Published online by Cambridge University Press: 26 July 2017
L'histoire de la Solution finale en France ne saurait négliger le contexte ouest-européen de l'événement. C'est cette référence occidentale qui découvre l'aspect paradoxal du cas « français » indispensable à la compréhension de son déroulement. La dimension occidentale n'est pas, en l'occurence, un artifice d'une histoire en mal de comparaisons. Le détour est obligé. Il est inscrit dans le plan nazi dont il procède. S'appliquant aux Juifs de France, ce dernier englobait, dans le même élan, ceux voisins de Belgique et des Pays-Bas. Tous les aspects de cette problématique « occidentale » ne seront pas abordés ici. Il conviendrait du moins d'en reprendre les phases successives pour marquer leur simultanéité dans chacun des trois pays.
Although the French state embraced the new order and its antisemitic program, only a quarter of the Jewish population of France was exterminated, as opposed to a half in Belgium and three quarters in the Netherlands. The author proposes an interpretation of this French paradox.
1. Et non le 17 juillet, comme on le dit trop souvent en méconnaissant cette dimension ouesteuropéenne : le convoi, parti le 17, ne relevait pas de la décision du 11 juin 1942, mais d'une déportation hors programme de 6 000 Juifs, y compris le convoi de « représailles » du 23 mars 1942.
2. Voir Marrus, M. R. et Paxton, R. O., « Nazis et Juifs en Europe occidentale (1940- 1944) », dans L'Allemagne nazie et le génocide juif, Paris, EHESS, Gallimard, Le Seuil, 1983, p. 310.Google Scholar
3. Voir, plus bas, l'annexe sur les chiffres de la deportation.
4. Lettre de Heydrich à Wagner (Haut commandement de l'armée), le 6 novembre 1941, dans Monneray, H., La persécution des Juifs en France et dans les autres pays de l'Ouest, Paris, 1947, p. 353.Google Scholar
5. Rapport de Dannecker sur la question juive en France et son traitement, du 1er juillet 1941, ibidem, pp. 84-116.
6. A la conférence de Wannsee, le 20 janvier 1942, la Sécurité du Reich attribue 165 000 Juifs à la zone occupée, et 700 000 à la zone non occupée.
7. Le problème est double. Le paradoxe peut être néerlandais. Voir J. C. Blom, « De vervolging van de joden in Nederland in internationaal vergelijkend perspectief » (” La persécution des Juifs aux Pays-Bas dans une perspective comparative internationale »), dans De Gids, n“6/7, 1987, pp. 494 à 507).
8. Steinberg, M., « La tragédie juive en Belgique : un ravage de la xénophobie », dans Morelli, A. dir., Histoire des Étrangers et de l'Immigration en Belgique, de la préhistoire à nos jours, Éditions Vie Ouvrière, Bruxelles, 1992, pp. 233–254.Google Scholar
9. Télégramme de Abetz, le 2 juillet 1942, dans Klarsfeld, S., Deutsche Dokumente, 1941- 1944, Die Endlôsung der Judenfrage in Frankreich, Paris, 1977, p. 74.Google Scholar
10. Rapport de Dannecker du 26.6.1942 dans Klarsfeld, S., Vichy-Auschwitz, le rôle de Vichy dans la solution finale de la question juive en France, Paris, Fayard, 1983, vol. 1, p. 215.Google Scholar
11. Note de procès-verbal de Hagen, datée du 3 septembre 1942 sur l'entretien avec Laval, le 2.9. 1942, ibidem, pp. 407-409.
12. Conseil des ministres, le 26 juin 1942, ibidem, p. 221.
13. Conseil des ministres, le 3 juillet 1942, ibidem, pp. 232-233.
14. Rapport de Dannecker, du 29.6. 1942 sur la poursuite des transports partant de France, ibidem, p. 222.
15. Télégramme de Abetz, Paris, le 2 juillet 1942, dans S. Klarsfeld, Deutsche Dokumente…, p. 74.
16. Rapport de Mader (Ostministerium-Groupe Belgique) sur l'action Meuble, le 22 juillet 1942, dans Klarsfeld, S. & Steinberg, M., Dokument, Die Endlôsung der Judenfrage in Belgien, The Béate Klarsfeld Foundation, New York-Paris, 1980, pp. 33–35.Google Scholar
17. Télégramme de von Bargen, le 9 juillet 1942, signé Bargen, dans S. Klarsfeld & M. Steinberg, Dokument…, pp. 32-33.
18. Cette prise en compte des scrupules constitutionnels des autorités nationales explique l'échec, au printemps 1941, de la tentative inspirée par la police SS et la section « belge » du NSDAP d'installer dans l'appareil d'État un Commissariat Royal aux Questions Juives. Voir Steinberg, M., L'Étoile et le fusil, La question juive, 1940-1942, Ed. Vie Ouvrière, Bruxelles, 1983, 1.1, chapitre V, pp. 121–128.Google Scholar
19. Ministère de la Santé Publique-Bruxelles. Majestic. Film XIV Administration militaire. Groupe VII Prévoyance sociale, au commissaire du Reich pour les territoires occupés des Pays- Bas, décision, objet : manière de traiter les Juifs dans les services publics, Bruxelles, le 21 décembre 1941.
