Hostname: page-component-78c5997874-xbtfd Total loading time: 0 Render date: 2024-11-05T06:30:12.037Z Has data issue: false hasContentIssue false

Sur la lissité du schéma Quot ponctuel emboîté

Published online by Cambridge University Press:  14 March 2022

Sergej Monavari*
Affiliation:
Mathematical Institute, Utrecht University, P.O. Box 80010, 3508 TA Utrecht, The Netherlands
Andrea T. Ricolfi
Affiliation:
Department of Mathematics, Università degli Studi di Bologna, Piazza di Porta San Donato 5, Bologna, Italy e-mail: [email protected]
Rights & Permissions [Opens in a new window]

Abstract

Dans cet article on caractérise la lissité du schéma Quot ponctuel emboîté d’une variété lisse—c’est-à-dire l’espace de modules paramétrant les drapeaux de quotients de dimension $0$ d’un faisceau localement libre fixé. Nos résultats étendent la classification de Cheah dans le cadre des schémas de Hilbert ponctuels emboîtés.

Type
Article
Creative Commons
Creative Common License - CCCreative Common License - BY
This is an Open Access article, distributed under the terms of the Creative Commons Attribution licence (https://creativecommons.org/licenses/by/4.0/), which permits unrestricted re-use, distribution, and reproduction in any medium, provided the original work is properly cited.
Copyright
© The Author(s), 2022. Published by Cambridge University Press on behalf of The Canadian Mathematical Society

0 Introduction

Soit X une variété lisse et quasi-projective de dimension m, définie sur le corps ${\mathbb {C}}$ . Soit E un faisceau localement libre de rang r au dessus de X. Pour un entier fixé $d>0$ et un d-uplet $\boldsymbol {n} = (0\leq n_1 \leq \cdots \leq n_d)$ d’entiers non-décroissant, on considère le schéma Quot ponctuel emboîté

$$ \begin{align*} \operatorname{\mathrm{Quot}}_X(E,\boldsymbol{n}) = \bigl\{\bigl[E \twoheadrightarrow T_d \twoheadrightarrow \cdots \twoheadrightarrow T_1\bigr]\big|\dim(T_i) = 0,\,\chi(T_i) = n_i\bigr\}, \end{align*} $$

où la dimension d’un faisceau cohérent T est, par définition, la dimension de son support.

Dans cet article on donne des conditions nécessaires et suffisantes pour que le schéma $\operatorname {\mathrm {Quot}}_X(E,\boldsymbol {n})$ soit lisse. Quand $d=1$ on retrouve le schéma Quot de Grothendieck et par abus on remplace l’écriture $\boldsymbol {n} = (0\leq n)$ par l’entier $n \in {\mathbb {N}}$ correspondant. Sans que cela impacte la généralité de notre propos, on suppose au cours du théorème suivant que $\boldsymbol {n}$ est de la forme $\boldsymbol {n} = (0<n_1<\cdots <n_d)$ .

Théorème A Soit $(X,E,\boldsymbol {n})$ comme ci-dessus. Alors $\operatorname {\mathrm {Quot}}_X(E,\boldsymbol {n})$ est lisse dans les cas suivants:

  1. (1) Si $m=1$ , pour tout choix de $(E,d,\boldsymbol {n})$ ,

  2. (2) si $d=1$ et $n=1$ ,

  3. (3) si $r=1$ , dans les cas suivants:

    1. (a) $m=2,d=1$ , pour tout choix de n,

    2. (b) $m=d=2$ et $\boldsymbol {n}=(n,n+1)$ ,

    3. (c) $m\geq 3,d=1$ et $n\leq 3$ ,

    4. (d) $m\geq 3,d=2$ et $\boldsymbol {n}=(1,2),(2,3)$ .

Dans tous les autres cas, $\operatorname {\mathrm {Quot}}_X(E,\boldsymbol {n})$ est singulier.

