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« Ordres » ou « puissances » : L'exemple des états de Flandre

Published online by Cambridge University Press:  11 October 2017

J. Dhondt*
Affiliation:
Professeur à l'Université de Gand

Extract

Parmi les problèmes dont la solution est fondamentale pour l'intelligence d'une société humaine figure le partage du pouvoir entre les diverses « puissances » existant à l'intérieur de cette société. Monopole du pouvoir au profit du prince ; exercice de l'autorité suprême par un certain nombre d'hommes ; combinaison de ces deux systèmes —telles sont les possibilités. Plus exactement, dans chaque société humaine, il y a perpétuelle évolution d'un état vers un autre, la répartition de l'autorité étant étroitement liée à ce phénomène fluctuant qui se nomme : les rapports de forces à l'intérieur des sociétés.

Type
Research Article
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1950

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References

page 289 note 1. Un prince territorial est autant un suzerain qu'un souverain. Rien de plus déconcertant pour l'esprit moderne que les rapports entre un suzerain et un vassal. Le suzerain, en effet, est obligé de consulter le vassal ; le vassal a non seulement le droit, mais le devoir, de conseiller son suzerain —mais ce dernier n'est point tenu de suivre l'avis que lui donne le premier. En pratique, bien entendu, ce sont les rapports de forces entre l'un et l'autre qui sont déterminants.

page 289 note 2. Presque partout ils ont, comme on sait, survécu à l'échelle provinciale.

page 290 note 1. État de la question de tout premier ordre dans Lousse, E., La société d'Ancien Régime, t. I. (Louvain, 1943), p. 163.Google Scholar

page 290 note 2. C'est la thèse exposée et défendue dans le livre de Lousse, cité ci-dessus. Sur ce point précis, cf. p. 147.

page 290 note 3. Ibid., p. 269-326 et passim.

page 290 note 4. Ibid., p. 42-43.

page 290 note 5. Ibid., p. 257. — « Celui qui parvient à obtenir un statut public avec le droit de se faire représenter par députés, termine victorieusement la course ». — P. 270 : « Les statuts ainsi acquis restent inchangés quant aux principes jusqu'à ce que les ordres soient écrasés par le rouleau de la révolution libérale ».

page 291 note 1. Sur ses origines, voir Dhondt, J., Origines de la Flandre et de l'Artois (Arras, 1945).Google Scholar

page 291 note 2. Inutile d'insister sur ce que cette vision a de volontairement schématique : il est trop clair qu'il y avait des familles de propriétaires fonciers antérieures à l'établissement du comté et qui ont survécu. L'origine de la classe des chevaliers est donc au moins double.

page 292 note 1. Excellent exposé de ces événements par Ganshof, F. L., La Flandre sous les premier” comtes (58 édition, Bruxelles, 1949), p . 112124.Google Scholar

page 292 note 2. Celui de Galbert de Brugesî(éd. Pirenne, Paris, 1891) et celui de Gautier de Thérouanne (M. G. H. SS., XII).

page 292 note 3. Ou, plus exactement, alliance préalable à la constitution d'un ordre.

page 292 note 4. Cf. Gauthier de Thérouanne, c. 36, p. 553, Herman de Tournai (M. G. H. SS., XIV, c. 31,. p. 283), Galbert, c. 34, p. 57.

page 292 note 5. Galbert, c. 53, p. 84.

page 292 note 6. C. 51, p. 80-81.

page 293 note 1. Ibid., c. 95, p. 138-139.

page 293 note 2. Les différents barons « se obsidioni… non discessuros… jure jurando conflrmaverunt » (Gauthier de Thérouance, loc. cit.). Les barons « conjurabant… nunquam sub illo comité… sese militaturos.. » (Galbert, c. 34) ; « ex civitatibus et castris burgenses stabant in eadem securitate.. ut nihil in electione nisi communiter consentirent.. » (Ibid., c. 53). Voyez encore c. 51.