20. Procès von Falkenhausen, P. 2395, « le commandant militaire au délégué du chef de la police de sécurité et du service de sécurité, Bruxelles, le 30.09.1942, objet : évacuation des Juifs ».
21. Il y eut cependant à Anvers une rafle de l'importance, toute proportion gardée, de celle du Vel d'Hiv. Dans une population juive sept fois moins nombreuse, les policiers anversois arrêtèrent sept fois moins de Juifs que leurs collègues français en deux rafles successives, les nuits des 15 et 29 août. Voir la description des rafles dans M. Steinberg, L'Étoile et le Fusil, op. cit., t. II, chapitre IV, pp. 209-213.
22. Télégramme de von Bargen, le 9 juillet 1942, dans S. Klarsfeld & M. Steinberg, Dokument…, pp. 32-33.
23. Voir le rapport de Dannecker à Eichmann du 6 Juillet 1942, dans Klarsfeld, S., Vichy- Auschwitz , vol. 1, p. 236 Google Scholar ; voir aussi pp. 108-110.
24. Voir Hilberg, R., La destruction des Juifs d'Europe, Paris, Fayard, 1988, p. 500.Google Scholar Les Juifs apatrides n'étaient que 25 000. 80% des Juifs étaient de nationalité néerlandaise.
25. Voir à ce propos le chapitre « entre les lignes » dans Steinberg, M., Les yeux du témoin et le regard du borgne, L'histoire contre le révisionisme, Paris, Le Cerf, 1990.Google Scholar
26. Voir le rapport de Dannecker du 21 juillet 1942, dans Klarsfeld, S., Vichy-Auschwitz , vol. 1, p. 278.Google Scholar
27. Voir convoi n° 19 en date du 14 août 1942, dans Klarsfeld, S., Mémorial de la déportation des Juifs de France, B. et Klarsfeld, S., Paris, 1978.Google Scholar
28. Rapport d'activité n“21 de l'administration militaire (pour la période 1er juin-lcr septembre 1942), le 15 septembre 1942, pp. A38-39 dans S. Klarsfeld & M. Steinberg, Dokument…, pp. 44-45.
29. Du 4 août au 15 septembre 1942, 10 038 Juifs furent déportés, dont 3 721, soit 37,05 %, étaient nés avant 1902 et 2. 321, soit 23,8 % après 1926. Voir Klarsfeld, S. et Steinberg, M., Le Mémorial de la Déportation des Juifs de Belgique, Bruxelles-New York, 1982.Google Scholar
30. Discours de Himmler à Posen, le 6 octobre 1943, dans Himmler, H., Discours secrets, Gallimard, Paris, 1978, pp. 167–169.Google Scholar
31. Rapport de Dannecker, du 20 juillet sur sa tournée en zone non occupée, texte allemand dans S. Klarsfeld, Deutsche Dokumente, p. 95, version française dans Vichy-Auschwitz, vol. 1, p. 277.
32. Voir les chiffres publiés par G. Wellers, « Le nombre de morts d'Auschwitz », dans Le Monde Juif, octobre-décembre 1983, p. 153. Ses chiffres ne font pas le décompte des sélectionnés à l'arrêt de Kozel, sauf dans le cas belge.
33. Les chiffres ne comprennent pas les 351 Tziganes également déportés de Malines à Auschwitz. Ils ont d'ailleurs tous été immatriculés au camp de concentration, à la différence de la masse juive déportée pour un génocide.
34. Rapport du lieutenant SS Rôthke sur l'évacuation des Juifs de zone non occupée, le 1.9.1942, dans S. Klarsfeld, Vichy-Auschwitz, vol. 1, pp. 407-409.
35. Voir Presser, J., Ondergang, de vervolging en verdelging van het nederlandse jodendom's, Cravenhage, 1965, t. II, p. 509.Google Scholar
36. Voir les chiffres de L. Dejong, Het Koninkrijk der Nederlanden in de Tweede Wereldoorlog, Gevangenen en gedeporteerden, 1978, tome 8, vol. 2, p. 708.
37. Voir Billig, J., Le Commissariat Général aux Questions Juives 1941-1944, Paris, 1957, t. II, p. 209.Google Scholar
38. Voir S. Klarsfeld, Mémorial, op. cit.
39. Voir Lazare, L., La Résistance juive en France, Paris, 1987, pp. 22–23 Google Scholar et surtout p. 336, note 26. Incorporant à tort 40 000 Juifs de Belgique, l'estimation de Lazare porte la population juive en France à 350 000 personnes.
40. En outre, les 43 000 Juifs de Belgique signalés à la conférence de Wannsee ne comprennent pas les enfants mentionnés sur la fiche de leurs parents lors du recensement de 1940.
41. Voir à ce sujet le chapitre I de M. Steinberg, L'Étoile et le Fusil, op. cit., t. III, vol. 1.
42. Voir S. Klarsfeld, Vichy-Auschwitz, vol. 1, p. 25.
43. Voir « le nombre réel des Juifs en Belgique » dans M. Steinberg, L'Étoile et le Fusil, op. cit., 1.1, pp. 83-85 ; également les conclusions de M. Steinberg, L'Étoile et le Fusil, op. cit., t. III, vol. 2.