On va démontrer le Théorème A de la façon suivante: on se ramène d’abord au cas $(X,E) = ({\mathbb {A}}^m,{\mathscr O}^{\oplus r})$ , on généralise ensuite la classification de Cheah [Reference Cheah3] pour $r=1$ (listant tous les schémas de Hilbert ponctuels emboîtés lisses) au rang r arbitraire; enfin on exclut toutes les exceptions à priori possibles, en produisant explicitement des points singuliers.

On remarque ici que dans le cas $d=r=1$ , correspondant au schéma de Hilbert de n points $\operatorname {\mathrm {Hilb}}^n(X)$ , il est connu que la lissité s’obtient si et seulement si $m\leq 2$ ou bien $n\leq 3$ . Si $r>1$ , le schéma Quot de Grothendieck $\operatorname {\mathrm {Quot}}_X({\mathscr O}^{\oplus r},n)$ est lisse si X est une courbe lisse, par contre il est singulier (mais irréductible, de dimension $n(r+1)$ , voir [Reference Ellingsrud and Lehn4] et [Reference Cazzaniga and Ricolfi2, Example 3.3]) si X est une surface.

La cohomologie de $\operatorname {\mathrm {Quot}}_X(E,\boldsymbol {n})$ a été étudiée en détail par Mochizuki [Reference Mochizuki5] lorsque X est une courbe lisse; dans ce cas-là, le motif $[\operatorname {\mathrm {Quot}}_X(E,\boldsymbol {n})] \in K_0(\operatorname {\mathrm {Var}}_{{\mathbb {C}}})$ de ce schéma a été calculé explicitement dans notre article [Reference Monavari and Ricolfi6].

1 Propriétés de l’espace de modules

On fixe, avec les notations précédentes, un triplet $(X,E,\boldsymbol {n})$ formé d’un faisceau localement libre E au dessus d’une variété lisse X, et un d-uplet d’entiers $\boldsymbol {n} = (0\leq n_1\leq \cdots \leq n_d)$ pour un entier $d>0$ . On rappelle que l’on utilise la notation $m=\dim X$ et $r=\operatorname {\mathrm {rg}} E$ . On remarque aussi que, si $n_d=1$ , le schéma $\operatorname {\mathrm {Quot}}_X(E,\boldsymbol {n})$ est isomorphe à ${\mathbb {P}}(E)$ , et notamment est lisse de dimension $m+r-1$ . Ce fait sera exploité dans la Section 1.3.

1.1 Espace tangent

Comme démontré en [Reference Monavari and Ricolfi6, Proposition 2.1], on peut décrire l’espace tangent du schéma $\operatorname {\mathrm {Quot}}_X(E,\boldsymbol {n})$ en un point $z = [E \twoheadrightarrow T_d \twoheadrightarrow \cdots \twoheadrightarrow T_1]$ comme le noyau d’une application ${\mathbb {C}}$ -linéaire appropriée,

$$ \begin{align*} T_z\operatorname{\mathrm{Quot}}_X(E, \boldsymbol{n})=\ker\left(\bigoplus_{i=1}^d\operatorname{Hom}(K_i, T_i)\xrightarrow{\Delta_z} \bigoplus_{i=1}^{d-1}\operatorname{Hom}(K_{i+1}, T_{i})\right), \end{align*} $$

où l’on pose $K_i = \ker (E \twoheadrightarrow T_i)$ . On omet la définition précise de $\Delta _z$ . On n’en fera pas usage dans nos preuves (le lecteur pourra en trouver une définition dans [Reference Monavari and Ricolfi6, Section 2] ou encore, sous une forme équivalente, dans [Reference Mochizuki5]).

