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Pour une Histoire monétaire de la France au XIXe siècle : Le role des monnaies de cuivre et de billon
Published online by Cambridge University Press: 26 July 2017
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L'Histoire Monétaire de la France reste à faire. Et pourtant, elle engage la réalité économique, coutumière, contraignante, elle permet de saisir — mieux que les statistiques officielles de production ou la chronologie des inventions — les vicissitudes journalières, les habitudes, les coutumes de pensée d'un monde qui nous demeure encore fort mal connu. Nous voudrions seulement souligner ici quelques directions de recherche, en prenant comme exemple l'inflation de la monnaie de cuivre et de billon au début du XIXe siècle.
La monnaie de cuivre a, comme chacun sait, joué un rôle essentiel dans la vie quotidienne de jadis : l'ouvrier, le journalier agricole était rarement payé en monnaie d'argent ; quant à l'or, il n'en voyait pour ainsi dire jamais.
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- Copyright © Copyright © École des hautes études en sciences sociales Paris 1959
References
1. Notons que le phénomène n'est pas spécifiquement français, mais presque européen. L'inflation de monnaie de billon est un fait constant, surtout en Allemagne depuis Frédéric II, et après 1814 le billon prussien se répandit par toute la Rhénanie. (Archives DU Grand Duché DE Berg [à Dusseldorf] (Monnaie, 195) ; — Noss, A., Die Mûnzen von Berg und Julich, t. II, Munich, 1929 Google Scholar, et F. VON Schôtter, Dos Preussische Mûnzwesen in 18 Jahrh., 1913.
1. De grandes rafles de cuivre avaient été faites (en 1792) à Lyon, Brest (cuhre des armements maritimes) et Strasbourg (place intermédiaire avec l'Allemagne).
2. Sur cette période, voir Dewamin, Cent ans de numismatique française, t. II : Histoire du Numéraire, 1894 ; les brochures conservées aux Archives Nationales : AD IX 537-538 ; les mémoires de DES Rotours (ibid., AF IV 1078) et, aux Archives DE LA Monnaie, les papiers Darcet (fabrication des sols de cloche).
3. Rollin, Rapport (24 Vendémiaire an VII) aux Cinq-Cents.
4. Abrégé des Observations du Sr Holker fils sur le commerce de l'Angleterre (Mémoire inédit, 1770, Archives privées).
1. Droz était associé à Mathieu Boulton. Cf. L. P. Molard, Notes sur les diverse» inventions de J. P. Droz, graveur mécanicien (s.d.), 85 p.
2. Vendus 40 sous, ils ne leur en coûtaient que 28 rendus en France.
3. Rapport cité, p. 8.
1. Lettre du ministre du Trésor, 13 août 1811 (ARCH. NAT., AF IV 1864).
2. Traité d'économie politique, t. II, 5e édit. 1826, p. 44-50.
1. Appuyé par le comte Defermon, qui avait la haute main sur les questions monétaires. — Sur cette enquête, voir son rapport (ARCH. NAT. ibid.).
1. D'après Defermon, depuis 1726, — déduction faite des refontes, — il avait été frappé, en or et argent, 3 200 000 000 F et 50 000 000 F en cuivre et billon. Le rapport étant de 1 à 64, il faudrait donc une exportation et une fonte de monnaie du tiers des espèces, pour respecter le rapport légal de 1 à 40.
1. « Les rescriptions des Postes en fournissent seules au payeur. »
2. La Vienne, par exemple, où l'on avance « la facilité du transport par la Loire ». Inversement, dans la Haute-Vienne, les « exportations du département » provoquent la rareté !
1. Houillères de Decize, hauts fourneaux et forges.
2. A preuve, sous la Révolution, les caisses de secours, telle la Caisse d'échanges des petits assignats contre de la monnaie de cuivre (ou Caisse Nationale des sols), qui fonctionna de 1791 à 1794, rue Vieille-du-Temple. On en trouve les archives complètes aux Archives Nationales (F30 187-190).
3. « Où elle était auparavant dans une quantité prodigieuse ».
4. « Des soupçons pèsent à cet égard sur les agents des droits réunis. »
5. Dans le département de l'Ourthe, « la monnaie de Liège, quoique devenue rare, est cependant la seule employée. »
1. Décret Impérial du 11 mars 1807.
2. Dans les Alpes maritimes, « le cuivre est recherché par les Génois ».
3. En Corse, préférence est accordée aux monnaies étrangères.
4. Rapport sur les banques au Premier Consul (An XI) [ARCH. NAT. AF IV 1070]. C'est de ce dossier réuni par le ministre du Trésor que nous tirons cette étude.
