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Le droit à l’expression sexuelle chez les personnes âgées vivant en milieu d’hébergement : comment concilier le consentement et les troubles neurocognitifs?

Published online by Cambridge University Press:  25 March 2024

Louise Langevin*
Affiliation:
Professeure titulaire, Faculté de droit, Université Laval, et membre du Barreau du Québec, Canada
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Résumé

Contrairement aux préjugés, les personnes aînées ne sont pas asexuelles ou post-sexuelles. Elles sont titulaires de droits sexuels, reconnus dans de nombreux textes législatifs. Cependant, la mise en œuvre de ces droits pose des défis, particulièrement pour les personnes aînées vivant en établissement et souffrant de problèmes neurocognitifs. Le Code criminel interdit tout contact sexuel entre personnes qui ne sont pas en mesure de consentir ou lorsqu’un des partenaires ne peut consentir. Cette règle a été critiquée parce qu’elle nie le droit à l’expression sexuelle de personnes aînées incapables de consentir en raison de maladies neurocognitives. Mon étude analyse un enjeu majeur en matière de lutte contre la maltraitance envers les personnes aînées : comment reconnaître et respecter à la fois le droit à l’expression sexuelle des personnes aînées vivant en établissement et leur droit à la sécurité, lorsque les maladies neurocognitives altèrent l’aptitude à consentir.

Abstract

Abstract

Older persons are not asexual or post-sexual. They enjoy the right to sexual expression. This right is recognized in many laws, but the application of such a right poses many challenges, especially for elders living in long-term care institutions and suffering from neurocognitive disorders. The Criminal Code clearly prohibits any sexual activity between partners who cannot consent, or between one partner who can consent and one who cannot. This all or nothing approach has been criticized because it denies the right to sexual expression of elders incapable to consent. My analysis deals with a major issue concerning maltreatment against seniors living in long-term care institutions: how to respect their right to sexual expression and their security, when neurocognitive disorders alters the capacity to consent.

Type
Research Article/Article de Recherche
Creative Commons
Creative Common License - CCCreative Common License - BY
This is an Open Access article, distributed under the terms of the Creative Commons Attribution licence (http://creativecommons.org/licenses/by/4.0), which permits unrestricted re-use, distribution and reproduction, provided the original article is properly cited.
Copyright
© The Author(s), 2024. Published by Cambridge University Press on behalf of Canadian Law and Society Association / Association Canadienne Droit et Société

Contrairement aux préjugés, qui considèrent que sexualité se conjugue nécessairement avec jeunesse, les personnes aînées ne sont pas asexuelles ou post-sexuellesFootnote 1. Elles veulent encore faire des rencontres amoureuses et vivre leur sexualité, quelle que soit leur orientation sexuelle, leur expression ou leur identité de genre. La génération des babyboomers a connu la libération sexuelle des années 1970, l’accès à la contraception efficace, les revendications féministes, ainsi que la dissociation de la sexualité et de la procréation. Avec leur arrivée dans des lieux d’hébergement, où elles seront prises en charge, ces personnes aînées demanderont que leurs modes de vie et leurs droits sexuels soient respectésFootnote 2.

Pourtant, des études ont démontré que ces droits ne sont pas toujours respectésFootnote 3. Les droits à la vie privée, à l’intimité, à la confidentialité des personnes aînées vivant en établissements privés ou publics (ailleurs que dans leur propre logement) sont très souvent ignorés, soit en raison du manque de formation ou de temps du personnel, de l’aménagement des lieux (des chambres et des salles de bain partagées), ou de préjugés âgistes et genrés du personnel, des autres résident.e.s et des familles. Les droits des personnes aînées membres de la communauté LGBT+ sont encore moins respectésFootnote 4.

Pour contrer ces atteintes aux droits fondamentaux, le législateur québécois, par sa Loi visant à lutter contre la maltraitance envers les aînés et toute autre personne majeure en situation de vulnérabilité Footnote 5, impose plusieurs mesures de protection. Entre autres, cette loi propose une définition large de la maltraitanceFootnote 6. À la maltraitance physique, psychologique, financière et organisationnelle s’ajoute celle de nature sexuelle. Le Plan d’action gouvernemental pour contrer la maltraitance envers les personnes aînées 2022-2027 Footnote 7 définit la maltraitance de nature sexuelle. Priver la personne aînée d’intimité, la traiter comme un être asexuel ou l’empêcher d’exprimer sa sexualité constituent des formes de maltraitance de nature sexuelle au sens de ce plan d’action, tout comme les propos ou attitudes suggestifs, les blagues de nature sexuelle, la promiscuité, les comportements exhibitionnistes et les agressions à caractère sexuel.

Si toute personne – peu importe son âge, son sexe, son orientation sexuelle, son expression ou identité de genre ou son milieu de vie – est titulaire de droits sexuels, reconnus dans de nombreux textes législatifsFootnote 8, la mise en œuvre de ces droits pose des défis, particulièrement pour les personnes aînées souffrant de problèmes neurocognitifs qui altèrent leur capacité de consentirFootnote 9 et vivant en établissement, parce que tous les aspects de leur vie sont pris en charge. Le droit criminel canadien interdit de façon très claire toute activité sexuelle entre une personne qui ne peut consentir et toute autre personne, que celle-ci puisse consentir ou non (art 273.1 (2) b) du Code criminelFootnote 10). Par ailleurs, soulignant l’importance du toucher pour les êtres humains et les bienfaits de l’activité sexuelle sur la santé des personnes aînéesFootnote 11, des chercheur.euse.s proposent que des activités sexuelles entre personnes aînées aient lieu si ces activités ne présentent pas de risques et que ces personnes semblent apaisées par la suite, même si elles ne sont peut‑être pas en mesure de comprendre toute la portée de leurs gestes et sont considérées comme incapables sur le plan juridiqueFootnote 12. Alors, comment peut-on appliquer le droit criminel canadien tout en respectant le droit à l’expression sexuelle des personnes âgées souffrant de problèmes neurocognitifs et les protéger?

À mon avis, même si les critères imposés par le Code criminel pour évaluer le consentement à l’activité sexuelle semblent trop sévères pour des personnes qui ont perdu leurs capacités cognitives en raison de la maladie, ce qui nie leur droit à l’expression sexuelle, la protection de leur grande vulnérabilité doit primer et leur sécurité doit être assurée. La position contraire, soit permettre l’expression sexuelle malgré l’absence d’une réelle aptitude à consentir, mène à envisager un double régime de protection juridique dans ce domaine : un régime très exigeant appliqué par les tribunaux criminels pour s’assurer du consentement libre, éclairé et continu de toute personne s’engageant dans des activités sexuelles, et un autre plus souple fondé sur les avantages des activités sexuelles, au bénéfice des personnes souffrant de maladies neurocognitives qui ne peuvent consentir et qui sont tout aussi vulnérables que les premières.

Après avoir présenté mon cadre théorique et la définition des termes employés, je propose une réflexion en deux temps. D’abord, j’analyse les dispositions du Code criminel en matière de consentement et d’agression sexuelle. Ensuite, je propose une analyse de ces exigences législatives et du contexte particulier qui nous intéresse.

Partie préliminaire : situer l’analyse

Ma réflexion adopte un cadre théorique féministe : elle s’appuie sur les outils et les concepts développés par les chercheuses féministes. Peu importe le courant de pensée féministeFootnote 13, les militantes et les chercheuses dénoncent la violence systémique envers les femmes de toutes les cultures, de toutes les époques et de tous les âges, tant dans la sphère privée que publique. Dans la société patriarcale hétérosexuelle, le corps des femmes est encore perçu comme un objet sexuel à la disposition des hommes. Ainsi, une réflexion portant sur la capacité à consentir à des activités sexuelles de personnes âgées atteintes de troubles neurocognitifs ne peut faire l’impasse sur la violence sexuelle que les femmes âgées subissent, et qui est peu rapportéeFootnote 14. Les femmes endurent la violence sexuelle à tous les âges et celle-ci ne s’arrête pas avec la vieillesse. Les agressions sexuelles envers les femmes âgées demeurent un tabou parce que la société les considère comme asexuelles et non attirantes sur le plan sexuel. Pourtant, sans lien avec l’attirance, la violence sexuelle constitue un contrôle du corps des femmes par les hommes (dans les relations hétérosexuelles). Comme nous le verrons, des progrès législatifs et jurisprudentiels importants ont été accomplis en matière de respect du consentement libre, éclairé et continu à l’activité sexuelle. Aucune forme d’accommodement ou de brèche visant à réduire ces acquis ne peut être envisagée au risque de les menacer et de réintroduire les mythes et les stéréotypes au sujet du consentement des victimes de violence sexuelle dénoncés dans l’arrêt Ewanchuk Footnote 15. Le respect du droit à l’intégrité, à l’égalité et à la dignité des femmes influence mes prises de position.

Mon analyse tente de trouver un équilibre entre la protection des personnes aînées, particulièrement les femmes, et le respect de leur droit à l’expression sexuelle, que l’on peut définir comme « des droits humains liés à la sexualité »Footnote 16. Ils sont garantis par la liberté de conscience (qui comprend le droit à la vie privée) (art 2 a)), le droit à la liberté et à la sécurité (art 7), et le droit à l’égalité (art 15), protégés par la Charte canadienne des droits et libertés Footnote 17. Par expression sexuelle ou activité sexuelle, j’entends ici tout attouchement de nature sexuelle avec une autre personne, tel embrasser, caresser, ou avoir un rapport sexuelFootnote 18. Est exclue de la présente analyse toute activité sexuelle avec soi-même. Le caractère sexuel d’un geste au sens du Code criminel et de la jurisprudence est abordé plus loin.

Sujet de mon étude, la définition de la catégorie « personne aînée » varie d’une société à l’autre, d’une époque à l’autre et englobe des personnes aux réalités diverses. La littérature distingue entre les « jeunes » aînés et les « vieux » aînés, le grand âge et le groupe des « super centenaires »Footnote 19. Aux fins de mon propos, les personnes aînées sont âgées de plus de 65 ans, parce que ce critère d’âge est retenu au Canada pour percevoir les prestations du Régime de pensions du Canada. Comme mon étude s’intéresse aux personnes aînées qui vivent en établissements privés ou publics, ces dernières sont souvent plus âgées que 65 ans et ce sont surtout des femmes qui, après 85 ans, représentent 64% de ce groupe, selon le recensement canadien de 2021Footnote 20.

