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La construction du politique dans la Chine du début du XXe siècle. L'action des élites locales du Jiangsu

Published online by Cambridge University Press:  04 May 2017

Xiaohong Xiao-Planes*
Affiliation:
Université Paris X-Nanterre

Résumé

Au début du XXe siècle, la Chine connaît une crise dramatique. La nécessité d'une modernisation devient urgente. Une mobilisation des élites locales se développe alors dans un contexte de coopération entre certains hauts fonctionnaires ministériels ou provinciaux et des réformateurs du milieu privé : industriels, marchands, lettrés. Malgré les réticences du pouvoir impérial, les élites locales imposent leur participation à l'élaboration de nouvelles structures de coopération et de partage des responsabilités entre l'État et la société. Une reconstruction politique s'ébauche ainsi. Elle aboutira à l'instauration d'un pouvoir régional, malheureusement brisé, en 1913, par le coup de force de Yuan Shikai.

Summary

Summary

In the early 16th century, China went through a severe crisis. It became urgent and necessary to modernize. Thus, the local elites went into action, in a context of cooperation between some high level civil servants in the ministeries or in the provinces and reformers in the civil society, such as industrialists, merchants, scholars. In spite of reluctant imperial authority, local elites imposed their participation in the construction of new cooperation structures and share of responsabilities between the state and the society. Thus, the rebuilding of politics began. It led to the rise of a regional authority, which was unfortunately stopped by the coup of Yuan Shikai in 1913.

Type
Catégories Sociales de L'espace Politique
Copyright
École des Hautes Études en Sciences Sociales, Paris, 2000

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References

La rédaction de cet article a bénéficié des observations de Pierre-Etienne Will et de Marie- Claire Bergère ; qu'ils soient ici très vivement remerciés.

1. Après l'affaire des Boxers et l'intervention militaire des puissances étrangères en 1899- 1900, la Cour lança une série de réformes étatiques concernant l'armée, le système juridique, l'administration, l'éducation et la politique économique. Ce fut la « Nouvelle Politique », dont la mise en oeuvre s'est déployée, avec des fortunes diverses, de 1901 à la révolution de 1911.

2. Schoppa, Keith R., Chinese Elites and Political Change: Zhejiang Province in the Early Twentieth Century, Cambridge, Harvard University Press, 1982 Google Scholar ; Bergère, Marie-Claire, L'âge d'or de la bourgeoisie chinoise, Paris, Flammarion, 1986 Google Scholar ; Mary Backus, Rankin, Elite Activism and Political Transformation in China Zhejiang Province 1865-1911, Stanford, Stanford University Press, 1986 Google Scholar ; Rowe, William T., Hankow: Commerce and Society in a China City, 1796-1889Conflict and Community in a China City, 1796-1896, Stanford, Stanford University Press, 1985-1989, 2 volsGoogle Scholar ; ZHU Ying, Xinhai geming shiqi xinshi shangren shetuan yanjiu (Étude sur les organisations marchandes de type nouveau à l'époque de la révolution de 1911), Pékin, Zhongguo renmin daxue chubanshe, 1991 ; Goodman, Bryna, Native Place, City and Nation, Berkeley, University of California Press, 1995.Google Scholar

3. William T. Rowe, « The Public Sphère in Modem China », Modem China, 16-3, 1990, pp. 309-329 ; id., « The Problem of “Civil Society” in Late Impérial China », Modem China, 19-2, 1993, pp. 139-157 ; Mary Backus Rankin, «The Origins of a Chinese Public Sphère: Local Elites and Community Affaires in Late Impérial, 9-2, 1990, pp. 13-60 ; id. « Some Observations on a Chinese Public Sphère », Modem China, 19-2, 1993, pp. 158-182.

4. Sur le débat autour des rapports entre l'Etat et la société, et les récents travaux qu'il a suscités, voir Marie-Claire Bergère, « Civil Society and Urban Change in Republican China », The China Quarterly, 150, 1997, pp. 309-328 (en particulier la deuxième partie : « Civil society and the political interprétative framework of republican urban history »), pp. 321-328.