5. Cf. Dejean, E., Un préfet du Consulat : Beugnot, Paris, 1905 Google Scholar. Beugnot devenu ministre des Finances du grand duché de Berg, eut à résoudre le même problème de l'inflation de billon (cf. ARCH. NAT. AF IV 1864).
1. II n'existe rien sur la Banque à Rouen à cette date. Sur le commerce, cf. A. CHABERT, La foire aux toiles de Rouen (thèse complémentaire), 1945 (inédite).
2. Telle la Caisse du Commerce, du normand Lecouteulx-Canteleu.
3. La Société générale du Commerce de Rouen escomptait les effets à deux signatures et à 180 jours, recevait les dépôts de 250 F et au-dessus, à charge d'intérêts au profit du déposant, et émettait des billets de 100, 250, 500 et 1 000 F, mais sa circulation resta toujours inférieure à 200 000 francs.
1. #x00AB; Caisse d'échanges des monnaies. »
1. Rapport anonyme. Barbé-Marbois le jugea excellent, digne d'être lu par le Premier Consul.
2. Signé R.G. A Rouen, de l'Imprimerie de Robert, Bureau des Petites Affiches.
3. Pétition de 12 pages, dont 3 de signatures.
4. L'épigraphe est tirée de Mirabeau : « La monnaie est la mesure de toutes choses ; le seul moyen de gagner sur la mesure, c'est de tromper sur sa contenance, son exactitude. »
1. Un rapport chiffre à 3 millions le capital travaillant des trois banques de sols, un autre : 2 millions. Le premier chiffre paraît le plus vraisemblable.
1. Rapport du 17 Floréal An x (Bureau du Ministère du Trésor).
2. Emission : 450 000 L.
3. De cette disette du numéraire, on rend responsable à Rouen la centralisation financière : « Toutes les contributions des départements se versent à Paris, les paiements s'effectuent à Paris, les affaires se concentrent à Paris. Rien ne circule plus dans les départements. Maintenant, les entrepreneurs, les fournisseurs, les rentiers, les créanciers de l'Etat et tous les gens d'affaires sont contraints d'avoir des fondés de procuration dans la capitale ; la mauvaise foi, les formes, les lenteurs, les exactions, les fausses Interprétations de la loi rebutent les habitants des départements, contrarient leurs spéculations, absorbent leurs bénéfices. Hors de Paris, point de revirement, par conséquent plus de circulation, de là la décadence du commerce, l'impossibilité de fournir des ouvrages aux ouvriers, d'alimenter les ateliers….. Telle est la cause de la rareté du numéraire dans le département, malgré laquelle tout y est à un prix exorbitant » [Mémoire de Goulet, Conseiller d'arrondissement de Forges-les-Eaux, 16 Messidor An X] (ABCB. NAT. F4 1060).
1. Rapport du 17 Floréal An X, loc. cit. Signalons, en particulier, que les industriels ne s'en servaient pas seulement pour leurs salaires, mais pour leurs dépenses de bâtisse.
2. Rappelons que le « haut commerce » refusait les bons de sols.
3. Etablie le 1” Frimaire An VIII, au capital de 600 000 L., elle émettait des billets de 50, 25 et 100 L.
4. Telle la Caisse d'Echanges, « dont les billets de 10,15, et 25 L. sont reçus difficilement dans le commerce, et qui fait un grand agiotage ».
1. « La lettre imprimée du receveur d'Indre-et-Loire doit être lue en entier. Un comptable pourrait être traduit devant les tribunaux… pour avoir ainsi dénaturé les valeurs qui doivent être reçues dans ses caisses. »
2. Le Gouvernement ne parvenait pas à se faire obéir en ce domaine : « le 11 Pluviôse An XII, « le Ministre du Trésor Publie rend compte des ordres qu'il a donnés ponr la suppression des banques de sols de Rouen. Elles ont été supprimées au commencement de l'année, non sans difficulté et la lenteur avec laquelle les intéressés y ont procédé a pensé occasionner de grands désordres. Aujourd'hui ils recommencent leurs émissions. La Chambre de Commerce réclame contre cette contravention à la loi du 4 Germinal An XI. Le Ministre tiendra la main à ce qu'elle soit ponctuellement exécutée ».
