Selon l’International Association for the Study of Pain (IASP), la douleur est « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle, ou décrite en ces termes ». D’après cette définition, la douleur correspond à la fois à un phénomène perceptif et à un vécu subjectif, et une intrication étroite existe entre ces composantes. De fait, les voies nerveuses qui conduisent les messages nociceptifs se projettent non seulement sur des structures cérébrales qui intègrent les paramètres physicochimiques de la sensation douloureuse (thalamus, cortex somesthésique) mais aussi sur celles qui en évaluent l’impact émotionnel aversif et déclenchent des réponses neurovégétatives, cognitives et comportementales adaptées ou non (aire parabrachiale latérale, noyau central de l’amygdale, hypothalamus, insula) . Cette organisation anatomique est en rapport avec les données cliniques qui attestent d’une forte co-morbidité entre les douleurs chroniques et des désordres affectifs tout particulièrement . Alors que les douleurs aiguës (nociceptives) et les douleurs chroniques inflammatoires mettent en jeu des mécanismes neurobiologiques bien connus aujourd’hui, les douleurs chroniques neuropathiques, ou de type neuropathique (par ex. : fibromyalgie), sont toujours l’objet d’intenses investigations . Leur prévalence est élevée (7 % de la population générale), et les traitements disponibles n’ont qu’une efficacité et une tolérabilité limitées. Certains antidépresseurs sont prescrits en première intention, mais leur NNT (« number needed to treat ») reste élevé (NTT = 4–6), même pour une réduction effective de la sensation douloureuse de seulement 30 %. En réalité, la prescription d’antidépresseurs ne résulte que d’observations empiriques, et le développement de traitements véritablement adaptés et efficaces ne pourra se faire qu’au prix d’une connaissance approfondie des mécanismes neurobiologiques en cause. À cet égard, les études actuelles qui portent sur l’impact des interactions neurone-glie , de modifications épigénétiques induites au cours de la prime enfance et/ou l’adolescence, et/ou d’altérations affectant le microbiote semblent très prometteuses.