5. M.-C. Bergère, « Civil Society… », art. cit. p. 328.

6. Cf. Wright, Mary C. (éd.), China in Révolution: The First Phase, 1900-1913, New Haven-Londres, Yale University Press, 1968 Google Scholar ; Zhang Pengyuan, Lixianpai yu xinhai geming (Les constitutionnalistes et la révolution de 1911), Taibei, Institute of Modem History (Academia Sinica), [1969] 1983 ; Zhang Yufa, Qingji de lixian tuanti (Les organisations constitutionnelles à l'époque des Qing), Taibei, Institute of Modem History (Academia Sinica, 28, 1971) ; Rhoads, Edward J. M., China's Republican Révolution: The Case of Kwangtung, 1895-1913, Cambridge, Harvard University Press, 1975 Google Scholar ; Esherick, Joseph W., Reform and Révolution in China : The 1911 Révolution in Hunan and Hubei, Berkeley, University of Califomia Press, 1976.Google Scholar

7. Sur l'évolution de l'historiographie de la Chine continentale et pour une critique de l'application du concept de bourgeoisie, voir Marie-Claire Bergère, « La révolution de 1911 jugée par les historiens de la République populaire de Chine », Revue historique, 230, 1963, pp. 403-436 ; id.. L'âge d'or…, op. cit., pp. 199-203.

8. Par exemple, M. B. Rankin, Elite Activism…, op. cit., pp. 283-296 ; 303-305.

9. Frédéric Wakeman Jr. et Wen-hsien Yeh (éds), Shanghai Sojoumers, Berkeley, University of California, 1992, p. 6 ; Frédéric, Wakeman Jr. Policing Shanghai, 1927-1937, Berkeley, University of California Press, 1995, pp. XVII, 291.Google Scholar

10. Sur la réforme politique et administrative de l'État Qing, voir Chuzo Ichiko, « Political and Institutional Reform, 1901-1911 », in Fairbank, J. K., The Cambridge History of China, Cambridge, Cambridge University Press, 1980, vol. 11, 1980, pp. 375415 CrossRefGoogle Scholar ; Meienberger, Norbert, The Emergence of Constitutional Government in China (1905-1908): The Concept Sanctioned by the Empress Dowager, Berne, Peter Land, 1980 Google Scholar ; John H. Fincher, Chinese DemocracyStatist Reform, the Self-Government Movement and Republican Révolution, Tokyo, Institute for the Study of Languages and Cultures of Asia and Africa, [1981] 1989 ; Tu-ki MIN, National Policy and Local Power: The Transformation of Late Impérial China, Cambridge, Harvard University/Harvard-Yenchieng Institute, 1989 ; WEI Qingyuan et alii, Qingmo xianzhengshi (Histoire du régime constitutionnel à la fin des Qing), Pékin, Zhongguo renmin daxue, 1993 ; Prasenjit Duara, Culture, Power, and the State: Rural North China, 1900-1942, Stanford, Stanford University Press, 1988 ; Thompson, Roger R., China's Local Councils in the Age of Constitutional Reform, 1898-1911, Cambridge, Harvard University Press, 1995.CrossRefGoogle Scholar

11. L'expression chinoise, minzu guojia, vise à l'association sémantique des deux concepts d'ethnie (minzu) et d'État (guojia). Elle semble être apparue au début du siècle, et d'abord dans les journaux chinois publiés au Japon, comme le Jiangsu (1903-1904), mensuel de l'Amicale des étudiants originaires de la province du Jiangsu. Ces derniers appelaient à fonder un « État-nation » (minzu zhi guojia), régi par une constitution (cf. Reynolds, Douglas R., China, 1898-1912, The Xinzheng Révolution and Japon, Council on East Asian Studies, Harvard University Press, 1993 CrossRefGoogle Scholar). Ce terme d'« État-nation » n'a peut-être pas été très courant, mais il exprime l'objectif des milieux réformateurs, soucieux d'associer le peuple et la nation à la réforme de l'État et au salut national (voir Philip A. Kuhn, Les origines de l'État chinois moderne, traduit et présenté par Pierre-Etienne Will, Paris, Éditions de l'Ehess, 1999, chap. IV : « La mutation du programme constitutionnel chinois », pp. 155-176).

