Hostname: page-component-78c5997874-s2hrs Total loading time: 0 Render date: 2024-11-18T22:28:37.606Z Has data issue: false hasContentIssue false

La confirmation des évolutions récentes du droit des mesures conservatoires par et devant la Cour internationale de Justice: remarques sur les ordonnances en indication de mesures conservatoires du 7 décembre 2021 dans les affaires relatives à l’Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Arménie c Azerbaïdjan et Azerbaïdjan c Arménie)

Published online by Cambridge University Press:  18 August 2022

RAPHAËL MAUREL*
Affiliation:
Raphaël Maurel, Maître de conférences en droit public à l’Université de Bourgogne, CREDIMI (EA 7532), CEDIN (EA 382) et CMH (EA 4232), France ([email protected]).
Get access

Résumé

Le 7 décembre 2021, la Cour internationale de Justice a rendu deux ordonnances attendues dans les affaires introduites par l’Arménie contre l’Azerbaïdjan et l’Azerbaïdjan contre l’Arménie. Elle y confirme une tendance à l’appréciation souple de certains critères d’indication des mesures conservatoires, comme celui de la plausibilité des droits allégués et des liens entre ceux-ci et les mesures requises, voire à la marginalisation d’autres critères, comme celui du caractère irréparable du préjudice invoqué. Bien que la cour de La Haye poursuive, au fil de sa jurisprudence, la construction du droit des mesures conservatoires, la manière dont elle mobilise ces critères continue ainsi de susciter des interrogations et critiques.

Abstract

Abstract

On 7 December 2021, the International Court of Justice issued two much anticipated orders in the cases brought by Armenia against Azerbaijan and Azerbaijan against Armenia. In these orders, the court confirmed a trend towards flexible assessment of certain criteria for the indication of provisional measures, such as the plausibility of alleged rights and the link between such rights and the measures requested, as well as the marginalization of other criteria, such as the irreparable nature of the alleged prejudice. While the Hague court pursues development of the law of provisional measures through its case law, the way in which it mobilizes these criteria continues to raise questions and criticism.

Type
Notes and Comments / Notes et Commentaires
Copyright
© The Canadian Yearbook of International Law/Annuaire canadien de droit international 2022

Access options

Get access to the full version of this content by using one of the access options below. (Log in options will check for institutional or personal access. Content may require purchase if you do not have access.)

References

1 Hormis les deux ordonnances commentées et mises de côté les ordonnances procédurales, la Cour internationale de Justice (CIJ) a rendu trois arrêts en 2021: Violations alléguées du traité d’amitié, de commerce et de droits consulaires de 1955 (République islamique d’Iran c États-Unis d’Amérique), Exceptions préliminaires, [2021] CIJ Rec 9; Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Qatar c Émirats arabes unis), Exceptions préliminaires, Arrêt du 4 février 2021, en ligne: CIJ <www.icj-cij.org/public/files/case-related/172/172-20210204-JUD-01-00-FR.pdf>; Délimitation maritime dans l’océan Indien (Somalie c Kenya), Arrêt du 12 octobre 2021, en ligne: CIJ <www.icj-cij.org/public/files/case-related/161/161-20211012-JUD-01-00-FR.pdf>. Cependant, alors que seules deux affaires avaient été introduites en 2019 — et aucune en 2020 — trois nouvelles requêtes, dont les deux faisant l’objet des ordonnances commentées, ont été introduites en 2021.

2 Allégations de génocide au titre de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Ukraine c Fédération de Russie), Mesures conservatoires, Ordonnance du 16 mars 2022, en ligne: CIJ <www.icj-cij.org/public/files/case-related/182/182-20220316-ORD-01-00-FR.pdf> [Ukraine c Russie 2022]. À son propos, voir Raphaël Maurel, “Ukraine c Fédération de Russie: la CIJ ordonne à la Russie de ‘suspendre immédiatement’ ses opérations militaires en Ukraine,” Dalloz Actualité, 18 mars 2022.

