Published online by Cambridge University Press: 05 February 2009
Cette contribution se situe dans le sillage d'un précédent travail qui portait sur les sources non-littéraires, archéologiques et épigraphiques, du judéo-christianisme ancien.1
1 Mimouni, S. C., Étude des sources non-littéraires (archéologiques et épigraphiques) dites judéo-chrétiennes. Bilan et perspectives (Mémoire de; 'Ecole Biblique et Archéologique Française de Jérusalem; Jérusalem, 1988).Google Scholar
2 La bibliographie sur le judéo-christianisme ancien est immense. On peut se reporter à Manns, F., Bibliographie du judéo-christianisme (Jérusalem, 1979)Google Scholar (cette compilation est étrangement organisée et contient de nombreuses erreurs; elle n'en demeure pas moins pratique). On trouve d'excellentes présentations (avec problématiques) du judéo-christianisme ancien dans: Munck, J., ‘Jewish Christianity in Post-Apostolic Times’, NTS 6 (1960) 103–16CrossRefGoogle Scholar; Strecker, G., ‘Zum Problem des Judenchristentums’, dans W. Bauer, Rechtgläubigkeit und Ketzerei im ältesten Christentum (Tübingen, 1964 [Nachtrag]) 243–314Google Scholar; Simon, M., ‘Problèmes du judéo-christianisme’, dans Aspects du judéo-christianisme (Paris, 1965) 1–17Google Scholar; Klijn, A. F. J., ‘The Study of Jewish Christianity’, NTS 20 (1973) 419–31CrossRefGoogle Scholar; Cirillo, L., ‘Il problema del giudeo-cristianesimo’, dans J. Daniélou, La theologia del giudeo-cristianesimo (Bologne, 1974) vii–lxvGoogle Scholar; Simon, M., ‘Reflexions sur le judéo-christianisme’, dans Christianity, Judaism and other Greco-Roman Cults (Leyde, 1975) vol. 2, 53–76.Google Scholar
On ne doit pas oublier de rappeler l'utile recueil de Reinink, A. F. J. Klijn-G. J., Patristic Evidence for Jewish-Christian Sects (Leyde, 1973).Google Scholar
Dernièrement parus, on peut signaler les titres suivants: Strecker, G., Art. ‘Judenchristentum’, TRE 17 (1988) 310–25Google Scholar; Pritz, R., Nazarene Jewish Community. From the End of the New Testament Period until Its Disappearance in the 4th Century (Jérusalem, 1988).Google Scholar
3 En effet, l'existence et l'influence du judèo-christianisme ne peuvent changer de manière fondamentale le discours théologique; en revanche, elles doivent modifier le discours historique qui s'est bien souvent contenté d'enregistrer la disparition des judéo-chrétiens soit à la suite de la révolte juive de 70, soit à la suite de celle de 135. C'est la position, par exemple, Munck, de J., NTS 6 (1960) 103–16CrossRefGoogle Scholar qui considère que le judéo-christianisme n'a pas survécu à la ruine de Jérusalem de 70, parce que la migration à Pella de la communauté primitive n'a pas, selon lui, de réalité historique. Voir aussi, Munck, J., ‘Primitive Jewish Christianity and Later Jewish Christianity: Continuation or Rupture?’, dans Aspects du judéo-christianisme (Strasbourg, 1965) 77–91.Google Scholar
4 Cf. Gutwirth, J., Les jud´o-chrétiens d'aujourd'hui (Paris, 1987).Google Scholar
5 Cf. J. Gutwirth, Judéo-chrétiens, 23–4: un certain groupe de judéo-chrétiens se dénomme ‘chrétiens hébraïques’ en référence aux premiers disciples ‘hébreux’ de Jésus à Jérusalem.
6 Cf. J. Gutwirth, Judéo-chrétiens, 41.
7 Cf. J. Gutwirth, Judéo-chrétiens, 23–4 et 41: chrétiens hébraïques et croyants juifs ont ensuite adopt´ le nom de juifs messianiques.
