Répondre à cette question suppose qu'on puisse définir avec précision ce qu'on entend par « réussite d'une modernisation », et par le mot « pourquoi ». Or, la modernisation est un concept vague. On pourra remarquer que, s'il n'y avait pas, à l'heure actuelle, un succès économique du Japon qui frappe même les plus aveugles des Européens, on ne discuterait guère de la modernité japonaise. Cela implique d'abord que l'élément économique, en particulier industriel, est fondamental dans notre perception de la modernité. Mais comme la notion de modernité a été definie à partir exclusivement de l'expérience européenne ou américaine, on éprouve la tentation de penser que seules les ressemblances entre le Japon et l'Europe sont significatives, et que le Japon (ou l'Europe…) ne saurait avoir sa modernisation particulière. Provisoirement, pour faire le tri dans le passé japonais, on retiendra ici des critères bien connus, déjà repérés en Europe: mobilité, individuation et laïcisation; et on admettra que la recherche de ces critères ne peut se limiter à l'ère Meiji et doit remonter d'une part au moins jusqu'au XVIIIe siècle et d'autre part, comme la modernisation est une adaptation continue à des techniques qui évoluent rapidement, aller jusqu'á nos jours.