3 Romain Le Bœuf, “La déclaration de cessez-le-feu entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan: un nouvel épisode de la lutte pour le Haut-Karabakh” (2020) 60 AFDI 291 à la p 291.

4 À propos de l’ordonnance relative à l’affaire Gambie c Myanmar (voir infra note 6), voir Pierre-François Laval, “Chronique de jurisprudence internationale” (2020) 124:1 RGDIP 147 à la p 149.

5 Ibid.

6 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Gambie c Myanmar), Mesures conservatoires, Ordonnance du 23 janvier 2020, [2020] CIJ Rec 3 [Gambie c Myanmar]. Sur cette ordonnance très commentée, voir les références notes 7 et 92 ci-dessous ou, dans une perspective différente, Christina M Cerna, “Provisional Measures: How International Human Rights Law Is Changing International Law (Inspired by Gambia v Myanmar)” (2021) 11:1 Notre Dame J Intl & Comp L 34. Pour un résumé, voir Vatsal Raj, “The Gambia v Myanmar: Paving the Yellow Brick Road to International Accountability for the Crime of Genocide” (2021) 3:1 De Lege Ferenda 42.

7 Gambie c Myanmar, supra note 6 au para 86, point 4. Nous renvoyons, pour une analyse, à Raphaël Maurel, “La contribution de l’ordonnance Gambie c Myanmar à l’élaboration d’un droit des mesures conservatoires” (2020) 20 R Centre Michel de l’Hospital 97 à la p 97.

8 Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale du 7 décembre 2021 (Arménie c Azerbaïdjan), Mesures conservatoires, Ordonnance du 7 décembre 2021, en ligne: CIJ <www.icj-cij.org/public/files/case-related/180/180-20211207-ORD-01-00-FR.pdf> au para 95 [Arménie c Azerbaïdjan]; Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale du 7 décembre 2021 (Azerbaïdjan c Arménie), Mesures conservatoires, Ordonnance du 7 décembre 2021, en ligne: CIJ <www.icj-cij.org/public/files/case-related/181/181-20211207-ORD-01-00-FR.pdf> au para 72 [Azerbaïdjan c Arménie].

9 L’Arménie demandait, en substance, la libération des prisonniers de guerre, détenus et otages arméniens arrêtés dans le contexte du conflit de fin 2020, leur traitement conforme à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, 21 décembre 1965, 660 RTNU 195 (entrée en vigueur: 4 janvier 1969) [CIEDR] dans cette attente, l’abstention de “fomenter la haine à l’égard des personnes d’origine” arménienne notamment en fermant un parc des trophées militaires, la protection du droit d’accéder au patrimoine arménien en Azerbaïdjan et celle dudit patrimoine contre toute dégradation, la facilitation des mesures de protection de ce patrimoine pour permettre l’exercice des droits protégés par la CIEDR, la protection et la conservation des preuves relatives aux violations alléguées de la CIEDR, l’abstention de prendre toute mesure aggravant ou étendant le différend, et enfin la transmission régulière d’informations sur le suivi de ces mesures à la CIJ. Voir Arménie c Azerbaïdjan, supra note 8 au para 11.

10 Mais n’excède pas les délais des affaires Application de la convention internationale pour la répression du financement du terrorisme et de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Ukraine c Fédération de Russie), Mesures conservatoires, Ordonnance du 19 avril 2017, [2017] CIJ Rec 104 [Ukraine c Fédération de Russie 2017] (demande en indication de mesures conservatoires déposée par l’Ukraine le 16 janvier 2017, ordonnance rendue le 19 avril 2017, soit trois mois et deux jours) ou encore Questions concernant la saisie et la détention de certains documents et données (Timor-Leste c Australie), Mesures conservatoires, Ordonnance du 3 mars 2014, [2014] CIJ Rec 147 (demande en indication de mesures conservatoires présentée par le Timor-Leste le 17 décembre 2013, ordonnance rendue le 3 mars 2014, soit trois mois et dix-sept jours).

