Published online by Cambridge University Press: 26 July 2017
Toutes les études sur les sociétés rurales d'hier et d'aujourd'hui font la part belle au développement des échanges monétaires et au renforcement volontaire ou imposé des rapports de la paysannerie avec le marché. Explicitement (E. Le Roy Ladurie, 1973) ou non, les historiens reprennent à leur compte l'opposition, classique, des pays du Tiers-Monde, entre agriculture de subsistance et agriculture commercialisée (G. Elwert et D. Wong, 1980). Et ceci avec une netteté toute particulière dans le cas de la France médiévale ou moderne, où l'on s'accorde volontiers à reconnaître le poids, précoce et durable malgré tous les efforts des rassembleurs de parcelles, d'une quasi-propriété paysanne enfin libérée par la Révolution de toutes les charges qui pesaient sur elle. Autoconsommation et marché se présentent ainsi comme les deux pôles autour desquels s'organisent les choix productifs de la majorité des exploitations agricoles.
Instead of the classic opposition between self-sufficiency and the market-the starting point and the endpoint of change in rural society-the study of French agrarian life in the modern period points to a distinction closer to that between target producers and market producers. The national dividing line of autarky effectively divided the peasantry into two camps. Above the line, a handful of larger or more specialized farming units sold their produce and regularly generated negotiable surpluses, however, faced with competition in the form of ecclesiastical and seigneurial levies, they hesitated to increase their cereal output. Below the line, the majority of peasants owned too little land to provide for their families' needs even in a normal year, and were obliged to seek out the necessary supplements-but only those supplements-in various markets (the grain, labor, credit and landmarkets). The violent fluctuations of these Secondary markets reflected variations in supply and demand that affected only a minor share of output. This dual incentive for production units to adopt a Malthusian strategy is an even more powerful explanation than technological stagnation for the inertia of farming output, which, in the latter half of the eighteenth century, was not so much guided by price trends as durably indexed on the population.
Cet article reprend, en le précisant et le complétant, l'un des chapitres du rapport collectif sur le cas français présenté au VIIIe Congrès international d'Histoire économique de Budapest (août 1982) dans le cadre du Thème A 1 : « Grands domaines et petites exploitations. Seigneurs et paysans en Europe du Moyen Age à l'époque moderne ». Ce qui explique ses évidentes limites géographiques, chronologiques et thématiques. Il respecte la division du travail entre les auteurs des différentes contributions : J. Andreau, J.-L. Fiches, F. Laubenheimer, F. Widemann, « Modes d'exploitation et occupation du sol en Gaule Narbonnaise » ; M. Corbier, « Grand domaine et petite exploitation : la Gaule du Nord à l'époque romaine » ; M.J. Tits-Dieuatde, « Grands domaines et petites exploitations du ve au début du VIIIe siècle » ; E. Magnou-Nortier, « Contribution à l'étude de la villa dans les Pays de Languedoc durant le Haut Moyen Age, VIIIe-XIIe siècle » ; B. Garnier, R. Hubscher, « Recherches sur une présentation quantifiée des revenus agricoles » ; M. Baulant, C. Beutler, « Les Loges Saint-Denis et Maisoncelles de 1675 à 1789 » ; F. Sigaut, « Formes et évolution des techniques » ; J.-P. Desaive, « Nature et typologie des exploitations dans la France entre le XIIe et le XVIIIe siècle » ; G. Sivéry, « Petite exploitation et économie de marché dans le Hainaut » ; A. Guillemin, « Rente, famille, innovation. Contribution à la sociologie du grand domaine noble au XIXe siècle ». Mais il a bénéficié, dans son élaboration, des suggestions de tous les membres du groupe de travail constitué par Joseph Goy et de G. Elwert, M. Morineau, et G. Postel-Vinay que je tiens à remercier.