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Le berbère au Moyen Âge

Une culture linguistique en cours de reconstitution

Published online by Cambridge University Press:  20 January 2017

Mehdi Ghouirgate*
Affiliation:
Université de Bordeaux

Résumé

Si dans la vulgate de l’histoire de l’Occident musulman médiéval les Berbères apparaissent comme une composante majeure tant sur le plan politique que militaire, il n’en va pas de même de leurs langues. Cet article se propose de revenir sur cette lacune en appréhendant la question de l’islamisation et de l’étatisation des sociétés du Maghreb sous les empires almoravide et almohade à travers le prisme de la langue berbère. En effet, contrairement à l’Orient qui vit quasiment disparaître les langues autochtones copte et syriaque, peu de Maghrébins étaient capables de lire et de parler l’arabe avant les XIIe et XIIIe siècles. Or le berbère servit de support à l’islamisation non seulement au Maghreb mais également en Afrique subsaharienne et fut à ce titre couché par écrit. Toujours dans la même logique, les Almohades se dotèrent d’une langue sacrée propre qui était la langue berbère des Maṣmūda à laquelle ils agrégèrent bon nombre de termes arabes, essentiellement puisés dans le champ lexical religieux. Cette langue en vertu d’une tradition prophétique (ḥadiṯh) ne fut pas appelée « langue berbère » mais « langue occidentale » ; les Almohades-Berbères cherchaient ainsi à se doter d’un idiome qui soit l’expression du message sacré.

Abstract

Abstract

Received accounts of the history of the western Muslim world portray the Berbers as an important military and political force, but pay little attention to their languages. This article attempts to redress this omission by using the Berber language to revisit the question of the islamization and the establishment of state control in western North Africa under the Almoravid and Almohad empires. In contrast to the Middle East, where the indigenous Coptic and Syriac languages virtually disappeared, few inhabitants of the Maghreb were able to read or speak Arabic before the twelfth or thirteenth century. Berber was thus the medium of islamization not only in the Maghreb but also in sub-Saharan Africa, a process in which the written language played an important part. Following a similar logic, the Almohads developed their own sacred language, essentially the Berber of the Maṣmūda with the addition of a significant number of Arabic words drawn predominantly from religious vocabulary. In accordance with a prophetic tradition (ḥadiṯh), this language was not called “Berber” but “the language of the west.” The Almohad-Berbers thus sought to develop a dialect that was the expression of the sacred message.

Type
Langues d'Islam (XIe-XVe siècle)
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 2015 

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Footnotes

*

Cette étude s’insère dans le cadre du projet IGAMWI (« Imperial Government and Authority in Medieval Western Islam ») financé par le septième programme-cadre de recherche et développement de l’European Research Council : FP7-ERC-StG-2010-263361. Participent à ce projet, dirigé par Pascal Buresi, Hicham el Aallaoui, Hassan Chahdi, Travis Bruce et moi-même.

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28- Ibid., p. 128, 178, 198 et 200. Les Maṣmūda étaient la composante berbère majoritaire du Maghreb extrême.

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56- C’est-à-dire les autres Almohades de condition.

57- On ne sait pas s’il s’agit des non-Almohades de condition ou, plus probablement, des Almohades de rang inférieur.

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61- Al-Qaṭṭān, Naẓm al-ğumān, op. cit., p. 173.

62- Ibid.

63- Ibn Al-Abbār, at-Takmila li-Kitāb ṣila, op. cit., t. 4, p. 92.

64- AŠ-Ṣatibī, Kitāb al-i‘tiṣām, op. cit., p. 60 et 78-79.

65- Ibn ‘Iḏārī, al-Bayān al-muġrib fī aḫbār mulūk al-Andalus wa-l-Maġrib, op. cit., p. 286.

66- Ibn Al-ḪaṬīb, al-Iḥāṭa fī aḫbār Ġarnāṭa, op. cit., t. 1, p. 224.

67- Dans un contexte almohade, ce terme revêt l’acception spécifique de compagnon ou de descendant des compagnons d’Ibn Tūmart.

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77- Ibid., p. 275 et 93.

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83- Documents inédits d’histoire almohade…, op. cit., p. 151.

84- Ibid., p. 45. Ibn Tūmart s’adresse à l’assemblée des Almohades pour qu’on laisse passer son père.

85- Ibn Abī Zar‘, Rawḍ al-qirṭās, op. cit., p. 288.

86- Documents inédits d’histoire almohade…, op. cit., p. 95. Dans le texte il est l’équivalent de l’arabe mağlis.

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89- Al-Idrīsī, Nuzhat al-muštāq, op. cit., p. 71.

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91- Ibid., p. 191.

92- Al-Idrīsī, Nuzhat al-muštāq, op. cit., p. 75 ; Az-Zuhrī, Kitāb al-Garāfiya…, op. cit., p. 190.

93- Al-Maqqarī, Nafḥ aṭ-Ṭīb, op. cit., t. 3, p. 146.

94- Ibid.

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97- Documents inédits d’histoire almohade…, op. cit., p. 61.

98- On donnait généralement ce nom à un enfant né après une période de sécheresse.

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