La question de l’activité sexuelle des personnes aînées appelle celle de l’âgismeFootnote 21 et des préjugés qu’elles subissent de la part des familles, du personnel soignant et des résident.e.s. Ces préjugés se cachent souvent sous des objectifs de protection et de supposées volontés antérieures des personnes âgées. Si les hommes âgés endurent de l’âgisme, les femmes âgées souffrent à la fois de l’âgisme et du sexismeFootnote 22.

Le consentement est au cœur de mon analyse. D’abord, la faculté de prendre des décisions éclairées est progressivement altérée chez la personne âgée souffrant de troubles neurocognitifsFootnote 23. La maladie d’Alzheimer, le trouble neurocognitif le plus courant, endommage les cellules cérébrales, ce qui entraîne une détérioration de la capacité de réflexion et de la mémoire avec le tempsFootnote 24. L’aptitude à consentir de la personne atteinte de troubles neurocognitifs déclinera et un régime de représentation, qui limitera sa capacité juridique (art 154 du Code civil du Québec (CcQ)), sera parfois mis en place par la familleFootnote 25. J’utiliserai indifféremment les termes aptitude/ inaptitude et capacité/ incapacité à consentirFootnote 26. Ensuite, le consentement constitue l’élément essentiel de l’infraction d’agression sexuelle. Le Code criminel définit le consentement à l’activité sexuelle comme l’accord volontaire du plaignant à l’activité sexuelle (art 273.1 (1) C cr). La capacité à consentir doit être intacte pour que le consentement existeFootnote 27. Nous verrons que le Code criminel explicite les qualités de cet accord volontaire afin que le consentement soit libre, éclairé et continu, c’est-à-dire un « véritable consentement »Footnote 28.

Afin d’analyser le présent sujet, des techniques de repérage appropriées en droitFootnote 29 ont été utilisées pour établir un corpus documentaire constitué de lois et de règlements, de documents internationaux, de jurisprudence, de doctrine, ainsi que de littérature en gériatrie sociale et en théories féministes.

Le consentement à l’activité sexuelle au sens du Code criminel : un consentement libre, éclairé et continu

Le consentement à l’activité sexuelle à l’étape de l’actus reus constitue « l’assise sur laquelle sont fondées les règles de droit canadiennes relatives aux agressions sexuellesFootnote 30». Le récent arrêt Kirkpatrick Footnote 31 de la Cour suprême du Canada rappelle les objectifs législatifs des modifications de 1991, en matière d’agression sexuelle, au Code criminel. Les parlementaires voulaient promouvoir l’égalité des sexes et protéger l’autonomie personnelle des individus pour opérer des choix au sujet de leurs corps et choisir de se livrer ou non à une activité sexuelleFootnote 32. Le plus haut tribunal rappelle aussi que les agressions sexuelles constituent un crime genréFootnote 33 et qu’elles sont indissociables des notions de pouvoir et de contrôleFootnote 34. On ne peut passer sous silence ici les batailles menées par les groupes féministes afin de faire reconnaître et corriger les lacunes du droit criminel en matière d’agression sexuelleFootnote 35. Dans l’arrêt Kirkpatrick, la juge Martin reprend les propos de la juge en chef McLachlin exprimés dans l’arrêt Mabior Footnote 36 : « Se livrer à des actes sexuels avec une autre personne sans son consentement c’est la traiter comme un objet et porter atteinte à sa dignité humaineFootnote 37 ».

Le Code criminel définit le consentement comme l’accord volontaire de la plaignante à l’activité sexuelle (art 273.1 (1) C cr) et énumère des situations où il ne peut y avoir de consentement (art 273.1 (2) C cr). Le consentement libre, éclairé et continu doit être donné par la personne concernée (art 273.1 (2) a) C cr), alors qu’elle est capable de consentir et de comprendre la nature et les conséquences de l’activité sexuelle. Il s’agit de « l’état d’esprit subjectif dans lequel se trouvait en son for intérieur la plaignante à l’égard des attouchements, lorsqu’ils ont eu lieuFootnote 38 ». Seul le point de vue de la personne plaignante est déterminant : elle a consenti ou elle n’a pas consenti à l’acte physique sexuel à un moment précis.

Le consentement peut se donner clairement par la parole, et aussi se déduire du comportement (art 273.1 (2) d) C cr). Il ne se déduit toutefois pas du silence, de l’absence de résistance, ou ne peut être implicite. Ce consentement libre, éclairé et continu peut être accordé, refusé, retiré à tout moment par la personne. Le consentement à l’activité sexuelle ne se présume jamais, puisqu’il ne peut être donné une fois pour toutes (art 273.1 (2) e) C cr). Il doit être renouvelé et exister lors des contacts sexuels (art 273.1 (1.1) C cr)Footnote 39. La plaignante doit être capable de consentir, puisque la capacité et le consentement sont inextricablement liésFootnote 40. Ainsi, la plaignante ne peut être inconsciente (art 273.1 (2) a.1) C cr), sous l’effet de drogues ou d’alcool, ou présenter des problèmes mentaux qui l’empêchent de donner son consentementFootnote 41. Le consentement ne peut être donné sous la menace de la force (art 265 (3) b) C cr), dans une situation d’exploitation ou de dépendance (art 273.1 (2) c) C cr). Enfin, la personne qui prend l’initiative de l’activité doit adopter des mesures raisonnables pour s’assurer du consentement véritable de son ou sa partenaire (art 273.2 b) C cr)Footnote 42.

L’aptitude à consentir des personnes souffrant de maladies neurocognitives doit être évaluée à l’aune des exigences imposées par l’article 273.1 C crFootnote 43. La personne aînée doit être en mesure de consentir, donc de comprendre la nature et les conséquences de l’activité sexuelleFootnote 44. Elle doit ainsi être capable de distinguer entre des gestes de nature sexuelle et non sexuelle, d’exprimer ses choix, de refuser les avances verbalement ou par ses comportements, de refuser la violence ou l’exploitation, de comprendre qu’il y a des lieux et des moments pour tenir de telles activitésFootnote 45. Seule la personne concernée peut consentir (art 273.1 (2) a) C cr).

En clair, l’article 273.1 C cr interdit les activités sexuelles lorsqu’un consentement libre, éclairé et continu ne peut être donné par un des partenaires ou les deux. Ainsi, une personne apte à consentir (par exemple, le conjoint) et une personne souffrant de troubles neurocognitifs, inapte à consentir (par exemple, sa conjointe), ne peuvent participer à des activités sexuelles ensemble au sens du Code criminelFootnote 46. Dans cet exemple, le conjoint doit prendre des mesures raisonnables pour vérifier l’aptitude à consentir de sa partenaire avant et pendant l’activité (art 273.2 b) C cr). Il connaît certainement l’état de santé de sa conjointe et ne devrait pas s’engager dans des contacts intimes si elle ne peut consentir. J’aborde plus loin la période intermédiaire de la maladie, alors que les fluctuations dans l’aptitude à consentir rendent son évaluation complexe. Selon le Code criminel, il n’est pas pertinent, pour déterminer la qualité du consentement, que la personne démente ait pris l’initiative de l’activité. De plus, le simple fait qu’elle ne s’oppose pas ne peut être interprété comme un consentement. Le conjoint en un tel cas pourrait théoriquement être accusé d’agression sexuelle (si toutes les autres conditions sont par ailleurs respectées). Dans le cas où la résidente s’engage dans des activités sexuelles avec un homme qu’elle croit faussement être son conjoint, on peut douter de son aptitude à consentir et de l’existence même de son consentementFootnote 47.

Les tribunaux ont précisé que, lorsqu’une personne souffre de limitations cognitives importantes, le fardeau de son ou sa partenaire est encore plus lourd aux fins de vérification du consentement réel de la personne vulnérableFootnote 48. Le consentement à l’acte sexuel ne peut être donné par la famille ou le représentant légal de la personne (art 273.1 (2) a) C cr). Dans le cas de deux personnes aînées souffrant de troubles neurocognitifs, incapables de consentir (incapables de donner un consentement libre, éclairé et continu) et participant à des activités sexuelles, il est possible que la personne qui a entrepris les avances ne puisse pas être tenue criminellement responsable d’agression sexuelle en raison de ses problèmes neurocognitifs et de son incapacité à comprendre la portée des gestes de nature sexuelle (art 16 C cr)Footnote 49.

Rappelons que les éléments de l’infraction d’agression sexuelle doivent être prouvés selon un fardeau de preuve très élevé, celui de la preuve hors de tout doute raisonnable. L’établissement qui héberge des personnes aînées pourrait être poursuivi en responsabilité contractuelle par la famille ou le tuteur pour ne pas avoir protégé ces dernières (art 1458, 1590 CcQ)Footnote 50.

Le consentement libre, éclairé et continu de la personne doit porter sur des activités de nature sexuelle. La Cour suprême a élaboré un critère pour déterminer le caractère sexuel des gestes posés : « Compte tenu de toutes les circonstances, une personne raisonnable peut-elle percevoir le contexte sexuel ou charnel de l’agression? La partie du corps qui est touchée, la nature du contact, la situation dans laquelle cela s’est produit, les paroles et les gestes qui ont accompagné l’acte, et toutes les autres circonstances entourant la conduite, y compris les menaces avec ou sans emploi de la force, constituent des éléments pertinents. »Footnote 51

En raison du contexte, certains gestes ne portent pas atteinte à l’intégrité sexuelle de la personne. Ainsi, dans un établissement hébergeant des personnes âgées, le fait qu’un.e résident.e prenne les mains d’un.e autre résident.e, lui touche la joue ou les cheveux, sans menace et sans emploi de la force, ne constitue pas pour la personne raisonnable des gestes de nature sexuelle (par comparaison avec toucher les fesses, les seins, les organes génitaux d’une personne sans son consentement). Il est fort possible qu’un baiser déposé sur une joue n’équivaille pas à un acte de nature sexuelle pour la « personne raisonnable » dans notre société, le caractère sexuel de certains gestes étant éminemment culturel. Qu’en est-il du baiser sur la bouche, qui peut être considéré comme un acte de nature sexuelle? Le contexte doit être analyséFootnote 52.

