Cet article envisage le débat concernant le regroupement des Indiens en villages (réductions au Pérou, congregaciones en Nouvelle-Espagne) dans l’Amérique espagnole coloniale. Plutôt qu’une stratégie visant à l’extraction des ressources, cette politique correspond à une représentation selon laquelle ceux qui vivaient sans enracinement communautaire étaient une menace sociale, car ils vivaient sans roi, ni religion, ni terre. Et leur conduite, alléguait-on, était à l’origine d’un environnement physique lui-même dangereux. Une telle association entre espace sauvage et vie hors communauté opérait de la même manière en Castille, et, en Amérique, était appliquée aux Espagnols, aux métis et aux Noirs comme aux Indiens. Envisager en parallèle les débats concernant le traitement des Indiens et des autres secteurs sociaux permet de dépasser la fausse opposition entre le monde indien et le monde espagnol, et d’examiner les échos existant entre les colonisations interne et externe.