La peinture italienne des XIIIe et XIVe siècles possède dans l'histoire de l'art, depuis les Vies de Vasari, un statut exceptionnel : celui d'origine de la « peinture occidentale ». En faisant de Cimabue et de Giotto les primi lumi d'une « manière moderne » encore en enfance, Vasari mettait en effet en place un discours qui n'a cessé de nourrir les histoires de l'art successives. La fin du Duecento et le Trecento y représentent, après le sombre Moyen Age, le début d'une « renaissance » des arts inspirée de l'Antiquité. Mais ce commencement ne se connaît pas pour tel, et sa vérité est le fruit d'un accomplissement ultérieur : l'invention au Quattrocento de la perspective, et les développements qu'en proposent Michel-Ange, Léonard de Vinci et Raphaël. D'où la double caractérisation dont la peinture des XIIIe et XIVe siècles a fait, alternativement ou parfois simultanément, l'objet : oeuvre de « primitifs », qu'identifie leur incapacité à mettre en pratique sans erreur les critères spatiaux définis à partir du xve siècle, ou au contraire, pour citer le titre de l'ouvrage fameux d'Erwin Panofsky, oeuvre d'« avant-courriers » de la Renaissance, auteurs valeureux d'« une première rupture par rapport aux principes médiévaux de représentation du monde visible au moyen du trait et de la couleur ».