8 L'auteur constate que la même ambiguité règne à propos de la qualification des locaux (on utilise aussi bien le terme temple que le mot synagogue) et des chefs spirituels (on dit pasteur, ministre et même rabbin) (cf. J. Gutwirth, Judéo-chrétiens, 47, n. 46).
9 Cf. Baur, F. C., ‘Die Christuspartei in der korinthischen Gemeinde, der Gegensatz des petrinischen und paulinischen Christenthums in der ältesten Kirche, der Apostel Paulus in Rom’, Tubinger Zeitschrift für Theologie 4 (1831) 61–206.Google Scholar
10 On trouve un excellent exposé sur cette question dans Benoit, M. Simon-A., Le judaïsme et le christianisme antique (Paris, 1968) 258–74Google Scholar. Les auteurs soulignent avec raison les problèmes que soulève une définition du phénomène jud´o-chrétien qui est difficile à délimiter. Ils ajoutent alors que cette difficulté vient du fait que le premier des deux termes qui définissent le judéo-christianisme peut être entendu soit en un sens ethnique, soit en un sens religieux. C'est là, il est vrai, toute l'ambiguïté du problème. On reviendra plus loin sur cette question précise.
11 Hort, F. J. A., Judaistic Christianity (Cambridge, 1894).Google Scholar
12 Hoennicker, G., Das Judenchristentum im ersten and zweiten Jahrhundert (Berlin, 1908).Google Scholar
13 Simon, M., Verus Israel. Étude sur les relations entre chrétiens et juifs dans l'empire romain (135–425) (Paris, 1948; 2nd ed. 1964).Google Scholar
14 Longenecker, R. N., The Christology of Early Jewish Christianity (Londres, 1970).Google Scholar
15 Schoeps, H. J., Theologie und Geschichte des Judenchristentums (Tübingen, 1949).Google Scholar
16 Daniélou, J., Théologie du judéo-christianisme (Paris, 1958).Google Scholar
17 Cf. J. Daniélou, ibid., 17–21.
18 Cf. Goppelt, L., Christentum und Judentum im ersten und zweiten Jahrhundert (Gütersloh, 1954).Google Scholar
19 Cf. J. Daniélou, Théologie, 19.
20 Cf. Daniélou, J., Art. ‘Judéo-Christianisme’, in Encyclopaedia Universalis 9 (Paris, 1968) 552 (= vol. 10, p. 697 de l'édition de 1985).Google Scholar
On peut aussi se reporter à l'article de Daniélou, J., ‘Une vision nouvelle des origines chrétiennes, le judéo-christianisme’, in Études 1967, 595–608Google Scholar, où l'auteur reconnaît jusqu'à quatre acceptions du judéo-christianisme (l'Église de Jérusalem; des chrétiens observants; le christianisme syriaque; des chrétiens non-observants).
21 Cf. Malina, B. J., ‘Jewish Christianity or Christian Judaism: Toward a Hypothetical Definition’, JSJ 7 (1976) 46–57.Google Scholar
22 Cf. Riegel, S. K., ‘Jewish Christianity: Definitions and Terminology’, NTS 24 (1978) 410–15.CrossRefGoogle Scholar
23 Cf. Murray, R., ‘Jews, Hebrews and Christians: Some Needed Distinctions’, NT 24 (1982) 194–208.Google Scholar
24 C'est la position d'Epiphane: dans Panarion 29, les nazoréens sont considérés comme des marginaux mais non pas comme des hétérodoxes, à la différence des ébionites (Pan. 30) et des elkasaïtes (Pan. 53 – consacré aus sampséens = elkasaïtes).
