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Published online by Cambridge University Press: 11 October 2017
Par quelle suite de mauvais hasards avons-nous pu laisser paraître sans le signaler, sans le louer comme il le mérite, un des plus excellents livres qui aient paru depuis longtemps sur cet immense, cet éternel, ce désespérant sujet : l'Allemagne et les Allemands ? — Évidemment, nous pouvons invoquer l'excuse honorable : le livre de Robert Minder est de ceux qui peuvent attendre, et dont le succès n'est point éphémère. Mais il ne s'agit pas de succès. Il s'agit d'utilité. Et nous voudrions bien que notre silence n'ait pas été la cause, pour celui-ci ou celui-là, d'une difficulté à comprendre tel processus historique ou telle manifestation actuelle de sentiments violents, que la lecture du livre de Robert Minder aurait levée sans difficulté.
page 272 note 1. Allemagnes et Allemands, tome I (Collection Esprit Frontière ouverte), Paris, 1948, in-8”, 480 p.
page 273 note 1. J'extrais pour donner une idée concrète de cette richesse, quelques passages de la table des matières : Livre I, II, Bases géographiques et ethniques : Rôle des provinces en Allemagne. — Dans quelle mesure subsistent-elles de nos jours ? Unification progressive du pays : trois cents États en 1800 ; une centaine après 1806 ; quarante après 1815 ; vingt-cinq en 1871. — L'industrialisation de l'Allemagne favorise la centralisation. Essai de synchronisation totale sous Hitler. Cependant, maintien des traditions provinciales. Le fédéralisme culturel se combine chez les Allemands avec l'unitarisme politique. — La géopolitique. —- L'Allemagne « pays de milieu » et « synthèse de l'Europe ». L'ode à la patrie de Hôlderlin. — Les « Staemme » allemands. Définition du terme. Apparition des Staemme aux rae et ive siècles après J.-C. Leurs rapports avec les anciennes tribus germaniques. Survivance des Staemme à travers les siècles. Valorisation actuelle du terme Stamm. — Le racisme. — Vieille Allemagne et Allemagne coloniale. — Hégémonie politique des provinces du Nord et de l'Est. —- Etc. Veut-on maintenant les têtes de chapitre des vingt dernières pages (de Stefan George à l'occupation de 1945) ? Voici : Nombre considérable de romanciers à succès dans la Rhénanie du XXe siècle. Stefan George : sa formation à Paris. Visions rhénanes de Stefan George. Nordiflcation progressive de sa pensée. Origine chez lui de l'idéal viril. Corydon, Parsifal et les reîtres prusso-teutoniques. Utilisation abusive des thèmes géorgiens par le nazisme. Incompréhension profonde du poète à l'égard de notre pays, symbole du fossé qui sépare Rhénans et Français. — Quelques philosophes et historiens : Naissance des sciences et de l'Esprit. Rôle du philosophe rhénan Dilthey, etc. —- Les poètes-ouvriers rhénans-westphaliens de Hans Ngland : Des écrivains engagés. Hymnes à l'âge de la machine. Haine de la France. Valeur artistique limitée, intérêt sociologique considérable, etc. — L'art expressionniste en Rhénanie : Deux nouvelles Universités, Francfort et Cologne. Nouvelles écoles d'architecture ; peintres rhénans. Arrière-plans économiques et politiques du mouvement. Les grandes faillites bancaires de 1930. La « nouvelle objectivité ». Etc. Ces quelques extraits de la table montrent mieux, je crois, que des pages de compte rendu ce qu'est l'ouvrage, quel est son esprit et quelle est sa richesse.
page 274 note 1. Annales d'Histoire Economique et Sociale, t. 1,1939.
page 276 note 1. Ici, je me reprends. Une chicane n'est jamais la dernière 1 J'ai dit plus haut les mérites de la bibliographie de Robert Minder. Et l'intelligence de ses jugements critiques. Cela ne veut pas dire que je souscris à tous. Et, par exemple, il me peine profondément de voir citer à tant de reprises, et avec des éloges qui m'ahurissent, ce que Robert Minder croit devoir appeler « l'ouvrage récent et capital de Jacques Pirenne, Les grands courants de l'Histoire Universelle ». Récent, soit — mais alors il est né centenaire. Capital, oui : pour démontrer, à l'aide d'un exemple frappant, ce qu'il ne faut pas faire quand on prétend, à soi tout seul, composer une histoire de la civilisation, sans s'être même posé la question de savoir ce que c'est que la civilisation. Et je m'irrite d'autant plus, je l'avoue, que ni la belle et puissante Histoire de l'Europe d'Henri Pirenne, ni l'admirable histoire nationale dont il a fait don à un peuple, — le peuple belge, — qui ne semble pas toujours dans tous ses éléments en reconnaître l'éminente vertu, — ne sont cités dans la bibliographie de Robert Minder. Pas plus que l'émouvante leçon de Pirenne (Henri 1) à l'Université de Gand, en 1918, à son retour de captivité en Allemagne : Ce qu'il faut désapprendre de l'Allemagne. Ce sont là d'authentiques chefs-d'oeuvre, les oeuvres maîtresses de l'un des deux ou trois plus grands historiens de langue française de notre génération. Ce ne sont pas des compilations frelatées de vulgarisateurs qui se donnent pour chercheurs. Une petite erreur, pendant que j y suis. R. Minder cite à tort comme parue dans la Collection Berr une Germanie de Hubert qui, en fait, n'a jamais paru. Pourquoi, encore, maintenir toute cette littérature des Berl, de Pange et autres : mortnée et sans qualification ? Il faudrait par contre citer, dans une prochaine édition, les réflexions de Marc Bloch sur les invasions germaniques que j a i publiées dans les Annales après sa mort. Et sans doute tels articles pénétrants de Mme Varga sur la genèse du national-socialisme (dansles Annales) et d'Henri Brunschwig (Ibid).