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Recherches écologiques et biogéographiques sur les Plécoptères et Coléoptères d'eau courante (Hydraena et Elminthidae) des Pyrénées

Published online by Cambridge University Press:  16 June 2011

C. Berthélemy*
Affiliation:
Laboratoire de Zoologie, Faculté des Sciences, 118, route de Narbonne, 31 - Toulouse
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Abstract

1. - Des prélèvements de faune benthique ont été effectués à l'aide d'un filet-troubleau. Ils ont été complétés par des lavages de mousses, des chasses à vue d'imagos, ainsi que par l'examen de quelques collections.

2. - Les cours d'eau étudiés sont situés dans la Vallée d'Aure (2.1), le Couserans (2.3), et les Prépyrénées (2.4, voir fig. 2.1). Tous appartiennent au bassin de la Garonne en amont de son confluent avec l'Ariège.

La description des stations comprend les trois rubriques suivantes :

- topographie et réseau hydrographique,

- environnement (terrains traversés, climat, végétation, action de l'homme),

- mesures (débit, données physico-chimiques, constitution du lit, vitesse du courant) et prélèvements.

Quelques stations des Pyrénées du département de la Haute-Garonne (2.2) et des environs de Toulouse (2.5) sont décrites plus brièvement.

Ces cours d'eau appartiennent à la même région climatique. Ils diffèrent principalement les uns des autres par l'altitude, le débit et la nature des terrains. Les conditions rencontrées dans chacun d'eux se retrouvent dans beaucoup d'autres cours d'eau situés aux mêmes altitudes. Il sera toutefois nécessaire de compléter cette étude par des prélèvements effectués dans des massifs cristallins.

3. - Pour chacune des 78 espèces de Plécoptères, des 25 espèces d'Hydraena et des 26 espèces d'Elminthidae sont fournies les indications suivantes (après les synonymes utilisés dans d'autres publications consacrées à la même région) :

a) descriptions de référence,

b) nombre des imagos (récoltes personnelles, collection Despax, liste communiquée par M. J. Aubert),

c) nombre des stations correspondant aux imagos mentionnés en b) + nombre des autres stations,

d) répartition par départements,

e) distribution géographique en Europe occidentale et en Europe moyenne.

Les citations douteuses ou erronées et les espèces probables sont indiquées pour les Plécoptères (3.2.3) et les Coléoptères (3.3.3).

La distribution des espèces en fonction du nombre des individus capturés pour chacune d'elle s'apparente à une distribution log-normale, ou à une distribution binomiale négative, plutôt qu'à une série logarithmique (3.4.1).

4.1. - L'écologie des différents taxa est comparée en suivant l'ordre systématique.

4.2. - Le maximum d'abondance des Plécoptères se situe à plus haute altitude que celui des Coléoptères. Les imagos de ces derniers sont plus nombreux en été. En plaine, les mues imaginales des Plécoptères ont lieu soit au printemps, soit en automne, selon les espèces. L'écart entre ces deux périodes de vol diminue avec l'altitude et, en haute montagne, les imagos apparaissent de façon ininterrompue pendant toute la belle saison.

4.3. - Les Setipalpia prédominent dans un torrent situé vers 2 000 m alors qu'ils sont peu abondants dans les ruisseaux et rivières de basse altitude.

4.4. - Le plus souvent, les espèces d'un même genre de Plécoptère diffèrent par leur période de vol, par la position qu'elles occupent le long des cours d'eau, ou par ces deux caractères. Les relations mises en évidence dans les Pyrénées s'observent aussi dans les autres régions où cohabitent les mêmes espèces ou leurs vicariantes géographiques. Quelques espèces voisines, comme Nemoura fulviceps et N. flexuosa, ou Leuctra mortoni et L. digitata, par exemple, ont été trouvées dans des cours d'eau différents, sans qu'il soit encore possible d'établir une corrélation avec des données écologiques. Par contre, le nombre des espèces d'un même genre qui sont fréquemment associées dans les mêmes stations et qui ont la même période de vol est peu élevé. Des différences de substrats ont été observées pour certaines d'entre elles (Protonemura pyrenaica et P. r. spinulosa, Leuctra fusca et L. geniculata).

4.5. - On ne rencontre en haute montagne que les Hydraena du sous-genre Haenydra ; les Hydraena s. s. et les Phothydraena vivent surtout en basse altitude. Le sous-genre Hadrenya a une répartition intermédiaire.

4.6. - Les Haenydra du groupe gracilis se remplacent d'amont en aval dans les cours d'eau ; la zone de densité maximale d'H. truncata s'intercale entre celles d'H. saga et d'H. gracilis. Une sériation analogue s'observe dans d'autres régions, mais les relations entre l'écologie et la phylogénie sont plus complexes que chez les Plécoptères. Les Hadrenya et H. s. s. pulchella sont muscicoles. Les cours d'eau dans lequels vivent H. sternalis et H. angulosa sont plus froids que ceux où ont été trouvées H. riparia et H. subdepressa.

4.7. - Le nombre des genres d'Elminthidae augmente d'amont en aval. Les Elmis et Oulimnius sont plus muscicoles que les Esolus, Limnius, Dupophilus et Stenelmis. Les Riolus prédominent dans les régions calcaires et les Dupophilus dans les régions siliceuses. Les larves d'Elminthidae sont moins rhéophiles que les adultes.

4.8. - Comme chez les Plécoptères et les Haenydra, les espèces d'Elminthidae appartenant à un même genre occupent des positions différentes le long des cours d'eau. Quelques différences liées aux substrats ont également été mises en évidence.