1.2 Le morphisme somme directe

Supposons que l’on ait une décomposition $\boldsymbol {n} = \boldsymbol {n}_1+\cdots +\boldsymbol {n}_s$ , où tous les $\boldsymbol {n}_k = (n_{k1}\leq \cdots \leq n_{kd})$ sont des suites non-décroissantes d’entiers non-négatifs «plus petites» que $\boldsymbol {n}$ . La notation «somme» ci-dessus signifie bien-sûr que $n_i = \sum _{1\leq k\leq s} n_{ki}$ pour tout $i=1,\ldots ,d$ . Considérons l’ouvert

$$ \begin{align*} U \hookrightarrow \prod_{1\leq k\leq s} \operatorname{\mathrm{Quot}}_X(E,\boldsymbol{n}_k), \end{align*} $$

paramétrant les s-uplets de quotients emboîtés

$$ \begin{align*} z_k = \bigl[ E \twoheadrightarrow T_{kd} \twoheadrightarrow \cdots \twoheadrightarrow T_{k1} \bigr] \in \operatorname{\mathrm{Quot}}_X(E,\boldsymbol{n}_k),\qquad k=1,\ldots,s, \end{align*} $$

tels que le support de $T_{kd}$ soit disjoint du support de $T_{ld}$ pour tout $1\leq k\neq l\leq s$ . Alors on a un morphisme de schémas

qui associe à un s-uplet $(z_1,\ldots ,z_s)$ le point

$$ \begin{align*} \bigl[E \twoheadrightarrow T_{1d}\oplus \cdots \oplus T_{sd} \twoheadrightarrow \cdots \twoheadrightarrow T_{11}\oplus \cdots \oplus T_{s1} \bigr] \in \operatorname{\mathrm{Quot}}_X(E,\boldsymbol{n}). \end{align*} $$

Une application immédiate du critère infinitésimal montre que ce morphisme est étale.

1.3 Dimension attendue

Fixons $\boldsymbol {n}=(n_1\leq \dots \leq n_d)$ et une décomposition $\boldsymbol {n} = \sum _{k=1}^{n_d} \boldsymbol {n}_k,$ où tout $\boldsymbol {n}_k = (n_{k1}\leq \cdots \leq n_{kd})$ satisfait à la condition $n_{kd} = 1$ . Dans le produit

$$ \begin{align*} \prod_{k=1}^{n_d} \operatorname{\mathrm{Quot}}_X(E,\boldsymbol{n}_k) \cong {\mathbb{P}}(E)^{n_d}, \end{align*} $$

on considère le sous-schéma ouvert $U_{\boldsymbol {n}}$ paramétrant les $n_d$ -uplets de quotients dont les supports sont deux à deux disjoints. L’ouvert $U_{\boldsymbol {n}}$ est lisse de dimension $n_d(m+r-1)$ . Comme $U_{\boldsymbol {n}}$ est étale au dessus de $\operatorname {\mathrm {Quot}}_X(E,\boldsymbol {n})$ , à travers le morphisme somme directe, on peut définir la dimension attendue

$$ \begin{align*} \mathrm{expdim} \operatorname{\mathrm{Quot}}_X(E,\boldsymbol{n}) = n_d(m+r-1). \end{align*} $$

En effet, $\operatorname {\mathrm {Quot}}_X(E,\boldsymbol {n})$ contient un ouvert lisse (l’image de $U_{\boldsymbol {n}}$ ) de cette dimension. Dans le cas du schéma de Hilbert de n points $\operatorname {\mathrm {Hilb}}^n(X)$ , l’image de $U_n$ paramètre les n-uplets de points distincts (à permutation près). Sa dimension est bien $n\cdot \dim (X)$ . Ce nombre est la dimension de $\operatorname {\mathrm {Hilb}}^n(X)$ lorsqu’il est irréductible, car la clôture de Zariski de cet ouvert-là, que l’on appelle la smoothable component, est toujours une composante irréductible.

