Published online by Cambridge University Press: 20 February 2018
La période 1750-1850 est souvent placée au centre des grands récits de la modernisation, notamment ceux qui la caractérisent par un passage de relations économiques encastrées dans des liens familiaux ou communautaires à des transactions impersonnelles uniquement appuyées sur le marché et des dispositifs juridiques. Ces récits sont ici mis à l’épreuve à travers l'analyse systématique de trois corpus de sources correspondant à des instruments largement utilisés par les marchands de l’époque : lettres d'entrée en relation, lettres circulaires et procurations notariées. Cette étude, à la fois qualitative et quantitative, ne met en évidence aucune révolution, et peu d’évolutions linéaires. En revanche, elle conduit à dépasser l'opposition entre des transactions commerciales encastrées et totalement désencastrées. De nombreux indices de la complémentarité entre des transactions économiques personnalisées et d'autres plus impersonnelles sont en effet perceptibles. D'autres types d'encastrement jouent aussi un rôle important : d'une part, les relations répétées ou celles établies par l'intermédiaire de tiers ; d'autre part, une forme d'homophilie sociale entre marchands, fondée notamment sur le partage d'un langage commun, celui du commerce.
Narratives of modernization often describe the period between 1750 and 1850 as marking a transition from embedded economic relationships (relying on kinship or community ties) to impersonal market transactions supported by legal arrangements. This article questions these narratives by studying three sets of tools employed by early modern and modern merchants on a daily basis: letters of introduction, circular letters, and notarized proxy forms. Systematic quantitative and qualitative analysis of these documents reveals few traces of a revolution or even a consistent linear evolution. To the contrary, it challenges the opposition between embedded and completely disembedded relationships. Indeed, there is strong evidence that personal and impersonal supports for economic transactions complemented rather than substituted one another. In addition, other types of embeddedness also played an important role: on the one hand, repeated interactions and relational chains involving intermediaries; on the other, a homophilic sociability among merchants that was partly based on the shared language of commerce.
Outre les participants à l'enquête (voir n. 19), les auteurs remercient tout particulièrement, pour leurs commentaires et suggestions, Jean Andreau, Luca Andreoni, Simon Bittmann, Guillaume Calafat, Serge Chassagne, Claude Denjean, Vincent Demont, Pierre Gervais, Michel Grossetti, Michel Lauwers, François Lerouxel, Silvia Marzagalli, Nadia Matringe, Nicolas Praquin, Alina Surubaru, Francesca Trivellato, Stefano Ugolini, Patrick Verley, Mikhaïl Xifaras, ainsi que les autres participants à la rencontre du Caltech Early Modern Group (avril 2016), au séminaire du Centre de sociologie des organisations (avril 2016), à la journée d’étude « Réseaux et finance dans le long terme » de la Toulouse Business School (juin 2016) et au séminaire d'histoire économique des Umr Larhra et Triangle (oct. 2016). Ils remercient également Audrey Murat pour la gestion financière de ce projet.
1 Neil McKendrick, John Brewer et John Harold Plumb, The Birth of a Consumer Society: The Commercialization of Eighteenth-Century England, Londres, Hutchinson, 1983 ; Maxine Berg et Helen Clifford (dir.), Consumers and Luxury: Consumer Culture in Europe 1650-1850, Manchester, Manchester University Press, 1999 ; John Brewer et Roy Porter (dir.), Consumption and the World of Goods, Londres, Routledge, 1993 ; Jan De Vries, The Industrious Revolution: Consumer Behavior and the Household Economy, 1650 to the Present, Cambridge, Cambridge University Press, 2008. Sur les renouvellements de l'histoire de l'industrialisation, voir Patrick Verley, L’échelle du monde. Essai sur l'industrialisation de l'Occident, Paris, Gallimard, 1997, et, sur la consommation, Frank Trentmann, Empire of Things: How We Became a World of Consumers, from the Fifteenth Century to the Twenty-First, New York, Harper Collins Publishers, 2016.
2 Dominique Margairaz, Foires et marchés dans la France préindustrielle, Paris, Éd. de l'Ehess, 1988 ; Laurence Fontaine, Histoire du colportage en Europe (xve-xixe siècle), Paris, Albin Michel, 1993 ; Anthony Molho et Diogo Ramada Curto, « Les réseaux marchands à l’époque moderne », Annales HSS, 58-3, 2003, p. 569-579 ; Xabier Lamikiz, Trade and Trust in the Eighteenth-Century Atlantic World: Spanish Merchants and Their Overseas Networks, Londres/Woodbridge, Royal Historical Society/The Boydell Press, 2010 ; Natacha Coquery, Tenir boutique à Paris au xviiie siècle. Luxe et demi-luxe, Paris, Éd. du Cths, 2011 ; Pierre Gervais, Yannick Lemarchand et Dominique Margairaz (dir.), Merchants and Profit in the Age of Commerce, 1680-1830, Londres, Pickering and Chatto, 2014 ; Silvia Marzagalli, Bordeaux et les États-Unis, 1776-1815. Politique et stratégies négociantes dans la genèse d'un réseau commercial, Genève, Droz, 2015 ; Francesca Trivellato, Corail contre diamants. Réseaux marchands, diaspora sépharade et commerce lointain. De la Méditerranée à l'océan Indien, xviiie siècle, trad. par G. Calafat, Paris, Éd. du Seuil, [2009] 2016.