11 Voir notamment Raphaël Maurel, “Remarques sur les ordonnances en indication de mesures conservatoires rendues par la CIJ dans les affaires Qatar c Émirats arabes unis (23 juillet 2018) et Iran c États-Unis d’Amérique (3 octobre 2018)” (2018) 16 R Centre Michel de l’Hospital 81 aux pp 83–85.

12 Règlement de la Cour, 14 avril 1978, en ligne: CIJ <www.icj-cij.org/fr/reglement> (entrée en vigueur: 1er juillet 1978), art 74, para 1. En effet, les audiences publiques ont été organisées du 10–12 décembre, après l’achèvement de celles relatives à l’affaire de l’Appel concernant la compétence du Conseil de l’OACI en vertu de l’article 84 de la convention relative à l’aviation civile internationale (Arabie saoudite, Bahreïn, Égypte et Émirats arabes unis c Qatar) tenues du 2–6 décembre 2019. Il convient cependant de noter qu’un tel délai, qui n’apparaît pas manifestement excessif, a pu être convenu d’un accord commun avec les parties. Le délai entre la clôture des audiences et le rendu de l’ordonnance, constitué d’un mois et onze jours, apparaît plus gênant du point de vue procédural. Bien qu’il soit vraisemblablement dû aux congés de fin d’année, la pratique consistant à rendre prioritaires les vacances de la CIJ sur son activité juridictionnelle demeure problématique, au regard tant de l’urgence des situations invoquées que du Règlement précité. Cette pratique étant variable — on se souviendra que l’ordonnance rendue dans l’affaire LaGrand avait été rendue sans audiences — on peut en déduire que tout dépend du degré d’urgence de la situation, telle qu’elle est ressentie par les parties mais également par la CIJ.

13 L’Azerbaïdjan demandait, en substance, l’enlèvement ou l’indication précis de l’emplacement des mines terrestres posées sur son territoire, la cessation de la mise en danger des vies azerbaïdjanaises par la pose ou l’encouragement à la pose de ces mines, l’empêchement d’un certain nombre d’incitations à la haine raciale contre les azerbaïdjanais notamment sur les réseaux sociaux et dans les médias en Arménie, la prise de disposition pour garantir la collecte et la préservation des preuves quant aux crimes perpétrés contre des Azerbaïdjanais en raison de leur appartenance ethnique, et l’abstention de prendre toute mesure susceptible d’aggraver ou d’étendre le différend. Voir Azerbaïdjan c Arménie, supra note 8 au para 11.

14 Essais nucléaires (Australie c France), Mesures conservatoires, Ordonnance du 22 juin 1973, [1973] CIJ Rec 99 au para 21.

15 Licéité de l’emploi de la force (Yougoslavie c États-Unis d’Amérique), Mesures conservatoires, Ordonnance du 2 juin 1999, [1999] CIJ Rec 761 au para 29.

16 Voir par ex Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Qatar c Émirats arabes unis), Mesures conservatoires, Ordonnance du 14 juin 2019, [2019] CIJ Rec 361 au para 15 [Qatar c Émirats arabes unis 2019].

17 “Tout différend entre deux ou plusieurs États parties touchant l’interprétation ou l’application de la présente Convention qui n’aura pas été réglé par voie de négociation ou au moyen des procédures expressément prévues par ladite Convention sera porté, à la requête de toute partie au différend, devant la CIJ pour qu’elle statue à son sujet, à moins que les parties au différend ne conviennent d’un autre mode de règlement.” CIEDR, supra note 9, art 22.

18 Arménie c Azerbaïdjan, supra note 8 au para 27.

19 Azerbaïdjan c Arménie, supra note 8 au para 27.

20 Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Géorgie c Fédération de Russie), Mesures conservatoires, Ordonnance du 15 octobre 2008, [2008] CIJ Rec 353 aux paras 113–17.

21 Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Géorgie c Fédération de Russie), Exceptions préliminaires, [2011] CIJ Rec 70 au para 183 [Géorgie c Fédération de Russie 2011].