12. Par exemple, un des fondateurs de la Société générale d'éducation du Jiangsu, Yang Tingdong (1878-1950), avait publié vers 1900-1901, à partir d'une version japonaise datée de 1883, une traduction du Contrat social de Jean-Jacques Rousseau. Sur l'évolution intellectuelle et la propagation des idées introduites depuis l'étranger, Schwarz, voir Benjamin, In Search of Wealth and Power, Yen Fu and the West, Cambridge, Harvard University Press, 1964 Google Scholar, et D. R. Reynolds, China, 1898-1912…, op. cit.

13. Cf. Youwei Kang, Manifeste à l'empereur adressé par les candidats au doctorat, traduit, annoté et présenté par Roger Darrobers, Paris, Éditions You-feng, 1996.

14. Cf. Pierre-Etienne Will, « Introduction. Entre présent et passé », in P. A. Kuhn, Les origines…, op. cit., pp. 54-59.

15. Les études sur ces mouvements intellectuels et politiques sont fort nombreuses. Outre l'ouvrage déjà cité de P. A. Kuhn, Les origines…, op. cit., on peut lire Frédéric Wakeman Jr., « The Price of Autonomy: Intellectuals in Ming and Ch'ing Politics », Daedalus, 101, 1972, pp. 35-70 ; Théodore W. de Bary, The Libéral Tradition in China, New York, Columbia University Press, 1983 ; Elman, Benjamin A., Classicism, Politics, and Kindship: The Changchou School of New Text Confucianism in Late Impérial China, Berkeley, University of California Press, 1990 Google Scholar ; Anne Cheng, « Tradition canonique et esprit réformiste à la fin du xixe siècle en Chine — La résurgence de la controverse jinwen/guwen sous les Qing », Etudes chinoises, XIV-2, 1995, pp. 7-42.

16. Zhang Jian a réécrit plusieurs fois, pour le compte des gouverneurs généraux du Liangjiang et du Huguang, un mémoire intitulé « Qing lixian zougao » (Demande d'instauration du régime constitutionnel) ; mais le ton trop modéré du document ne le satisfaisait pas (Zhang Jian, Zhang Jian quanji (OEuvres complètes de Zhang Jian), Nankin, Jiangsu guji chubanshe, 1994, vol. 6, pp. 528-529 et p. 865). Wei Qingyuan a relevé que les rapports des deux responsables des délégations d'inspection politique à l'étranger avaient été rédigés par les lettrés réformateurs Liang Qichao et Yang Du ; le premier vivait en exil et le second séjournait au Japon (WEI Qingyuan et alii, Qingmo xianzhengshi, op. cit., pp. 133-135). Les milieux des « lettrés et marchands » (shenshang) shanghaïens saluèrent les deux délégations avant leur embarquement. Parmi les délégués, Dai Hongci, ministre des Rites, et Duanfang, gouverneur du Jiangsu, discutèrent longuement avec les notables résidents à Shanghai ; ils croyaient être d'accord sur l'essentiel : sur ce point, lire « Dai Hongci », in Qindai renwu zhuangao (Biographies de personnalités sous les Qing), Shenyang, Liaoning renmin chubanshe, 1992, Xiabian, Part II, vol. 8, p. 107.

17. Une traduction commentée de l'ouvrage de Thomas Henry Huxley, Evolution and Ethics (en chinois Tianyan lun) avait été publiée par Yan Fu en 1898 et avait connu un grand retentissement (cf. B. Schwarz, In Search of Wealth…, op. cit.).

18. Susan Mann Jones et Philip A. Kuhn, « Dynastie Décline and the Roots of Rébellion », in The Cambridge History of China, vol. 10, 1978, pp. 107-162. Les auteurs indiquent que, malgré la réforme de la gestion du transport des céréales à la capitale, les Qing laissaient entiers des problèmes majeurs tels que l'administration locale, les travaux hydrauliques, la gabelle, le fisc et la monnaie. Voir aussi Marianne Bastid, « The Structure of Financial Institutions of the State in the Late Qing », in Schram, S. R. (éd.), The Scope of State Power in China, Londres-Hong-Kong, St. Martin's Press/The Chinese Press, 1985, pp. 5179 Google Scholar ; P. A. Kuhn, Les origines…, op. cit., chap. III, « L'agriculture maoïste et l'ancien régime ».