25 Les tenants de l'École de Tübingen, à qui les recherches sur le judéo-christianisme doivent tant, se sont bien longtemps opposés à une telle distinction. Leur raisonnement est le suivant: l'expérience et la réflexion de Paul lui ont fait concevoir la divinité du Christ, cette croyance s'est imposée à l'Église de la Gentilité, mais n'a pas été partagée par l'Église de la Circoncision. On trouve une excellente présentation de la problématique de l'École de Tübingen dans l'article de Klijn, A. F. J., dans NTS 20 (1973) 419–31.CrossRefGoogle Scholar
26 Cf. Grego, I., I giudeo-cristiani nel IV secolo. Reazione-Influssi (Jérusalem, 1982).Google Scholar
27 Cf. I Grego, Giudeo-cristiani, 113–32.
28 Il s'agit des lettres 2 (PG 46, col. 1010–15) et 3 (PG 46, col. 1015–24); voir l'édition de Pasquali, G., Gregorii Nyssenii Opera 8.2 (Leyde, 1959) 13–27.Google Scholar
29 L'argumentation d'l. Grego repose sur le fait que les conceptions de certains chrétiens de Jérusalem sont typiquement judéo-chrétienes, notamment: ils se prétendent purs, ils appellent Marie mère d'un homme, ils croient à la reconstruction du temple et à la restauration des sacrifices.
30 Cf. Maraval, P., ‘La lettre 3 de Grégoire de Nysse dans le débat christologique’, RevSR 61 (1987) 73–89Google Scholar. Pour cet auteur, la lettre de Grégoire concerne des apollinaristes et non pas des judéo-chrétiens.
31 Cf. par exemple, Origène, In Matth. 16.12. Il en est de même pour Justin, voir Dialogue 47.2, où on rencontre l'expression ‘les juifs qui croient au Christ’.
32 Les autres témoignages d'Eusèbe de Césarée sont les suivants: HE 3.24.6; 3.27.6; 5.8.2.
33 Cf. Eusèbe de Césarée HE 4.5.1–4.
34 On peut toutefois dire que le problème principal, posé par ce texte, peut se résumer ainsi: Eusèbe compte quinze évêques, y compris Jacques et Siméon; or ce dernier mourut martyr en 105; il ne resterait donc qu'une trentaine d'années pour loger ses treize successeurs, ce qui ferait supposer une durée moyenne d'épiscopat inférieure à trois ans pour chacun d'eux. Les critiques ont apporté diverses solutions à cette question (cf. Marchal, L., Art. ‘Judéo-Chrétiens’, in DThC 8.2 [1925] col. 1695–97)Google Scholar. L. Duchesne (dans Les Origines Chr´tiennes, Cours lithographié, p. 140), en son temps, avait déjà posé les diverses problématiques: ‘La première liste d'Eusèbe ne peut être acceptée que si l'on admet une durée plus longue, ou plusieurs évêques simultanés.’ On voit mal pourquoi la communauté judéo-chrétienne aurait eu simultanément plusieurs évêques; il faut done admettre une durée de vie plus longue pour les successeurs de Jacques et Siméon et par conséquence l'existence d'une double hiéarchie épiscopale à Jérusalem après 135: l'une judéo-chrétienne, l'autre pagano-chrétienne. Cette derniére conjecture est d'autant plus fondée qu'elle se trouve corroborée par la présence d'une synagogue judéo-chrétienne sur le Mont Sion jusqu'au IVème siècle (cf. infra, p. 174, n. 52).
35 Cf. Eusèbe de Césarée HE 3.25.5.
36 Cf. Eusèbe de Césarée HE 3.27.4; 3.39.16; 4.22.8.
37 Cf. Eusèbe de Césarée HE 4.22.8.
38 Cf. Klostermann, E., Eusebius Werke. Das Onomastikon der biblischen Ortsnamen (Leipzig, 1904) 172–3.Google Scholar
39 Cf. Origène In Matth. 16.12.
40 En Dém. Ev. 3.5 (PG 22, col. 221), on peut lire: ‘… il y eut aussi à Jérusalem une très grande église du Christ, formée de juifs, jusqu'au temps du siège qui eut lieu sous Hadrien. On rapporte que les dernier évêques qui se succédèrent en ce lieu furent des juifs dont la mémoire des habitants a retenu les noms jusqu'à ce jour.’