Le fait de toucher les parties génitales ou des zones érogènes ne permet pas de toujours conclure à un geste de nature sexuelleFootnote 53. Ainsi, dans le domaine qui nous intéresse, des préposé.e.s aux bénéficiaires touchent, dans le cadre de soins d’hygiène, des parties du corps des résident.e.s, ce qui peut être associé à des gestes de nature sexuelle. Selon le contexte, ces gestes ne sont pas toujours d’une telle natureFootnote 54.

Comment peut-on appliquer le droit criminel en matière de consentement à l’activité sexuelle tout en respectant le droit à l’expression sexuelle des personnes âgées souffrant de problèmes neurocognitifs et les protéger?

Comment respecter le droit à l’expression sexuelle lorsque l’aptitude à consentir disparaît?

Par une approche binaire (soit la personne manifeste un consentement libre, éclairé et continu, soit elle n’est pas en mesure de consentir), les exigences du Code criminel en matière de consentement à l’activité sexuelle mettent un terme à toute expression sexuelle d’une personne avec un tiers apte et consentant, dès que des problèmes neurocognitifs affectent l’aptitude à comprendre et à consentir, entre autres chez les personnes âgées. Les dispositions du Code criminel nient ainsi le droit à l’expression sexuelle de ces personnesFootnote 55. Ces normes législatives peuvent-elles être réinterprétées en tenant compte du contexte particulier qui nous intéresse ici?

Dans son avis Amour, sexualité et démence en milieu d’hébergement Footnote 56, le Comité national d’éthique sur le vieillissement (CNEV) propose une approche en trois temps pour tenir compte de l’évolution de la perte cognitive et de l’aptitude à consentir des personnes âgées aux activités sexuelles. Voyons ces trois étapes et les réflexions qu’elles suscitent en regard du droit criminel et du droit civil.

Au début de la maladie, la personne aînée est en mesure de consentir à des activités sexuelles avec son ou sa conjoint.e, un nouveau conjoint.e ou toute autre personne consentante. Ainsi, son droit à l’expression sexuelle et à l’intimité doit être respecté. Le milieu d’hébergement doit faciliter l’exercice de ce droit par des mesures d’accommodementFootnote 57. Le consentement à l’activité sexuelle ne se présume jamais (art 273.1 (2) e) C cr); il doit donc être évalué par l’équipe soignante si des événements qui peuvent menacer la sécurité de la personne et des autres résident.e.s suscitent un doute.

Lors d’un deuxième temps – qualifié de « zone grise » par le Comité en raison de l’évolution de la maladie – une analyse des circonstances s’avère nécessaire. Les auteur.e.s de l’avis suggèrent d’évaluer l’aptitude à consentir de la personne aînée au-delà de la parole et de prendre en compte d’autres formes d’expression du consentement, comme le comportement, qui sont mieux adaptés aux troubles neurocognitifs, ce que permet le Code criminel (art 273.1 (2) d) C cr). Ils reconnaissent aussi la difficulté pour le personnel soignant de déterminer l’aptitude à consentir qui fluctue.

Au troisième temps de la maladie, la personne aînée n’est plus en mesure de consentir à des activités sexuelles, avec son ou sa conjoint.e ou toute autre personne. Ces activités sont interdites selon le Code criminel. Le Comité admet l’impératif du consentementFootnote 58. Il reconnaît aussi que l’exigence du consentement libre et éclairé exprimé avant et pendant l’activité sexuelle nie en quelque sorte l’exercice d’un droit fondamental pour ces personnes aînéesFootnote 59.

Par ailleurs, le Comité distingue les activités sexuelles des signes de tendresse et d’affectionFootnote 60. Des personnes aînées peuvent être inaptes à consentir à des activités sexuelles au sens du Code criminel, mais être en mesure de donner un assentiment (une façon d’indiquer sa volonté sans être en mesure de donner un consentement au sens juridiqueFootnote 61) à des signes de tendresse comme se tenir les mains, caresser la joue de l’autre personne, en raison du peu de risque impliqué, de l’absence d’abus dans la relation et des avantages pour les personnes aînées concernéesFootnote 62. Selon la définition jurisprudentielle donnée plus haut aux gestes de nature sexuelleFootnote 63, la personne raisonnable analysant le contexte ne percevrait pas dans ces signes d’affection des comportements de nature sexuelle.

Comme d’autres études citées ici portant sur le respect des droits sexuels de personnes présentant des problèmes neurocognitifs, les auteur.e.s de l’Avis veulent respecter ce droit tout en protégeant les personnes aînées. Il ne faut pas voir une opposition entre le respect des droits sexuels des personnes vivant avec des problèmes cognitifs et leur protection. Une meilleure protection permet en fait d’assurer leur expression sexuelle. Ainsi, les personnes âgées seront mieux protégées contre les agressions sexuelles si elles peuvent se confier au personnel et savent qu’elles seront écoutéesFootnote 64.

Rappelons que, dans la première phase de la maladie, alors que la personne aînée est en mesure de comprendre et de consentir à des activités sexuelles, la famille n’a pas à être informée ou à donner une autorisation quelconque. Comme la personne aînée est apte et capable de manifester un consentement libre, éclairé et continu, il n’est pas question de « consentement substitué » (comme en matière de consentement aux soins de santé, art 15 CcQ) à l’activité sexuelle. D’ailleurs, il ne peut jamais y avoir de consentement substitué dans ce domaine, que la personne soit apte ou inapte (art 273.1 (2) a) C cr). Dans la première phase de la maladie, le droit à la vie privée de la personne aînée doit être respecté.

La confusion s’installe souvent chez les familles au sujet du consentement aux activités sexuelles de la personne aînée. Comme elles participent à l’élaboration du plan de soins de santé avec l’équipe soignante, elles pensent aussi qu’elles doivent donner leur autorisation pour l’activité sexuelle de la personne aînéeFootnote 65. Les familles sont souvent très réticentes à toute forme d’intimité de leur parent âgé avec une autre personneFootnote 66. Leur position est fréquemment fondée sur leur vision personnelle de la sexualité chez les personnes âgées ou encore sur leur interprétation des valeurs de leur parent avant l’apparition des troubles neurocognitifs. Les familles s’attendent à ce que le personnel de la résidence surveille et intervienne pour empêcher ces activités. Même si l’autorisation de la famille à l’activité sexuelle d’une personne âgée n’est jamais requise sur le plan juridique, des auteur.e.s recommandent d’informer la famille afin qu’elle comprenne et accepte la situationFootnote 67. On pourrait voir dans cette recommandation une atteinte au droit à la vie privée et un consentement substitué dans les faits (qui se manifeste souvent par un refus de la part de la famille). La personne âgée devrait elle-même décider d’en informer ou non sa famille.

Au troisième temps de la maladie, alors que la personne aînée n’est plus en mesure de consentir à l’activité sexuelle au sens du Code criminel, il ne peut être question de consentement substitué, donné par une autre personne comme un membre de sa famille, l’établissement ou le ou la représentant.e légal.e (comme pour les soins de santé, art 15 CcQ). Une personne ne peut prévoir dans son mandat de protection que son mandataire prenne les décisions au sujet de ses activités sexuelles, qu’il s’agisse de les permettre ou de les interdireFootnote 68.

Les enjeux du consentement à l’activité sexuelle se présentent avec plus d’acuité dans la « zone grise », une période pendant laquelle la maladie fluctue ainsi que l’aptitude à consentir. Les auteur.e.s de l’Avis affirment : « Peut-être faudra-t-il faire cette évaluation [du consentement] au ressenti, au contextuel, en se basant sur la manière d’être de la personne dans le présent de sa maladie et avec autrui, sur sa communication non verbale, sur ses émotions, sur les impressions qu’elle reflète à l’observateur, et la comprendre à demi-motFootnote 69 ».

Au lieu de l’approche binaire (la plaignante a exprimé un consentement libre et éclairé ou elle n’a pas consenti) imposée par le Code criminelFootnote 70, de nombreux auteur.e.s considèrent que le consentement devrait plutôt être appréhendé à partir d’un ensemble de critères, tels que les risques ou les abus potentiels, la nature des gestes posés, les avantages pour les résident.e.s et l’évolution de leur aptitude à consentir à l’activité sexuelleFootnote 71 :

To illustrate, the decision to engage in cuddling or kissing involves a low level of risk, whereas the decision to engage in intercourse has decidedly higher risk and potential for harm, especially when considering the relevant physical, cognitive, and emotional limitations of the older adult. The potential benefits to the resident are considered, and it is understood that intimate interactions that provide physical and psychological benefits for older adults and buffer against lonelinessFootnote 72.

Ces dernières auteures proposent d’aller plus loin. Même si le ou la résident.e après évaluation est inapte à consentir, mais intéressé.e à des rencontres sexuelles, l’équipe soignante, la famille (si possible) et le ou la résident.e (si possible) pourrait déterminer si cette activité intime favorise l’intérêt supérieur des deux parties concernéesFootnote 73. L’équipe pourrait trouver des moyens pour éviter des effets négatifs.