3. « La monnaie de cuivre est très abondante. L'enregistrement en donne de grandes quantités. Les caisses en sont encombrées, le receveur général les vend à perte, le payeur en donne le dixième en paiement, ce qui excite des plaintes. » Même situation dans l'Eure et l'Eure-et-Loir.
4. Rapport du Bureau du Commerce, du 4 décembre 1819 (Archives Privées).
1. « Les billets ne portent que l'indication du domicile où ils seront payés, à peine sont-ils marqués de lettres initiales de ceux qui en répondent. Il n'y a qu'un petit nombre de maisons qui à la suite de désagréments ont cru devoir signer leurs bons et qui dès lors se sont astreintes à les écrire sur du papier timbré. »
2. Observations sur la refonte des anciennes monnaies, s.d. [1823].
3. « On trouverait peu de villes où la monnaie de cuivre soit plus abondante qu'à Rouen » ( Jouannin, J. B., Des Monnaies considérées comme faisant partie du système métrique, Rouen, 1836 Google Scholar). Voir plus loin, p. 85. En 1845 la démonétisation de la monnaie de billon provoqua des agitations populaires à Falaise, à Caen, et surtout à Rouen où se forma une association pour défendre les intérêts des artisans (ARCH. NAT. BB18 1434).
1. « Cet abus est une des lois rigoureuses, déclare le préfet de la Seine-Inférieure en 1819, que le besoin de vendre fait subir au vendeur et que les marchands de la ville seraient embarrassés de justifier. » En 1811, le ministre du Trésor considérait cet abus comme « inévitable ».
2. Nous nous contentons ici de brèves indications sur l'histoire de la monnaie de cuivre à partir de la Restauration. Une enquête plus approfondie s'imposerait. Remarquons toutefois que la destruction des archives du Ministère des Finances (1870 et 1945) et celle, partielle, des archives de la Monnaie de Paris nous privent de sources irremplaçables.
3. Mémoire sur la refonte des monnaies de cuivre présenté à S.E. le Ministre des Finances par les Directeurs des Monnaies de France (1822).
1. Cependant dans ces départements les receveurs généraux ne se faisaient pas faute d'envoyer au Trésor plus du 1 /40 en monnaie divisionnaire, ce qui souleva en 1828 les protestations de l'Inspection des Finances (Archives DE LA Monnaie).
2. Discours à la Chambre du député Muret DE Bord, en mai 1843.
3. En 1825, les autorités s'inquiètent de la circulation en Haute-Garonne de sols anglais et des importations clandestines, à Bordeaux, de demi-shellings de fabrication suédoise (Archives DE LA Monnaie).
4. ARCH. NAT. C. 829. — De 1814 à 1819, vingt-cinq affaires de fausse monnaie de cuivre furent jugées en Cour d'Assises sur 146 procès pour fausse monnaie (Ibid. A A 4).
5. Baron Lambert, Le Messager, 2, 8, et 13 octobre 1839.
6. Cf. E. Dumas, Notes sur l'émission en France de monnaies décimales de bronze (1852-1865), 1868.
1. Baron Lambert, loc. cit.
2. Cf. Inspection Générale des Finances, Rapport à M. le Ministre des Finances sur la refonte des pièces de 1 et 2 liards, des pièces de 10 centimes… (déc. 1838), et Rapport fait au Ministre des Finances par la Commission instituée pour étudier les questions relatives à la refonte de la monnaie (1840).
3. Selon certains témoignages, la pénurie de cuivre obligeait les paysans à des accords de troc (A. Bonneville, Nouveau système de réforme monétaire, 1843, p . 20).
4. Rapport de Vinspection des Finances, op. cit. Pour les pièces de dix centimes à la lettre N, « le faux-monnayage s'exerce avec tant de facilité sur ces pièces que cette considération doit déterminer le Gouvernement à retirer très promptement de la circulation cette monnaie dont la refonte présentera d'autant plus de perte qu'on la différera davantage » (Ibid., 1838).