3 Louis Dermigny, Cargaisons indiennes. Solier et Cie, 1781-1793, 2 vol., Paris, Sevpen, 1959-1960 ; Charles Carrière, Négociants marseillais au xviiie siècle, Marseille, Institut historique de Provence, 1973 ; Louis Bergeron, Banquiers, négociants et manufacturiers parisiens du Directoire à l'Empire, Paris, Éd. de l'Ehess/Mouton, 1978.
4 Pierre Gervais, « Early Modern Merchant Strategies and the Historicization of Market Practices », Economic Sociology: The European Electronic Newsletter, 15-3, 2014, p. 19-29 ; Dominique Margairaz et Philippe Minard (dir.), « Le marché dans son histoire », Revue de synthèse, 127-2, 2006, p. 241-252.
5 S. Marzagalli, Bordeaux et les États-Unis. . ., op. cit., p. 423, conclut ainsi : « La mise en place d'un commerce régulier et intense entre Bordeaux et les États-Unis à la fin du xviiie siècle révèle aussi la place tenue par deux mécanismes fondamentaux propres au fonctionnement des réseaux marchands d'Ancien Régime : l’échange d'informations et la construction de liens de confiance. » Plus généralement, sur le caractère irréductiblement singulier de l’économie d'Ancien Régime, abordé à travers la pensée économique, voir Jean-Yves Grenier, L’économie d'Ancien Régime. Un monde de l’échange et de l'incertitude, Paris, Albin Michel, 1996.
6 Pierre Gervais, « Early Modern Merchant Strategies and the Historicization of Market Practices », Economic Sociology: The European Electronic Newsletter, 15-3, 2014, p. 19-29, ici p. 27.
7 Karl Polanyi, La subsistance de l'homme. La place de l’économie dans l'histoire et la société, trad. par B. Chavance, Paris, Flammarion, [1977] 2011, p. 43 (c'est l'auteur qui souligne). Sur le xixe siècle occidental « libéral », ayant constitué l’économie comme « sphère autonome », désencastrée de la religion, de la famille ou de la politique : Id., La grande transformation. Aux origines politiques et économiques de notre temps, trad. par B. Chavance, Paris, Gallimard, [1944] 1983. Chez K. Polanyi, l'encastrement est une métaphore qui renvoie au fait que, dans toute société, les sphères économique, politique, religieuse ou culturelle sont nécessairement imbriquées. Mais ce qui caractérise, selon lui, le xixe siècle en Occident, c'est un puissant mouvement de désencastrement de la sphère économique, lié au fait que le travail, la terre et la monnaie sont progressivement transformés en marchandises soumises au marché et à la loi du profit. La « grande transformation » raconte comment, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, des forces sociales opposées à ce mouvement construisent les institutions permettant de réencastrer l’économie. La sociologie économique, à la suite de Mark Granovetter, « Economic Action and Social Structure: The Problem of Embeddedness », American Journal of Sociology, 91-3, 1985, p. 481-510, a repris à son compte cette notion d'encastrement. Cependant, elle l'emploie à une échelle plus micro, pour qualifier des transactions marchandes qui ne se résument pas à leur seul motif économique, mais incorporent des formes de solidarité liées à la parenté, au voisinage, à la religion ou à la profession.
8 Neil J. Smelser et Richard Swedberg (dir.), The Handbook of Economic Sociology, Princeton, Princeton University Press, 2005.
9 Par exemple, Douglass C. North, Le processus du développement économique, trad. par M. Le Séac'h, Paris, Éd. d'Organisation, [2005] 2005, met l'accent sur un processus pluriséculaire qui a conduit l'Occident « du monde simple des échanges personnels au monde complexe et interdépendant qui caractérise aujourd'hui les économies développées » (p. 84), opposant fonctionnements « collectivistes » et « informels » d'un côté, « culture individualiste » et « échanges impersonnels » de l'autre.
10 M. Granovetter, « Economic Action and Social Structure. . . », art. cit.
11 Max Weber, Histoire économique. Esquisse d'une histoire universelle de l’économie et de la société, trad. par C. Bouchindhomme, Paris, Gallimard, [1923] 1991. Il insiste notamment sur le passage des machines en bois aux machines en acier, la séparation définitive du commerce de gros et du commerce au détail, le déploiement de l'industrie lucrative, la naissance des bourgeoisies nationales, l’émergence de l’État rationnel et la diffusion de l’éthos économique rationnel issu de l'ascèse protestante intramondaine.
12 Gérard Gayot, Les draps de Sedan, 1646-1870, Paris, Éd. de l'Ehess, 1998 ; Stanley Chapman, Merchant Enterprise in Britain from the Industrial Revolution to World War I, Cambridge, Cambridge University Press, 1992 ; P. Verley, L’échelle du monde. . ., op. cit. ; Jean-Pierre Hirsch, Les deux rêves du commerce. Entreprise et institution dans la région lilloise, 1780-1860, Paris, Éd. de l'Ehess, 1991 ; Alessandro Stanziani, Rules of Exchange: French Capitalism in Comparative Perspective, Eighteenth to the Early Twentieth Centuries, Cambridge, Cambridge University Press, 2012.