1.4 Connexité

Si X est irréductible, le schéma $\operatorname {\mathrm {Quot}}_X(E,\boldsymbol {n})$ est connexe [Reference Monavari and Ricolfi6, Theorem. 1.4]. Alors, si l’on trouve un point $z \in \operatorname {\mathrm {Quot}}_X(E,\boldsymbol {n})$ tel que

$$ \begin{align*} \dim_{{\mathbb{C}}} T_z \operatorname{\mathrm{Quot}}_X(E,\boldsymbol{n})> \mathrm{expdim} \operatorname{\mathrm{Quot}}_X(E,\boldsymbol{n}) = n_d (m+r-1), \end{align*} $$

il en résulte que z est forcément un point singulier de $\operatorname {\mathrm {Quot}}_X(E,\boldsymbol {n})$ .

2 Démonstration du théorème

Nous allons réduire notre analyse sur l’existence des singularités dans le cas «global» $(X,E)$ à la même analyse dans le cas «local» $({\mathbb {A}}^m,{\mathscr O}^{\oplus r})$ .

Lemme 2.1 Soit X une variété lisse et quasi-projective de dimension m sur ${\mathbb {C}}$ , et soit E un faisceau localement libre de rang r au dessus de X. Alors $\operatorname {\mathrm {Quot}}_X(E,\boldsymbol {n})$ est lisse si et seulement si $\operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},\boldsymbol {n})$ est lisse.

Démonstration L’énoncé résulte du fait que $\operatorname {\mathrm {Quot}}_X(E,\boldsymbol {n})$ est localement une carte étale pour $\operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},\boldsymbol {n})$ . On détaille ce fait dans la suite.

Considérons d’abord le cas $d=1$ . Soit $U\subset X$ une sous-variété ouverte tel que $E|_U = {\mathscr O}_U^{\oplus r}$ . Supposons que l’on ait un morphisme étale $\varphi \colon U \to {\mathbb {A}}^m$ . Si l’on écrit $V^{\varphi }_{r,n}$ pour le sous-schéma ouvert de $\operatorname {\mathrm {Quot}}_U({\mathscr O}_U^{\oplus r},n)$ paramétrant les quotients $[{\mathscr O}_U^{\oplus r} \twoheadrightarrow T]$ tels que $\varphi |_{\operatorname {Supp}(T)}$ soit injectif, on peut bien définir un morphisme étale [Reference Beentjes and Ricolfi1, Proposition A.3]

$$ \begin{align*} \Phi_{n}\colon V_{r,n}^\varphi \to \operatorname{\mathrm{Quot}}_{{\mathbb{A}}^m}({\mathscr O}_{{\mathbb{A}}^m}^{\oplus r},n) \end{align*} $$

en associant $[{\mathscr O}^{\oplus r} \twoheadrightarrow T] \mapsto [E \to \varphi _\ast \varphi ^\ast E = \varphi _\ast {\mathscr O}^{\oplus r} \twoheadrightarrow \varphi _\ast T]$ . En variant $(U,\varphi \colon U \to {\mathbb {A}}^m)$ pour couvrir ${\mathbb {A}}^m$ tout entier, on peut facilement confirmer le résultat dans le cas $d=1$ .

Pour le cas général, fixons $\boldsymbol {n} = (0<n_1\leq \cdots \leq n_d)$ et $(U,\varphi )$ comme ci-dessus. Le produit des morphismes étales $\Phi _{n_i}$ nous donne un morphisme étale $\Phi _{\boldsymbol {n}}$ qui apparaît dans un diagramme

où les flèches horizontales sont des immersions fermées.

On peut facilement verifier que $Z_{\boldsymbol {n}}^{\varphi }$ est aussi l’intersection schématique

dans un produit de schémas Quot classiques; comme $\operatorname {\mathrm {Quot}}_{U}({\mathscr O}_U^{\oplus r},\boldsymbol {n})\subset \operatorname {\mathrm {Quot}}_{X}(E,\boldsymbol {n})$ est ouvert, on a trouvé un sous-schéma ouvert $Z_{\boldsymbol {n}}^{\varphi } \subset \operatorname {\mathrm {Quot}}_{X}(E,\boldsymbol {n})$ qui admet un morphisme étale vers $\operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r}_{{\mathbb {A}}^m},\boldsymbol {n})$ . En faisant varier $(U,\varphi \colon U \to {\mathbb {A}}^m)$ tout comme dans le cas $d=1$ on obtient le résultat.□

On aborde désormais la démonstration de notre résultat principal.