41 Les études sur Cyrille de Jérusalem et les judéo-chrétiens sont rares. On peut toutefois renvoyer à Grego, I., ‘San Cirillo di Gerusalemme nel XVI centenario della sua morte’, dans Commission des pèlerinages chrétiens, Annales 1988 (Jérusalem, 1988) 27–31Google Scholar. Cette courte contribution, qui repose sur les travaux de B. Bagatti et d'E. Testa, n'lapporte en fait rien de nouveau sur la question.
42 Cf. Rupp, W. C. Reischl-J., Cyrilli Hierosolymarum archiepiscopi opera quae supersunt omnia, Tome 1 (Munich, 1848) 278–9Google Scholar (pour le texte grec) et Bouvet, J., Saint Cyrille de Jérusalem. Catéchèses baptismales et mystagogiques (Namur, 1962) 199Google Scholar (pour la traduction française).
44 Le verbe καταδέχομαι signifie recevoir, accueillir, accepter; il a un sens positif, on pourrait meme lui donner le sens de reconnaître.
45 Au sujet de cette distinction entre messianité et divinité, cf. Flusser, D., ‘Thesen zur Entstehung des Christentums aus Judentum’, dans Bemerkungen eines Juden zur christlichen Theologie (Munich, 1984) 94–102Google Scholar. Jésus se qualifiait de Fils de Dieu et de Fils d'Homme. Pour Paul, Jésus était un être surhumain; pour les pauliniens, il était un être divin. A la fin du Ier siècle, Jésus était considéré comme Dieu.
46 Au sujet de cette catéchèse cf. S. Janeras, ‘A propos de la catéchèse XIVème de Cyrille de Jérusalem’, Ecclesia Orans 3 (1986) 307–18.
47 Cf. Rupp, W. C. Reischl-J., op. cit., Tome 2 (Munich, 1860) 126–9Google Scholar (pour le texte grec) et J. Bouvet, op. cit., 311 (pour la traduction française).
48 Un groupe religieux nouveau a bien souvent la tendance à marginaliser les anciens coreligionnaires qui refusent la nouvelle croyance.
49 Duval, Y.-M., Jérôme: Commentaire sur Jonas (Paris, 1985) 73Google Scholar, reconnaît que dans l'œuvre de Jérôme, par exemple, il y a une différence entre ludaei, iudaicus et Hebraei, hebraicus, les premiers sont d'ordinaire beaucoup plus négatifs. Cet auteur ne va pas audelà de la simple constatation, d'ailleurs, pour lui, les premiers remplacent bien souvent les seconds.
50 Cf. W. C. Reischl-J. Rupp, op. cit, Tome 2, 208–11 (pour le texte grec) et J. Bouvet, op. cit., 362–3 (pour la traduction française sensiblement modifiée).
51 Cf. Epiphane de Salamine De mensuris et ponderibus 14 (PG 43, 260–1). Le texte d'Epiphane est corroboré par le récit du l'Anonyme de Bordeaux où on peut lire: ‘A l'intérieur, dans l'enceinte de Sion, se voit le lieu où David eut un palais et où existèrent sept synagogues dont une seule a subsisté: les autres sont labourées et ensemencées comme l'a dit le prophète Isaïe.’
