No CrossRef data available.
Published online by Cambridge University Press: 13 April 2010
On n'a pas toujours assez insisté sur cet aspect, mais la préoccupation de l'herméneutique de Gadamer d'affranchir l'expérience humaine de la vérité de sa dépendance unilatérale envers la méthode et ses promesses de contrôle, plonge ses racines, bien avant la rédaction de Vérité et méthode, dans les premières années d'apprentissage du philosophe. C'est la puissance de révélation et d'évocation non maîtrisable de la poésie qui aura d'abord éveillé le jeune Gadamer à un univers de connaissance qui ne se résume ni à un savoir d'objet ni aux prétentions modernes d'une pensée qui veut s'assurer de ses precédés et de ses propres pensées, mais qui n'en recèle pas moins un authentique pouvoir véritatif.
1 Cf. Gadamer, Hans-Georg, Années d'apprentissage philosophique, Paris, Critérion, 1992, p. 27, 47.Google Scholar
2 Gadamer parlera de la «décharge électrique» («Das war für mich wie das Getroffenwerden von einem elektrischen Schlage») que déclencha chez lui en 1922 la lecture du Manuscrit-Natorp de Heidegger, consacré aux Interprétations phénoménologiques d'Aristote: «C'était comme si j'avais été frappé d'une décharge électrique. J'avais vecu quelque chose de semblable lorsqu' à dixhuit ans, j'ai lu pour la première fois des vers de Stefan George» (Années d'apprentissage, p. 253; Philosophische Lehrjahre, Francfort, Klostermann, 1977, p. 212).Google Scholar
3 II s'agit de la thèse d'habilitation de 1928, publiée en 1931 : L'éthique dialectique de Platon, Paris, Actes Sud, 1994.Google Scholar Comme le signale Jean Grondin (p. 21), ce travail sera le seul véritable livre publié par Gadamer avant Vérité et méthode.
4 Grondin, Jean, Hans-Georg Gadamer. Eine Biographie, Tübingen, Mohr Siebeck, 1999, 437 p.Google Scholar
5 Grondin, Jean, Hermeneutische Wahrheit? Zum Wahrheitsbegriff Hans-Georg Gadamers, Königstein, Forum Academicum, 1982; 2e ed. Weinheim, Belz-Athäneum, 1994.Google Scholar
6 C'est ce qu'il faisait déjà dans son article de 1981, «La conscience du travail de l'histoire et le problème de la vérité en herméneutique», Archives dephilosophie, vol. 44, p. 435–453.Google Scholar
7 Cf. Habermas, Jürgen, «Die Universalitätsanspruch der Hermeneutib» (1970), dans Zur Logik der Sozialwissenschaften, Francfort, Suhrkamp, 1982, p. 331;Google Scholar trad, franç. Rochlitz, R., Logique des sciences sociales et autres essais, Paris, PUF (Philosophie d'aujourd'hui), 1987, p. 240.Google Scholar Si nous référons ici à la lecture de Habermas, c'est évidemment à cause de son importance dans le débat philosophique contemporain, mais plus encore pour souligner son appréciation globalement positive de l'herméneutique, qu'a pu faire oublier la polémique sur la critique des idéologies au tournant des années 70. Habermas a reconnu volontiers la contribution inestimable de l'herméneutique de Gadamer. Il y revient dans Wahrheit und Rechtfertigung, Francfort, Suhrkamp, 1999, p. 89sq.Google Scholar, et dans son texte en hommage à Gadamer, «Der liberate Geist», dans Begegnungen unit Hans-Georg Gadamer, Stuttgart, Reclam, 2000.Google Scholar Á la page 52 de ce dernier écrit, il rappelle la fascination qu'ont exercée sur lui la seconde et la troisième parties de Vérité et méthode, quoique pour des motifs différents : «[…] der zweite, weil ich hier alles erklärt und begriffen fand, was mir bis dahin unklar geblieben war; und der dritte, weil er mich zum Widerspruch reizte. Ich war iiberzeugt (und bin es noch), dass Gadamer die Grossartigen Einsichten, die er mit der “Wiedergewinnung des hermeneutischen Grundproblems” und mit der “Analyse des wirkungsgeschichtlichen Bewusstseins”, gewonnen hat, durch Nachgiebigkeit gegenüber der seinsgeschichtlichen Suggestion des späten Heidegger wieder gefährdete». En d'autres termes, Habermas retiendra le potentiel d'élucidation de la conscience du travail de l'histoire, bien qu'il soit à son avis compromis par le tournant ontologique emprunté par Gadamer, surtout dans la troisième partie de Vérité et méthode.
8 De façon un peu plus neutre, le texte allemand dit: «[…] diesen Begriff in sich selbst zu begrenzen» (Zwischen Phänomenologie und Dialektik. Versuch einer Selbstkritik, GW2, Tübingen, Mohr Siebeck, 1986, p. 11).Google Scholar La traduction citée ici est celle de Jean Grondin (p. 140).
9 Cf. Gadamer, Hans-Georg, «Le probleme de l'herméneutique», dans L'art de comprendre I, Paris, Aubier, 1982, p. 35;Google ScholarGW2, p. 226.
10 Gadamer, Hans-Georg, Le problème de la conscience historique (1957), Paris, Seuil, 1996, p. 19–20Google Scholar (mes italiques).
11 Gadamer, Hans-Georg, «Entre phénoménologie et dialectique, essai d'autocritique», dans L'art de comprendre II, Paris, Aubier, 1991, p. 11 sq.;Google ScholarGW 2, p. 3 sq.
12 Sur la diversité de la conception gadamérienne du dialogue, cf. Thérien, Claude, «Gadamer et la phénoménologie du dialogue», Laval théologique et philosophique, vol. 53, n° 1 (1997), p. 167–180 (en particulier p. 178).CrossRefGoogle Scholar
13 Cf. note 7, supra.
14 Apel, Karl-Otto a rappelé les termes de cette alternative dans son essai «Regulative Ideen oder Wahrheits-Geschehen? Zu Gadamers Versuch, die Frage nach den Bedingungen der Möglichkeit gültigen Verstehens zu beantworten» (1996), dans Auseinandersetzungen in Erprobung des Transzendentalpragmatischen Ansatzes, Francfort, Suhrkamp, 1998, p. 569–608.Google Scholar
15 Cette formule est évidemment celle de Habermas, qui se voulait aussi un hommage Gadamer, dans Philosophish-politische Profile, Francfort, Suhrkamp, 1981, p. 392–401.Google Scholar
16 Grondin, Jean, L'universalité de l'herméneutique, Paris, PUF (Épiméthée), 1993.Google Scholar
17 Ce que rappelle justement Kaegi, Dominic dans son article «Was heisst, und zu welchem Ende studiert man philosophische Hermeneutik?», Philosophische Rundschau, vol. 41, no 2 (juin 1994), p. 116–132.Google Scholar