L'évolution en 1955 de l'industrie transformatrice des métaux est dominée par un progrès important de la demande. Ce progrès était annoncé l'année dernière par le rythme croissant des inscriptions de commandes. Il a été surtout sensible pour les biens de première transformation comme c'est le cas généralement en période de grande activité et il a été plus marqué pour les biens de consommation durables que pour les biens d'équipement. En outre, la demande étrangère a stimulé la production plus nettement que la demande du marché intérieur.

Etant donné l'importance de ces facteurs, il a paru plus logique de renverser l'ordonnance habituelle d'un exposé decegenre et d'examiner d'abord l'évolution de la demande tant sur les marchés belges que sur les marchés étrangers, pour en venir ensuite à la manière dont la production a pu répondre à cette demande et aux problèmes qui se sont posés à cet égard.

Le contraste entre l'évolution conjoncturelle de l'industrie textile et celle de l'ensemble du pays a rarement été aussi accentué qu'en 1955. Alors que les indices de production globale évoluaient d'une façon extrêmement satisfaisante, que les indices d'exportation atteignaient des niveaux records, et que les statistiques du chômage témoignaient d'une situation assez proche du niveau théorique du plein emploi, l'industrie textile fut, dans l'ensemble, aux prises avec de lourdes difficultés.

Ce n'est pas que les quantités produites furent inférieures à celles de l'année précédente. Quoiqu'il englobe des évolutions assez divergentes selon les secteurs, l'indice global de la production textile dépassa légèrement le niveau de 1954. Mais ce maintien des quantités produites ne put être acquis que dans un âpre climat de concurrence. Celle-ci se poursuivit par ailleurs dans une conjoncture de prix généralement à la baisse. L'indice global des prix gros textile recula de 6 % pendant l'année. En filature le recul fut de 10 % pour les fils de laine, 8 % pour ceux de coton, 11 % pour ceux de lin et 12 % pour ceux de jute.

Quiconque observe la structure de l'agriculture belge est immédiatement frappé par trois faits principaux : la superficie réduite des exploitations, le nombre relativement élevé de personnes actives dans ces exploitations et enfin l'éparpillemeut considérable des terres. Quelques données statistiques, relevées du recensement agricole de 1950, fixent l'attention sous ce rapport.

Environ 60 % des exploitations agricoles belges ont une superficie de 1 à 5 ha; dans leur ensemble ces exploitations disposent de quelque 22 % de la superficie agricole; viennent ensuite les exploitations de 5 à 10 ha, soit 23 % du total et couvrant 24 % de la superficie agricole. Ces deux groupes, comptant au total environ 206.000 exploitations, constituent ce qu'on est habitué à appeler les petites exploitations agricoles. Bien entendu un certain nombre d'entre elles, quelque 50.000, ne fournissent pas la seule source de revenus à la famille agricole, ce sont les exploitions occasionuelles où le chef d'entreprise exerce en même temps une autre profession.

L'évolution de notre commerce extérieur a été, en 1955, particulièrement brillante. Nos exportations ont augmenté en valeur de 20 %. Cet accroissement dépasse de loin le progrès réalisé par les autres pays. Le commerce mondial ne s'est en effet développé que de 8 % et seul, parmi les exportateurs importants, le Japon nous a dépassé avec un progrès de 23 %.

Examinée sur une période plus longue, la situation se présente toutefois sous un jour différent, ainsi que le montre le tableau I. Par rapport à 1951, qui représente le maximum précédent atteint par notre commerce extérieur au moment du boom de Corée, la comparaison avec le reste du monde nous est nettement défavorable. L'augmentation des exportations de la Belgique n'est que de 4,3 %, alors que les pays de l'U.E.P. de l'Europe continentale ont vu au contraire, durant cette même période, leurs exportations s'accroître de 26,8 %, et que la Grande-Bretagne a vu les siennes progresser de 11,6%. Deux de nos voisins ont réalisé des avances réellement sensationnelles : les Pays-Bas 35,3 % et l'Allemagne 76,5 %. Ce dernier chiffre est pourtant dû à des circonstances particulières auxquelles nous revenons plus loin. Par rapport à 1948, la comparaison nous est de nouveau plus favorable.

1. Durant l'année écoulée, le mouvement général des prix belges a été orienté à la hausse, d'une façon légère, mais généralisée.

Les prix de gros se sont conformés aux indications de la conjoncture mondiale. L'influence interne que nous signalons plus loin, à propos de nos prix de détail ne se retrouve pas ici. En passant de 412, en décembre 1954 à 423 en décembre 1955, les prix de gros ont simplement reflété la tendance des prix mondiaux. Tout ce que l'on peut noter, c'est que cette tendance s'est sensiblement accentuée au cours des derniers temps, puisque Janvier et février 1956 ont accusé de nouvelles hausses de 3 points, qui ont porté l'index à 430.

La prospérité économique s'est développée dans la plupart des pays d'Europe occidentale et aux Etats-Unis en 1955, et en fin d'année sont apparus plusieurs phénomènes caractéristiques d'une période de tension conjoncturelle. Alors que de nombreux secteurs des économies ont développé leur activité jusqu'à la limite des capacités, l'augmentation de la demande a provoqué un suremploi des facteurs et exercé des pressions inflationnistes. Aussi plusieurs pays ont déjà élevé leur taux d'escompte et pris les mesures qui constituent une mise en place du dispositif habituel destiné à freiner les emballements de haute conjoncture.

Sur les grands marchés des matières premières, les tendances apparaissent contradictoires. Les prix des produits végétaux ne manifestent en moyenne aucune tendance à la hausse: ils n'ont guère dépassé depuis la fin de 1952 leur niveau antérieur au boom de Corée. Cette inertie, qui paraît assez étonnante dans la conjoncture actuelle, s'explique peut-être par l'importance des réactions quantitatives provoquées, avec retard en agriculture, par les prix très élevés de 1950-51; depuis lors, des stocks se sont accumulés que l'accroissement actuel de la demande ne parvient pas à entamer suffisamment.