Démonstration du Théorème A . Grâce au Lemme 2.1 on peut supposer que $(X,E)=({\mathbb {A}}^m, {\mathscr O}^{\oplus r}_{{\mathbb {A}}^{m}})$ . La lissité dans le cas $m=1$ , voir (1), est démontrée dans notre article [Reference Monavari and Ricolfi6, Proposition 2.1] et dans [Reference Mochizuki5, Proposition 2.1]. La lissité dans les cas (3a)–(3d) a été démontrée par Cheah [Reference Cheah3, Theorem, p. 43]. Enfin, (2) découle de l’isomorphisme $\operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r}, 1)\cong {\mathbb {A}}^{m}\times {\mathbb {P}}^{r-1}$ (voir aussi Remarque 2.2). Il reste à prouver qu’il n’existe pas d’autres schémas Quot ponctuels emboîtés lisses.

On note que si $\operatorname {\mathrm {Hilb}}^{\boldsymbol {n}}({\mathbb {A}}^m) = \operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O},\boldsymbol {n})$ est singulier, alors il en est de même de $\operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},\boldsymbol {n})$ pour tout $r>1$ . En effet, le tore ${\mathbb {G}}_m^r$ opère canoniquement sur $\operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},\boldsymbol {n})$ , et $\operatorname {\mathrm {Hilb}}^{\boldsymbol {n}}({\mathbb {A}}^m)$ est une composante connexe du sous-schéma des points fixes [Reference Monavari and Ricolfi6, Proposition 3.1].

Comme Cheah a démontré que $\operatorname {\mathrm {Hilb}}^{\boldsymbol {n}}({\mathbb {A}}^m)$ est singulier chaque fois qu’il ne tombe pas dans les cas (1),(2),(3a)–(3d), on déduit que, si $r>1$ , le schéma $\operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},\boldsymbol {n})$ est singulier dans les cas suivants:

  1. (1) si $d\geq 3$ , pour tout choix de $\boldsymbol {n}$ ,

  2. (2) si $m=2$ , $d=2$ , $\boldsymbol {n}=(n, n')$ et $n'-n\geq 2$ ,

  3. (3) si $m\geq 3$ , $d=1$ , $n\geq 4$ ,

  4. (4) si $m\geq 3$ , $d=2$ , $\boldsymbol {n}\neq (1,2),(2,3)$ .

Il ne reste plus qu’à démontrer que $\operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},\boldsymbol {n})$ est singulier dans les cas suivants:

  1. (A) si $m\geq 2$ , $r\geq 2$ , $d=1$ et $n\geq 2$ ,

  2. (B) si $m\geq 2$ , $r\geq 2$ , $d=2$ et $\boldsymbol {n}=(n,n+1)$ .

Le cas (A) (resp. (B)) est l’énoncé du Lemme 2.3 (resp. Lemme 2.4). □

Remarque 2.2 Soit E un faisceau cohérent au dessus d’une variété X. L’isomorphisme $\operatorname {\mathrm {Quot}}_X(E,1) = {\mathbb {P}}(E)$ s’obtient en comparant les foncteurs de modules. En revanche, le cas $(X,E) = ({\mathbb {A}}^m,{\mathscr O}^{\oplus r})$ , qui entraîne $\operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},1) = {\mathbb {A}}^m \times {\mathbb {P}}^{r-1}$ , s’obtient également à travers une présentation explicite du schéma $\operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},n)$ en tant que sous-schéma fermé du schéma Quot non-commutatif

$$ \begin{align*} \operatorname{\mathrm{ncQuot}}_m^{n,r} = \bigg\{ (A_1,\ldots,A_m,v_1,\ldots,v_r) \in \operatorname{End}_{{\mathbb{C}}}({\mathbb{C}}^n)^m \times ({\mathbb{C}}^n)^r \bigg| \begin{array}{c} (v_1,\ldots,v_r)\textrm{ est } \\ (A_1,\ldots,A_m)\textrm{-stable} \end{array}\bigg\}\Bigg{/}\operatorname{\mathrm{GL}}_n, \end{align*} $$

