Published online by Cambridge University Press: 11 October 2017
Le commerce de l'homme en tant que marchandise a été, des siècles durant, une des activités florissantes de la Méditerranée ; pas seulement dans l'antiquité et le moyen âge, mais encore à une époque récente, — il suffit d'évoquer à cet égard la « piraterie barbaresque », dont la conquête de l'Algérie en 1830 aura à peu près marqué le terme. L'homme marchandise, — est-ce pour l'historien, comme pour les économistes, une bonne mesure ? Sans doute pas une mesure fixe, on le voit.
En tout cas, n'utilisons pas, sans y être très attentif, le mot même de piraterie, employé à tort pour cet autre mot, la course. D'où des erreurs sur la signification de ces opérations qui, en ce qui concerne les Barbaresques, furent bel et bien des actes de guerre.
page 157 note 1 Isnard, Hildebert, Sur les destins de l'Afrique du Nord, dans Annales (E. S. C), n° 1, 1950, p. 124.Google Scholar
page 157 note 2 Le rôle de la course chrétienne a été évoqué dans la Revue Africaine, 1er trimestre 1952, p. 105 à 113, par J. Godechot, avec note de M. Ëmerit : La Course maltaise le long des côtes barbaresques à la fin du XVIIIe siècle.
page 158 note 1 Royal Malta Library, Arch. 1772. Récit d'une croisière en 1755 : à Naples, fêtes continuelles pendant le séjour de l'escadre, du 22 juillet au 28 août.
page 158 note 2 Ettore Rossi, Storia délia Marina dell Ordine di san Giovanni di Gierusalemme, 1930.
page 159 note 1 Le Liber Bullarum des archives de Saint-Jean et La Valette renferme la copie de toutes les Bulles de chancellerie de l'Ordre, en particulier les patentes de course, délivrées à des armateurs privés. Ces patentes sont le plus souvent rédigées ad Pyraticam et mercaturam exercendam. La correspondance diplomatique des Arch. Nat. à Paris (Malte : A. E., B. I, 814 à 824) compte nombre de lettres du chargé d'affaires français à Malte où il est parlé d'un bâtiment commerçant qui renonce pour une saison au commerce et devient corsaire, quitte à exercer de nouveau un commerce régulier six mois plus tard, quand le taux de profit des deux activités a changé à l'avantage du commerce.
page 159 note 2 Tous ces renseignements se trouvent dans le Liber Bullarum de la Royal Malta Library à La Valette (Arch. 500, année 1696, à 624, année 1798) et dans le Liber Conciliorum Status : Royal Malta Library (Arch. 265 à 275). Il y a également de nombreux renseignements sur la course maltaise dans les archives de la Chambre de Commerce de Marseille (Kl à 4 I) et aux Archives Nationales à Paris, particulièrement Affaires Étrangères B. III, 406 et 484, et 814 à 824.
page 159 note 3 L'avantage essentiel à Malte est que les Maltais ont un débouché des esclaves, écrit à la Chambre de Commerce de Marseille un « conseilleur » anonyme qui suggère de proposer une prime de 100 écus par esclave capturé aux capitaines marchands maltais qui armeraient en course contre les Tripolains (vers 1728-1729, pendant la guerre entre la France et Tripoli ; arch. de la Ch. de Commerce de Marseille, E. 64). Malheureusement on ne connaît pas avec précision pour quel pourcentage la vente des esclaves entre dans les revenus de l'Ordre. Il n'y a pas de « budget » avant la fin du xviiie siècle, c'est-à-dire un moment où la course chrétienne est en pleine décadence par rapport au commerce régulier et où les besoins des chiourmes des galeries de Saint- Jean rendent difficile la vente des esclaves. En 1738 l'Ordre vend 41 esclaves ; 33 en 1739, 134 en 1769 (qui rapportent seulement 24 915 écus car ce sont des vieillards ou des estropiés). L'exercice 1794-1795 porte un revenu de 56 350 écus provenant de la vente des esclaves, sur un total de revenus de 966 000 écus, contre seulement 1 206 écus contre 1 236 000 de revenus en 1783-1784 (Royal Malta Library, Liber Conciliorum Status, Arch. 272-275, et Archivio Tesoro, Contri libri délia Conservatoria, Arch. 700 à 704) ; mais en 1782 plus de 200 esclaves avaient été vendus, pour 76 700 écus, soit 8 p. 100 environ du revenu total moyen de l'Ordre (provenant essentiellement des « commanderies » sur le continent : l'Ordre est devenu « État-rentier »). Ces chiffres ne font pas intervenir la vente des marchandises capturées, ni le produit de la « course privée
page 160 note 1 Le mécanisme est admirablement démontré dans la lettre du bailly d'Avernes du Bocage, représentant de la France à Malte, au ministre Maurepas, le 10 nov. 1729 (Arch. Nat., A. E., B. I, 817, f° 290). N'importe quel pavillon est bon pour la course ; en 1686, le marquis de Fleury arme en course sous pavillon de Pologne (A. B., B. I, 814).