52 Des fouilles archéologiques ont révélé l'existence d'un batîment dont la destination pourrait être synagogale et l'attribution judéo-chrétienne. A ce sujet, cf. S. C. Mimouni, Etude (n. 1), 36–40. Et en tout dernier lieu, un article paru dans la suite de ce travail: Puech, E., ‘La synagogue judéo-chrétienne du Mont Sion’, MDB 57 (1989) 18–19.Google Scholar
53 Cf. Renoux, C., ‘Hierosolymitana’, Archiv für Liturgiewissenschaft 23 (1981) 16Google Scholar. Pour cet auteur, l'enseignement des catéchumenes, durant le carême, avait lieu toujours au Martyrium (selon les dispositions rubricales dont témoigne Egérie [cf. c. 46]). L'argument n'est pas déterminant.
54 Cf. Janeras, S., Ecclesia Orans 3 (1986) 310Google Scholar. L'auteur, pour soutenir son affirmation, ne propose aucun argument.
55 Il ne faut pas confondre les nazoréens de la notice 29 avec les nasaréens de la notice 18, qui seraient des juifs baptistes.
56 Il faut noter qu'Epiphane distingue les nazoréens des ébionites à qui ils consacre la longue notice 30. Cette distinction est problématique; l'évêque connaît très mal les deux groupes qu'il situe non seulement dans les mêmes aires géographiques mais aussi dans les mêmes villes. Ce qui en soi, quoique possible, est suspect.
57 Cf. Pan. 29, 7, 5–6. Cf. Holl, K., Epiphanius (Ancoratus und Panarion) 1: Ancoratus und Panarion Haer. 1–33 (Leipzig, 1915) 329–30Google Scholar (pour le texte grecque) et Williams, F., The Panarion of Epiphanius of Salamis. Book I (Sects. l–46) (Leyde, 1987) 117–18Google Scholar (pour la traduction anglaise).
58 D'un point de vue philologique, il n'y a aucune différence entre le grec nazoréen et le latin nazaréen. L'un et l'autre viennent très probablement de l'hébreu ‘nazir’ et non pas du toponyme ‘Nazareth’. Cette dernière question est fort discutée.
59 Cf. PL 23, col. 643.
60 Il s'agit des textes suivants: Epist. 112.13; In situ 143; De vir. ill. 3; In Matt. 12.13; 13. 53–4; 23.35; 27.9–10; In Amos 1.11–12; In Is. 5.18–19; 8.11–15; 8.19–22; 9.1; 11.1–3; 29.17–21; 30.6–9; 40.9–11; 49.7; 52.4–6; In Is. praef. 65; In Ez. 16.13; 16.16; 18.5–9; Adv. Pel. 3.2; In Hier. 3.14–16.
61 La Lettre 112 de Jérôme répond aux Lettres 56, 67 et 104 d'Augustin. Le moine de Bethléem dénonce la tolérance de l'évêque d'Hippone à l'égard des pratiques judéo-chrétiennes.
62 Cf. Labourt, J., Saint Jérôme. Lettres Tome 6 (Paris, 1956) 31–2Google Scholar. La traduction de Labourt a été légèrement modifiée.
63 Pour ce résident et cet autochtone de Palestine, il ne saurait être question d'observer la Torah et de croire au Christ. Leur antijudaïsme les conduit à une intolérance intransigeante à l'égard des judéo-chrétiens, qu'ils soient orthodoxes (comme les nazoréens) ou hétérodoxes (comme les ébionites et les elkasaïtes).
64 Le texte latin de ce passage est le suivant: … judaei et christiani judaizantes … ut non judaei christiani sed christiani judaei fiant (cf. PL 25, col. 1529 [cf. aussi CC series latina 76A, p. 285]). Une traduction littérale donnerait: ‘… juifs et chrétiens judaïsants … ne sont pas des juifs devenus chrétiens mais des chrétiens devenus juifs’.
65 Cf. Dulaey, M., ‘Jérôme, Victorin de Poetovio et le millénarisme’, in Duval, Y.-M. (éd.), Jérome entre l'Occident et l'Orient. XVIème centenaire du départ de Saint Jérôme de Rome et de son installation à Bethléem. Actes du Colloque de Chantilly (09 1986) (Paris, 1988) 83–98Google Scholar. L'auteur considèere que ce texte de Jérôme, comme bien d'autres, vise les millénaristes, au nombre desquels on trouve des judéo-chrétiens (ébionites et nazaréens).