page 293 note 3. Ainsi qu'il ressort précisément de la suite des événements, le comte Guillaume Cliton s'avéra absolument anti-urbain : voyez le réquisitoire que les Gantois dressent contre lui (Galbert, c. 95, p. 139) : « Violentiam.. in Insulam lecistis… cives in Sancto Audomaro persecuti sitis… nunc quoque in Gandavo cives, si potueritis, maie tractaberitis », et plus loin, p. 140 : « Ecce, patet quomodo mercatores et universae terrae Flandriae negotiatores obsessi sunt causa comitis istius et jam per annum istum comsumpsimus substantias nostras, et însuper quicquid in tempore alio sumus lucrati… » Il n'y avait rien de théorique, on le voit, 4ans l'intérêt porté par les villes au choix d'un nouveau comte!

page 294 note 1. Ibid., c. 95, p. 139 : — « Ponatur curia vestra, si placet, m Ipra, qui locus est in medïo terrae vestrae, et conveniant principes utrimque nostrique compares (c'est un « pair » ou baron qui est le porte-parole des Gantois) ac universi sapientiores in clero et populo… et dijudieent : si potueritis comitatum.. deinceps obtinere, volo ut obtineatis ; sin vero taies estis… discedite a comitatu… » Notons en passant que les seuls chevaliers qui sont supposés participer à la Cour plénière sont les pairs ou barons.

page 294 note 2. Le traité du comte Robert II avec l'Angleterre (Vercauteren, Actes des comtes de Flandre, p. 89-90) prévoit que le comte de Flandre se portera au secours de son allié avec 1 000 chevaliers. L'indication est confirmée par d'autres sources, comme veut bien me l'indiquer mon ami J. Verbruggen, l'excellent connaisseur de l'histoire militaire du moyen âge.

page 294 note 3. Texte très formel dans Galbert, c. 53, p. 84, où l'on voit des chevaliers faire partie de la gue urbaine qui s'est constituée (et, en cette occurrence précise, agit) exclusivement contre a ligue des barons.

page 294 note 4. Notamment dans le passage allégué à la n. 1, où il est du moins question du elerusf du populus, — non des milites, il est vrai, mai des pares.

page 294 note 5. On rencontre bien, tout au long de l'histoire de la Flandre, du XIIe au XVIIIe siècle des mentions de « la noblesse » (interventions de la noblesse, réunions de la noblesse). A notre avis, cela ne prouve rien : il nous faudrait la preuve que, dans ces différents cas, il s'agit bien réellement de l'ensemble ou d'une grosse majorité des membres de l'état noble, et non de quelques dizaines d'individus appartenant à cette classe. Ce qui en tout cas est certain, c'est que, de même qu'en 1127, il y a visiblement interpénétration de l'état des villes et de l'état des chevaliers, de même, au vxi° et xvn” siècle, il y a la même interpénétration. Au point que nombreux sont les membres de la noblesse qui figurent comme représentants des villes aux assemblées d'États : à preuve ce passage de la réponse du magistrat d'Ypres à la requête de la noblesse de Flandre demandant son admission aux États (1599) ; je traduis : « H serait bon de rappeler auxdits nobles qu'ils siègent dans tous les magistrats, et qu'il faudrait bien savoir s'ils seraient d'accord, au cas où les nobles constitueraient un état séparé, pour se retirer de tous ces collègues urbains » (Arch. État Bruges, Fonds États de Flandre, reg. 642, f° 167 v°). Voir aussi, sur la participation des nobles aux collèges urbains représentés dans les États de Flandre, H. Van Houtte, I Le serment de fidélité à Philippe III » (Bull. Comm. Royale d'Histoire, t. C, p. 146).

page 295 note 1. J'ai tenté de le marquer dans le chapitre consacré à la maison d'Alsace, au t. II de la Algemene Geschiedenis der Nederlanden (Utrecht, 1950, p. 118-133).

page 295 note 2. Gand a environ 60 000 habitants ; Bruges à peu près 35 000 ; Ypres un peu moins que Bruges. Ce sont là toutes grandes agglomérations à l'échelle de l'époque, Gand n'étant dépassé au Nord des Alpes que par le seul Paris (Cf. le Rapport sur la démographie du moyen âge, par Cipolla, Dhondt, Postan et Wolff, dans les Rapports du Congrès Historique de i960 (Paris, 1950).