4.9. - Les espèces récoltées sont comparées deux à deux, au point de vue

- de leur abondance relative dans les mousses, pour les imagos de Coléoptères (Tableau hors-texte 4.40. C),

- de leur période de vol, pour les Plécoptères (4.40. A),

- de leur position relative le long des cours d'eau, pour les deux groupes (4.40. B). L'étude de ce dernier caractère montre qu'il n'est pas possible d'établir une sériation unique, mais qu'il est nécessaire de tenir compte de l'altitude où les cours d'eau prennent leurs sources.

4.10. - On observe une bonne correspondance entre la position relative des Plécoptères dans les cours d'eau pyrénéens et le classement des mêmes espèces, ou de leurs vicariantes géographiques, dans le système des Saprobies, classement établi en Tchécoslovaquie.

Beaucoup d'espèces eurytopes ont des périodes de vol étalées. La date d'apparition des imagos des Plécoptères printaniers est d'autant plus tardive que l'altitude est plus élevée ; celle des Plécoptères automnaux ne varie pas avec ce facteur.

Quelques espèces vivant en haute altitude dans les Pyrénées centrales descendent plus bas dans les Pyrénées atlantiques. Inversement, les altitudes maximales de certaines espèces ont été observées dans la partie orientale des Pyrénées.

4.11. - Les formes muscicoles sont en général de plus petite taille que les formes pétricoles. Certaines présentent des carènes et des apophyses dorsales.

Les Protonemura estivales ont des branchies plus courtes que les espèces printanières et automnales.

Les espèces d'aval sont plus petites et plus claires que les espèces d'amont appartenant aux mêmes groupes et, chez les Isoperla et les Chloroperla, ont des soies natatoires plus développées.

4.12. - Dans un milieu ouvert comme les eaux courantes, il paraît préférable d'étudier la distribution des espèces en fonction de leurs relations phylogéniques, plutôt que d'aborder le problème sous son aspect inverse. En règle générale, les zones occupées par deux espèces voisines sont moins importantes que celles où coexistent des espèces appartenant à des lignées éloignées.

5.1. - Le peuplement des stations étudiées n'a pas montré de fluctuations annuelles importantes.

5.2. - 31 espèces de Plécoptères ont été capturées dans la station la plus riche (l'Orle à 860 m ). Dans les petits cours d'eau, le nombre d'espèces est moins élevé, mais la densité absolue est semblable. Dans le torrent situé vers 2 000 m, la densité et la diversité sont faibles, de même que pour tous les groupes d'insectes aquatiques. En basse altitude, dans le Volp à 240 m, les Plécoptères sont peu nombreux en espèces et en individus et s'opposent ainsi à la plupart des autres groupes.

Les groupements les plus étudiés ("groupements de référence") ont été rangés de telle sorte que les groupements qui possèdent en commun le plus grand nombre d'espèces se trouvent les uns à côté des autres. La série obtenue est conforme à l'altitude relative des stations, mais il n'a pas été possible d'y insérer un ruisseau de basse altitude. La liste des espèces capturées près de la Garonne en amont de Toulouse confirme qu'on ne peut disposer les groupements de Plécoptères en une série unique lorsque interviennent à la fois de fortes différences de débit et d'altitude.

5.3. - La diversité des groupements de Coléoptères est maximale en basse altitude. Elle est liée à l'importance des cours d'eau, mais cette influence ne joue que pour des débits très faibles, à la différence de ce qu'on observe chez les Plécoptères. Lorsqu'on range les groupements de référence d'après leur composition faunistique, on obtient une série conforme à l'altitude relative des stations.

Les groupements d'Elminthidae des eaux courantes d'Europe ont été rangés en séries qui diffèrent en fonction de la nature des terrains (groupements avec ou sans Riolus) et d'un facteur encore inconnu (avec ou sans Esolus). Dans chaque série, le nombre des espèces croît d'amont en aval et on observe des remplacements réguliers d'espèces les unes par les autres chez les Elmis, Esolus, Riolus et Limnius.

5.4. - La notion de succession physiographique ne fournit pas une base utilisable pour une classification écologique des cours d'eau, l'évolution physiographique se déroulant à une vitesse trop faible par rapport aux variations climatiques et à l'évolution biologique.

Si les confluents principaux peuvent constituer de bonnes limites entre les biocénoses d'un cours d'eau déterminé, la concordance entre les limites situées sur des cours d'eau différents n'a pas été établie.

Dans la région étudiée, un schéma basé sur l'importance des cours d'eau n'est applicable que dans des limites altitudinales assez étroites.

6.1. - D'est en ouest, le peuplement des Pyrénées est assez homogène et il ne reste pas de traces de spéciation géographique intrapyrénéenne dans les répartitions actuelles. La présence dans le Pays Basque de quelques Coléoptères ibériques montre qu'il s'agit d'une zone de passage et pose le problème de la limite occidentale de la chaîne.

6.2. - Pour les groupes considérés, les Pyrénées présentent des relations faunistiques plus étroites avec les régions situées au nord qu'avec les massifs de la Péninsule Ibérique. Ce phénomène est général dans le sud de l'Europe et est, au moins partiellement, compensé par la présence de nombreux endémiques.

7. - Le rôle de la concurrence entre espèces voisines est discuté dans la conclusion et il est proposé un plan d'étude des communautés d'eau courante.

Type
Research Article
Copyright
© Masson, 1966

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