66 Cf. Jérôme In Is. 40.9–11.
67 Cf. Tertullien Adv. Marc. 4.8. Dans ce texte, on y lit: ‘quos vulgo nazareos nuncupant’. On retrouve exactement la même formulation sous la plume de Jérôme: ‘quos vulgo nazareos nuncupant’ (cf. Lettre 112.13.29). On peut se demander si Jérôme ne reprend pas intentionnellement la formulation de Tertullien, qui ne devait pas être ignorée d'Augustin, afin d'expliciter ‘minaeorum’.
68 Il faut aussi remarquer que dans Evagre le Gaulois (Vème siècle), on trouve l'expression Nazoreum Iudaeum qui semble, dans ce cas, être un sobriquet appliqué à Simon le Juif (cf. Bratke, E., Evagrius. Altercatio legis inter Simonem ludaeum et Theophilum Christianum [CSEL 45; Vienne, 1904] 2Google Scholar). Je voudrais remercier Jean-Louis Feiertag d'avoir attiré mon attention sur ce dernier texte.
68 Il faut remarquer qu'il en est toujours de même. D'autre part, la forme la plus ancienne de la Birkat Ha-Minim se rapportait d'abord aux nazoréens, avant d'être étendue à tous les apostats et hérétiques du judaïsme. A l'origine, le terme hébreu a désigné les judéo-chrétiens, puis il a été utilisé pour appeler les chrétiens en général (comme c'est encore le case actuellement en hébreu moderne).
69 Cf. Augustin, De bapt. 7.1.1; C. Faust. 19.4, 17; C. Cresc. 1.31–6; Epist. 116.16.1; De haer. 9.
70 En Contra Faustum 19.4 et 17, Augustin, dans sa polémique avec l'évêque manichéen Fauste de Milève, utilise le terme ‘nazaréen’ (‘que d'autres appellent symmachiens’ précise-t-il) pour désigner les chrétiens qui pratiquent la circoncision et observent le sabbat (et qui sont visés par l'hérétique). Pour l'évêque d'Hippone, ces nazaréens sont en fait des ébionites; on en trouve confirmation dans sa Lettre 116.16 où on peut lire: ‘l'héresie d'Ébion ou ceux qui communément sont appelés nazaréens’.
71 Cf. Compendium haereticorum fabularum 2.2 (PG 83, col. 289A).
72 Cf. A. F. J. Klijn-G. J. Reinink, Evidence (n. 2), 51–2.
73 Cf. De haeresibus liber 28 et 29 (PG 94, col. 696 A).
74 Cf. Liber scholiorum (CSCO 69, p. 302). Le terme syriaque ne fait que transcrire le terme grec et n'est pas d'un grand secours.
75 Cf. Baldi, D., Enchiridion Locorum Sanctorum (2nd éd.; Jérusalem, 1955) 4, no. 5 (cf. aussi CC series latina 175, 130–1).Google Scholar
76 Ce texte témoigne de diverses traditions: la tradition de la synagogue de Nazareth; la tradition de la maison de Marie à Nazareth sur laquelle une basilique fut construite; la tradition des reliques de Marie (vêtements).
77 Il est en effet difficile de considérer qu'il s'agit là d'une tradition chrétienne à propos des femmes juives de Nazareth. Les traditions chrétiennes palestiniennes sont à cette époque rarement très positives à l'égard des juifs. D'ailleurs l'auteur de ce récit de pèlerinage utilise le terme ‘juif’ et non pas ‘hébreu’ quand il veut parler des adeptes du judaïsme.