13 Amalia D. Kessler, A Revolution in Commerce: The Parisian Merchant Court and the Rise of Commercial Society in Eighteenth-Century France, New Haven, Yale University Press, 2007, chap. 5.
14 Almanach du commerce, des arts et métiers des villes de Lille, Douay et Dunkerque, Lille, Vanackere, 1789, non folioté, cité par J.-P. Hirsch, Les deux rêves du commerce. . ., op. cit., p. 66. Sur le développement des almanachs, voir John Grand-Carteret, Les almanachs français, Paris, Alisie et Cie, 1896 ; Arnaud Bartolomei, « La publication de l'information commerciale à Marseille et à Cadix (1780-1820). La fin des réseaux marchands ? », Rives méditerranéennes, 27, 2007, p. 85-108.
15 Arnaud Bartolomei, Claire Lemercier et Silvia Marzagalli (dir.), « Les commis voyageurs, acteurs et témoins de la grande transformation », Entreprises et histoire, 66-1, 2012, p. 7-21 ; Roman Rossfeld, « Handelsreisende – Travelling salesmen – Voyageurs de commerce : eine Einführung », Zeitschrift für Unternehmensgeschichte, 59-2, 2014, p. 129-134.
16 Mikhaïl Xifaras, « Science sociale, science morale ? Notes sur la pénétration de l’économie dans la pensée juridique française au xixe siècle », in J.-F. Kervégan et H. Mohnhaupt (dir.), Économie et théories économiques en histoire du droit et en philosophie, Francfort-sur-le-Main, Klostermann, 2004, p. 185-225 ; Laurent Pfister, « Un contrat en quête d'identité. Jalons pour une histoire de la qualification du mandat », in N. Dissaux (dir.), Le mandat : un contrat en crise ?, Paris, Economica, 2011, p. 1-38.
17 Ces matériaux correspondent davantage à la définition de l'encastrement de M. Granovetter (analyse de l'imbrication des dimensions marchande et non marchande à l’échelle des liens sociaux interpersonnels) qu’à celle, plus macrosociale, de K. Polanyi.
18 Un connaissement est un acte par lequel un établissement de transport maritime ou un capitaine atteste qu'il a reçu des marchandises à bord d'un navire.
19 Cet article décrit les problématiques et les premiers résultats du projet « Fiduciae. Pratiques et matérialités des relations marchandes : vers une dépersonnalisation (xviiie-xixe siècle) ? », qui bénéficie d'un financement de l'Agence nationale de la recherche pour la période 2014-2017. Outre les auteurs de cet article, Thierry Allain, Boris Deschanel, Mathieu Grenet, Marguerite Martin, Thomas Mollanger, Fabrice Perron, Viera Rebolledo-Dhuin, Veronica Aoki Santarosa et Sylvie Vabre ont contribué bénévolement à la constitution des bases de données.
20 Sur la maison Roux, voir C. Carrière, Négociants marseillais. . ., op. cit. ; sur la maison Greffulhe, voir Guy Antonetti, Une maison de banque à Paris au xviiie siècle, Greffulhe Montz et Cie, 1789-1793, Paris, Éd. Cujas, 1963.
21 Serge Chassagne, Veuve Guérin et fils. Banque et soie, une affaire de famille, Saint-Chamond - Lyon, 1716-1932, Lyon, Éd. Bga Permezel, 2012 ; Matthieu de Oliveira, Les routes de l'argent. Réseaux et flux financiers de Paris à Hambourg, 1789-1815, Paris, Comité pour l'histoire économique et financière de la France, 2011 ; Maurice Begouën Demeaux, Mémorial d'une famille du Havre, vol. 1, Les fondateurs. Choses et gens du xviiie siècle en France et à Saint-Domingue, Jacques-François Begoüen, 1743-1831, vol. 2, Stanislas Foäche, 1737-1806, négociant de Saint-Domingue, Paris, Société française d'histoire d'outre-mer, 1971 et 1982 ; Édouard Delobette, « Ces ʻMessieurs du Havreʼ. Négociants, commissionnaires et armateurs de 1680 à 1830 », thèse de doctorat, Université de Caen, 2005.
22 J.-P. Hirsch, Les deux rêves du commerce. . ., op. cit. Cette notion de complémentarité des dispositifs personnels et impersonnels dans la construction des relations marchandes ou des relations de crédit est également mise en avant par Claire Lemercier et Claire Zalc, « Pour une nouvelle approche de la relation de crédit en histoire contemporaine », Annales HSS, 67-4, 2012, p. 979-1009, notamment p. 998 sq., et par les sociologues Michel Grossetti, « Réseaux sociaux et ressources de médiation dans l'activité économique », Sciences de la société, 73, 2008, p. 83-103, et Alina Surubaru, « Les producteurs roumains de l'habillement à la recherche de clients. Une analyse sociologique des rencontres d'affaires », Sociologie du travail, 54-4, 2012, p. 457-474.
23 Walter Friedman, Birth of a Salesman: The Transformation of Selling in America, Cambridge, Harvard University Press, 2004.
24 Sur la notion de chaîne relationnelle, voir Michel Grossetti, « Les narrations quantifiées. Une méthode mixte pour étudier des processus sociaux », Terrains et travaux, 19-2, 2011, p. 161-182.