Bien que l’évaluation du consentement à partir d’un faisceau d’éléments semble plus respectueuse du droit à la vie privée et à l’expression sexuelle des personnes âgées, parce qu’elle semble plus flexible et qu’elle cherche tout indice de consentement, elle s’éloigne des objectifs législatifs de respect de l’autonomie décisionnelle et d’égalité du Code criminel en matière de consentement à l’activité sexuelleFootnote 74. Le consentement peut se manifester tant verbalement que par le comportement (art 273.1 (2) d) C cr), mais il ne peut devenir un critère parmi d’autres. Le plus haut tribunal canadien est clair à ce sujet : le consentement est au cœur de l’infraction d’agression sexuelleFootnote 75. Les facteurs de risques ou d’abus potentiels, et les avantages pour les résident.e.s ne font pas partie de l’évaluation du consentement au sens du Code criminel. Ils servent plutôt à assurer la sécurité de la personne, ce qui demeure une obligation du lieu d’hébergementFootnote 76. Le consentement à l’activité sexuelle, évalué à partir du point de vue de la plaignante et non d’impressions d’observateurs externes, doit d’abord exister avant que soit considérée l’évaluation des risques. Sinon, on pourrait très bien soutenir qu’à la troisième étape de la maladie, même si la personne ne présente pas d’aptitude à consentir, elle pourrait participer à des activités sexuelles dans la mesure où elle ne subirait aucun risque et en retirerait des avantages.

Il pourrait être argumenté que les critères imposés par le Code criminel pour déterminer la validité du consentement à l’activité sexuelle s’avèrent trop exigeants et non adaptés aux réalités des personnes souffrant de problèmes neurocognitifs. Selon certains auteur.e.sFootnote 77, la notion de consentement devrait être remplacée par celle d’assentiment, qui est moins exigeante, et utilisée entre autres pour des projets de recherche dans le domaine de la santé menés avec des mineurs incapables de consentir sur le plan juridique, mais en mesure de comprendre en fonction de leur âgeFootnote 78. Cette notion, qui ne remplace pas celle de consentementFootnote 79, a été récupérée en gériatrie pour obtenir la participation du patient souffrant de maladies neurocognitives dans la prise de décision avec sa famille au sujet de soins de santé. Molinari et ses collègues précisent bien les objectifs de la notion d’assentiment auprès des patient.e.s souffrant de problèmes neurocognitifs :

Geriatric assent exhorts health professionals to evaluate remaining capacity for autonomous decision-making, to identify the patient’s longstanding values and preferences, to assess plans of care in terms of safety and independence in light of the patient’s values and preferences, to protect remaining autonomy, and to cultivate the professional virtues of steadiness, self-effacement, and self‑sacrifice. In implementing geriatric assent, it is therefore important to keep in mind that many patients with dementia can still express their values and preferences, even when they remain irreversibly below thresholds of decision-making autonomy Footnote 80 .

Selon l’état du droit canadien, la notion d’assentiment ne peut être retenue comme un équivalent à la notion de consentement. D’abord, le Code criminel ne connaît pas cette notion. On mesure les risques à vouloir édulcorer le critère de consentement libre, éclairé et continu exigé en matière d’activité sexuelle, compte tenu de la vulnérabilité des personnes âgées et de la réalité des violences sexuelles. Rappelons que, parmi les personnes âgées, ce sont surtout les femmes qui subissent ces violencesFootnote 81. Ensuite, la notion d’assentiment ne peut être appliquée en matière de consentement à des activités sexuelles, parce qu’il ne peut y avoir de consentement substitué dans ce domaine. En effet, l’assentiment, notion issue de la bioéthique, est utilisé pour le consentement aux soins de santé de la personne inapte, domaine où le consentement substitué est possible.

Dans l’évaluation du comportement, les auteur.e.s de l’Avis suggèrent « quelques indices de consentement dans un comportement qu’il faut savoir lire ». Ils citent Teresa AnuzaFootnote 82 qui propose « de déceler si la personne a eu du plaisir suite à l’expérience, regarder si elle est encore contente quelque temps après, si elle a peur de son partenaire ou si au contraire elle recherche sa proximité et semble vouloir répéter l’expérience ».

On peut interpréter de deux façons le comportement mentionné à l’article 273.1 (2) a) C cr comme manifestation du consentement à l’activité sexuelle. D’abord, la notion de comportement peut être appréhendée de façon large et inclure le langage du corps, comme Mme Anuza le décrit dans le paragraphe précédent. Les comportements constatés après l’acte pourraient témoigner de ce qui s’est passé pendant l’acte et pourraient respecter le Code criminel. Ou, selon une seconde interprétation de l’article 273.1 C cr, on peut refuser d’utiliser ce comportement évalué après l’acte comme indice de consentement pour des raisons de sécurité. Cet élément de preuve constaté après l’acte constitue l’un des éléments à prendre en considération parmi un faisceau de faits, mais ne peut cependant pas remplacer l’absence de consentement a priori et pendant l’activité sexuelle.

La position plus flexible demande en quelque sorte que des règles juridiques différentes encadrent les activités sexuelles des personnes aînées souffrant de maladies neurocognitives et vivant en établissement, afin de ne pas taire leur expression sexuelle. À mon avis, ce serait nier le phénomène des agressions sexuelles en CHSLDFootnote 83. Même si cette violence est difficile à chiffrer, les agressions sexuelles envers les femmes aînées vivant en établissement ou ailleurs existentFootnote 84. En raison de leur grande vulnérabilité, ces femmes ne sont pas toujours en mesure de demander de l’aide ou de porter plainte. Ces règles juridiques différentes (ou une interprétation plus large des critères du Code criminel) s’appliqueraientelles lorsqu’il s’agit d’un ou une employé.e en relation d’autorité qui pose des gestes de nature sexuelle à l’égard d’un.e résident.e? L’article 273.1 (2) c) C cr affirme clairement que la relation d’abus vicie le consentement de la victime de l’agression. Sans nier le droit à l’expression sexuelle des personnes aînées, il faut trouver un juste équilibre entre le respect de l’expression sexuelle et la protectionFootnote 85. Comme les règles en matière d’agression sexuelle ont été élaborées pour protéger l’intégrité, la dignité et le droit à l’égalité des victimesFootnote 86, une interprétation trop large du terme « comportement » à l’article 273.1 (2) a) C cr permettrait de diluer l’objectif législatif. Pour reprendre l’expression du CNEV dans son avis, cette interprétation créerait en fait des zones gris pâle, gris moyen, gris foncé, à l’image du caractère évolutif de la maladie, zones très difficiles à découper.

Les critères servant à évaluer l’aptitude à donner un consentement libre, éclairé et continu à des activités sexuelles peuvent être rapprochés de ceux en matière médicale et testamentaire. À mon avis, la qualité du consentement dans ces trois domaines doit répondre aux mêmes standards très élevés et on ne peut les distinguer. Ils concernent le respect de l’autonomie et de la dignité de la personneFootnote 87. Évidemment, le fardeau de la preuve n’est pas le même et le consentement en matière d’agressions sexuelles ne peut être implicite, tandis que, dans le domaine médical et testamentaire, la capacité d’exercer ses droits constitue la règle, à moins de preuve contraire (art 2 et 154 CcQ). L’objectif ici est de démontrer que, dans ces deux derniers domaines, les critères sont stricts, ils se rapprochent de ceux imposés par le Code criminel et ils ne sont pas remis en question.

Les règles en matière de consentement substitué aux soins de santé ont été élaborées par la Cour d’appel dans l’affaire Institut Philippe-Pinel de Montréal c G (A) Footnote 88. Elles sont résumées ainsi : (i) La personne comprend-elle la nature de la maladie pour laquelle un traitement lui est proposé? (ii) La personne comprend-elle la nature et le but du traitement? (iii) La personne saisit-elle les risques et les avantages du traitement si elle le subit? (iv) La personne comprend-elle les risques de ne pas subir le traitement? (v) La capacité de comprendre de la personne est-elle « affectée » par sa maladie? Si la personne ne respecte pas ces conditions, elle n’est pas en mesure de consentir aux soins de santé et une autre personne, son représentant ou son tuteur (art 15 et 258 CcQ), prendra la décision. Rappelons qu’il ne peut y avoir de consentement substitué à l’activité sexuelle.

En matière testamentaire, les tribunaux ont élaboré des critères très stricts pour s’assurer que le testateur jouit de sa pleine aptitude. Le tribunal doit rechercher les éléments suivants chez le testateur : « Connaître sans qu’on l’aide la nature et l’étendue des biens qu’il possède; connaître et comprendre la nature de l’acte qu’il s’apprête à effectuer; connaître (et se souvenir) le nom et l’identité des personnes désignées; connaître la nature de la relation qu’il a avec elles; comprendre et se souvenir de tous ces faits; être capable de comprendre les relations de tous ces facteurs entre eux; avoir la capacité de se souvenir de la décision qu’il a priseFootnote 89 ». Le Tribunal doit aussi analyser les critères suivants : « la capacité de communiquer sur le contenu de la décision à prendre; une indication claire et répétée de préférence quant à la décision à prendre; la capacité de comprendre et de peser les options quant au choix à prendre; la capacité de rationaliser ce choixFootnote 90 ». Ces critères ont aussi été utilisés en matière de consentement au mariageFootnote 91. Il est difficile de justifier des critères plus exigeants en matière d’aptitude à tester et à se marier (et pour le consentement aux soins médicauxFootnote 92) que dans le domaine du consentement à l’activité sexuelleFootnote 93, à moins de voir dans l’exigence de l’aptitude à tester et à se marier les seules conséquences patrimoniales qui mériteraient une plus grande protection du consentement, ou de comparer le consentement à l’activité sexuelle au choix du dessert que des personnes souffrant de troubles neurocognitifs peuvent encore exercerFootnote 94.

La liberté de se marier ou nonFootnote 95, tout comme celle d’avoir ou non des activités sexuelles, et le respect de l’intégrité de la personne en matière de soins de santé font partie des libertés fondamentales et doivent être protégées de la même façon. On ne peut retenir l’argument de la « zone grise », qui permettrait le recours à d’autres critères que ceux du Code criminel pour évaluer le consentement libre, éclairé et continu, au moment où l’aptitude de la personne âgée à consentir fluctue.

Comme le Code criminel exige une participation consentie à l’activité sexuelle, les équipes soignantes qui voient à la sécurité et au bien-être des résident.e.s doivent évaluer leur aptitude à consentir. Pour faciliter leur tâcheFootnote 96, des modèles d’évaluation de l’aptitude à consentir à l’activité sexuelle ont été proposés. Ils ressemblent aux critères élaborés en matière d’aptitude à consentir aux soins de santé qui visent à vérifier si la personne comprend la nature et les conséquences de la maladie et du traitement proposéFootnote 97.