78 Cf. Justin Dialogue 47.2; Origène In Matth. 16.12.
79 Cf. Origène Contre Celse 5.61.30.
80 Dans certaines amulettes magiques on rencontre la mention du terme ‘hébreu’ qui pourrait renvoyer à un milieu judéo-chrétien. Voir notamment un papyrus magique publié par Preisendanz, K., Papyri Graecae Magicae, Vol. 1 (Leipzig, 1928) 170–2Google Scholar, où on trouve l'expression ‘Jésus, Dieu des hébreux’ (voir aussi, à la ligne 67, la formule finale: ὁ γὰρ λόγος ἐστιν ἑβραικός).
81 Cf. le texte islamique repéré par Pines, S., The Jewish Christians of the Early Centuries of Christianity according to a New Testament Source (Jérusalem, 1966)Google Scholar (excellent commentaire de Magnin, J. M., ‘Notes sur l'Ébionisme’, in POC 27 [1977] 255–73)Google Scholar. Cf. aussi l'Évangile de Barnabé, œuvre certainement d'origine judéo-chrétienne (ébionite), au caractère christianisant et islamisant accusé, cherchant l'Harmonia Abrahamica, selon l'expression de H. Corbin.
82 A quand remonte pour les autorités romaines la séparation entre judaïsme et christianisme? La question est délicate. A Rome, la persécution de Néron offre un point de repère commode. En Palestine, on dispose de peu d'éléments antérieurs au début du IVème siècle. Il y a bien sûr l'enquête de Domitien au sujet des descendants de Jésus (cf. Eusèbe de Césarée HE 3.19–20); mais celle-ci semble, aux yeux des romains, viser des juifs et non des Chrétiens.
83 Cf. Bagatti, B., L'Église de la Circoncision (Jérusalem, 1965).Google Scholar
84 En effet, les judéo-chrétiens, sur le plan ethnique, étaient attachés au judaïsme, alors que sur le plan religieux, ils l'étaient au christianisme. Il ne faut pas oublier que les juifs se sentent attachés au judaïsme non seulement sur le plan religieux, mais aussi sur le plan ethnique. Il faut d'ailleurs prendre le terme ‘ethnique’ dans le sens de λαός et non pas dans celui de ἔθνος. C'est l'appartenance au peuple, et non pas celle à la race, qui fait sens dans le judaïsme. Autrement dit, il faut considérer le judaïsme non seulement dans sa dimension religieuse, mais aussi dans sa dimension sociologique. D'ailleurs, les termes λαός et ἔθνος représentent des catégories sociologiques et non pas théologiques. Cette question reléve d'un grand débat sur lequel il n'est pas possible de s'attarder. Mais toute compréhension du phénoméne judéo-chrétien ancien (comme récent) dépend de fait de cette question au demeurant fort délicate.
85 Par observance, il faut entendre la pratique de la Torah dans le sens juif du terme, c'est-à-dire aussi bien de la Torah écrite que la Torah orale, autrement dit la pratique des règles de pureté rituelle, de la circoncision et du sabbat.
Par christologie, il faut comprendre la croyance en la messianité de Jésus et en la divinité du Christ.
En simplifiant, on peut dire que le judéo-christianisme peut se définir par un mixage de certaines observances et par certaines croyances.
86 Les termes orthodoxe et hétérodoxe sont utilisés d'un point de vue pratique, sans leur donner aucunement le sens qu'ils revêtaient aux yeux des hérésiologues chrétiens anciens.
87 Il est nécessaire de préciser que la définition, qui va être présentée, avait déjà été énoncée, sous une forme différente, par Marchal, L., dans DThC 8/2 (1925) col. 1681Google Scholar; qu'elle avait été qualifiée d'‘inadmissible’ par M. Simon, Verus Israel (n. 13), 278. On peut souligner que cette définition n'est pas totalement nouvelle, en ce sens qu'elle reprend des éléments souvents mentionnés sous des formes variées par tel ou tel auteur.
