Que nos lecteurs ne soient pas surpris si nous ne leur donnons pas de nouvelles de la Conférence révisionniste qui a été convoquée par le Conseil fédéral pour le 14 septembre prochain. C'est que nous n'en avons guère. Nous savons seulement que la réponse aux invitations de la Confédération suisse sont lentes à venir, ce qui n'a rien de bien surprenant.

Ainsi que nous le disions dans notre dernier Bulletin, la lutte contre la malaria, entreprise il y a quelques années par la Croix-Rouge italienne, a été courageusement poursuivie en 1902, et du rapport de M. l'inspecteur Dr F. Postempski, qui dirige depuis le début cette entreprise avec une compétence et un dévouement remarquables, nous extrayons les détails suivants.

Lorsqu'une société jette un coup d'œil en arrière sur l'année qui vient de s'écouler, pour en faire le bilan, il est rare qu'il n'apparaisse pas quelques vides creusés par la mort. Le Comité central prussien a perdu, en 1902, le professeur Virchow, lequel en 1870 avait provoqué l'organisation du premier grand lazaret selon les principes d'Esmarch; il a perdu d'autres membres également et son secrétaire général Dr Lieber. Le Dr Kimmle, médecin d'état-major a pris provisoirement sa charge.

D'après un rapport récemment paru sur les postes de secours en cas d'accidents de la Croix-Rouge, à Berlin, on peut constater le développement de cette institution. Fondée, comme on sait, par les corps de métiers en 1893, elle n'était originairement destinée qu'à ceux-ci; peu après cependant elle fut amenée à servir à toute la population berlinoise. Dirigée par un Comité central elle a un médecin et deux assistants, ainsi que des sœurs et des infirmiers attachés à son service; elle possède 22 stations, dont deux sont munies de cliniques contenant chacune 30 lits. Des cours pratiques de samaritains sont donnés dans ces stations.

Le Comité central russe a bien voulu nous informer que le Fonds institué en 1902 par S. M. l'impératrice Marie Féodorovna, au moyen d'un don de 100,000 rbls., avait atteint, le 1er mai 1903, par ses intérêts accumulés, le chiffre de 102,192 rbls., 55 cop. et il nous a priés en même temps de faire savoir, à toutes les sociétés nationales de la Croix-Rouge, qu'un état de situation de ce fonds, au 1er Janvier de chaque année, serait dorénavant publié périodiquement dans notre Bulletin.

L'école d'infirmières de la Croix-Rouge, à Berne, a achevé sa troisième année d'existence. Elle a reçu 33 élèves, dont 17 ont terminé leur instruction complète; 15 exercent leur profession de garde-malades, les unes dans des hôpitaux, les autres chez des particuliers. Les 18 autres sont encore dans le cours de leurs études ou théoriques ou pratiques.

Les nombreuses demandes d'infirmières instruites qui ont été adressées à l'école démontrent que sa création répondait à un besoin.

Après le Conseil des Etats, le Conseil national a voté, le 12 juin 1903, l'arrêté fédéral du 4 décembre 1902 concernant les sociétés de secours volontaires aux malades et blessés et allouant une subvention à la Société centrale suisse de la Croix-Rouge.

Nous nous bornerons à reproduire aujourd'hui le texte de l'arrêté ainsi adopté par les Chambres, nous réservant de revenir ultérieurement sur l'importance de cette décision pour la Société suisse.

Le dernier exercice a été riche en travail. L'activité des sœurs s'est étendue et leur nombre s'est élevé à 54; elles fonctionnent dans les hôpitaux de la ville, ou chez les particuliers. Grâce à la création d'un institut pour les infirmières et d'une succursale, les demandes émanant de particuliers ont pu être mieux satisfaites. La maison voisine a été achetée, de façon à donner plus de place soit aux sœurs, soit aux malades à soigner.

Le compte rendu complet de la conférence internationale de la Croix-Rouge tenue à Saint-Pétersbourg en mars 1902, a paru il y a quelques mois. A côté des rapports présentés sur les questions à l'ordre du jour et qui sont reproduits in extenso, ce compte rendu donne la composition de la conférence, de son bureau et de ses commissions, et renferme les procès verbaux sténographiques des séances ainsi que le texte officiel des résolutions votées.

La pétition de la Société suisse de la Croix-Rouge est venue devant les Chambres suisses pendant leur session d'octobre. Le rapport de la commission désignée fut très favorable; il concluait à ce que le Conseil fédéral fût invité à présenter un projet en vue de l'union plus étroite de l'assistance volontaire avec le service sanitaire officiel et de l'allocation à cet effet d'une subvention à la Croix-Rouge suisse. M. le conseiller fédéral Muller a déclaré qu'il était autorisé à accepter au nom du Conseil fédéral les deux postulats, qu'il leur était personnellement très sympathique et ne doutait pas de les voir aboutir malgré les difficultés financières. Ils furent adoptés à l'unanimité par l'assemblée.

