On a toujours considéré, semble-t-il, que la nasalisation vocalique régressive procède habituellement par étapes, c’est-à-dire que certaines voyelles se font nasaliser avant d’autres, soit à cause de leur nature même ou à cause du contexte plus ou moins propice dans lequel elles se trouvent. Or, voici qu’après avoir effectué une étude exhaustive sur le développement des voyelles nasales, George Entenman en est arrivé récemment à la conclusion tout à fait opposée. Son hypothèse peut se résumer ainsi: “A language cannot nasalize some vowels before nasal consonants without nasalizing all vowels in this environment” (1977:1). C’est ce qu’il a baptisé le principe “tout ou rien” (the “all-or-nothing” principle).
Bien que les arguments qu’il présente en faveur de ce principe semblent en général solides et bien motivés, je vais tenter de démontrer qu’il y en a un d’entre eux qui s’effondre complètement. L’argument en question découle d’une tentative de rendre compte d’un phénomène de toute évidence phonologique, à savoir la dénasalisation vocalique en français, en des termes morphologiques. Avant d’aborder ce problème particulier, cependant, il est essentiel de le situer dans le contexte de sa théorie.