page 295 note 3. Dept, G. G., Les influences anglaises et françaises dans le comté de Flandre au début du XIIIe siècle (Gand, 1928), p. 73.Google Scholar

page 296 note 1. Sur ce point, v. J. Dhondt, Les origines des États de Flandre (sous presse).

page 296 note 2. Funck-bbentano, F., Philippe le Bel en Flandre (Paris, 1897).Google Scholar

page 296 note 3. Pour cet aspect précis, v. un examen plus détaillé dans notre étude Les origines des États de Flandre. Citons simplement le texte le plus éloquent : « Nous Philippes de Flandre… faisons savoir… ke de tant de tans qui peust souvenir, toutes les besoignes ke li conte de Flandres qui par le tans on estei, touchant communaument Testât dou pays, li dit conte les ont traiteit et ordenei par les boines villes de le conteit. Et chouke par le seigneur et les dites boines villes a estei ordenei generaument, il convint ke che fuist tenu et wardei par toute le conteit… (Wanzkoenig-gheldolf, Histoire de Flandre, V, p. 445). Acte de Tan 1304.

page 296 note 4. Cet aspect est étudié plus en détail dans notre travail mentionné à la note précédente.

page 297 note 1. Même remarque qu'à la note précédente.

page 297 note 2. Au xne siècle, il y avait sept grandes villes, dont Arras fut la première cédée à la France. Au début du xin” siècle, il y en avait encore six : ce sont les « Six Villes ». Saint-Omer suivit bientôt le sort d'Arras. Enfin par le traité dAthis-sur-Orge, au début du xive siècle, Lille et Douai furent à leur tour perdues pour la Flandre. Ne subsistèrent donc que les Trois Villes : Gand, Bruges et Ypres. A noter toutefois que ces « Trois Villes » représentaient, économiquement, à peu près 40 p. 100 de la Flandre ; le fait ressort de leur quote-part dans les impôts établi par le plus ancien « Transport de Flandre », celui de 1317 (v. Zaman, Exposition des Trois Etats et Pais de Flandre, 1711, p. 341-42).

page 298 note 1. On s'est bien souvent demandé, pourquoi le Franc ? La réponse me paraît simple : le Franc de Bruges était la seule circonscription administrative (châteUenie ou ville) à payer une part d'impôt équivalente à celle que payaient les Trois Villes ; elle payait même davantage qu'Ypres. Voici en effet les chiffres au transport de 1317 : Sur cent livres de subside, payaient : Bruges, 15 L 4 s 3 den. ; — Gand, 13 L 17 s 0 den. ; — Le Franc, 13 L 6 s 9 den. ;—Ypres, 10 L 14 s 6 den. ; — Alost, 6 L 18 s 6 den.; — Fûmes, 4L 10s 6 den. ; — Waas, 3L 10 s 9 den. D'où il ressort que le Franc, qui payait presque autant que Gand et beaucoup plus qu'Ypres était bien en droit de siéger à l'assemblée d'États !

page 299 note 1. Gilliodts Van Severen, Inventaire des Archives de la ville de Bruges, t. III, p. 503 — et surtout Compte du Franc de Bruges (Arch. Royaume, Bruxelles, Chambre des Comptes” n° 42528, f° 37 v°).

page 299 note 2. La mention la plus ancienne que je connaisse se trouve dans les Comptes d'Ypres (Arch. Royaume Bruxelles, n° 38639, f° 170).

page 299 note 3. Kervun DE Lettenhove, Histoire de Flandre, t. IV, p. 213.

page 299 note 4. Est-il besoin de rappeler que la politique centralisatrice de Philippe II a précisément abouti à une révolte généralisée, compliquée de multiples interventions étrangères, et qui a eu pour résultat la perte des Pays-Bas septentrionaux pour les Habsbourg ?

page 299 note 5. Renvoyons ici à l'étude capitale, passée cependant presque inaperçue, de M. Arnould, « L'impôt sur le capital en Belgique au xvi6 siècle » (Le Hainaut Économique, 1946, p . 17- 45 et en particulier p. 41).