25 Voir, en sociologie économique, Brian Uzzi et Ryon Lancaster, « Embeddedness and Price Formation in the Corporate Law Market », American Sociological Review, 69-3, 2004, p. 319-344, ou, en économie, Alan P. Kirman et Nicolaas J. Vriend, « Evolving Market Structure: An Ace Model of Price Dispersion and Loyalty », Journal of Economic Dynamics and Control, 25-3/4, 2001, p. 459-502.
26 Bien que l'on puisse lire de cette manière Pierre Gervais, « Crédit et filières marchandes au xviiie siècle », Annales HSS, 67-4, 2012, p. 1011-1048.
27 F. Trivellato, Corail contre diamants. . ., op. cit., chap. 6.
28 Boris Deschanel, « Que vaut un négociant ? Prix et compétences des commerçants dauphinois, des années 1750 aux années 1820 », Les cahiers de Framespa. Nouveaux champs de l'histoire sociale, 17, 2014, https://framespa.revues.org/3019.
29 La catégorie « Lettre d'entrée en relation » ne semble avoir été clairement définie qu'assez tard au xixe siècle. La première « Lettre de compliment à une personne qu'on n'a jamais Vue et avec qui l'on doit avoir quelques affaires » a été publiée dans le manuel de René Milleran, mais aucun autre cas n'a été retrouvé ensuite avant 1800. En revanche, des modèles de lettre d'entrée en relation se rencontrent à peu près systématiquement dans les manuels marchands édités après 1800, notamment ceux de Paul Brée et de Marie Clément où l'objet est nommé et décrit avec le plus de précision. Ce constat se fonde sur l'analyse d'un corpus de vingt-deux manuels marchands, constitué à partir des bases de données Making of the Modern World de l’éditeur Gale et Gallica et des occurrences « correspondance », « commerce », « négoce », « épistolaire », « marchand », « xviiie siècle » et « xixe siècle » : René Milleran, Le nouveau secrétaire de la cour ou lettres familières sur toutes sortes de sujets, avec des réponses, une instruction pour bien écrire et dresser les lettres, les titres dont on qualifie toutes sortes de personnes, et des maximes pour plaire et se conduire dans le monde, Bruxelles, Le Gras, [1692] 1714 ; Jean Paganucci, Manuel historique, géographique et politique des négocians, ou Encyclopédie portative de la théorie et de la pratique du commerce, 3 vol., Lyon, J.-M. Bruyset, 1762 ; Jacques Accarias de Sérionne, Les intérêts des nations de l'Europe, développés relativement au commerce, 2 vol., Leyde, Weidemann Erben und Reich, 1766 ; Johann Carl May, Lettres marchandes fort propres à s'exercer dans le stile épistolaire du négociant, Altona, D. Iversen, 1769 ; Fortunato Bartolomeo De Felice, Encyclopédie, ou Dictionnaire universel raisonné des connoissances humaines, Yverdon-les-Bains, s. n., 1775, vol. 3, p. 131-133 ; Jean-Baptiste Robinet, Dictionnaire universel des sciences morale, économique, politique et diplomatique, ou Bibliothèque de l'homme-d’État et du citoyen, Londres, Libraires associés, 1780, vol. 14, « Con-Cur » ; Lettres d'un négociant à son fils. Sur les sujets les plus importants du commerce, Strasbourg, A. Koenig, 1786 ; L'art de la correspondance, ou Modèles de lettres sur toutes sortes de sujets, Paris, Louis, 1800 ; Hermanus Antonius Boex (dir.), Manuel de correspondance à l'usage du pensionnât françoises d'Eindhoven, Anvers, A. Grangé, après 1800 ; Manuel du jeune négociant, ou Elémens du commerce, sur la tenue des livres en partie double et simple, Paris, Laurens jeune, 1803 ; Le correspondant triestin, ou Lettres instructives imprimées séparément en français, en italien et en allemand, Amsterdam, F. C. Loeflund, [1795] 1803 ; Nicolas Gouin-Duffieff, Nature Displayed in her Mode of Teaching Language to Man, Being a New and Infaillible Method of Acquiring Languages with Unparalleled Rapidity, 2 vol., Londres, Chez l'auteur, 1818 ; abbé Joseph Mozin, La correspondance des négocians, ou Recueil de lettres sur le commerce, originales ou extraites des meilleurs épistolaires nationaux ou étrangers, Paris, Librairie du commerce, Chez Renard, 1822 ; Jacques Peuchet, Manuel du négociant et du manufacturier, contenant les lois et réglemens relatifs au commerce, aux fabriques et à l'industrie, Paris, Roret, 1829 ; Henry Celliez, Dictionnaire usuel de législation commerciale et industrielle, Paris, Librairie usuelle, 1836 ; August Schiebe, Correspondance commerciale, suivie de la traduction en allemand des principaux termes employés dans les lettres et terminée par un recueil explicatif des mots les plus usités dans le commerce, Leipzig, J. A. Barth, 1843 ; Paul Brée, Traité de correspondance commerciale, contenant des modèles et des formules épistolaires pour tous les cas qui se présentent dans les opérations de commerce, avec des notions générales et particulières sur leur emploi, Leipzig, Librairie de Baumgaertner, 1850 ; Gilbert-Urbain Guillaumin, Dictionnaire universel théorique et pratique du commerce et de la navigation, Paris, Guillaumin, 1859-1861, vol. 1 ; Edmond Degranges, Traité de correspondance commerciale, Paris, Langlois et Leclercq, 1866 ; Marie Clément, L'art de la correspondance commerciale, précédé d'un traité de style épistolaire et suivi d'un vocabulaire des termes du commerce, Sens, Chez l'auteur, 1870.