19. « Xinhai wuyue shiqiri zhaojian nidui » (Discours de réponse lors de la réception du Régent le 17e jour du 5e mois de 1911), Zhang Jian quanji, op. cit., vol. 1, p. 164.

20. Pour une étude critique et nuancée des conceptions et des interventions de l'État prémoderne chinois dans le développement économique, voir Pierre-Etienne Will, « Appareil d'État et infrastructure économique dans la Chine prémoderne », in Bureaucraties chinoises, Paris, L'Harmattan, 1987, pp. 11-41 ; id., « Développement quantitatif et développement qualitatif en Chine à la fin de l'époque impériale », Annales HSS, 49-4, 1994, pp. 863-902 ; id., « Officiai Conceptions of Economie Development in Late Impérial China », in Guo Tingyi xiansheng jiuzhi danchen jinian lunwenji (Mélanges pour le quatre-vingt-neuvième anniversaire de Guo Tingyi), Taibei, Institute of Modem History (Academia Sinica), 1995, vol. 2, pp. 313-351.

21. « Xinhai wuyue… » art. cit., p. 164.

22. La Chine évoluait ainsi d'un droit commercial coutumier à un droit commercial écrit, définissant le statut des personnes morales, régissant les contrats, les litiges, etc. Sur les coutumes régissant les transactions commerciales, voir Liang Zhiping, Qingdai xiguanfa : shehui yu guojia (Les lois coutumières sous les Qing : société et État), Pékin, Zhongguo zhengfa daxue chubanshe, 1996.

23. Les deux projets de loi en question sont entrés en vigueur sous la République en janvier 1914, sous la juridiction de Zhang Jian : Shen Jiawu (éd.), Zhang Jian Nongshang zongzhang renqi jingji ziliao xuanbian (Recueil des documents économiques du ministère de l'Agriculture et du Commerce sous la juridiction de Zhang Jian), Nankin, Nanjing daxue chubanshe, pp. 24, 57. Sur le contenu des deux lois : Code des sociétés commerciales (Gonsi tiaoli), pp. 25-56 et Code général de la personne morale (Shangren tongli), pp. 153-161. Zhang Jian accordait une grande importance à ces questions. L'intention de parachever la législation commerciale fut d'ailleurs l'une des principales raisons pour lesquelles il accepta la responsabilité, en 1913- 1915, du ministère de l'Agriculture et du Commerce.

24. Dans le domaine de la construction de l'État de droit, six projets étaient achevés à la veille de la chute de la dynastie : le nouveau Code pénal, le Code civil, le Code commercial, le Code de procédure des affaires civiles, le Code de procédure des affaires pénales et les dix-neuf principes de la Constitution.

25. Duanfang, « Qing gaiding guanzhi yiwei lixian yubei zhe » (Mémoire demandant la réforme du système de l'administration pour servir de base à la préparation au régime constitutionnel), 1906, s. 1. Duan Zhongmin gong zougao, vol. 6, pp. 38b, 54a-58a. Duanfang, qui figurait parmi les plus fermes partisans du projet constitutionnel, joua un rôle actif dans son lancement. Parmi les cinq membres de la délégation d'inspection du projet constitutionnel (décembre 1905 — août 1906), il était le plus écouté par le trône. Avant la promulgation de l'édit du 1er septembre, les réunions au sommet, fin août 1906, s'appuyaient sur les mémoires du prince Zaize et de Duanfang : Xinhai geming (La révolution de 1911), Shangai, Zhongguo Shixuehui/ Shanghai renmin chubanshe, 1957, vol. 4, pp. 14-23.

26. Empruntée au début du siècle aux institutions japonaises, l'autonomie locale — difang zizhi — s'inspirait du « conseil local » japonais (kengiji kai) et de structures anglo-saxonnes similaires. Le terme, adopté par l'administration, servit à désigner l'expérience d'autonomie locale accordée, en été 1905, à la cité chinoise de Shanghai. Des représentants locaux y avaient pour mission de mettre en place les infrastructures nécessaires au développement économique et à l'aménagement urbain, de promouvoir l'enseignement et d'assurer divers services publics. L'exemple avait eu un grand impact dans la région (cf. infrà).