Résumant les divers modèles d’évaluation du consentementFootnote 98 et se basant sur l’état du droit criminel canadien, Hayter propose les critères suivants : une connaissance de base des parties du corps; une aptitude à distinguer entre un toucher sexuel et non sexuel; une aptitude à distinguer entre un toucher sexuel abusif et non abusif; une aptitude à exprimer un choix; une aptitude à résister à l’exploitation; une aptitude à refuser verbalement ou autrement une proposition sexuelle; une aptitude à reconnaître le refus du partenaire et d’arrêter l’activité; une aptitude à comprendre qu’il y a des lieux et des moments pour tenir des activités intimesFootnote 99. L’aptitude à consentir doit être évaluée régulièrement et non une fois pour toutes.

Comme le soutient le CNEV, il ne suffit pas de reconnaître le droit à la sexualité des personnes aînées; des mesures concrètes doivent être adoptées et appliquéesFootnote 100. L’absence d’intimité et de confidentialité que vivent les résident.e.s dans un milieu où tout est contrôlé rend l’expression de l’activité sexuelle souvent illusoire. Des informations sur la santé de la personne sont facilement accessibles; le personnel entre souvent dans la chambre sans frapper; le seul espace privé de la personne aînée se résume parfois à un lit. Des mesures concrètes doivent être prévues. On pense à mettre une affiche sur la porte des chambres « Ne pas déranger », frapper à la porte et attendre d’être invité avant d’entrer; respecter la confidentialité de la personne; offrir des chambres individuelles, des salles de bain privées, des lits à deux places; prévoir des chambres d’intimité; manifester une plus grande sensibilité à la conjugalité (lorsque l’un des conjoints est hébergé et l’autre ne l’est pas). La formation du personnel et la collaboration d’équipes soignantes spécialisées doivent aussi être organisées.

Les établissements doivent adopter des codes d’éthique qui mentionnent le droit à la confidentialité et à la discrétion des résident.e.sFootnote 101, ainsi que des politiques et des protocoles pour répondre aux besoins sexuels et affectifs des personnes aînées, afin d’éviter que les situations se règlent de façon discrétionnaire ou selon les valeurs ou les préjugés des intervenant.e.s ou des prochesFootnote 102.

Les exigences du Code criminel en matière de consentement à l’activité sexuelle, bien résumées par le slogan « sans oui, c’est non », peuvent sembler inadaptées à des personnes qui ne peuvent communiquer ou consentir en raison de problèmes neurocognitifs. Cependant, la violence systémique dont sont victimes les femmes touche aussi les femmes âgées et handicapées. Le Plan d’action gouvernemental pour contrer la maltraitance envers les personnes aînées 2022-2027 mentionne l’importance de respecter l’expression sexuelle des personnes aînéesFootnote 103. Mais il reconnaît aussi un autre enjeu majeur : « La violence sexuelle à l’égard des femmes âgées doit retenir plus d’attention des chercheurs et des décideurs. Il est nécessaire d’enrayer les croyances selon lesquelles les personnes âgées vivent peu ce type de violence, parce qu’elles sont perçues comme « asexuelles », « postsexuelles » et non attirantes, alors que la violence sexuelle n’a rien à voir avec l’attirance »Footnote 104.

Conclusion

Mon étude a analysé un enjeu majeur en matière de lutte contre la maltraitance envers les personnes aînées : comment reconnaître et respecter à la fois le droit à l’expression sexuelle des personnes aînées vivant en établissement et leur droit à la sécurité, lorsque des maladies neurocognitives altèrent leur aptitude à consentir? Ma réflexion est inspirée d’un cadre théorique féministe qui prend en compte la violence sexuelle dont sont victimes les femmes, entre autres les femmes âgées et handicapées, dont les facultés neurocognitives sont très diminuées. Le travail des groupes féministes et des parlementaires a placé le consentement véritable de la plaignante au cœur de l’infraction d’agression sexuelle. Aucune interprétation s’éloignant du consentement libre, éclairé et continu ne peut être acceptée au risque d’ouvrir une brèche dans ce domaine.

Si la personne aînée est en mesure de consentir à des contacts sexuels selon les critères imposés par le Code criminel et qu’elle comprend que son partenaire aussi doit être en mesure de consentir, la famille et le personnel soignant doivent respecter sa décision. Par ailleurs, lorsque les capacités neurocognitives de la personne sont très diminuées par la maladie et que l’obtention du consentement n’est plus possible, cette personne ne peut s’engager dans des activités sexuelles avec autrui. L’assentiment, l’évaluation des risques, une analyse large du comportement ne peuvent remplacer le consentement libre, éclairé et continu tel qu’imposé par le Code criminel. La complexité de la question se présente davantage dans la phase intermédiaire de la maladie, lorsque les capacités cognitives de la personne aînée fluctuent. Outre la formation du personnel soignant sur les besoins sexuels et affectifs des personnes aînées et l’aménagement des lieux pour permettre une réelle intimité, les équipes soignantes doivent être en mesure d’évaluer l’aptitude à consentir des résident.e.s. Si la maltraitance sexuelle chez les personnes aînées doit être combattue afin de permettre leur expression sexuelle, l’intégrité et la dignité des femmes aînées doivent aussi être respectées.

References

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2 Connolly, Voir Marie-Therese, Breckman, Risa, Callahan, Jean, Lachs, Mark, Ramsey-Klawsnik, Hollly et Solomon, Joy, « The Sexual Revolution’s Last Frontier: How Silence about Sex Undermines Health, Well-being, and Safety in Old Age », Generations 36, no 3 (2012) : 4352 Google Scholar; Rowntree, Margaret, « “Comfortable in my own skin”: A New Form of Sexual Freedom for Ageing Baby Boomers », Journal of Aging Studies 31 (2014) : 150–58CrossRefGoogle ScholarPubMed.

3 Une littérature importante analyse les barrières à l’expression sexuelle des personnes âgées vivant en établissement : voir Bauer et al., « I always look under the bed for a man », supra note 1; Lester, Paula E., Kohen, Izchak, Steanacci, Richard G. et Feuerman, Martin, « Sex in Nursing Homes: A Survey of Nursing Home Policies Governing Resident Sexual Activity », Journal of the American Medical Directors Association 17, no 1 (2016) : 7174 CrossRefGoogle ScholarPubMed; Simpson, Paul, Horne, Maria, Brown, Laura J. E., Wilson, Christine Brown, Dickinson, Tommy et Torkington, Kate, « Old(er) Care Home Residents and Sexual/Intimate Citizenship », Ageing and Society 37, no 2 (2017) : 243–65CrossRefGoogle ScholarPubMed; Ward, Richard, Vass, Antony Andreas, Aggarwal, Neeru, Garfield, Cydonie et Cybyk, Beau, « A Kiss is still a Kiss? The Construction of Sexuality in Dementia Care », Dementia 4 (2005) : 4972 CrossRefGoogle Scholar; Villar, Feliciano, Serrat, Rodrigo, Celdrán, Montserrat, Fabà, Josep, Martínez, Teresa et Twisk, Jos, « “I do it my way”: Long-term Care Staff’s Perceptions of Residents’ Sexual Needs and Suggestions for Improvement in their Management », European Journal of Ageing 17, no 2 (2020) : 197205 CrossRefGoogle ScholarPubMed; Villar, Feliciano, Celdrán, Montserrat, Serrat, Rodrigo, Fabà, Josep, et Martínez, Teresa, « Staff’s Reactions Towards Partnered Sexual Expressions Involving People with Dementia Living in Long-term Care Facilities », Journal of Advanced Nursing 74 (2018) : 1189–98CrossRefGoogle ScholarPubMed.

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5 RLRQ c L-6.3, art 21.

6 RLRQ c L-6.3, art 2, 3° « maltraitance ». La jurisprudence a reconnu l’exploitation sexuelle comme étant incluse dans la protection offerte par l’article 48 de la Charte des droits et libertés de la personne, RLRQ c C-12: voir Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CA et un autre) c Comeau, 2020 QCTDP 11 aux para 54-60.

7 Québec, ministère de la Santé et des Services sociaux, Plan d’action gouvernemental pour contrer la maltraitance envers les personnes aînées 2022-2027 – Reconnaître et agir ensemble, 2022 à la p. 10.

8 Infra note 16.

9 Dans les centres hospitaliers de soins de longue durée (CHSLD), 85 % des résident.e.s souffrent de problèmes cognitifs. Voir Québec, Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS), État des connaissances : Qualité du milieu de vie en centre d’hébergement pour les personnes âgées en perte d’autonomie, Rapport rédigé par Isabelle David, INESSS, 2018 à la p. 3.

10 Code criminel, LRC 1985, c C-46 [C cr].

11 Træen, Voir Bente et Villar, Feliciano, « Sexual Well‑being is part of Aging Well », European Journal of Ageing 17 (2020) : 135–38CrossRefGoogle ScholarPubMed.

12 Voir entre autres Syme, Maggie L. et Steele, Debora, « Sexual Consent Capacity Assessment with Older Adults », Archives of Clinical Neuropsychology 31 (2016) : 495505 CrossRefGoogle ScholarPubMed.

13 Sur la richesse et la variété des courants féministes, Eloit, voir Ilana « Sujet politique des féminismes » dans Encyclopédie critique du genre, dir. Rennes, Juliette (Paris : La Découverte, 2021) aux pp. 738–47 CrossRefGoogle Scholar; Blais, Mélissa, Fortin-Pellerin, Laurence, Lampron, Ève-Marie et Pagé, Geneviève « Pour éviter de se noyer dans la (troisième) vague : réflexions sur l’histoire et l’actualité du féminisme radical », Recherches féministes 20, no 2 (2007) : 141–62CrossRefGoogle Scholar.