22 Ukraine c Fédération de Russie 2017, supra note 10 au para 60.

23 Application de la convention internationale pour la répression du financement du terrorisme et de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Ukraine c Fédération de Russie), Exceptions préliminaires, [2019] CIJ Rec 600 aux paras 106–13 (la citation est extraite du para 113).

24 Arménie c Azerbaïdjan, supra note 8 au para 24.

25 Ibid au para 27; Azerbaïdjan c Arménie, supra note 8 au para 26.

26 Arménie c Azerbaïdjan, supra note 8 au para 41.

27 Ibid au para 37; Azerbaïdjan c Arménie, supra note 8 au para 37.

28 Affaire des concessions Mavrommatis en Palestine (1924), CPJI (sér A) n° 2 à la p 13.

29 Questions concernant l’obligation de poursuivre ou d’extrader (Belgique c Sénégal), Mesures conservatoires, Ordonnance du 28 mai 2009, [2009] CIJ Rec 139 au para 57.

30 Arménie c Azerbaïdjan, supra note 8 au para 45.

31 Qatar c Émirats arabes unis 2019, supra note 16 au para 47.

32 Selon la formule peu claire utilisée dans Violations alléguées du traité d’amitié, de commerce et de droits consulaires de 1955 (République islamique d’Iran c États-Unis d’Amérique), Mesures conservatoires, Ordonnance du 3 octobre 2018, [2018] CIJ Rec 623 au para 69 [Iran c États-Unis].

33 Ibid au para 56.

34 On peut néanmoins regretter que cette rigueur — relative — soit souvent peu motivée. Voir ci-dessous sur ce point.

35 Voir, à ce propos, Alain Pellet, “Le droit international à la lumière de la pratique: l’introuvable théorie de la réalité” (2021) 414 Rec des Cours 25, spécifiquement le chapitre 9 sur “l’‘humanisation’ du droit international et ses limites” aux pp 370 et s.

36 Certaines activités menées par le Nicaragua dans la région frontalière (Costa Rica c Nicaragua), Mesures conservatoires, Ordonnance du 8 mars 2011, [2011] CIJ Rec 6 à la p 29, Opinion individuelle de M le juge Koroma au para 1 (“[o]utre qu’un tel critère introduit à mon sens une ambiguïté et une incertitude, on voit mal s’il porte sur les droits, les faits, ou les deux”).

37 Arménie c Azerbaïdjan, supra note 8 au para 58.

38 Azerbaïdjan c Arménie, supra note 8 au para 53.

39 Arménie c Azerbaïdjan, supra note 8 au para 60.

40 Ibid au para 59.

41 Azerbaïdjan c Arménie, supra note 8 au para 52.

42 Arménie c Azerbaïdjan, supra note 8 au para 60 (la CIJ précise néanmoins que le droit à ce que ces personnes ne subissent pas de traitements inhumains ou dégradants fondés sur leur origine nationale ou ethnique tant qu’elles sont détenues en Azerbaïdjan est plausible).

43 Ibid au para 61.

44 Voir en ce sens ibid, Déclaration du juge ad hoc Keith au para 4.

45 Arménie c Azerbaïdjan, supra note 8 aux paras 63–64, 66; dans le même sens, voir ibid, Opinion dissidente du juge Yusuf au para 17.

46 Azerbaïdjan c Arménie, supra note 8 au para 53.

47 Iran c États-Unis, supra note 32 au para 75.

48 Gambie c Myanmar, supra note 6 aux paras 61–62. La mesure semblait certes éloignée des droits allégués puisqu’elle requerrait “qu’il soit prescrit au Myanmar de donner accès et d’apporter son concours à tous les organes d’établissement des faits de l’Organisation des Nations Unies qui enquêtent sur des actes de génocide qui auraient été commis contre les Rohingya, y compris sur les conditions auxquelles ces derniers sont soumis” (ibid au para 10). Cependant, une motivation plus étayée que la formule lapidaire selon laquelle “la Cour ne considère pas que son indication soit nécessaire dans les circonstances de l’espèce” (ibid au para 62) eût été souhaitable, d’autant que cette formulation sème un sérieux doute sur l’articulation entre, d’une part, le lien entre la mesure et les droits allégués, d’autre part, la nécessité de la mesure qui est — ou est censée être — une tout autre question.

