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Des « marcheurs » de 1983 aux « émeutiers » de 2005. Deux générations sociales d’enfants d’immigrés

Published online by Cambridge University Press:  04 May 2017

Marc Gurgand
Affiliation:
CNRS
Éric Maurin
Affiliation:
EHESS

Résumé

L’avènement du collège unique dans les années 1960, puis l’ouverture du lycée dans les années 1985-1995 ont été des moments de réduction rapide des écarts de niveaux d’études entre la toute petite minorité d’enfants que leur milieu social et leurs aptitudes scolaires destinent aux filières les plus prestigieuses de l’enseignement supérieur et l’immense majorité de ceux qui, après la guerre, n’allaient guère au-delà de la scolarité primaire obligatoire. Nous montrons que ces moments d’expansion scolaire ont également été des périodes de réduction sensible des inégalités salariales au sein des classes d’âge, entre ces mêmes enfants devenus adultes. Le surcroît de formation secondaire dont ont bénéficié les 95% de la population qui n’ont pas accès au système des grandes écoles s’est bel et bien traduit par une amélioration de leur situation relative sur le marché du travail au fil des générations. La démocratisation de l’enseignement pose des problèmes très concrets et très visibles de mise en œuvre. Elle n’en a pas moins des effets souterrains de long terme très positifs pour ceux qui en bénéficient le plus directement.

Abstract

Abstract

During the 1960’s, lower secondary education was unified in France and, between 1985 and 1995, access to upper secondary education was significantly enlarged: these have been times of a fast reduction in the schooling gap between an elite children who accessed the most prestigious tracks of higher education and the large majority who, right after World War ii, would hardly receive more than primary education. We show that these periods of schooling expansion have come along with significant reduction in wage inequalities within the age classes concerned with those reforms. Progressively increasing schooling attendance of the 95 % population that cannot access the grandes écoles elite system has indeed resulted in better relative wages for them. Enlarging access to education raises many difficulties in the short term. It has less directly observable effects in the long run, but still very positive ones for their beneficiaries.

Type
Penser la crise des banlieues
Copyright
Copyright © Les Áditions de l’EHESS 2006

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References

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2 - La réforme Berthoin (1959) unifie le primaire en cinq niveaux (du CP au CM2), prolonge l’obligation scolaire de deux ans (jusqu’à 16 ans), et crée le Collège d’enseignement général et le Collège d’enseignement technique. La réforme Capelle-Fouchet (1963) crée le Collège d’enseignement secondaire et commence l’unification du premier cycle du secondaire. La réforme Haby (1975) achève le mouvement d’unification des différents types de collèges.

3 - Pour l’analyse du lien entre milieu social d’origine et exposition à la démocratisation d’après-guerre, on peut consulter par exemple Goux, Dominique et Maurin, Éric, « Origine sociale et destinée scolaire », Revue française de sociologie. , XXXVI, 1, 1995, pp. 81-123 CrossRefGoogle Scholar.

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8 - L’origine est mesurée par le niveau scolaire du père et les capacités le sont sur la base de tests logiques subis à la fin des six premières années de primaire.

9 - Oreopoulos, Philip, « Do dropouts drop out too soon? Wealth, health and happiness from compulsory schooling », 2005, ˂www.economics.utoronto.ca/oreo/research/˃ Google Scholar.

10 - ID., « The compelling effects of compulsory schooling: Evidence from Canada », Canadian Journal of economics, 2006, à paraître.

11 - La réforme fut mise en place en Ulster en 1989 et consista non pas à abolir les grammar schools, mais à en ouvrir plus largement l’accès; voir Maurin, Éric et McNally, Sandra, Selective schooling. , Discussion paper of the Center for Economics of Education, 2006 Google Scholar.

12 - La différence des logarithmes des salaires présentée dans le tableau 2 est très exactement de - 0,7571, ce qui correspond à un rapport du niveau de salaire de 1 à 2.

13 - Cet effet de 0,36% n’est pas lisible directement dans le tableau 2, car la variable de cohorte a été normalisée. Il est obtenu en divisant le coefficient (0,0259) par le terme de normalisation, soit 0,0259/7,33. Le même principe s’applique aux autres chiffres tirés des tableaux 2 et 3.

14 - De tels taux de rendement impliquent qu’en renonçant à une année de salaire pour poursuivre ses études, on augmente de 10 à 16% les salaires futurs chaque année au cours de la vie active. Un tel surplus de revenus couvre largement le coût privé ou social d’une année de formation, en particulier parce que le coût d’opportunité d’une année d’étude doit s’évaluer aux taux d’intérêt du marché, qui sont nettement inférieurs.

15 - Selon l’enquête sur la « Formation et les qualifications professionnelles » de l’INSEE, la proportion de personnes travaillant alors qu’elles n’ont pas fini leurs études était résiduelle dans l’après-guerre, alors qu’elle représente aujourd’hui 20% des étudiants.

16 - Nos conventions sont les suivantes: les personnes ayant atteint la terminale se voient attribuer douze années d’étude (qu’elles aient ou non réussi le baccalauréat); celles ayant atteint les premiers cycles universitaires en reçoivent quatorze (qu’elles ou non un diplôme bac + 2); celles ayant atteint le second cycle en reçoivent seize; et les personnes ayant atteint le troisième cycle, dix-huit. Les élèves ayant dépassé la troisième et commencé une scolarité au lycée reçoivent dix années d’études, ceux n’ayant été que jusqu’en troisième ou équivalent en reçoivent neuf, les autres personnes ayant fréquenté le collège en reçoivent huit et celles déclarant avoir arrêté avant le secondaire en reçoivent sept (pour mémoire, l’âge modal de fin d’étude de ce dernier groupe est de quatorze ans).

17 - Nous présenterons les résultats correspondant à deux spécifications possibles. La première associe à chaque diplôme l’âge de fin d’études médian de ses titulaires (tel qu’observé en début de période pour la génération 1947). La seconde associe à chaque diplôme un nombre d’années d’études théoriques.