30 La presse mercantile n'apparaît pas à proprement parler dans la seconde moitié du xviiie siècle, mais elle connaît alors une diffusion accélérée. Voir John J. McCusker, « The Demise of Distance: The Business Press and the Origins of the Information Revolution in the Early Modern Atlantic World », The American Historical Review, 110-2, 2005, p. 295-321 ; A. Bartolomei, « La publication. . . », art. cit.
31 Le fonds Greffulhe est conservé aux Archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine sous la cote 61 AQ ; ses portions antérieures et postérieures à la Révolution sont très lacunaires. Le fonds Roux est conservé aux archives de la Chambre de commerce et d'industrie de Marseille (ci-après ACCIM), sous la cote LIX. Les deux fonds présentent l'avantage d’être classés par correspondant. Les cinq premières lettres de chaque dossier ont été collectées, pour une vingtaine de villes représentatives de la diversité du monde négociant de l’époque : les six grandes places de change européennes (Paris, Londres, Amsterdam, Hambourg, Gênes et Madrid), des grandes places négociantes maritimes (Bordeaux, Cadix, Le Havre, Liverpool, Marseille, Naples, Rotterdam, Rouen, Smyrne et Tunis) ou continentales (Lyon, Genève et Lille), quelques villes manufacturières françaises (Sedan, Mulhouse et Carcassonne) et toutes les localités situées en dehors de l'Europe occidentale et de la Méditerranée – les colonies antillaises, quelques comptoirs asiatiques (Batavia), les ports des États-Unis et quelques places russes (Riga et Saint-Pétersbourg). Pour chacune de ces localités, toutes les liasses ont été ouvertes dès lors que la place comptait moins de 25 correspondants ; 20 ont été tirées au sort aléatoirement lorsqu'elle en comptait entre 26 et 100 ; 50 lorsqu'elle en comptait plus de 100. Au total, 1 896 correspondances ont été collectées, parmi lesquelles un échantillon représentatif de 971 débuts de correspondance ont été pour l'heure analysés, restaurant le poids réel de chaque ville dans les différents fonds. Une fois écartées les lettres qui n’étaient pas des premiers contacts épistolaires, nous arrivons aux 326 entrées en relation étudiées.
32 ACCIM, LIX, liasse 866, courrier de Cabarrus et Lalanne, Madrid, 22 juill. 1782 ; liasse 856, courrier de Guillaume et Jean Tirry, Cadix, 22 juill. 1782.
33 ACCIM, LIX, liasse 369, courrier de Robert et Rivaud fils, Lyon, 2 juin 1772.
34 ACCIM, LIX, liasse 512, courrier de Beaujour, Paris, 8 janv. 1788.
35 Parmi la demi-douzaine de modèles de lettre d'entrée en relation proposées par M. Clément, L'art de la correspondance commerciale. . ., op. cit., p. 51.
36 P. Brée, Traité de correspondance commerciale. . ., op. cit., p. 63 sq.
37 M. Clément, L'art de la correspondance commerciale. . ., op. cit., p. 1 et 2.
38 ACCIM, LIX, liasse 866, courrier de la Brena, Madrid, 7 mars 1790, trad. par A. Bartolomei.
39 Cette étude confirme le constat formulé par Jean Meuvret, « Manuels et traités à l'usage des négociants aux premières époques de l’âge moderne », Études d'histoire moderne et contemporaine, 5, 1953, p. 5-29, qui souligne que les « manuels » marchands du xvie siècle avaient souvent la forme de compilations manuscrites de documents issus de la pratique. Il note également que ces manuels accordent bien plus d'importance aux techniques du change et de la comptabilité qu'aux normes épistolaires. Les pratiques largement partagées en la matière, que mettent en évidence les études sur le fonds Bonvisi, par exemple, ne sauraient donc trouver leur origine dans l'existence de modèles imprimés : Valentín Vázquez de Prada, Lettres marchandes d'Anvers, 4 vol., Paris, Sevpen, 1960 ; Anne Lambert, « Écritures du commerce. La correspondance au fondement des transactions Ruiz-Bonvisi, 1580-1590 », thèse, École des chartes, 2010 ; Nadia Matringe, La banque en Renaissance. Les Salviati et la place de Lyon au milieu du xvie siècle, Rennes, Pur, 2016. La multiplication de tels modèles dans la littérature didactique marchande à partir de la fin du xviiie siècle ne saurait donc être interprétée comme étant à l'origine de cette langue du commerce, mais elle a pu contribuer à la standardiser et à la rendre accessible à des acteurs ne l'ayant pas apprise par imprégnation dans le milieu négociant. Sur la place, limitée, des manuels dans la formation des négociants, voir Franco Angiolini et Daniel Roche (dir.), Cultures et formations négociantes dans l'Europe moderne, Paris, Éd. de l'Ehess, 1995.