14 Conscient de l’invisibilité des femmes aînées et de la violence qu’elles subissent, le gouvernement du Québec veut appliquer une analyse différenciée selon les sexes pour tenir compte de leurs besoins. Voir Québec, Plan d’action gouvernemental pour contrer la maltraitance envers les personnes aînées 2022-2027 – Reconnaître et agir ensemble, supra note 7. Voir aussi sur ce phénomène, Grant, Isabel et Benedet, Janine, « The Sexual Assault of Older Women: Criminal Justice Responses in Canada », Revue de droit de McGill 62 (2016) : 4178 Google Scholar; Myrna Dawson, Loin de l’«âge d’or »: Féminicides de femmes âgées au Canada (Centre for the Study of Social and Legal Responses to Violence, Université de Guelph : Ontario, 2021); Bianca Fileborn, « Sexual Assault and Justice for Older Women: A Critical Review of the Literature », Trauma Violence Abuse (2016) : 496-507.

15 R c Ewanchuk, [1999] 1 RCS 330. Voir aussi Québec, Rebâtir la confiance, Rapport du comité d’experts sur l’accompagnement des victimes d’agressions sexuelles et de violence conjugale coprésidé par Elizabeth Corte et Julie Desrosiers, décembre 2020 [Rebâtir la confiance].

16 Voir entre autres Déclaration des droits sexuels de l’IPPF (International Planned Parenthood Federation), 2008; Association mondiale de santé sexuelle, Déclaration des droits sexuels, 2014; Alain Giami, « De l’émancipation à l’institutionnalisation : santé sexuelle et droits sexuels », Genre, sexualité & société 15 (2016) : 1-14; Rosalind P. Petchesky, « Sexual Rights: Inventing a Concept, Mapping an International Practice », dans Framing the Sexual Subject. The Politics of Gender, Sexuality, and Power, dir. Richard Parker, Regina Maria Barbosa et Peter Aggleton (Berkeley : University of California Press, 2000), 81-103; World Health Organization, Sexual Health, Human Rights and the Law, 2015.

17 Partie 1 de la Loi constitutionnelle de 1982 [annexe B de la Loi sur le Canada (1982, R-U, c 11). Le Canada est signataire de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, 13 décembre 2006, (2008) 2515 RTNU 3 (no 44910). En lien avec le droit à l’expression sexuelle, cette convention reconnaît entre autres le droit à la santé, le droit à la liberté et à la sécurité des personnes, la protection contre l’exploitation, la violence et les abus.

18 Voir World Health Organization, Defining Sexual Health: Report of a Technical Consultation on Sexual Health (Geneva, 2006), à la p. 5.

19 Voir Christine Morin, « Éléments de réflexion sur un droit des aînés », dans Droit des aînés, dir. Christine Morin (Montréal : Yvon Blais/Thomson Reuters, 2020), 1-22. Pour une analyse sociologique de la catégorie d’âge, Rennes, voir Juliette, « Déplier la catégorie d’âge. Âge civil, étape de la vie et vieillissement corporel dans les préjudices liés à l’“âge” », Revue française de sociologie 60, no 2 (2019) : 257–84CrossRefGoogle Scholar.

20 Selon l’Institut national de la statistique du Québec, en 2020, l’espérance de vie à la naissance s’établit à 80,6 ans chez les hommes et à 84,0 ans chez les femmes. En 2021, près de 54 % des personnes de 65 ans et plus sont des femmes. Cette proportion s’élève à 64 % chez les femmes de 85 ans et plus. Voir Institut de la statistique du Québec, Perspectives démographiques du Québec et des régions, 2016-2066, édition 2019 à la p. 10.

21 Le terme « ageism », construit par analogie avec les termes « racism » et « sexism », a été proposé par Butler, Robert N., « Age-Ism: Another Form of Bigotry », The Gerontologist 9 (1969) : 243–46CrossRefGoogle ScholarPubMed. On peut définir ce concept comme un traitement différencié défavorable ou une exclusion, en raison de l’âge réel ou perçu, ce qui maintient les préjugés et les stéréotypes envers les personnes qui sont catégorisées comme étant trop vieilles et incapables, et ce qui nie leur pleine participation sociale.

22 Calasanti, Voir Toni, Slevin, Kathleen F. et King, Neal, « Ageism and Feminism: From “Et Cetera” to Center », National Women’s Studies Association Journal 18, no 1 (2006) : 1330 Google Scholar; Calasanti, Toni, « On the Intersections of Age, Gender and Sexualities in Research on Aging », dans Intersections of Ageing, Gender and Sexualities, Multidisciplinary International Perspectives, dir. King, Andrew, Almack, Kathryn et Jones, Rebecca L. (Bristol : Policy Press, 2019), à la p. 13 CrossRefGoogle Scholar; Marc Pichard, « Droit, grand âge et genre : questions de méthode », La Revue des droits de l’homme 17 (2020) (en ligne).

23 Troubles neurocognitifs : « un ensemble de symptômes causés par des perturbations spécifiques du fonctionnement sain du cerveau ». Société Alzheimer du Canada, Les troubles neurocognitifs au Canada : Quelle direction à lavenir?, 2022 à la p. 14.

24 Voir ibid, Encadré 1, Types de troubles neurocognitifs à la p. 15.

25 Sur la différence entre aptitude et capacité, Moore, voir Benoit « Considérations terminologiques sur les notions d’aptitude et de capacité », dans La personne humaine, entre autonomie et vulnérabilité – Mélanges en l’honneur d’Édith Deleury, dir. Landheer-Cieslak, Christelle et Langevin, Louise (Montréal : Yvon Blais, 2015), 389 à la p. 396Google Scholar.

26 Goubau, Voir Dominique, Le droit des personnes physiques, 7e éd. (Montréal : Yvon Blais, 2022), à la p. 521 au no 451Google Scholar.

27 R c JA, 2011 CSC 28 aux para 25 et s., opinion de la juge McLachlin.

28 Ibid au para 36.

29 Les bases de données suivantes ont été consultées à la bibliothèque de l’Université Laval : SOQUIJ, CanLII, Cairn, Hein-on-line, PubMed, EBSCOhost (Social Gerontology, MEDLINE, SocINDEX), PsyInfo, Scopus. Les mots-clés suivants ont été utilisés : troubles neurocognitifs / neurocognitive disorders, activité sexuelle / sexual activity, agression sexuelle / sexual assault, consentement / consent, femmes / women.

30 R c JA, supra note 27 au para 1.

31 R c Kirkpatrick, 2022 CSC 33 au para 30. Desrosiers, Voir Julie et Beausoleil-Allard, Geneviève, L’agression sexuelle en droit canadien, 2e éd. (Montréal : Yvon Blais, 2017), aux pp. 67 à 105Google Scholar; Stuart, DonCanadian Criminal Law: A Treatise, 8e éd. (Toronto : Thomson Reuters, 2020), aux pp. 642 et sGoogle Scholar.

32 Voir R c Kirkpatrick, ibid aux para 30 et s, opinion de la juge Martin.

33 Voir R c Kirkpatrick, ibid au para 62.

34 Voir R c Kirkpatrick, ibid au para 63.

35 Voir Rebâtir la confiance, supra note 15.

36 R c Mabior, 2012 CSC 47.

37 R c Kirkpatrick, supra note 31 au para 51.

38 R c Ewanchuk, supra note 15 au para 26, opinion du juge Major; R c Barton, 2019 CSC 33 au para 88; R c Kirkpatrick, supra note 31 au para 50.

39 Voir R c JA, supra note 27 au para 31.

40 Voir R c JA, supra note 27 aux para 25 et s.

41 Benedet, Voir Janine et Grant, Isabel, « Hearing the Sexual Assault Complaints of Women with Mental Disabilities: Consent, Capacity, and Mistaken Belief », Revue de droit de McGill 52, no 2 (2007) : 243–89Google Scholar; Isabel Grant, Janine Benedet, « Sexual Assault and the Meaning of Power and Authority for Women with Mental Disabilities », Feminist Legal Studies 22 (2014) : 131–54Google Scholar; Janine Benedet et Isabel Grant, « A Situational Approach to Incapacity and Mental Disability in Sexual Assault Law », Ottawa Law Review 43 (2011-2012) : 1-27.

42 Voir R c Barton, supra note 38 aux para 101 et s.

43 Voir sur le droit canadien : Emily Hayter, « Sexual Expression in Long-Term Care Homes: Capacity & Consent », Windsor Review of Legal and Social Issues 35 (2014) : 54-86; McSherry, Bernadette et Somerville, Margaret A., « Sexual Activity among Institutionalized Persons in Need of Special Care », Windsor Yearbook of Access to Justice 16 (1998) : 90 Google Scholar; Julia Brassolotto, L. Howard et A. Manduca-Barone, « Sexual Expression in Alberta’s Continuing Care Homes: Capacity, Consent, and Co-decision-making », Canadian Journal on Aging 40, no 1 (2021) : 156-65; S. J. Welch et G. W. Clements, « Development of a Policy on Sexuality for Hospitalized Chronic Psychiatric Patients », Canadian Journal of Psychiatry 41 no 5 (1996) : 273-79.

44 « En résumé, pour que la plaignante soit capable de donner un consentement subjectif à l’activité sexuelle, elle doit être capable de comprendre quatre choses : 1. l’acte physique; 2. le fait que l’acte est de nature sexuelle; 3. l’identité précise de son ou ses partenaires; 4. le fait qu’elle peut refuser de participer à l’activité sexuelle. » R c GF, 2021 CSC 20 au para 57.

45 Le Code criminel interdit les actes indécents (art 173.1 C cr) et la nudité en public (art 174 C cr). Les activités sexuelles doivent se dérouler en privé.

46 Le fait qu’ils soient mariés ne donne évidemment pas un droit au mari sur le corps de sa femme. Le viol conjugal est criminalisé depuis 1983 (art 278 C cr).

47 Voir R c Hutchison, 2014 CSC 19 au para 57.

48 Voir entre autres R v R (R), 2001 CANLII 3091 (Ont CA). Voir les deux articles de Benedet et Grant, supra note 41.

49 Un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux serait prononcé. Voir PL et Responsable du Centre de santé et de services sociaux A, 2011 QCTAQ 03358; SL et Responsable du CSSS A, 2016 QCTAQ 02745.