27. Dès les premières années de la Nouvelle Politique, déjeunes lettrés avaient été officiellement envoyés au Japon pour y recevoir une formation technique et moderne.

28. P. A. Kuhn, Les origines…, op. cit., p. 156.

29. Zhang Jian, « Nianpu zixu » (Préface de la chronique personnelle), Zhang Jian quanji, op. cit., vol. 5-1, pp. 298-299. Cet écrit est postérieur au règne des Qing, mais la position de Zhang Jian n'a pas changé.

30. En outre, Zhang Jian continuait à employer certains termes traditionnels dans l'appréciation des révolutionnaires de son temps — shengxian (sages), quanjian (traîtres au sein du pouvoir) et daozei (bandits) : « Pour moi, les révolutions diffèrent par la nature de leurs auteurs, qu'ils soient sages, traîtres ou bandits. Le sage est rarissime dans l'histoire et le traître n'existe pas à l'heure actuelle. Pour ce qui est des révolutions ourdies par les bandits, nos expériences de la période des Six Dynasties (Liuchao, 222-5 89) et de celle des Cinq Dynasties (Wudai, 907-960) peuvent nous servir d'avertissement. En plus, il y a encore aujourd'hui un problème de relations extérieures, qui rend la situation bien différente de celle d'autrefois. » (Zhang Jian quanji, op. cit., vol. 6, p. 867).

31. Originaire du Zhejiang, Tang Shouqian préconisait très tôt, dans son ouvrage Weiyan (Paroles libres), publié vers 1890, la réforme complète des domaines administratif et politique. Après avoir obtenu le titre impérial de docteur et être entré à l'Académie Hanlin en 1892, il démissionna, dès sa nomination, de son premier poste de magistrat. À partir de 1905, il fut l'un des principaux leaders du Mouvement de la protection des droits de chemin de fer du Zhejiang, et assuma la fonction d'administrateur général (zongli) de la Compagnie ferroviaire provinciale.

32. « Archives de Duanfang », cité par Qingdai renwu zhuangao, Xiabian, Part II, vol. 3, p. 72. À plusieurs reprises, Duanfang demanda à la Cour d'abolir complètement les privilèges encore existants, ainsi que les mesures de ségrégation toujours en vigueur : réglementation des casernes des bannières, proscription des mariages mixtes, système de recrutement des fonctionnaires et quotas avantageux réservés aux Mandchous, etc. (Duang zhongmin gong zougao, vol. 8).

33. Meng Sen (1868-1938) avait étudié le droit politique au Japon, de 1901 à 1905. En 1908, il devint rédacteur en chef du journal Dongfang zazhi (L'Orient). Élu député à l'Assemblée nationale après la Révolution de 1911, il ne tarda pas à s'éloigner de la politique pour se consacrer à l'histoire des Ming et des Qing.

34. Meng Sen, « Sanshiri liixingji » (Notes d'un voyage de trente jours), Dangfang zazhi, t. 7-6, 1910, annexes, pp. 17757-17764 ; t. 7-7, pp. 17977-17984. Il devait contacter les députés de la Mandchourie, du Zhili et du Shandong. Trois autres députés du Jiangsu prenaient en charge d'autres régions chinoises : Wang Shuhuai, Zhongguo xiandaihua de quyu yanjiu- Jiangsusheng 1860-1916 (Étude régionale de la modernisation chinoise — province du Jiangsu, 1860-1916), Taibei, Institute of Modem History (Academia Sinica, 48), 1985, p. 147.

35. Voir par exemple Soda Saburo, « Qingmo chanye xingzheng de fenquanhua he jiquanhua » (Centralisation et décentralisation de l'administration de l'industrie à la fin des Qing), Jindai Zhongguo, 6, 1996, pp. 107-131 ; Nozawa Yutaka, « Xinhai geming yu chanye wenti — 1910 nian de Nanyang quanyehui yu rimei shiyetuan fanghua » (La Révolution de 1911 et le problème de l'industrie — L'Exposition de promotion économique du Nanyang de 1910 et la visite en Chine des délégations industrielles américaine et japonaise), in Jinian xinhai geming qishi zhounian xueshu taolunhui wenji, 3, 1983, pp. 2473-2496.