40 E. Degranges, Traité de correspondance commerciale, op. cit., p. 80.
41 ACCIM, LIX, liasse 855, courrier de Jean-Baptiste Chillet, Cadix, 28 sept. 1784. L'expression « sous les auspices » est employée aussi bien par des marchands de Smyrne, d'Amsterdam ou de Carcassonne, dans les années 1760, que par des correspondants de Basse-Terre et de Madrid, dans les années 1780, ou encore par ceux de Bordeaux, de Paris et de Lyon, sous l'Empire.
42 ACCIM, LIX, liasse 367, courrier d'Anginieur et Hervier, Lyon, 8 thermidor an X (27 juill. 1802). Sur la date d'apparition des voyageurs, voir les deux dossiers cités en introduction (n. 15).
43 ACCIM, LIX, liasse 754, courrier d'Aubert et Ricaud, Smyrne, 9 sept. 1732.
44 Dans le fonds Greffulhe, ces lettres représentent plus de la moitié des entrées en relation en 1789, l'année où, précisément, la banque a changé de raison sociale ; la proportion tombe ensuite à 10 %. Chez Roux, on passe de 20 % jusqu'en 1749 à 5 % après. Il est là aussi probable que cette évolution soit plutôt liée à l'histoire de la maison Roux qu’à une transformation plus générale des modes d'entrée en relation.
45 ACCIM, LIX, liasse 367, courrier des frères Albane, Lyon, 30 juill. 1731.
46 Sur la reconnaissance d’écrits très variés utilisés par les commerçants en tant que preuves, voir A. D. Kessler, A Revolution in Commerce. . ., op. cit., chap. 2.
47 Matthieu de Oliveira, « Circulaires commerciales et réseaux négociants en Europe, fin xviiie-début xixe siècles », in D. Margairaz et P. Minard (dir.), L'information économique, xvie-xixe siècle, Paris, Cheff, 2008, p. 93-113 ; A. Bartolomei, « La publication de l'information commerciale. . . », art. cit. Au Royaume-Uni, quelques études ont été menées sur les trading cards, un objet très proche : Katie Scott, « The Waddesdon Manor trade Cards: More than One History », Journal of Design History, 17-1, 2004, p. 91-100.
48 Sur les 1 672 circulaires collectées, 358 comportent en fait deux lettres distinctes mais qui sont réunies dans un même courrier, ce qui porte le corpus total à 2 036 lettres. Les circulaires étaient vraisemblablement soigneusement conservées par leurs destinataires, ce qui explique qu'il en existe de très belles collections, dont les cinq retenues pour la présente recherche : outre les deux fonds précités, il s'agit du fonds Foäche du Havre (Archives nationales du monde du travail, ci-après ANMT, 69 AQ), du fonds Veuve Guérin de Lyon (archives départementales du Rhône, ci-après ADR, 4 J 387) et du fonds Briansiaux de Lille (ANMT, 3 AQ). Les indications de Boris Deschanel, Guillaume Foutrier et Thomas Mollanger ont également permis de repérer d'autres collections, au sein des fonds des maisons Pinet (archives départementales de l'Isère, 4 J, 1746-1816), Dupont-Boisjouvin (archives départementales de Seine-Maritime, 1 ER 2339-2340) et Hennessy (archives privées). Les pourcentages donnés portent sur un échantillon aléatoire de 378 circulaires étudiées plus en détail.
49 La plus ancienne circulaire du corpus est celle reçue par la maison Roux en 1739, en provenance de la société Robiou frères et Cie de Cadix (ACCIM, LIX, liasse 842, 7 avril 1739).
50 Dans les fonds Roux et Greffulhe, toutes les circulaires émanant des villes où ont été étudiés les entrées en correspondance (Greffulhe), ou uniquement des correspondants tirés au sort dans ces villes (Roux), ont été collectées. Rappelons que si le fonds Greffulhe contient quelques liasses commençant dans les années 1810, voire 1830, il est très lacunaire en dehors de la période 1789-1795. Nous avons recherché toutes les circulaires dans les fonds Foäche et Briansiaux. En revanche, les dépouillements dans le fonds Veuve Guérin (limités à notre échantillon de villes) n'ont été pour l'heure systématiquement réalisés que pour la période 1773-1814. Nous n'avons encore effectué que des relevés ponctuels pour 1814-1850 (d'où l'indication entre parenthèses de ces nombres). Serge Chassagne, que nous remercions pour la communication de ces informations, a dénombré 1 344 circulaires pour cette période.
51 ANMT, 3 AQ 241, circulaire de Charles Choiseau, Boulogne-sur-Mer, 13 frimaire an X (4 déc. 1801) ; 3 AQ 341, circulaire d'Antoine Combe père, fils et Cie, Trieste, 5 germinal an X (26 mars 1802). Sur ce moment, voir Matthieu de Oliveira, « Le négoce nordiste d'un traité franco-anglais à l'autre. Attentes, réception et aménagements (1786-1802) », in J.-P. Jessenne, R. Morieux et P. Dupuy (dir.), Le négoce de la paix. Les nations et les traités franco-britanniques (1713-1802), Paris, Société des études robespierristes, 2008, p. 165-187.