Il arrive aussi parfois qu'un auteur évolue et propose alors une définition sensiblement ou totalement différente d'une étude à l'autre. C'est le cas, on l'a vu, pour J. Daniélou, c'est également le cas pour M. Simon. En ce qui concerne M. Simon, on peut comparer la définition formulée en 1948 (reprise en 1964) (cf. M. Simon, Verus Israel), et celle exposée en 1965 (cf. Simon, M., dans Aspects du judéo-christianisme [Paris, 1965] 1–17)Google Scholar. Dans la première, l'auteur récuse la christologie pour l'observance; dans la seconde, il accepte la christologie et l'observance mais sans récuser la première tentative. C'est justement cette attitude, source de confusion, qui est discutable.
88 Les t´moignages sont réunis dans Herford, R. T., Christianity in Talmud and Midrash (Londres, 1903) 361–97Google Scholar sous le titre The Minim.
89 Pour un exposé critique de la question, cf. M. Simon, Verus Israel (n. 13) 214–38. En dernier lieu, cf. Horbury, W., ‘The Benediction of the Minim and Early Jewish-Christian Controversy’, JTS 31 (1982) 19–61CrossRefGoogle Scholar; Schiffman, L. H., Who Was a Jew? Rabbinic and Halakhic Perspectives on the Jewish-Christian Schism (Hoboken/N.J., 1985)Google Scholar; Thornton, T. C. G., ‘Christian Understandings of the Birkath Ha-Minim in the Eastern Roman Empire’, JTS 38 (1987) 419–31.CrossRefGoogle Scholar
90 Une enquête similaire pourrait être entreprise dans la littérature apocryphe chrétienne. Cf. pour exemple, l'article de Lowe, M., ‘IOYΔAIOI of the Apocrypha. A Fresh Approach to the Gospels of James, Pseudo-Thomas, Peter and Nicodemus’, NT 23 (1981) 56–90.Google Scholar
91 A cette époque, on ne trouve qu'un seul emploi du mot ‘nazaréen’ chez Tertullien et aucun du vocable ‘hébreu’.
92 Il faut souligner que la critique refuse de reconnaître l'influence judéo-chrétienne sur les œuvres exégétiques d'Origène ou de Jérôme, préférant y voir tout simplement une influence des traditions juives. A ce sujet, voir par exemple: Jay, P., L'exégèse de Saint Jérôme d'après son ‘Commentaire sur Isaïe’ (Paris, 1985) 39–43, 142–7, 194–200Google Scholar; pour cet auteur, ‘Hébreu’ renvoie toujours à un contexte juif et non pas à un contexte judéo-chrétien.
93 Dans un article récent Bar-Ascher, M., ‘Le syro-palestinien. Études grammaticales’, JA 276 (1988) 28Google Scholar, a proposé pour le syro-palestinien (appelé aussi christo-palestinien ou christo-araméen) la définition suivante: ‘On appelle syro-palestinien la branche chrétienne de l'araméen palestinien, qui fait partie de l'araméen occidental. Celui a été utilisé dans différentes régions de la Palestine … entre le moment où l'on cessa de parler hébreu … et celui où il fut lui-même supplanté par l'arabe, … Les trois principaux dialectes araméens occidentaux sont: le judéo-araméen, … l'araméen-samaritain et le christopalestinien ou syro-palestinien.’ Cette définition sous-entend que les utilisateurs du christo-araméen seraient les descendants des judéo-chrétiens palestiniens. Il est difficile de se prononcer de manière aussi tranchée sur cette question; un point est certain: si les utilisateurs du christo-araméen étaient des judéo-chrétiens, ils appartenaient à la branche orthodoxe (les documents parvenus en font foi).
94 Notamment à partir de la récupération des traditions judéo-chrétiennes par les pagano-chrétiens, particulièrement à Jérusalem vers la fin du IVème siècle et le début du Vème siècle sous l'épiscopat de Jean II.