page 160 note 2 Par exemple l'affaire Abraham Massad en 1720-1735 : Arch. Nat., A. E., B. I, 817 et 818, et B III, 24, et celle des marchands arméniens en 1715-1723, A. E., B. I, 816.
page 160 note 3 Toute la correspondance de Livourne est intéressante à cet égard (A. E., B. I, 695 à 753).
page 160 note 4 Consul Cotolendy (Livourne) à ministre Maurepas, 14 fév. 1682 (Arch. Nat., A. E., B. I, 697).
page 160 note 5 En 1682 par exemple, la « matricule de galériens turcs » sur les galères du roi de France à Toulon (Arch. du Port de Toulon, n° 10-106 bis) compte 1026 noms, auxquels s'ajoutent 361 autres en 1687, 365 en 1690, 318 en 1691, etc.
page 161 note 1 D'autres puissances gardent leurs galères en service jusqu'à la Révolution, en particulier Malte.
page 161 note 2 Arch. Nat., A. B., B. I, 814, 20 sept. 1674 ; en 1678, il s'agit d'acheter des Dalmates « esclavons ».
page 161 note 3 Au contraire, les esclaves chrétiens chez les Musulmans redevenaient libres en reniant.
page 161 note 4 Il existait d'autres marchés d'esclaves secondaires : Venise, mais surtout les îles du Levant, en particulier Chio, où les prix sont d'ailleurs très inférieurs à ceux pratiqués en Méditerranée occidentale.
page 162 note 1 Après 1720, il est difficile de préciser la valeur d'un esclave destiné aux galères : les achats se font plus rares parce que les galères voient leur rôle diminuer.
page 162 note 2 Quelques indications chiffrées pour le xviiie siècle :
prix différentiels sont officiellement reconnus, comme en témoigne cette lettre du Chevalier des Pennes, représentant de la France à Malte ; il vient de recevoir l'ordre de racheter plusieurs Maures, destinés au roi du Maroc, et souhaite qu'on ne les lui désigne pas nommément : leur prix en serait beaucoup majoré, comme le prouve le précédent du bey de Tunis qui, dit-il, « m'ayant donné l'hiver passé la commission d'un rachat d'esclaves sans me gêner, ni pour l'âge, ni pour la patrie, je lui en envoiai 160, vêtus et transportés chez lui pour une somme de 70 000 livres (soit environ 435 livres par esclave) : cette somme n'aurait pas suffi pour lui en faire passer 40 s'il les avait désignés un par un ». — Lettre au ministre du 2 septembre 1757. Arch. Nat., A.B., B.I. 822, f° 385.
page 163 note 1 Voir instamment Arch. Nat., A. E., B. III, 316 à 319, et pour le xvne, Charles Penz, Les Captifs français au Maroc au XVIIe siècle, Rabat, 1944, qui utilise les tomes .parus des Sources inédites de l'histoire du Maroc, de Castries (poursuivi actuellement par CossÉ-Brissac).
page 164 note 1 Néanmoins, il y a encore 9 000 esclaves i turcs » à Malte au milieu du xviiie siècle lors de la tentative manquée de révolte des esclaves en 1749, chiffre qui prend tout son sens quand on le rapproche du nombre total d'esclaves chrétiens au Maroc : 800 en 1708 ; 660 en 1723, etc….
page 164 note 2 Le chevalier d'Escrainville, représentant de la France à Malte, se vante d'avoir enlevé avec deux malheureux vaisseaux, en 1664 et 1665, quatre vaisseaux turcs d'un convoi, ce qui lui rapporta 200 000 écus (A. E., B. I, 814, 6 sept. 1685) 1