36. La première chambre de commerce fut créée à Shanghai, en 1903, sous l'impulsion des autorités ministérielles et provinciales. Dans la seule province du Jiangsu, la législation de 1904 porta bientôt à trente-quatre le nombre des chambres de commerce générales (zonghui) et de leurs filiales (fenhui).

37. Cf. Xiaohong Xiao-Planes, « L'activité réformatrice des élites locales au début du xxe siècle : l'exemple de la Société générale d'éducation du Jiangsu », Études chinoises, Xvii-1/2, 1998, pp. 191-231.

38. Le discours des réformateurs va même jusqu'à invoquer la capacité législatrice de la « société » face à l'exécutif gouvernemental : « Fu Susheng xuewuchu shu » (Réponse à l'Office d'éducation du Jiangsu), in Jiangsu xuewu zonghui wendu (Documents de la Sgej), 1906, Part II, p. 204 ; publié également dans Shenbao, le 15 mai 1906.

39. « Xuebu zou zhuoni jiaoyuhui zhangcheng zhe » (Mémoire du ministère de l'Instruction : règlements de la Société d'éducation, élaborés après mûre réflexion), Dongfang zazhi, 3-9, 1906, p. 7503.

40. Par exemple, il estimait que les élites de Yangzhou progressaient dans la prise de conscience et que celles de Mandchourie manquaient complètement d'esprit d'autonomie par rapport à l'administration : Zhang Jian, « Riji [Journal], le 17e jour du 2e mois, le 22e jour du 9e mois et le 27e jour du 11e mois 1906 », Zhang Jian quanji, op. cit., vol. 6, pp. 570, 580, 583, 868.

41. Sur le rôle des guildes et amicales régionales (tongxianghui) dans la mobilisation du corps social et les mouvements patriotiques, voir B. Goodman, Native Place…, op. cit.

42. Il se donnait pour objectifs : « Redresser toutes les affaires de la localité, résister à l'empiétement des étrangers, rénover l'esprit, l'insuffisance de l'administration et développer le bien-être de la population » (” Shanghaixian chengxiang neiwai gongchengju zhangcheng » [Statuts du Bureau général des travaux publics de la sous-préfecture de Shanghai], Dongfang zazhi, 2-10, 1905, p. 5040). Les statuts stipulent que l'administrateur général (zongdong) doit être un lettré (shenshi) autochtone, mais les deux vice-administrateurs doivent être marchands et non lettrés. Sur le fonctionnement et les réalisations du conseil municipal, voir Mark Elvin, « The Gentry Democracy in Chinese Shanghai, 1905-1914 », in J. Gray (éd.), Modem China Searchfor a Political Form, Londres, Oxford University Press, 1969, pp. 41-65 ; et du même, « The Administration of Shanghai, 1905-1914 », in M. Elvin et W. G. Skinner (éds), The Chinese City Between Two Worlds, Stanford, California University Press, 1974, pp. 239-262.

43. Mu Xiangyao, « Shanghai zizhihui jiangyan lu » (Enregistrement des discours de la Société d'études sur l'autonomie locale), Xianzheng zazhi, 1-2, 1907, pp. 65-70 ; ici p. 66.

44. Ibid., p. 65.

45. MA Min et ZHU Ying, Chuantong yu jindai de liangchong bianzouwanqing Suzhou shanghui ge'an yanjiu (Le duo de la modernité et de la tradition — études sur le cas de la chambre de commerce de Suzhou à la fin des Qing), Chengdu, Bashu shushe, 1993.

46. Alain Roux, Grèves et politique à Shanghai, les désillusions (1927-1932), Paris, Editions de l'Ehess, 1995, p. 56.

47. Zhang Jian s'exprima ainsi lors des réunions de l'Aprc et de la Sgej au 9e mois de 1906 et nota cette position dans sa chronique personnelle rédigée en 1923 : Zhang Jian, Zhang Jian quanji, op. cit., vol. 6, « Riji », p. 580 ; « Nianpu », p. 868.

