectivement de 800,6 et 218,0. Ces données confirment les résultats du tableau général ci-dessus. Il convient de noter aussi le pourcentage décroissant de la culture du froment et le fort accroissement de l'orge en fonction des besoins de la brasserie, qui, dès la première moitié du xvne siècle, malte l'orge au lieu du froment. Cf. mention dans Lustr., 1616, fos 206, 226, 246, etc.

page 667 note 1. Cf. W. Malcuzynski, Le développement territorial de la ville de Varsovie, 1000, p. 188-139. L'auteur souligne la concentration fréquente de plusieurs dizaines de petites propriétés nobiliaires entre les mains d'un seul magnat.

page 667 note 2. Selon les calculs effectués pour l'Atlas historique… op. cit., la limite inférieure de la grande propriété en Masovie au XVIe siècle a été fixée à 10 manses roturiers (un village royal ou ecclésiastique moyen en Masovie mesure environ 12 manses) ; au XVIIe siècle à 20 feux, ce qui correspond, — compte tenu du haut pourcentage des dommages de guerre, — à 10 manses de l'époque précédente. Au XVIe siècle, dans le pays de Varsovie, nous trouvons 10 propriétaires individuels de plus de 10 manses ; au XVIIe siècle, 34 propriétaires possèdent plus de 20 feux. Même situation dans la voïévodie de Plock.

page 667 note 3. De même, le grand-sous-trésorier de la Couronne, André Morsztyn, possède dans le pays de Varsovie 9 villages entiers et 2 partiellement, et encore 6 villages dans le pays de Czersk.