$\operatorname {\mathrm {GL}}_n$ opère par conjugaison sur les endomorphismes et par multiplication à gauche sur les vecteurs; enfin, la condition de stabilité se lit de la façon suivante: le sous-espace de ${\mathbb {C}}^n$ engendré par les vecteurs obtenus en appliquant tous les monômes possibles en $A_1,\ldots ,A_m$ au vecteurs $v_1,\ldots ,v_r$ coïncide avec ${\mathbb {C}}^n$ tout entier. On voit facilement que la variété $\operatorname {\mathrm {ncQuot}}_m^{n,r}$ est lisse de dimension $(m-1)n^2+rn$ . Au cas où $n=1$ , l’immersion (qui dans le cas général est définie par les relations $[A_i,A_j] = 0$ ) est triviale, et l’action de $\operatorname {\mathrm {GL}}_1$ est aussi triviale sauf sur les r-uplets de nombres complexes $(v_1,\ldots ,v_r) \in {\mathbb {C}}^r$ , qui ne peuvent pas être tous $0$ grâce à la condition de stabilité. Ceci fournit une démonstration directe de la décomposition $\operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},1) = {\mathbb {A}}^m \times {\mathbb {P}}^{r-1}$ .

Pour compléter la démonstration du Théorème A il nous reste à traiter les cas (A) et (B).

Lemme 2.3 Soit $m\geq 2, r\geq 2,n\geq 2$ . Alors $\operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r}, n)$ est singulier.

Démonstration Nous commençons par démontrer l’énoncé dans le cas $n=2$ .

Considérons un point $z \in \operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},2)$ représenté par une suite exacte

$$ \begin{align*} 0 \to \mathfrak m_0^{\oplus 2} \oplus {\mathscr O}^{\oplus r - 2} \to {\mathscr O}^{\oplus r} \to {\mathscr O}_0^{\oplus 2} \to 0, \end{align*} $$

$\mathfrak m_0 = (x_1,\ldots ,x_m) \subset {\mathscr O} = {\mathbb {C}}[x_1,\ldots ,x_m]$ est l’idéal de l’origine $0 \in {\mathbb {A}}^m$ et ${\mathscr O}_0 = {\mathscr O}/\mathfrak m_0$ est son faisceau structural. On obtient

$$ \begin{align*} \dim_{{\mathbb{C}}} T_z\operatorname{\mathrm{Quot}}_{{\mathbb{A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},2) &= \dim_{{\mathbb{C}}}\operatorname{Hom}_{{\mathscr O}}(\mathfrak m_0^{\oplus 2} \oplus {\mathscr O}^{\oplus r - 2},{\mathscr O}_0^{\oplus 2}) \\ &=\dim_{{\mathbb{C}}}\operatorname{Hom}_{{\mathscr O}}(\mathfrak m_0^{\oplus 2},{\mathscr O}_0^{\oplus 2}) + \dim_{{\mathbb{C}}} \operatorname{Hom}_{{\mathscr O}}({\mathscr O}^{\oplus r - 2},{\mathscr O}_0)^{\oplus 2} \\ &=4 m + 2 (r-2), \end{align*} $$

qui est plus grand que $\mathrm {expdim\, } \operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},2) = 2(m+r-1)$ comme $m\geq 2$ . En exploitant la connexité du schéma Quot (voir la Section 1.4), le calcul ci-dessus montre que z est bien un point singulier.