page 300 note 1. Il paraît pourtant bien que, dans l'intervalle entre la victoire de Maximilien d'Autriche sur les communes de Flandre, et le soulèvement contre l'Espagne au temps du duc d'Albe — les « États de Flandre » aient continué à exister. On en trouve des mentions sporadiques (Cf. Zaman, op. cit., p. 131 ; J. Craeybeckx, De Staten van Vlaanderen en de gewestelijke financiën'« Les États de Flandre et les finances provinciales » Handelingen Maatschappij Geschiedenis Cent, IV-2,1950, p. 93. Bien entendu, et comme au temps des ducs de Bourgogne, les assemblées des Quatre Membres sont infiniment plus fréquentes que celles des Trois États.

page 300 note 2. Comme le remarque Wijnants au début du XVIIIe siècle dans son traité inédit sur les institutions des Pays-Bas : « Touchant les aides et subsides, Flandre : les magistrats des villes aiant voix étaient facilement induicts à les consentir fort grands pour se conserver dans leurs emplois ou pour y être remis une autre fois… »

page 300 note 3. Cf. J. Dhondt, « Over Standenvertegenwoordiging in de Staten van Vlaanderen (Représentation des classes sociales aux états de Flandre) » (Nederlandsche Historiebladen, 1940, p. 311-326), en particulier p. 319-20.

page 300 note 4. Ibid., p. 320-323. Elle ne fut réintroduite aux États qu'à l'époque de la Révolution brabançonne de 1789, donc peu de temps avant la suppression des États de Flandre.

page 300 note 5. C'est ce qu'a très bien mis en lumière J. Craeybeckx dans son étude citée ci-dessus.

page 301 note 1. Cf. J. Craeybeckx, «Aperçu sur l'histoire des impôts en Flandre et au Brabant au cours du xvie siècle » (Revue du Nord, 1947, p. 87-108) — et J. Dhondt, « Bijdrage tôt de Kennis van net Financiewezen der Staten van Vlaanderen (Contribution à l'étude de l'organisation financière des États de Flandre »), Nederlandsche Historiebladen, 1940, p. 149-181.

page 301 note 2. Le premier transport est de 1317, le second de 1408, le troisième de 1517 et le dernier de 1631. Il y en eut donc, approximativement, un par siècle.

page 301 note 3. Tandis que, dans les villes, le magistrat levait l'argent au moyen d'impôts indirects.

page 301 note 4. C'est ce qui se dégagera rapidement d'un simple coup d'oeil aux » Tafels van de Resolutieboeken der Staten van Vlaanderen » (Résumé des registres aux délibérations des États de Flandre), que j'ai édités (Bruxelles, in-4°, 1941) pour la période 1631-1656, soit précisément pour la période où la puissance de l'Espagne subit ses revers les plus sensibles. Après Hocroy notamment, c'est une vraie crise d'indépendance que piquent les États.

page 302 note 1. Un exemple emprunté aux « Tafels », n° 633 : durant le semestre d'été 1634, le total des impôts levés en Flandre se monte à environ 790 000 florins. Sur cette somme, 440 000 florins sont produits par des impôts sur le bétail, pesant donc exclusivement sur les populations rurales. Le reste est fourni par des impôts sur le vin, la bière, la viande, le sel et le poisson, impôts qui frappent également les habitants des villes et des campagnes. Ces chiffres sont normaux pour la Flandre à l'époque.

page 303 note 1. Un décret de 1614 (Placcaerten van Vlaenderen, v, 1, p. 346 et suiv.) détermine le droit des autres villes et châtellenies à donner par écrit leur avis aux Quatre Membres en matière d'accord de subsides. Il n'est pas stipulé que les Quatre Membres doivent tenir compte de cet avis.

page 303 note 2. La réponse à cette question, pour chacun des « collèges » représentés directement ou indirectement aux États de Flandre, est donnée avec une grande précision dans un traité anonyme de la fin de l'ancien régime. Cf. J. Dhondt, Locale Standenvertegenwoordiging in Jut Graafschap Vlaanderen (” Représentation locale dans les États en Flandre»), Gand, 1950; le traité est en français.

page 303 note 3. Ceci s'applique à la situation des États après la réforme de 1754, lorsque, par conséquent, toutes les villes et toutes les châtellenies ont eu accès aux États. Toutefois, dans la mesure où, dès avant cette date, les châtellenies et villes possédaient déjà une compétence .consultative, la description ci-dessous est valable.