48. Mouvement patriotique d'opposition à une tentative britannique de s'arroger des droits sur la construction de la ligne Shanghai-Ningbo. Cf. Tu-ki MIN, National Policy and Local Power…, op. cit., pp. 181-218 ; M. B. Rankin, Elite Activism…, op. cit., pp. 248-298.

49. Jindai Shanghai dashiji, 1989, p. 642 ; Yubei lixian gonghui bao, 1/20, 2/5, 1908-1909 ; voir aussi Zhang Kaiyuan, « Xinhai geming yu jiangzhe zichan jieji », Jinian xinhai…, op. cit., vol. 1, pp. 269-270. Parmi les représentants figuraient ceux des Chinois d'outre-mer de l'Asie du Sud-Est et du Nord-Est ; d'autres villes de la Chine intérieure communiquèrent leurs observations par correspondance.

50. Jiangsu…, op. cit., III, Parti, 1908, pp. 38-43.

51. Les émissaires envoyés dans les différentes régions furent Fang Huai, Meng Sen, Yang Tingdong et Lin Wenyuan. Meng Sen, chargé de la communication avec les provinces de Mandchourie et du nord de la Chine (Zhili et Shandong), a laissé un récit détaillé de cette mission : Dongfang zazhi, 7-6/7-7, 1910, « Fulu, Xingji », pp. 17757-17764 et 17977-17985.

52. Dongfang zazhi, 6-1, 1908, pp. 13888-13389.

53. Dongfang zazhi, 5-9, 1908, pp. 12900-12902 ; Jindai Shanghai dashiji, 1989, p. 657 ; voir aussi John H. Fincher, Chinese Democracy: Statist Reform…, op. cit., p. 107.

54. Dongfang zazhi, 6-6, 1909, p. 14949. De même, le sud du Jiangsu s'est montré le plus enthousiaste lors des élections des conseillers communaux : ibid., 7-1, 1910, pp. 16592-16593.

55. Tu-ki MIN, National Policy and Local Power…, op. cit., pp. 178-179 ; voir aussi Wang Shuhuai, « Qingmo minchu Jiangsusheng ziyiju yu shengyihui » (L'assemblée consultative et la chambre générale de la province du Jiangsu à la fin des Qing et au début de la République), Taibei, Guoli shifan daxue, Lishi xuebao, 6, 1978, pp. 319-333. Les différences entre les taux de participation (de 40 % à 70 %) relevés dans la province du Jiangsu expriment bien, par ailleurs, le degré variable des difficultés rencontrées dans la mise en place des nouvelles institutions.

56. Jiangsu ziyiju yanjiuhui baogao (Documents de la Société d'études de l'assemblée provinciale du Jiangsu), 1909, pp. 1-4. Ces documents rassemblent de nombreux textes émanant des membres de la Société et portant sur divers sujets relatifs aux affaires provinciales ou régionales.

57. Shenbao, le 25.09.1910; Peng-Yuan Chang, Constitutionalists and the Révolution of 1911 in China, Institute of Modem History (Academia Sinica, 24), 1983, pp. 19-22 et notes 29-31, p. 36 et notes 12-13.

58. L'assemblée était habilitée à émettre des avis en matière de politique générale, de budget, de finances et de règlements provinciaux. Mais ceux-ci n'avaient force de loi qu'avec l'agrément du gouverneur, et le pouvoir central restait l'arbitre suprême en cas de différend entre l'administration et l'assemblée. Cette dernière, également chargée d'élire les membres de l'Assemblée nationale consultative, jouait un rôle d'intermédiaire entre le futur parlement et les conseils locaux.

59. Discours du gouverneur et réponse du président et des députés : Jiangsu ziyiju dier niandu baogao, 3, 1910, pp. 3b-5a.

60. Les taxes d'octrois constituaient un droit de transit de marchandises institué au Sud- Est pour faire face aux rébellions Taiping. La majoration de ces taxes, maintenues et généralisées après la guerre civile, était à l'origine de nombreux abus chez les fonctionnaires et les employés de douane, qui conduisaient à un alourdissement important des charges des commerçants et fabricants chinois, alors que les produits étrangers en étaient exemptés.