49 Il faut noter, au-delà des propos qui suivent, que ces clarifications n’apparaissent pas non plus dans l’ordonnance ultérieure rendue dans l’affaire Ukraine c Russie 2022, supra note 2.

50 Arménie c Azerbaïdjan, supra note 8 au para 67.

51 Ibid au para 68 [nos italiques].

52 Ibid au para 80 [nos italiques].

53 Azerbaïdjan c Arménie, supra note 8 au para 57.

54 Ibid au para 58.

55 Ibid au para 64.

56 Mohammed Bedjaoui, “La ‘fabrication’ des arrêts de la Cour internationale de justice” dans Le droit international au service de la paix, de la justice et du développement: Mélanges Michel Virally, Paris, Pedone, 1991, spécifiquement aux pp 98–99 ou encore à la p 105 (“[o]n ne peut pas lire un arrêt de la Cour comme la sentence d’un arbitre unique, ou comme une thèse bien équilibrée de doctorat. La Cour n’a ni rapporteur, ni avocat général et n’entend pas en avoir. Son travail est collégial et l’arrêt est le produit d’une œuvre collective”). L’auteur de ces lignes n’est pas certain de totalement échapper à la critique opérée par l’honorable juge Bedjaoui des commentaires doctrinaux fustigeant le “niveau de la compétence rédactionnelle” des arrêts (ibid); il n’en demeure pas moins qu’il est peu satisfaisant — et peu commun — qu’une ordonnance de la Cour dise une chose, puis, par omission, son exact contraire.

57 Voir par ex Azerbaïdjan c Arménie, supra note 8 au para 60.

58 Robert Kolb, La Cour internationale de Justice, Paris, Pedone, 2013 à la p 649.

59 Ibid.

60 L’on pense par ex à l’affaire Demande en interprétation de l’arrêt du 31 mars 2004 en l’affaire Avena et autres ressortissants mexicains (Mexique c. États-Unis d’Amérique) (Mexique c États-Unis d’Amérique), Mesures conservatoires, Ordonnance du 16 juillet 2008, [2008] CIJ Rec 311 au para 73, ou plus récemment à l’affaire Jadhav (Inde c Pakistan), Mesures conservatoires, Ordonnance du 18 mai 2017, [2017] CIJ Rec 231 au para 55 (“le simple fait que M. Jadhav fasse l’objet de pareille condamnation et puisse donc être exécuté suffit à établir l’existence d’un tel risque”).

61 Qatar c Émirats arabes unis 2019, supra note 16 au para 69.

62 Iran c États-Unis, supra note 32 au para 91.

63 Tel était notamment le cas dans l’ordonnance Iran c Etats-Unis, ibid, puisque l’objet du différend ne concernait pas la protection des ressortissants iraniens.

64 Ibid.

65 Gambie c Myanmar, supra note 6 aux paras 69–75. Si les développements sont conséquents sur ce point, l’issue du raisonnement, au regard tant de la gravité des faits allégués que des faits déjà pris en considération par la CIJ dans le cadre de l’appréciation de la plausibilité des droits invoqués, ne faisait aucun doute.

66 Arménie c Azerbaïdjan, supra note 8 au para 82.

67 Ibid au para 83.

68 Ibid.

69 Azerbaïdjan c Arménie, supra note 8 au para 66.

70 Kolb, supra note 58 à la p 650.

71 Ibid.

72 Qatar c Émirats arabes unis 2019, supra note 16 au para 68 [nos italiques].

73 Ibid au para 70 (la CIJ en déduit “par conséquent qu’il existe un risque imminent que les mesures adoptées […] puissent causer un préjudice irréparable” au para 71 [nos italiques]).