52 Dans le corpus des premières lettres reçues par cette maison au xviiie siècle, une trentaine se termine sur une offre d’échantillons de signature, dont certaines se présentent exactement selon les mêmes canons que les lettres circulaires imprimées. En témoigne, par exemple, la belle double circulaire manuscrite adressée par la maison Magon Lefer frères de Cadix en 1729, qui annonce dans un premier temps la dissolution de l'ancienne société puis, dans un second temps, la formation d'une nouvelle (ACCIM, LIX, liasse 330, 31 mai 1729).
53 G. Antonetti, Une maison de banque à Paris. . ., op. cit., p. 100.
54 Nicolas Petit, L’éphémère, l'occasionnel et le non livre à la bibliothèque Sainte-Geneviève, xv e-xviii e siècles, Paris, Klincksieck, 1997 ; Annie Charon et Élisabeth Parinet (dir.), Les ventes de livres et leurs catalogues, xviie-xxe siècle, Paris, École des chartes, 2000. Du côté de l'administration, ce sont les instructions adressées aux consuls, notamment, qui prennent la forme au xviiie siècle de courriers circulaires, d'abord manuscrits, puis imprimés (voir la section « Personnel » des archives du ministère des Affaires étrangères). Les billets de congé des soldats, dès 1716, puis les avis de recherche judiciaires sont imprimés avant que la Révolution et l'Empire systématisent cet usage pour disposer d'autres éléments d'identification : Ilsen About et Vincent Denis, Histoire de l'identification des personnes, Paris, La Découverte, 2010, chap. 2.
55 G. Gayot, Les draps de Sedan. . ., op. cit., p. 403.
56 Claude Vielfaure, « Spectrographie de la publicité directe », Communications, 17-1, 1971, p. 99-105.
57 Les pourcentages présentés dans ce paragraphe portent sur l'ensemble du corpus. Les autres pourcentages donnés dans cette sous-partie portent sur l’échantillon de 378 circulaires.
58 Sur l'histoire de ces polices, voir Rémi Jimenes, Les caractères de civilité. Typographie et calligraphie sous l'Ancien Régime, France, xvie-xixe siècles, Gap, Atelier Perrousseaux, 2011.
59 Voir les remarques d'Otto S. Lankhorst, « Les ventes de livres en Hollande et leurs catalogues (xviie-xviiie siècles) », in A. Charon, Les ventes de livres et leurs catalogues. . ., op. cit., p. 11-26, ici p. 12. Dans le même but, certains commerciaux actuels archivent toutes les cartes de visite qu'ils ont pu recevoir : Alexandre Mallard et Sandrine Ville-Eber, « ʻJe vous laisse ma carte de visite.ʼ Analyse d'un artéfact relationnel », Sciences de la société, 73, 2008, p. 123-144.
60 Ce paragraphe repose sur l’échantillon de 378 circulaires (qu'elles soient ou non envoyées au sein d'une même ville ou situées en milieu de liasse).
61 Par exemple, ANMT, 69 AQ 3, courrier de Pinel, Veuve Colombel aîné et fils, Le Havre, 1er janv. 1822.
62 ACCIM, LIX, liasse 375, courrier de Veuve Barras et fils, Marseille, 15 juill. 1830.
63 Il s'agit d'un phénomène de longue durée qui touche manifestement toute l'Europe. Les trente circulaires en langues étrangères collectées adoptent la même rhétorique. Sur les origines théologiques médiévales de ce vocabulaire, voir Giacomo Todeschini, « Investigating the Origins of the Late Medieval Entrepreneur's Self-Representation », Imprese e storia, 35, 2007, p. 13-37.
64 Voir, par exemple, ACCIM, LIX, liasse 513, circulaire de Denneville (individu, et non société), 10 juin 1829. Il s'agit d'un prospectus plus que d'une circulaire conforme aux modèles évoqués ci-dessus, dans la mesure où l'activité est décrite en une quarantaine de lignes.
65 Jean-Paul Poisson, « Introduction à une sociologie statistique des actes de procuration », Journal de la société statistique de Paris, 109, 1968, p. 263-265, ici p. 263. Ce type d'interprétation reste dominant chez les juristes : Philippe Pétel, Le contrat de mandat, Paris, Dalloz, 1994. Il se retrouve dans une récente série d'articles ayant, indépendamment les uns des autres, observé et analysé la présence de procurations données par des maris, souvent négociants, à leurs femmes, par exemple Benoît Grenier et Catherine Ferland, « ʻQuelque longue que soit l'absence.ʼ Procurations et pouvoir féminin à Québec au xviiie siècle », Clio. Femmes, genre, histoire, 37, 2013, p. 197-225.
66 M. Xifaras, « Science sociale, science morale. . . », art. cit.
67 Désiré et Armand Dalloz, « Mandat », Répertoire méthodique et alphabétique de législation de doctrine et de jurisprudence en matière de droit civil, commercial, criminel, administratif, de droit des gens et de droit public, Paris, Bureau de la Jurisprudence générale, 1853, t. 30, p. 624-765.