61. Wang Shuhuai, « Qingmo minchu Jiangsusheng…, art. cit. », pp. 320-323 ; Zhang Jian quanji, 1, p. 152.

62. Les conflits entre villes et campagnes semblent avoir été l'un des principaux obstacles à la mise en place de l'autonomie locale : Dongfang zazhi, 6-13, 1909, pp. 16373-16375 ; 7-2, 1910, p. 16785.

63. D'origine mongole, Xiliang (1853-1917), qui acquit le titre de doctorat à 21 ans, assuma longtemps les fonctions de magistrat et de préfet. Gouverneur général du Sichuan (1903-1907), puis du Yun-Gui (Yunnan-Guizhou) avant d'être nommé gouverneur général de Mandchourie en 1909, il fut l'un des rares hauts fonctionnaires qui aient persisté, après le dernier refus catégorique de la Cour et malgré le risque de révocation, dans leur demande d'instauration du régime constitutionnel : Roger V. DES Forges, Hsi-Liang and the Chinese National Révolution, New Haven, Yale University Press, 1973 ; Samuel Adrian M. Adshead, Province and Politics in Late Impérial China: Viceregal Government in Szechwan, 1898-1911, Londres, Curzon Press Ltd, 1984.

64. LAO Zude (éd.), Zheng Xiaoxu riji (Journal de Zheng Xiaoxu), 20 et 21 novembre 1910, Pékin, Zhonghua shuju, 1993, vol. 3, p. 1290.

65. Dongfang zazhi, 6-4, 1904, pp. 14514-14515.

66. Wang Shuhuai, « Qingmo minchu Jiangsusheng… », art. cit., pp. 321-323 ; Geng Yunzhi, « Qingmo zichan jieji lixianpai yu ziyiju » (Les constitutionnalistes et l'assemblée consultative provinciale à la fin des Qing), in Jinian xinhai…, op. cit., 1983, vol. 2, pp. 1205-1206.

67. Zhang Yufa, Qingji de lixian tuanti, op. cit., pp. 460-463.

68. GEN Yunzhi, « Qingmo zichan… », art. cit., p. 1219.

69. Les principaux dirigeants activistes entrèrent dans le nouveau gouvernement provisoire confié à l'ancien gouverneur Cheng Dequan, en vertu de l'accord conclu avec les leaders du Tongmenghui (la Ligue jurée). Celle-ci était la plus importante des formations révolutionnaires ; fondée en 1905 au Japon, elle avait à sa tête Sun Yat-sen.

70. Sur Yuan Shikai et la vie politique au début de la République, se reporter à Ernest P. Young, The Presidency ofYuan Shih-k'ai: Liberalism and Dictatorship in Early Republican China, Ann Arbor, University of Michigan Press, 1977, et « Politics in the Aftermath of Révolution: The Era of Yuan Shih-k'ai, 1912-1916 », in Fairbank, J. K. et Twitchett, D. (éds), The Cambridge History of China, vol. 12, Republican China 1912-1949, Part I, Cambridge, Cambridge University Press, 1983, pp. 208255.Google Scholar Sur les relations des élites du Jiangsu avec Yuan Shikai et sur leur volonté de conciliation avec les différentes tendances politiques, voir Xiaohong Xiao-Planes, La Société générale d'éducation du Jiangsu et son rôle dans l'évolution socio-politique chinoise de 1905 à 1914, thèse de doctorat, Paris, Inalco, 1997, pp. 323-327.

71. Par exemple, les examens impériaux étaient interdits, pour trois générations, aux descendants de prostituées et de trois autres catégories professionnelles : comédiens, exécuteurs des peines prescrites par les tribunaux, employés civils de l'armée. Voir Zhong Yulong, « Kechang huiyi lu » (Souvenirs du système des examens), in Wenshi ziliao jingxuan (Recueil de matériaux historiques et culturels), Pékin, Zhongguo wenshi chubanshe, s. d., vol. 1, pp. 295-296.

72. Les lois de la République ont notablement élargi les libertés politiques et le corps des électeurs. De nombreux lettrés de rang modeste pensaient trouver là l'occasion d'accéder aux postes officiel, mais la corruption entacha rapidement la procédure électorale (voir à ce sujet Wang Shuhuai, « Qingmo minchu Jiangsusheng… », art. cit., pp. 324-329).