50 Nous n’avons pas trouvé de décisions rapportées au Québec sur ce sujet précis. Des centres hospitaliers ont été tenus responsables pour le manque de surveillance de leurs employés qui a entraîné la mort ou un préjudice grave à des patients. Voir, entre autres, Cloutier c Centre Hospitalier de l’Université Laval (CHUL), EYB 1986-79087 (CS). Par ailleurs, un milieu d’hébergement ne pourrait pas dans ses politiques internes interdire l’activité sexuelle entre les résident.e.s au nom de la vulnérabilité de ceux-ci, de leur droit à l’intimité, à la sécurité et à la tranquillité (ou pour éviter toute poursuite en responsabilité civile). Il s’agirait d’une violation de leurs droits à l’expression sexuelle.

Des employés ont été congédiés pour agressions sexuelles commises sur des résidentes aînées. Voir R c Deschênes, 2020 QCCQ 3073; R c Poupart, SOQUIJ AZ-51338737, conf 2010 QCCA 1956; R c Tardif, 2014 QCCQ 1608; Syndicat des employés du pavillon Le Normandie d’Alma (CSN) et Centre Le Jeannois (M Michel Lavoie), SOQUIJ AZ-50182611 (TA); Syndicat des employés et employées du Centre hospitalier de Buckingham et Centre hospitalier de Buckingham (M M… B…), SOQUIJ AZ-00145038 (TA); Syndicat des travailleuses et travailleurs de l’Hôpital général juif – CSN et Hôpital général juif (KS), SOQUIJ AZ-51025053; Syndicat québécois des employées et employés de service – local 298 (FTQ) et Groupe Champlain inc. (Gatineau) (Berthin Lungwe Wa Runyenera), 2020 QCTA 46.

51 R c Chase, [1987] 2 RCS 293 au para 11. Dans l’arrêt Hutchison, supra note 47 au para 54, la Cour suprême donne des exemples de différents actes physiques de nature sexuelle, comme « les baisers, les caresses, le sexe oral, les rapports sexuels ou l’utilisation d’accessoires sexuels ». Voir Desrosiers et Beausoleil-Allard, supra note 31 aux pp. 56 à 67.

52 À comparer avec R c Poupart, supra note 50 : L’intimé est préposé aux bénéficiaires dans un hôpital où la victime âgée de 77 ans a été admise pour des problèmes gastriques. Il entre dans la chambre de sa victime; il dit être physiothérapeute. Il passe alors ses mains sur le corps de sa victime, avant de les glisser sous sa jaquette pour lui prendre les seins, puis lui pincer les mamelons. Il quitte la chambre après avoir embrassé sa victime sur la bouche et l’avoir prévenue d’une autre visite le lendemain.

53 Voir par exemple R c Begué, 2021 QCCQ 4602 (attouchements aux seins de patientes dans un contexte thérapeutique. Les touchers n’étaient pas d’ordre sexuel selon le contexte. Acquittement.); R c Yanon, 2021 QCCQ 7295 (un infirmier auxiliaire qui a touché l’anus d’une patiente sous prétexte d’évaluer son problème médical, ce qui n’était pas dans ses fonctions, est déclaré coupable d’agression sexuelle).

54 Voir R v Ashley-Pryce, 2004 BCCA 531; R v Brown, 2013 ONCJ 203. Des employés qui prodiguent des soins d’hygiène ont été accusés d’agressions sexuelles sur des femmes souffrant d’Alzheimer et ont été congédiés. Dans ces affaires de congédiement, le fardeau de preuve qui incombe à l’employeur en matière disciplinaire est celui de la prépondérance des probabilités. Voir Syndicat des travailleuses et travailleurs de l’Hôpital général juif – CSN et Hôpital général juif (KS), supra note 50 (congédiement annulé); Syndicat québécois des employées et employés de service, section locale 298 (FTQ) et Centre d’hébergement Saint-Vincent-Marie (Mireille Davilmar), 2016 QCTA 396 (congédiement annulé). Syndicat des employés du pavillon Le Normandie d’Alma (CSN) et Centre Le Jeannois (M Michel Lavoie), SOQUIJ AZ-50182611 (TA).

55 Voir entre autres Andria Bianchi, « Sexual Consent, Aging and Dementia », dans The Routledge Handbook of Philosophy of Sex and Sexuality, dir. Brian D. Earp, Clare Chambers et Lori Watson (New York : Routledge, 2022), à la p. 286. Voir aussi Andria Bianchi, « Autonomy, Sexuality, and Intellectual Disability », Social Philosophy Today 32 (2016) : 107-21; Alisa Grigorovich et Pia Kontos, « A Critical Rethinking of Sexuality and Dementia, A Prolegomenon to Future Work in Critical Dementia Studies and Critical Disability Studies », dans Earp et al., Philosophy of Sex and Sexuality, à la p. 85.

56 Québec, Comité national d’éthique sur le vieillissement (CNEV), Amour, sexualité et démence en milieu d’hébergement : réflexions pour guider les pratiques (Québec : ministère de la Santé et des Services sociaux, 2021) [Avis].

57 On peut se demander jusqu’où va la reconnaissance du droit à l’expression sexuelle des personnes aînées et l’obligation des milieux d’hébergement d’apporter leur soutien à l’exercice de ce droit. Ainsi, le milieu d’hébergement doit-il faciliter l’accès à des sites de pornographie sur internet, fournir des revues pornographiques et des jouets, installer les deux partenaires dans un lit, contacter des escortes? Bien que la prostitution ne constitue pas un crime au Canada, l’achat de services sexuels l’est. Le client, peu importe son âge ou son lieu de résidence, peut être accusé et condamné pour l’obtention de services sexuels moyennant rétribution (art 286.1 C cr). L’assistance sexuelle pour personnes aînées ou handicapées constitue un crime au Canada. Un lieu d’hébergement, par ses employés, ne peut acheter des services sexuels pour ses résidents ou permettre qu’une personne vienne offrir de tels services tarifés dans ces lieux. Les employés se trouvent à commettre un acte criminel au sens de l’article 286.1 C cr (Obtention de services sexuels moyennant rétribution). Pour une réflexion sur le droit français, voir Jean-Baptiste Thierry, « Libre propos sur l’assistance sexuelle au sujet de la liberté sexuelle des personnes handicapées », dans Le sexe et la norme, dir. Natalie Deffains et Bruno Py (Nancy : Éditions universitaires de Lorraine, 2011), à la p. 301; Vignon-Barrault, supra note 1.

58 Avis, supra note 56 à la p. 45.

59 Avis, ibid à la p. 33.

60 Avis, ibid à la p. 48.

61 Sur l’assentiment, voir infra note 78.

62 Syme et Steele rapportent la solution trouvée par un psychologue pour répondre aux besoins d’une vieille dame souffrant d’Alzheimer et qui faisait des avances sexuelles à d’autres résidents et qui n’avait pas la capacité de comprendre ou de consentir. Il a proposé qu’on lui touche les mains par des manucures, qu’on lui fasse des massages dans le dos, qu’on lui donne des caresses et qu’on la fasse participer à plus d’activités sociales. Voir Syme et Steele, supra note 12 à la p. 502.

63 Voir R c Chase, supra note 51.

64 Voir Care Quality Commission, Promoting Sexual Safety through Empowerment: A Review of Sexual Safety and the Support of People’s Sexuality in Adult Social Care (R.-U. : 2020).

65 Voir Avis, supra note 56 à la p. 49.

66 Voir Michael Bauer, R Nay, L Tarzia, D. Fetherstonhaugh, D. Wellman et E. Beattie, « “We need to know what’s going on”: Views of Family Members toward the Sexual Expression of People with Dementia in Residential Aged Care », Dementia 13, no 5 (2013) : 571-85.

67 Voir Bauer et al., ibid. Voir aussi Legal Issues in Residential Care: An Advocate’s Manual, 2014 (wikibook sur le droit en Colombie-Britannique, section sur consentement et activité sexuelle) : https://wiki.clicklaw.bc.ca/index.php?title=Other_Consent_Issues_in_Residential_Care#Intimacy_and_Sexual_Relations)

68 Code civil du Québec, art 2131 et 2166 à 2174. Il en va de même pour le mariage et le divorce : seule la personne concernée peut prendre cette décision. Voir Droit de la famille – 221625, 2022 QCCS 3531; Dominique Goubau, « Les actes qui exigent le consentement personnel du majeur protégé », dans Service de la formation continue du Barreau du Québec, La protection des personnes vulnérables, vol. 378 (Cowansville : Yvon Blais, 2014), à la p. 3. La loi britannique le précise clairement : Mental Capacity Act 2005, art 27(1)(b). Voir Victor M. Aziz et Philip Slack, « Sexuality, Sexual Expression in Long-Term Care and the Law », BJPsych Advances (2021) : 1-10. Le droit est au même effet dans les provinces canadiennes de common law. Voir par exemple en Colombie-Britannique : Representation Agreement Act, RSBC 1996, c 405, art 7; en Ontario : Loi de 1992 sur la prise de décisions au nom d’autrui, LO 1992, c 30, art 43 et s; en Alberta : Adult Guardianship and Trusteeship Act, SA 2008, c A-4.2, art 87.

69 Avis, supra note 56 à la p. 41.

70 Voir Ewanchuk, supra note 15 au para 31.

71 La littérature dans ce domaine est riche et les auteur.e.s s’accordent pour défendre le droit à l’expression sexuelle des personne souffrant de problèmes neurocognitifs. Voir entre autres Syme et Steele, supra note 12; P. A. Lichtenberg, « Sexuality and Physical Intimacy in Long-term Care », Occupational Therapy in Health Care 28 (2014) : 42-50. Voir aussi ces directives qui considèrent que, d’un point de vue éthique, les personnes inaptes devraient pouvoir participer à des activités sexuelles : Vancouver Coastal Health. Supporting Sexual Health and Intimacy in Care Facilities: Guidelines for Supporting Adults Living in Long-term Care Facilities and Group Homes in British Columbia, 2009, Canada. Nous ne savons pas si ces directives ont été appliquées ou mises à jour depuis 2009. Elles ne semblent pas respecter cependant l’état du droit en Colombie-Britannique. Voir Legal Issues in Residential Care: An Advocate’s Manual, supra note 67. Voir Representation Agreement Act, RSBC 1996, c 405, art 7.