1. AKCH. NAT. C. 839. — Signalons encore les plaintes sur la pénurie de pièces d'un et deux centimes et de demi-sous. Ces pièces i permettent d'augmenter et de diminuer par gradations insensibles le prix de certaines denrées de nécessité qui sont l'objet de la consommation du pauvre Il y a en France un besoin absolu de monnaies plus petites que 5 centimes, car, faute d'en avoir dans les départements de l'Est, on est obligé de faire usage de pièces suisses, allemandes et hollandaises dont plusieurs sont plus petites que le centime » (J.B.Jouannin, op. cit.). Faute de telles pièces, l'ouvrier, forcé souvent d'acheter par livre et demi-livre certaines denrées, doit les payer plus cher. En 1905 encore, on discutait du problème des « demi-sous » qui permettait de graduer les hausses de prix…
2. Voir les débats à la Chambre des Députés lors de la discussion du projet (Le Moniteur, 29 mai-2 juin 1843).
3. Un député, M. Lestibourdois, rappela à la tribune de la Chambre certains troubles qui avaient éclaté sous l'Empire à Lille : « Permettez-moi de citer à la Chambre un fait qui m'a vivement impressionné dans ma jeunesse. C'était sous l'Empire. Un jour, le bruit se répand dans une grande ville manufacturière que tous les sous marqués de l'effigie monarchique cesseront d'avoir cours. Une panique inexprimable se répandit aussitôt parmi les ouvriers et les commerçants en détail, ils couraient faire des emplettes qu'on leur refusait, ou bien le prix des denrées payées en cuivre devenait exorbitant. On se rendait en foule chez les fondeurs, on leur demandait quel était le prix d'une livre de cuivre et combien il fallait de sous pour une livre ; et vous pouvez deviner si la réponse mettait du calme dans les esprits et de l'espérance dans les coeurs ; aussi quelque peu que les spéculateurs donnaient au-dessus de la valeur du cuivre, on leur livrait les sous, on croyait avoir fait une bonne affaire en ne perdant pas la différence de la valeur nominale à la valeur intrinsèque… ».
1. Les considérants du décret exposent clairement la situation à cette date : « Considérant que la refonte générale des monnaies de cuivre, de métal de cloche et de bronze, fabriquées il y a plus d'un demi-siècle, est une opération depuis longtemps réclamée par les voeux publics. Que la difformité de ces monnaies, leur poids incommode et la diversité de leurs empreintes, sont autant de motifs qui, sous le rapport de l'art et dans l'intérêt des transactions commerciales, doivent faire désirer de les voir disparaître entièrement de la circulation Que la fabrication des pièces d'un et deux centimes est surtout réclamée par les citoyens peu aisés qui se plaignent avec raison d'être privés d'une monnaie nécessaire à leurs besoins et à leurs intérêts les plus urgents… »
2. Pour le détail de la fabrication (par année), Dewamin, op. cit., t . I I , p. 292-293. Sur l'opération, E. Dumas, op. cit., et Archives DE LA Monnaie DE Paris.
1. Remarquons que, depuis 1870, le terme de billon ne désigne plus la monnaie en alliage d'argent et de cuivre, mais exclusivement les pièces de bronze.
2. Cf. le débat à la Chambre des Députés du 6 novembre 1896 (Annales de la Chambre des Députés, session de 1896, p. 138 et suiv. Voir également Le Figaro, 5 novembre 1896). Il faudrait encore étudier le drainage des sous à destination des colonies, surtout d'Afrique noire, autre source de fructueuses spéculations.
3. Les frais de transport du cuivre étant compensés par le bénéfice purement commercial sur les marchandises (Archives DE LA Monnaie).
4. Chambre des Députés, session de 1892, proposition de loi 2 300.
1. « Les paiements des ouvriers qui travaillent à la journée ou à la semaine ont lieu exclusivement en monnaie de billon » et l'on paie le plus souvent en paquets de cent sous, — sans que l'ouvrier puisse vérifier la somme : « Voyez-vous les 400 ou 500 ouvriers d'une usine se mettant à déplier les paquets de cent sous qu'on leur donne ? car on leur donne ces sous en paquets enveloppés… »
2. Nous avons pu recueillir des témoignages oraux d'après lesquels, dans les campagnes de l'Est, les coquetiers payaient leurs achats en sous étrangers, et les paysans redonnaient ces sous aux colporteurs et merciers ambulants. Vers 1905, en Haute- Saône, les enfants mettaient de côté les sous étrangers qui pouvaient circuler pour les donner à la foire à des petits marchands qui les recueillaient spécialement. Tout un petit trafic occulte de ces monnaies sans valeur légale semble avoir persisté dans ces régions jusqu'à la guerre.
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- Cited by