68 Fabien Eloire, Claire Lemercier et Veronica Aoki Santarosa, « Beyond the Personal-Anonymous Divide: Agency Relations in Powers of Attorney in France, 18th-19th Centuries », 2016, https://spire.sciencespo.fr/hdl:/2441/3v5ra0iula8h5a94g2b8a43cvb, fournissent des résultats chiffrés plus détaillés. Ils se fondent sur toutes les procurations des années 1751, 1800 et 1851, collectées chez différents notaires, en général trois par ville, à Lille, Lyon, Marseille et Paris, choisis autant que possible parmi ceux ayant le plus de marchands dans leur clientèle. Presque tous ces chiffres portent sur l'ensemble des 2 831 procurations collectées. L'analyse de clauses précises se fonde sur un échantillon représentatif de 870 procurations. Dans un cas comme dans l'autre, il peut s'agir de procurations établies chez le notaire (en présence du mandant) ou de dépôts de procurations passés dans d'autres villes, parfois en brevet ou sous seing privé (le notaire chez qui est effectuée la collecte est alors celui du mandataire). Un sixième des procurations a ainsi été rédigé hors des quatre villes de collecte (11 % en France et 5 % à l’étranger). La présence de quelques procurations en brevet ou de dépôts d'actes sous seing privé souligne que la forme notariée n'est en rien obligatoire pour donner un mandat : celui-ci peut être inclus dans une correspondance, voire être uniquement verbal ou tacite. Toutefois, les incertitudes de la jurisprudence sont nombreuses et peuvent contribuer à expliquer qu'un grand nombre de mandats soient notariés. De fait, les procurations représentent une part importante des archives notariales sur toute la période (la base Arno, qui regroupe tous les actes des notaires parisiens, comprend 14 % de procurations en 1851, soit près de 8 500 actes, et 11 % en 1751, soit 6 300 actes). À Marseille, des sondages dans les registres de contrôle des actes de 1751 et dans ceux de l'enregistrement de 1800 permettent d'estimer à environ 18 % la part des procurations dans l'ensemble de la documentation notariée (respectivement 2 000 et 2 800).
69 J.-P. Poisson, « Introduction à une sociologie statistique. . . », art. cit. Les pourcentages sont calculés en excluant les procurations en blanc.
70 Sont résumés ici à grands traits les raisonnements de la théorie de l'agence, présentés, par exemple, par Robert Boyer, « Historiens et économistes face à l’émergence des institutions du marché », Annales HSS, 64-3, 2009, p. 665-693.
71 Robert-Joseph Pothier, « Traité du contrat de mandat », Œuvres complètes de Pothier, Paris, Thomine et Fortic, 1821, vol. 9, p. 47. Une exception presque unique de procuration ressemblant à celles que Pothier a en tête est constituée par le mandat donné à Marseille le 22 pluviôse an VIII (11 févr. 1800) par le mineur Pierre Barnabé Germain, d'Aix, au commis marseillais Marc Antoine Cauvet, ce dernier devant, dans le cadre d'une succession, vendre une propriété aux enchères « aux clauses et conditions qui seront jugées les plus avantageuses et en dessus de dix mille francs mise à prix dans les affiches placardées à ce sujet » (archives départementales des Bouches-du-Rhône, 370E/84). Peut-être le fait que le mandant soit mineur explique-t-il cette exception.
72 ADR, 3E/12868, procuration du 13 ventôse an VIII (4 mars 1800) donnée par la veuve lyonnaise Françoise Ocel à Claude Perrand, propriétaire dans la même ville, pour gérer la succession de son mari et, notamment, recouvrer diverses sommes dues.
73 Cela concorderait avec leurs autres fonctions d'intermédiation déjà soulignées par l'historiographie : Philip T. Hoffman, Gilles Postel-Vinay et Jean-Laurent Rosenthal, Des marchés sans prix. Une économie politique du crédit à Paris, 1660-1870, Paris, Éd. de l'Ehess, 2001.
74 ADR, 3E/12868, 1er ventôse an VIII (20 fév. 1800) pour le dépôt, 28 ventôse an VII (18 mars 1799) pour la procuration.
75 Le seuil de quatre procurations (pendant une même année civile) a été choisi pour éviter de comptabiliser les personnes recevant plusieurs mandats successifs liés à une seule affaire (une même succession, par exemple). Ce comptage sous-estime peut-être le poids des mandataires récurrents, dans la mesure où ils pourraient apparaître chez plusieurs notaires différents (ils ne sont toutefois présents, à de rares exceptions près, que chez l'un des trois notaires de leur ville pris en compte dans le corpus).
76 Pour une esquisse, voir Anne Boigeol et Yves Dezalay, « De l'agent d'affaires au barreau. Les conseils juridiques et la construction d'un espace professionnel », Genèses, 27, 1997, p. 49-68, et Claire Lemercier, « Un modèle français de jugement des pairs. Les tribunaux de commerce, 1790-1880 », habilitation à diriger des recherches, Université Paris VIII, 2012, p. 193-195 et 420-424.
77 Cette assertion se fonde sur une régression qui prend en compte l'objet du mandat, la date, la ville, le nombre et le sexe des mandants. Il en va de même pour les résultats du paragraphe suivant. Voir F. Eloire, C. Lemercier et V. A. Santarosa, « Beyond the Personal-Anonymous Divide. . . », art. cit.
78 Brian Uzzi, « Social Structure and Competition in Interfirm Networks: The Paradox of Embeddedness », Administrative Science Quarterly, 42-1, 1997, p. 35-67.
Translation available: The Embeddedness of Inter-Merchant Relations in France, 1750–1850: A Revolution in the World of Commerce?