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Published online by Cambridge University Press: 27 June 2016
Nous nous Proposons d’étudier au cours de cet article deux des multiples problèmes posés par la racine indo-européenne *d(e/o)y. Nous envisagerons d’expliquer tout d’abord les formes anormales des accusatifs dyām, Zῆv et diem. Cet effort nous permettra peut-être d’éclairer l’évolution phonétique des diphtongues indo-européennes à premier élément long. La deuxième partie de cet article sera consacrée à dīvī, l’ancien génitif du mot deus. L’étude de cette forme est, en effet, susceptible selon nous de jeter une lumière intéressante sur la marque du génitif singulier des thématiques latins. Nous avons considéré dans l’un et l’autre cas que la racine *d(e/o)y était féconde pour donner des mots dans la langue liturgique qui résiste, comme on le sait, particulièrement bien aux tendances de normalisation d’une langue donnée. Aussi est-on en droit de considérer la plupart des dérivés de cette racine comme un champ d’expérience privilégié pour le linguiste et pour le philologue.
1 Nous tenons à remercier M. le professeur Polomé, directeur des Etudes asiatiques à l’Université du Texas, qui a bien voulu relire ce travail. Nous nous sommes efforcé de tenir compte de ses remarques dans toute la mesure du possible. On se reportera à la lecture de ses réflexions pour pouvoir se faire une opinion personnelle sur les points qui, dans une telle matière, sont susceptibles d’interprétations différentes.
2 h: ce signe, appelé en sanscrit visarga, note une sifflante affaiblie dans certaines conditions à la finale d’un mot.
3 On trouve d’ailleurs ce traitement dans l’adverbe diū.
4 Pour la terminologie employée dans cet article, nous renvoyons à un de nos articles antérieurement publiés: “Introduction à l’Etude de la Grammaire Comparée des Langues Classiques. Notions de Phonétique et de Morphologie Indo-européenne,” Revue de V Université de Sherbrooke, décembre 1963, p. 79 sq.
5 On entend par vṛddhi un surallongement à valeur expressive ou morphologique. Ce procédé est fréquent en sanscrit. Dans dyoh le /o/ marque une ancienne diphtongue /eu/. Le /o/ ne peut donc être allongé qu’en se contractant avec la voyelle sanscrite /a/. Or /ao/ passe à /au/. Cf. pour illustrer ce phénomène morphologique le nominatif gauḥ qui représente une forme allongée de goḥ.
6 Chantraine, P., Morphologie Historique du Grec (Paris, Klincksieck, 2e édition, 1947), p. 98.Google Scholar
7 Le h de pṛthus représente une trace du caractère consonantique du schwa. On retrouve peut-être une trace analogue dans le traitement de /ə2/ et en hittite à l’initial; e.g.: hitt. .
8 II y aurait peut-être lieu de faire une étude analogue pour le yod; mais celle-ci dépasserait le cadre de notre étude.
9 Le mot bōs en latin, issu du même thème, pose des problèmes particuliers, puisque cette forme a subi semble-t-il une influence dialectale des parlers sabins.
10 Hérodien I, 328.
11 Nous ne posons pas le schwa que nous posions dans l’étude précédente, car sa présence ici n’est pas nécessaire pour la compréhension des faits. Le schwa est tombé, parce que nous avons dans ce cas un groupe de trois sonantes: /yəw/. Cette sonante est donc ici doublement débile, étant donné qu’elle est faible par nature et qu’elle occupe la deuxième place dans un groupe de trois sonantes.
12 Telle est l’explication de l’école française. L’école allemande en propose une différente. Selon elle, le /e/ de deus résulterait d’une évolution partiellement entravée de la diphtongue /ey/ en hiatus.
13 M. Ernout, op. cit. p. 30, pose les thèmes *deywei et *deyweis probablement parce que, selon lui, le /w/, si la diphtongue finale avait été /oi/, aurait dû s’absorber dans le /o/ bref comme au nominatif. Cependant le cas n’est pas exactement le même, car au nominatif et au datif ablatif pluriel le o est le premier élément de la diphtongue et ne peut absorber le /w/. C’est pourquoi *deywoi nous semble préférable à *deywei, car au nominatif pluriel la voyelle thématique se présente sous le timbre /o/. D’autre part l’opposition de /oi/ et de /ei/ prouve bien que le /w/ est tombé après la contraction respective de ces deux diphtongues. Nous reviendrons sur cette idée un peu plus loin.
14 Niedermann, M., Phonétique Historique du Latin (Paris: Klincksieck, 1953), p. 107.Google Scholar
15 Ernout, A., Recueil de Textes Latins Archaïques (Paris, Klincksieck, 1957), p. 7.Google Scholar
16 Ibid., p. II.
17 La forme Segomari prouve bien que ce /i/ ne peut remonter à une ancienne diphtongue. En effet, le thème *Segomarei serait passé en gaulois à *Segomare.
18 Cette démonstration s’appuie sur les éléments suivants: l’opposition entre le génitif Brundisī et le locatif Brundisit; le fait que dans les inscriptions, les nominatifs pluriels sont notés ei, e.g. Virei, Oinovorsei, alors que le génitif ne donne pas lieu à de telles notations; le traitement en gaulois de Segomari. On pourrait ajouter à toutes ces raisons l’explication phonétique du génitif dīvī que nous avons esquissée, du moins si elle mérite d’être retenue.
19 Cette explication nous semble ne pas rencontrer d’obstacles insurmontables, si l’on se réfère aux formes mithunībhū, grāmībhū etc. … Ces thèmes en i peuvent très bien se comprendre comme des génitifs et sont bien par rapport au sujet de bhū dans un rapport de subordination comparable à celui de l’adjectif par rapport au nom qu’il qualifie. En effet, grāmībhū signifie “être villageois,” mais le mot à mot pourrait bien être: “être du village.” De même mithunībhū “être apparié,” pourrait signifier plus exactement: “être, faire partie d’un couple, d’une paire.”