74 Voir par ex Certaines activités menées par le Nicaragua dans la région frontalière (Costa Rica c Nicaragua); Construction d’une route au Costa Rica le long du fleuve San Juan (Nicaragua c Costa Rica), Mesures conservatoires, Ordonnance du 22 novembre 2013, [2013] CIJ Rec 354 au para 50.

75 Arménie c Azerbaïdjan, supra note 8 aux paras 85–88.

76 Ibid au para 85 (citant la résolution sur les conséquences humanitaires du conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe du 27 septembre 2021).

77 Ibid au para 88 [nos italiques].

78 Ibid au para 70.

79 Azerbaïdjan c Arménie, supra note 8 au para 67.

80 Ibid au para 62 [nos italiques].

81 Ibid au para 60, citant Gambie c Myanmar, supra note 6 au para 65.

82 C’est en 2007 que la CIJ a pour la dernière fois rejeté une demande d’indication de mesures conservatoires sur le fondement de l’absence d’imminence d’un préjudice irréparable. Usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay (Argentine c Uruguay), Mesures conservatoires, Ordonnance du 23 janvier 2007, [2007] CIJ Rec 3 aux paras 41–42 [Argentine c Uruguay].

83 Depuis 2016, si l’on excepte les affaires introduites par compromis ou requête conjointe et celles radiées du rôle, seules quatre contentieux sur les treize soumis par requête introductive d’instance n’ont pas (encore?) été accompagnés de demandes d’indication de mesures conservatoires. Transfert de l’ambassade des États-Unis à Jérusalem (Palestine c États-Unis d’Amérique), “Requête introductive d’instance par la Palestine” (28 septembre 2018), en ligne: CIJ <www.icj-cij.org/public/files/case-related/176/176-20180928-APP-01-00-FR.pdf>; Sentence arbitrale du 3 octobre 1899 (Guyana c Venezuela), “Requête introductive d’instance par le Guyana” (29 mars 2018), en ligne: CIJ <www.icj-cij.org/public/files/case-related/171/171-20180329-APP-01-00-FR.pdf>; Frontière terrestre dans la partie septentrionale d’Isla Portillos (Costa Rica c Nicaragua), “Requête introductive d’instance par le Costa Rica” (16 janvier 2017), en ligne: CIJ <www.icj-cij.org/public/files/case-related/165/165-20170116-APP-01-00-FR.pdff>; Différend concernant le statut et l’utilisation des eaux du Silala (Chili c Bolivie), “Requête introductive d’instance par le Chili” (6 juin 2016), en ligne: CIJ <www.icj-cij.org/public/files/case-related/162/162-20160606-APP-01-00-FR.pdf>. Autrement dit, environ deux requêtes sur trois font actuellement l’objet d’une ordonnance en indication de mesures conservatoires.

84 Voir par ex Qatar c Émirats arabes unis 2019, supra note 16 au para 17.

85 Voir Argentine c Uruguay, supra note 82 au para 42; Mandat d’arrêt du 11 avril 2000 (République démocratique du Congo c Belgique), Mesures conservatoires, Ordonnance du 8 décembre 2000, [2000] CIJ Rec 182 au para 72.

86 Cette liberté découle de l’article 75, para 2, du Règlement de la Cour, supra note 12, selon lequel “[l]orsqu’une demande en indication de mesures conservatoires lui est présentée, la CIJ peut indiquer des mesures totalement ou partiellement différentes de celles qui sont sollicitées, ou des mesures à prendre ou à exécuter par la partie même dont émane la demande.” La CIJ a souvent fait usage de cette faculté. Voir par ex Immunités et procédures pénales (Guinée équatoriale c France), Mesures conservatoires, Ordonnance du 7 décembre 2016, [2016] CIJ Rec 1148 au para 94; Ukraine c Fédération de Russie 2017, supra note 10 au para 100; ou encore, de manière remarquable puisqu’il s’agit du premier cas dans lequel la CIJ, de sa propre initiative, “juge opportun d’indiquer des mesures à l’intention des deux Parties,” voir Géorgie c Fédération de Russie 2011, supra note 21 au para 146.