72 Syme et Steele, supra note 12, à la p. 500. Ces auteures ne tiennent pas compte du droit criminel canadien. Voir le guide suivant qui propose de meilleures pratiques qui respectent le Code criminel canadien en matière de consentement à l’activité sexuelle et qui adopte l’approche du continuum. Il suggère une analyse en cinq catégories de comportements sexuels selon leur degré de risques et la capacité de consentement des personnes âgées : Lanark, Leeds and Grenville Long-Term Care Working Group, A Best Practice Approach to Intimacy and Sexuality: A Guide to Practice and Resource Tools for Assessment and Documentation (Ontario : juin 2007).

73 Voir aussi James M. Wilkins, « More than Capacity: Alternatives for Sexual Decision Making for Individuals with Dementia », Gerontologist 55, no 7 (2015) : 716-23, à la p. 721. Cet auteur ne tient pas compte du droit criminel canadien et du fait qu’il ne peut y avoir de consentement substitué pour des activités sexuelles.

74 Voir R c JA, supra note 27 au para 1.

75 Voir Kirkpatrick, supra note 31 aux para 30 et s.

76 Voir Loi sur les services de santé et les services sociaux, RLRQ c S-4.2, art 3, 100; art 1458 CcQ.

77 C’est ce que semble suggérer Wilkins, supra note 73, aux pp. 720 et 721. Voir aussi Lieslot Mahieu, Luc Anckaert et Chris Gastmans, « Intimacy and Sexuality in Institutionalized Dementia Care: Clinical Ethical Considerations », Health Care Analysis 25, no 1 (2017) : 52-71, à la p. 63. Dans son avis, supra note 56 à la p. 46, le CNEV propose l’assentiment des personnes impliquées, au lieu du consentement, pour les relations affectives. « Cette position permet en effet de maintenir l’équilibre entre la réponse aux besoins affectifs et la sécurité des personnes ».

78 On peut définir ainsi l’assentiment : « An interactive process between a researcher and child participant involving developmentally appropriate disclosure, discussion, and understanding wherein the child freely affirms their agreement to participate in a proposed research study but has insufficient maturity or lack of legal authority to meet the formal and legal expectations of informed consent » (Alan R. Tait et Michael E. Geisser, « Development of a Consensus Operational Definition of Child Assent for Research », BMC Medical Ethics 18, no 41 (2017) : article 41, à la p. 3).

79 Voir Amanda Sibley, Mark Sheehan et Andrew J. Pollard, « Assent is not Consent », Journal of Medical Ethics 38, no 1 (2012) : 3 à la p. 3; V. Molinari, L. B. McCullough, J. H. Coverdale et R. Workman, « Principles and Practice of Geriatric Assent », Aging & Mental Health 10, no 1 (2006) : 48-54 à la p. 52.

80 Molinari et al., ibid à la p. 48.

81 Supra note 14.

82 « L’intimité et la sexualité des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer », Conférence du 4 décembre 2019, dans le cadre de la série de Conférences mémorables 2019, Fédération québécoise des Sociétés Alzheimer à la p. 45 de l’Avis, supra note 56.

83 Les journaux rapportent des cas d’agressions sexuelles sur des femmes âgées résidentes de CHSLD. Voir Mayssa Farah, « Une femme de 86 ans violée par un intrus dans un HLM », La Presse, 1er novembre 2022. Nous n’avons pas trouvé les décisions des tribunaux criminels ou civils dans ces dossiers : Louis-Samuel Perron, « CHSLD Laurendeau : Un employé accusé d’avoir agressé sexuellement une résidente », La Presse, 10 juin 2022; Kathleen Frenette, « Septuagénaire accusé : le CHSLD Chanoine-Audet au courant des agressions sexuelles », Le Journal de Québec, 18 août 2016; Mélissa Gagnon, « La police de Saguenay enquête sur une agression sexuelle en CHSLD », Radio-Canada, 17 octobre 2019; Jean-François Guillet, « Un résident violent sème la terreur au CHSLD Horace-Boivin », La Voix de l’Est, 9 décembre 2019; Laura Lévesque, « Du CHSLD à la prison pour un octogénaire », Le Quotidien, 25 août 2020; Mélanie Noël, « Pavillon Argyll : des dames âgées victimes d’attouchements », La Tribune, 15 août 2015; René-Charles Quirion, « 15 mois de prison pour l’agression sexuelle d’une aînée à Youville », La Tribune, 19 octobre 2020.

84 Voir les affaires citées à la note 50 et à la note 83. Voir aussi Institut de la statistique du Québec, Enquête sur la maltraitance envers les personnes aînées au Québec 2019. Portrait de la maltraitance vécue à domicile, par Lucie Gingras (Québec, 2020). Voir le rapport du Protecteur du citoyen de 2015-2016, qui dénonce l’inaction d’un CHSLD à la suite d’une trentaine d’attouchements sexuels par un résident sur d’autres résidentes. L’établissement a failli à sa responsabilité de protéger la sécurité et l’intégrité physique de sa clientèle. Québec, Protecteur du citoyen, Rapport annuel d’activités 2015-2016, Québec, 2016.

85 Voir Syme et Steele, supra note 12, à la p. 496.

86 Voir Kirkpatrick, supra note 31.

87 Certains auteur.e.s ont affirmé que le consentement en matière médicale, financière ou légale est différent du consentement à l’activité sexuelle, parce qu’il y a peu de risques impliqués en matière sexuelle. La décision de s’engager dans des relations intimes se rapprocherait davantage de celle de choisir un dessert que de consentir à un soin de santé. Voir Laura Tarzia, Deirdre Fetherstonhaugh et Michael Bauer, « Dementia, Sexuality and Consent in Residential Aged Care Facilities », Journal of Medical Ethics 38, no 10 (2012) : 609-13, à la p. 610; Wilkins, supra note 73 à la p. 720.

88 Institut Philippe-Pinel de Montréal c G (A), [1994] RJQ 2523 (CA) à la p. 2533. Cette affaire reprend les « critères de la Nouvelle-Écosse » établis dans la Hospitals Act, RSNS 1989, c 208, art 52(2), 52(2A) et 52(2B) de la Nouvelle-Écosse. Voir Robert P. Kouri et Suzanne Philips-Nootens, L’intégrité de la personne et le consentement aux soins, 4e éd. (Montréal : Yvon Blais, 2017), aux para 221 et s; Dominique Goubau, Le droit des personnes physiques, 7e éd. (Montréal : Yvon Blais, 2022), aux pp. 138-51.

89 Baba c Succession de Naumovich, 2020 QCCS 1163 au para 43, citée dans Droit de la famille — 21535, 2021 QCCS 1305 au para 118.

90 Baba c Succession de Naumovich, ibid au para 44.

91 Voir Droit de la famille — 21535, supra note 89.

92 Voir Institut Philippe-Pinel de Montréal, supra note 88.

93 Dans une demande d’ouverture de régime de protection, la Cour supérieure de l’Ontario s’est penchée sur la capacité à consentir à l’activité sexuelle. Mme Salzman, une dame de 93 ans, avait des relations sexuelles avec un homme 30 ans plus jeune qu’elle. Mme Salzman avait subi une crise cardiaque, une fracture à la hanche, elle souffrait de démence et avait eu un cancer du côlon. Elle recevait des soins et était sous supervision 24 heures sur 24. Elle ne pouvait voir à ses besoins d’hygiène et se nourrir de façon convenable. Elle avait des relations annales avec l’homme en question, ce qui n’était pas recommandé compte tenu de son cancer du côlon. Il semblait aussi y avoir de l’abus de la part de l’homme. La demande d’ouverture de régime de protection était fondée sur ce fait parce que Mme Salzman voulait poursuivre cette relation. « The real difficulty, therefore, was not that she failed to appreciate reasonably foreseeable consequences, but that she was cognitively unable to do so. » Salzman v Salzman, 2011 ONSC 3555; Hayter, supra note 43 à la p. 67.

94 Exemple mentionné dans Wilkins, supra note 73 à la p. 719.

95 Voir R c Morgentaler, [1988] 1 RCS 30, opinion de la juge Wilson, au para 234.

96 Sur les difficultés à évaluer l’inaptitude des personnes, voir Dominique Giroux, « L’évaluation clinique de l’inaptitude par les professionnels de la santé et des services sociaux : un défi comportant de nombreux enjeux! » dans Service de la formation continue, Barreau du Québec, vol. 393, La protection des personnes vulnérables (2015) (Montréal : Yvon Blais, 2015), à la p. 37; Yara Barrak et Nicholas Léger-Riopel, « Peut-on concilier réalité et enjeux éthiques, juridiques et scientifiques dans le processus d’évaluation médicale de l’inaptitude des personnes âgées? », Revue du Barreau canadien 95 (2017) : 413-57.

97 Voir Institut Philippe-Pinel de Montréal, supra note 88.

98 Voir Wilkins, supra note 73; Lichtenberg, supra note 71; P. A. Lichtenberg et D. M. Strzepek, « Assessments of Institutionalized Dementia Patients’ Competencies to Participate in Intimate Relationships », The Gerontologist 30, no 1 (1990) : 117-20; Syme et Steele, supra note 12.

99 Hayter, supra note 43, à la p. 72; R c GF, supra note 44 au para 57.

100 Avis, supra note 56 aux pp. 56 et s.

101 Règlement sur la certification des résidences privées pour aînés, RLRQ c S-4.2, r 0.01, art 36.

102 Québec, ministère de la Santé et des Services sociaux, Politique-cadre de lutte contre la maltraitance envers les aînés et toute autre personne majeure en situation de vulnérabilité, 2020.

103 Supra note 7 à la p. 32.

104 Ibid à la p. 32.