On suppose désormais que $n\geq 3$ . Considérons le sous-schéma ouvert

$$ \begin{align*} U \hookrightarrow \operatorname{\mathrm{Quot}}_{{\mathbb{A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},2) \times \operatorname{\mathrm{Quot}}_{{\mathbb{A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},1)^{n-2}, \end{align*} $$

paramétrant les $(n-1)$ -uplets de quotients dont les supports sont deux à deux disjoints. Choisissons un point $u \in U$ de la forme $u = (\mathfrak m_0^{\oplus 2} \oplus {\mathscr O}^{\oplus r - 2},\mathfrak m_{p_1}\oplus {\mathscr O}^{\oplus r-1},\ldots ,\mathfrak m_{p_{n-2}}\oplus {\mathscr O}^{\oplus r-1})$ , où $0\neq p_i \in {\mathbb {A}}^m$ pour tout $1\leq i\leq n-2$ et $p_i\neq p_j$ pour $1\leq i\neq j\leq n-2$ . Le schéma U est étale au dessus de $\operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},n)$ par le morphisme somme directe. On note v l’image du point u par ce morphisme. On trouve

$$ \begin{align*} \dim_{{\mathbb{C}}} T_v \operatorname{\mathrm{Quot}}_{{\mathbb{A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},n) &= \dim_{{\mathbb{C}}} T_u U \\ &= 4 m + 2 (r-2) + (n-2) (m+r-1) \\ &= n(m+r-1) + 2m-2, \end{align*} $$

qui est plus grand que $\mathrm {expdim\, } \operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},n) = n(m+r-1)$ comme $m\geq 2$ . Encore une fois grâce à la connexité du schéma Quot, ceci prouve le résultat.

Lemme 2.4 Soit $m\geq 2, r\geq 2$ et $\boldsymbol {n}=(n,n+1)$ pour $n\geq 1$ . Alors $\operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r}, \boldsymbol {n})$ est singulier.

Démonstration On commence par montrer l’énoncé dans le cas $n=1$ .

Considérons un point $z \in \operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},(1,2))$ representé par les quotients emboîtés

$$ \begin{align*} \bigl[ {\mathscr O}^{\oplus r}\twoheadrightarrow {\mathscr O}_0^{\oplus 2} \twoheadrightarrow {\mathscr O}_0 \bigr], \end{align*} $$

et écrivons encore une fois $\mathfrak m_0 = (x_1,\ldots ,x_m) \subset {\mathscr O} = {\mathbb {C}}[x_1,\ldots ,x_m]$ pour l’idéal de l’origine $0 \in {\mathbb {A}}^m$ . Comme on l’a rappelé à la Section 1.1, l’espace tangent en z est donné par:

$$ \begin{align*} &T_z\operatorname{\mathrm{Quot}}_{{\mathbb{A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},(1,2))\\ & = \ker\left(\vphantom{\xrightarrow{\Delta_z}}\operatorname{Hom}_{\mathscr O}(\mathfrak{m}_0\oplus {\mathscr O}^{\oplus r-1}, {\mathscr O}_0)\oplus \operatorname{Hom}_{\mathscr O}(\mathfrak{m}_0^{\oplus 2}\oplus {\mathscr O}^{\oplus r-2}, {\mathscr O}_0^{\oplus 2})\right.\\ & \qquad \left.\xrightarrow{\Delta_z} \operatorname{Hom}_{\mathscr O}(\mathfrak{m}_0^{\oplus 2}\oplus {\mathscr O}^{\oplus r-2}, {\mathscr O}_0) \right). \end{align*} $$

D’autre part, les espaces vectoriels apparaissant en $\Delta _z$ satisfont

$$ \begin{align*} \dim_{{\mathbb{C}}} \operatorname{Hom}_{\mathscr O}(\mathfrak{m}_0\oplus {\mathscr O}^{\oplus r-1}, {\mathscr O}_0) &= m+r-1,\\ \dim_{{\mathbb{C}}} \operatorname{Hom}_{\mathscr O}(\mathfrak{m}_0^{\oplus 2}\oplus {\mathscr O}^{\oplus r-2}, {\mathscr O}_0^{\oplus 2}) &=4m+2(r-2), \\ \dim_{{\mathbb{C}}} \operatorname{Hom}_{\mathscr O}(\mathfrak{m}_0^{\oplus 2}\oplus {\mathscr O}^{\oplus r-2}, {\mathscr O}_0)&= 2m+r-2. \end{align*} $$

