L'analyse de tout livre d'histoire concernant une quelconque région de l'Afrique au sud du Sahara implique dès le départ une question fondamentale : l'historien doit-il tenir compte de la masse des faits ethnographiques réunis pour prouver le caractère spécifique des « sociétés traditionnelles », ou ne doit-il s'inquiéter que des documents historiques ? C'est un problème, car si évidemment les outils historiques sont partout les mêmes, il faut bien connaître une société pour découvrir l'implicite de tout document, historique ou autre. Autrement dit : l'histoire de l'Europe, ou plus largement du monde occidental, n'exige pas de l'historien occidental une origine « nationale » ou « continentale » précise : un historien français peut fort bien s'occuper d'histoire économique italienne et inversement. Les concepts sont alors généraux et il n'est pas indispensable de les adapter à des circonstances nouvelles. Au risque de me voir accuser d'ethnocentrisme, ou d'européocentrisme, je dirais que ce n'est pas le cas en Afrique (pour tout historien non africain) : il y a un rythme de vie, des solutions sociales auxquelles nombre de nos concepts ne peuvent pas s'appliquer. Il suffit de penser à la difficulté de cerner le (ou les) mode de production africain, pour concevoir les déboires de l'historien devant la masse des documents et des faits.