La Section genevoise (hommes) de la Société suisse de la Croix-Rouge, frappée de la fréquence des accidents dans la montagne pour lesquels les moyens de secours manquent, principalement dans les hautes régions que parcourent les alpinistes, émet le vœu qu'il soit placé, dans les cabanes et les localités les plus fréquentées, des appareils et moyens de secours qui pourraient aussi servir en cas de guerre ou de manœuvres militaires.

Nous avons sous les yeux l'intéressant mémoire présenté par Mme Aurélie Ramos de Segarra, présidente de la Croix-Rouge de l'Uruguay, sur l'activité de cette société pendant l'année 1902. Nous en extrayons les passages suivants:

« Notre institution s'est placée au-dessus de tous les partis et de toutes les opinions; elle réalise le programme qu'elle s'est tracé sans faire d'exceptions ou de préférences, et, ainsi, elle consolide son crédit parmi la population et parmi les blessés et les penseurs.

La Convention de Genève du 22 août 1864 a été un bienfait pour l'humanité souffrante: elle a contribué à adoucir les maux inséparables de la guerre et à améliorer le sort des militaires blessés et malades dans les armées en campagne. Aussi personne n'en conteste plus aujourd'hui l'utilité, bien qu'on en reconnaisse les défectuosités et la nécessité d'y apporter les modifications suggérées par les expériences faites depuis 1864. En 1868 déjà, une conférence s'était réunie, à cet effet, à Genève, et avait adopté un projet de quinze articles additionnels à la Convention de 1864, dont neuf avaient trait aux guerres maritimes. Ces articles, n'ayant pas reçu la consécration diplomatique, ne purent être érigés en loi.

M. le colonel Dr Borisavlievitch-Petzutch est l'inventeur d'un excellent brancard, simple, solide et léger, qui a été adopté dans l'armée serbe. Voici la description qu'en donne l'auteur dans une courte notice qu'il nous en a fait tenir récemment:

Le brancard se compose de deux barres rondes, en bois, longues de 2m45. Sur les barres est tendue la toile, avec l'oreiller, sur une longueur de 1m75. La longueur du brancard est de 0m75. La toile enveloppe les barres et est cousue en dessous.

Le bureau de placement institué par la Croix-Rouge suisse en 1901, à Berne, vient d'accomplir sa première année d'existence. Si ses débuts ont été modestes, il a pu se réjouir de voir de mois en mois son activité s'étendre et le public et les médecins s'adresser de plus en plus à lui. Il n'a reçu que peu de plaintes du public, alors que lui-même a eu à regretter que les gardes qui se sont inscrits au bureau ne répondent pas plus promptement parfois aux engagements qui leur sont transmis. Il y a naturellement quelques perfectionnements à introduire dans les rouages; le bureau souhaiterait de voir le public mieux comprendre qu'il n'est pas un bureau de placement ordinaire, cherchant à faire des affaires et à gagner de l'argent, tandis qu'il ne réclame aucune commission et coûte à la Croix-Rouge environ 1500 francs par an.

Nous avons sous les yeux la publication illustrée que fait paraître depuis quelques années, sous le titre de Noël Suisse, la Société genevoise d'édition. Elle contient cette année un intéressant article sur les origines de la Croix-Rouge et de la Convention de Genève, dû à la plume de M. Emmanuel Kuhne. Ayant puisé ses renseignements à une source parfaitement sûre, M. Kuhne ne s'est en rien écarté de la vérité historique et les faits qu'il expose sont rigoureusement exacts, A ce seul titre ces quelques pages sont dignes d'être lues car l'exactitude n'a point toujours été la qualité dominante des historiographes de la Croix-Rouge et nombreuses sont les erreurs qui se sont ainsi accréditées.

1. La Convention de Genève pose le principe que les militaires blessés ou malades doivent être recueillis et soignés, à quelque nation qu'ils appartiennent (article 6, 1er alinéa). Y a-t-il lieu d'ajouter que les militaires mis hors de combat seront protégés contre les mauvais traitements et le pillage? Faudrait-il, en outre, stipuler:

a) que l'inhumation ou l'incinération des morts devra être précédée d'un examen attentif de leur cadavre?

b) que tout militaire portera sur lui une marque permettant d'établir son identité?

c) que la liste des morts, des blessés et des malades recueillis par l'ennemi sera remise, le plus tôt possible, par celui-ci, aux autorités de leur pays ou de leur armée?

Nous avons reçu de Mme A. Ramos de Segarra, présidente de la Croix-Rouge uruguayenne, la lettre suivante:

Montevideo, 13 avril 1903.

Monsieur le Président,

Nous avons l'honneur de vous informer que le 16 du mois dernier s'est produit dans notre pays un mouvement révolutionnaire qui heureusement a été réprimé sept jours après.

Les mêmes partis qui prirent part à la guerre civile de 1897 allaient entrer de nouveau en lutte; ayant des éléments plus forts, le résultat de la guerre eût été plus désastreux.

Suivant l'ordre du Comité central suédois, j'ai l'honneur de vous faire part de la perte douleureuse que la Société suédoise de la Croix-Rouge vient d'éprouver en la personne de son président, M. le général comte Hamilton, décédé le 1er mai dernier.