On obtient alors

$$ \begin{align*} \dim_{{\mathbb{C}}} T_z\operatorname{\mathrm{Quot}}_{{\mathbb{A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},(1,2))&\geq (m+r-1)+(4m+2(r-2))- (2m+r-2)\\ &> 2(m+r-1) = \mathrm{expdim\, } \operatorname{\mathrm{Quot}}_{{\mathbb{A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},(1,2)). \end{align*} $$

Ceci entraîne que z est un point singulier par notre remarque à la Section 1.4.

On va maintenant supposer que $n\geq 2$ . Considérons le sous-schéma ouvert

$$ \begin{align*} U \hookrightarrow \operatorname{\mathrm{Quot}}_{{\mathbb{A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},(1,2)) \times \operatorname{\mathrm{Quot}}_{{\mathbb{A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},(1,1))^{n-1}, \end{align*} $$

paramétrant les n-uplets de quotients dont les supports sont deux à deux disjoints. Choisissons un point $u = (z,z_1,\ldots ,z_{n-1}) \in U$ , où z est comme ci-dessus et $z_i$ est representé par des quotients emboîtés

$$ \begin{align*} \bigl[{\mathscr O}^{\oplus r} \twoheadrightarrow {\mathscr O}_{p_i} \,\widetilde{\to}\, {\mathscr O}_{p_i}\bigr],\qquad p_i \in {\mathbb{A}}^m. \end{align*} $$

On va supposer également que $0\neq p_i \in {\mathbb {A}}^m$ pour tout i et que $p_i\neq p_j$ pour $1\leq i\neq j\leq n-1$ . Le schéma U est étale au dessus de $\operatorname {\mathrm {Quot}}_{{\mathbb {A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},(n,n+1))$ , par le morphisme somme directe. On note v l’image du point u par ce morphisme. On trouve

$$ \begin{align*} \dim_{{\mathbb{C}}} T_v \operatorname{\mathrm{Quot}}_{{\mathbb{A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},(n,n+1)) &= \dim_{{\mathbb{C}}} T_uU \\ &>2(m+r-1) + (n-1)(m+r-1) \\ &=(n+1)(m+r-1) \\ &=\mathrm{expdim} \operatorname{\mathrm{Quot}}_{{\mathbb{A}}^m}({\mathscr O}^{\oplus r},(n,n+1)). \end{align*} $$

Le point v est donc un point singulier.

Remerciements

S.M. est financé par NWO grant TOP2.17.004.

References

Beentjes, S. and Ricolfi, A. T., Virtual counts on Quot schemes and the higher rank local DT/PT correspondence . Math. Res. Lett. 28(2021), no. 4, 9671032.CrossRefGoogle Scholar
Cazzaniga, A. and Ricolfi, A. T., Framed sheaves on projective space and Quot schemes . Math. Z. 300(2022), no. 1, 745760.CrossRefGoogle Scholar
Cheah, J., Cellular decompositions for nested Hilbert schemes of points . Pacific J. Math. 183(1998), no. 1, 3990.CrossRefGoogle Scholar
Ellingsrud, G. and Lehn, M., Irreducibility of the punctual quotient scheme of a surface . Ark. Mat. 37(1999), no. 2, 245254.CrossRefGoogle Scholar
Mochizuki, T., The structure of the cohomology ring of the filt schemes. Preprint, 2003. arXiv:0301184Google Scholar
Monavari, S. and Ricolfi, A. T., On the motive of the nested Quot scheme of points on a curve. Preprint, 2021. arXiv:2106.11817CrossRefGoogle Scholar