87 LaGrand (Allemagne c États-Unis d’Amérique), [2001] CIJ Rec 466 au para 109.

88 Sur cette procédure, voir Maurel, supra note 7 à la p 112. Au-delà de la demande formulée par la Gambie, l’entrée en fonction de Philippe Gautier, ancien Greffier du Tribunal international du droit de la mer, en tant que Greffier de la CIJ quelques mois avant le rendu de l’examen n’est sans doute pas étranger à cette nouveauté. Le 21 décembre 2021, la CIJ a en ce sens ajouté un nouvel article 11 à la résolution du 12 avril 1976 visant la pratique de la CIJ en matière judiciaire, lequel dispose notamment que “i) Lorsqu’elle indique des mesures conservatoires, la Cour élit trois juges pour former une commission ad hoc chargée de l’aider à assurer le suivi de la mise en œuvre des mesures indiquées. Ni les membres de la Cour ayant la nationalité de l’une des parties ni les juges ad hoc ne peuvent siéger à la commission. ii) La commission ad hoc examine les renseignements fournis par les parties concernant la mise en œuvre des mesures conservatoires indiquées. Elle rend compte périodiquement à la Cour et lui fait des recommandations sur la suite à donner.” On peut néanmoins regretter l’absence de transparence totale quant à la composition et à l’activité de ces commissions, dont la publication des travaux et des informations reçues permettrait d’éclairer la communauté internationale quant à l’effectivité des mesures conservatoires.

89 Dans l’affaire Arménie c Azerbaïdjan, Lawrence Martin se borne à conclure, lors du premier tour de plaidoiries, que “an order for regular reporting is essential to ensure that Azerbaijan is genuinely implementing the Court’s Order and respecting the rights of Armenians that are the subject of that Order (and our Request).” Arménie c Azerbaïdjan, supra note 8, Audience publique du 14 octobre 2021 à 10h, à la p 63, para 30. Clôturant le premier tour de plaidoiries dans l’affaire Azerbaïdjan c Arménie, Donald Francis Donovan ne mentionne même pas précisément la mesure requise. Azerbaïdjan c Arménie, supra note 8, Audience publique du 18 octobre 2021 à 10h, à la p 64, para 21. Ces points ne font l’objet d’aucune mention — autre que les conclusions finales — dans les seconds tours respectifs des parties.

90 Laval, supra note 4 à la p 155.

91 Voir CIJ, Communiqué de presse n° 2020/38, “Adoption d’un nouvel article 11 de la résolution visant la pratique interne de la Cour en matière judiciaire concernant l’établissement d’une procédure de suivi de la mise en œuvre des mesures conservatoires indiquées par la Cour” (21 décembre 2020) (par lequel la CIJ prévoit l’établissement d’une commission ad hoc de trois juges dédiée au suivi de la mise en œuvre des mesures conservatoires indiquées — lorsque la mesure en question est indiquée).

92 Une partie de la doctrine a pu considérer, sans doute un peu promptement, que ce type de mesures était “acquis” pour l’avenir une fois indiqué une première fois, en se fondant sur l’idée selon laquelle “plus une mesure d’information est demandée à la CIJ et plus celle-ci semble l’indiquer; plus la demande vise une information détaillée et périodique et plus la CIJ peut la prescrire, voire hausser les niveaux de détail et de périodicité demandés.” Hugues Hellio et Solveig Henry, “Le suivi par la Cour internationale de Justice de ses ordonnances en indication de mesures conservatoires. Une pratique émergente entre inspiration, discrétion et recherche d’effectivité” (2020) 124:2 RGDIP 225 à la p 257. Voir également, dans une perspective similaire, Maurel, supra note 7 à la p 113.